Messages : 270 Date d'inscription : 01/04/2012 Age : 44
Sujet: Gymnastique florale (PV David) Mar 9 Sep - 20:51
Esther découvrait petit à petit les lieux à l'Institut. Malgré un an passé dans l'institution du professeur Xavier, elle n'en avait jamais vu qu'une infime partie. Les jardins, le foyer où elle retrouvait Ernest lorsqu'elle jouait encore à la petite maman et la chambre qu'elle trouvait désormais étouffante mais dans laquelle elle s'était terrée six mois durant. De jour en jour, les étudiants et les résidents s'habituaient à la voir passer dans une pièce, un couloir ou au détour d'un bosquet dans le jardin. Mais aucun encore n'avait franchi le pas de lui adresser la parole. Esther prenait conscience que le contact se nouait petit à petit, par la simple habitude de sa présence. Et à dire vrai, cette méfiance qui s'évaporait si lentement lui allait très bien. Elle avait besoin de temps pour revenir du gouffre de dépression où la mort de Daniel l'avait jetée. Aujourd'hui, c'est un peu toute sa vie qu'elle redécouvrait en même temps qu'elle découvrait ce vaste bâtiment.
Ce matin, elle avait poussé la porte du gymnase sans trop savoir ce qui se trouvait derrière. Elle avait été surprise du véritable luxe qui s'y trouvait. D'un côté, la salle était munie de tous les appareils de musculation rêvés et modèle dernier cri, de l'autre, une vue plus classique d'un parquet de sport muni de tapis de sol et de tous les agrès de gymnastique. Des espaliers s'alignaient sagement le long des murs tandis qu'un immense miroir occupait le fond de la pièce sous la rangée de fenêtres aux tores bateau qui laissaient filtrer des rayons de soleil chaud. Esther entra dans la pièce déserte à cette heure plutôt matinale pour des adolescents. La plupart des sportifs du matin préféraient toujours jogger dans le parc. Elle caressa les anneaux puis les barres parallèles en se remémorant ses cours de danse classique lorsqu'elle était petite fille, sa mère aux cheveux platine choucrouttés se pavanant en bord de piste de son petit bout de fillette si adorable dans son tutu blanc, des instructions précises et un peu sévères de Miss Penny, la Maître à danser, des positions de pieds... combien y en avait-il encore?
Ses yeux tombèrent presque malgré eux sur la chaîne stéréo qui occupait un coin de la pièce. Elle s'approcha de la pile de CD qui trônait un peu en désordre sur la table basse à côté. Les Girls Aloud... musique d'aérobic! Elle fit glisser quelques autres CD jusqu'à en rencontrer un qui lui parla. Agnès Obel... Ca ce n'est pas mauvais... c'est même loin d'être mauvais. Machinalement elle inséra le CD dans la chaîne et monta un peu le volume. Machinalement, elle se souvint de ses vieux enchaînements et de la première chorégraphie complète que Miss Penny lui avait montrée. Elle se regarda taper du bout du pied dans le miroir et s'en amusa. Elle s'approcha alors des barres parallèles et y posa la main comme s'il s'agissait d'une barre de danse. Elle s'essaya aux positions de pieds : la une, la deux, la trois, ... En une seconde, elle enchaîna les entrechats et les pirouettes, quittant la barre pour se laisser aller à danser du mieux qu'elle se rappela devant ce miroir. Ce n'était peut être pas excellent mais il y avait de beaux restes. Des souvenirs techniques qui manquaient beaucoup de pratique. Pourtant cette danse improvisée lui fit énormément de bien. Elle ferma les yeux et eut l'impression de s'évader de son corps, de son temps, de la réalité. Cette danse lui fit un bien fou, peut-être mieux qu'une thérapie. C'était la reconnexion avec la vie, le plaisir simple des sensations agréables, le cerveau en mode "off".
Mais tout plaisir a une fin. Son manque de condition physique du à sa récente et longue claustration eut tôt fait de la rendre hors d'haleine. Avant même que la chanson soit finie, elle se laissa tomber sur un tapis de sol, essoufflée. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, la tête lui tournait, une sensation comparable à l'ivresse que procure l'alcool, une sensation qu'elle n'avait plus jamais sentie depuis sa mutation, son corps synthétisant l'alcool sans jamais la rendre ivre. Elle tourna la tête sur le côté et vit dans le miroir qu'un homme se tenait dans l'encadrement de la porte ouverte. Agnes obel venait de finir "Down by the riverside". Elle se leva doucement, et alla éteindre la stéréo nonchalamment, comme si elle n'avait pas vu le nouvel arrivant ou du moins comme si elle n'y prêtait pas plus d'attention que ça. En réalité, elle était assez troublée que cet inconnu l'ai surprise dans cet étrange exercice. Non pas qu'elle était gênée d'avoir dansé mais plutôt de ne pas avoir été très bonne dans son exercice et de s'être affalée hors d'haleine à la fin. Elle se dirigea vers la porte, espérant qu'il allait s'écarter pour la laisser sortir et le gratifia d'un :
- Vous pouvez utiliser le gymnase comme bon vous semble, j'avais fini de toute façon.