X-men RPG
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilPortailDernières imagesRechercherS'enregistrerConnexion
-40%
Le deal à ne pas rater :
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 pièces (induction, ...
59.99 € 99.99 €
Voir le deal

 

 Quand Ernest dit stop ! [Libre]

Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeSam 15 Juin - 8:47

Mr Sinister venait de partir, laissant Ernest en proie à une confusion sans pareille. Sitôt que le petit mutant eut retrouvé sa liberté de mouvement, il se mit à trembler nerveusement comme une feuille. Dans sa tête, tant de choses, trop de choses ! Les révélations sur sa condition de clone, l’affreux dilemme entre désirs et devoir, le poids terrible de l’Altérium, son lien avec Rachel, les paroles de Caitlyn, l’affection pour Cérès, et puis... et puis, sa situation, ses erreurs. Il avait caché cette correspondance écrite avec la fausse Neko, il était venu au rendez-vous, il avait apporté la molécule mutagène à Sinistre... il avait en somme une fois de plus trahit l’Institut, à cause de sa curiosité, de son mal être, de sa stupidité. Il devrait l’avouer ou bien le cacher. Un poids de plus sur ses épaules déjà vacillante. Qu’allait-on lui dire ? Quallait-on faire de lui ? N’était-ce pas la fin définitive de son projet visant à devenir X-Men ? Il avait refusé l’offre du docteur, mais serait-ce assez pour qu’on lui pardonne encore ? Il était en programme de réinsertion, c’était la prison qui lui pendait au museau ! Mais pire, car il y avait toujours pire, il n’était même pas persuadé d’avoir fait le bon choix. N’aurait-il pas été mieux avec Sinistre ? Les doutes le rongeaient, l’angoisse le submergeait. Il ne savait plus où il en était, il perdait pieds, se noyait en pensée.
 
Altérion, victime d’une migraine aussi soudaine que virulente, porta les mains à son front. Il fit quelques pas, tituba, prit de vertige. Finalement, il s’assit sur le matelas moisi, attendant que ça passe. Il suffoquait, comme si on lui pressait la poitrine. Son stresse devint si élevé qu’il se mua en douleur dans les côtes. Trop, c’était trop, il allait claquer ! Et voilà qu’il avait envie de claquer. Quelle tentation de mettre ici et maintenant un point final à tous ses tourments ! Supplice de trop ! Assez, que diable, assez ! Fébrile, Lenoir tira de sa poche intérieure le pistolet qui, lors du rendez-vous, ne lui avait été d’aucun secours. Finalement, néanmoins, sa précaution prise avant la rencontre n’allait pas être inutile. Entre ses doigts griffus, il tripota l’objet familier. Il était chargé, ne restait qu’à ôter la sécurité, ce qu’il fit d’une pichenette. Il eut un sanglot, une larme coula le long de sa joue, allant se perdre dans sa fourrure. Assez hurlait l’abyme de son désespoir. Il n’y avait plus d’issue, plus de fuite, sauf le salut de cette balle en guise de point final.
 
Il ouvrit la gueule, y introduisit le canon. Un petit calibre mais il savait s’y prendre, il n’y survivrait pas. Il ferma les yeux, soupira. Assez ! Il était si nerveux qu’il mordit le canon et resta ainsi, le doigt sur la détente, à un geste, à un tout petit geste de ce brutal dénouement. Pardon Cérès. Pardon Rachel. Pardon Karma. Pardon Daniel. Pardon Enora. Le vrai Ernest Lenoir n’était déjà plus de ce monde, que prenne fin cette farce. Ne devrait-il pas au moins laisser une lettre, expliquer sa décision ? Mettre tous ces pardons par écrit ? Non pas le temps, ils comprendraient, ou ne comprendraient pas. Quelle importance ? Le suicide, c’était égoïste, ça lui ressemblait tant.
 
Altérion pressa la gâchette.
 
Il n’y eu pas beaucoup de bruit, à peine un sifflement. C’était fait pour ça un silencieux. Puis, le choc du métal contre le béton. De la bave avait coulé sur l’arme. Elle gisait à présent dans un coin. Ernest l’avait jeté. Le rat ricana, un son mi-triste, mi-dément. Oui, il avait tiré, mais en face de lui, dans le mur gris. Il fallait croire qu’il n’avait même pas les couilles pour se brûler la cervelle. Il n’était pas plus avancé. Que faire ? Cette simple question mit en déroute ses neurones. Ce fut un regard vide qu’il fit circuler sur ce lieu souterrain. Il était toujours dans les égouts, au fond de ce cul de sac que, jadis, aménagé en cachette. Il n’en restait que se matelas pourri et des bouteilles vides. Cela datait de cette période où il se faisait appeler Vermine, où il gambadait au gré de ses caprices dans les conduits. Alors, il n’avait que peu de choses à penser, menant une existence dissolue, primitive. L’esprit libre... à ce qu’il voulait avoir l’esprit libre ! Que ne donnerait-il pas pour mettre en veille ce maudit cerveau, écarter d’un unique désir tous ses problèmes ! Que ne donnerait-il pas pour revenir dans le temps, être à nouveau Vermine, oublier Crapule, oublier Altérion !
 
Une lueur traversa les yeux rouges du rat. Un sourire s’esquissa sur son bestial visage. D’un geste, il sécha ses larmes. L’Institut n’attendait son retour que demain matin. Il avait la soirée, la nuit... Toujours assis, il se déchaussa lentement. Il déposa ensuite avec minutie ses chaussures, un modèle adapté à sa morphologie, au pied du matelas, bien perpendiculaire à celui-ci. Le détail, qui n’avait pas la moindre forme d’importance, semblait en avoir pour le mutant. Ensuite, il retira son large chapeau, puis sa montre holographique déjà désactivée. Puis, il se leva, se dépouilla de sa veste, de sa chemise, de son pantalon, de son caleçon. Il rangea tout avec une égale minutie en un petit tas au pied du matelas. Il frissonna, désormais nu, mais son pelage allait lui suffire comme il lui suffisait par le passé. Ernest fit un pas, puis deux, s’étendit comme s’il venait de se réveiller. Enfin, il se mit à quatre pattes, tel le vrai gros rat qu’il semblait maintenant être. Après un instant de passivité, il partit galoper dans les égouts, au gré du hasard.
 
Il ne pouvait retourner dans le passé, mais il pouvait redevenir Vermine, ne serait-ce que pour quelques heures. Mentalement, il s’était dit stop. Il se fichait royalement de l’imprudence dont il faisait preuve. C’était sa pose...
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeSam 15 Juin - 21:46

La nervosité, ça n'est pas sain. Augmentation de la tension artérielle, mots de tête et de ventre... tous les médecins le disent. Ils sont unanimes : pour la santé, c'est très mauvais. Heureusement, je suis plutôt le type de type pas stressé qui regarde les autres types plus stressés avec un petit air goguenard. Ne rien montrer de sa propre tension, faire croire qu'on a le contrôle de la situation, ou au pire qu'on s'en désintéresse complètement, c'est tout un art en soi. Pourtant, quoiqu'on en dise et quoiqu'on paraisse, agent d'intervention au bureau des affaires mutantes, c'est quand même pas le métier le plus relax qui soit. En tout cas, pas tous les jours. Alors, lorsqu'on arrive en fin de journée, après avoir bossé cinq heures depuis la reprise déjeuner, à téléporter des collègues à droite et à gauche... même les meilleurs se félicitent de pas avoir à en faire une sixième. Et avec la fatigue naissante, la nervosité, sournoise, pointe toujours le bout de son museau.

Il se trouvait justement qu'à l'approche de cette soirée là, j'étais plus ou moins fatigué, et par conséquent, plus ou moins nerveux. Pas de quoi faire peser un poids désagréable sur mes épaules ou mes paupières, mais cela justifiait parfaitement que je me montre plus fainéant que d'habitude. Ce qui n'est, peu objectivement, pas rien. Hélas, comme si le sort s'acharnait contre ma personne, il se trouvait que c'était le jour précis où je devais sans attendre m'occuper de choses qui ne pouvaient attendre. À savoir, m'assurer ce bien-être précaire, et en sus, la survie de ma modeste enveloppe de chair, en allant faire quelques courses alimentaires. Direction : une grande surface quelconque. Toujours la même. Parce que je sais assez bien où elle se trouve par rapport à là d'où je sors du travail. Pas besoin de plus.

Arrivée sur le parking, essuyons quelques regards intrigués. Haussons les épaules, tout sourire, l'air de rien. Lançons un regard coquin à une mère de famille qui, sous cette impulsion canaille, s'empresse de faire rentrer son cadet dans un siège arrière d'une grosse voiture bleue. Ensuite, continuons la marche. Très vite, je me fonds dans la foule des dizaines de clients venus faire leurs emplettes à cette heure de pointe. Tintamarre. Ça y est. Je respire le doux parfum de mes semblables. Le doux parfum de n'être plus personne en particulier. Je ne m'y attarde pas trop. Je pourrais y prendre goût, et cela serait une regrettable bévue. L’anonymat est une drogue dure à laquelle trop succombent.

J'avance, je jette un œil aux caisses, pour la plupart automatiques. Des files kilométriques en émergent, allant parfois jusqu'à emplir les premiers rayons. Je grimace. La perspective de la longue attente qui m'attend me débecte déjà. Je déteste patienter. Il est hors de question que je me prête au même jeu ennuyant que tous ces gens. Déambulant entre les divers produits, j'en touche certains du bout des doigts. Discrètement. Il ne faudrait pas que quelqu'un se rende compte qu'à peine je les ai effleurés qu'ils disparaissent, à l'exemple. Je ne sais pas exactement où je les envoie. Normalement, pas trop loin de chez-moi, à une ou deux rues près. La seule chose dont je suis sûr, c'est qu'ils  arrivent approximativement au même endroit. Je compte mes pas pour être sûr. Je pourrais les acheter légalement, ça n'est pas le problème. Il ne faut pas croire que je suis mauvais payeur. Ou pire : pauvre. Après tout, pas de scrupule particulier à avoir. Je ne suis plus policier, moi. Je suis agent.

L'agent que je suis arrive donc non-loin d'une grosse pile de denrées. Du gras, du sucre, et, folie, une poignée de légumes. J'en soupirerais presque, si quatre ans de grande vie ne m'y avaient habitués. On est bien en Amérique. Pas dans l'Amérique d'où je viens, non, celle-là mange encore du poisson pêché main, entre deux fast-food trop chers ; dans l’Amérique qui a les moyens, et qui se gave. Tant pis. Je ne suis pas mécontent d'en faire partie. Il y a plus d'avantages que d’inconvénients au fait d'avoir de l'argent. Juré. L'agent que je suis arrive donc non-loin de chez-lui. Ça, c'est la théorie. Dans les faits, je ne dois pas en être bien loin. Juste un étage en dessous. Une histoire de rotondité, je suppose. Sur les longues distances, il faut parfois songer à corriger ça. Et parfois, on y songe pas. Alors plutôt que de s'encastrer dans un trottoir, si on a de la chance, on apparaît juste au-dessus. Et si on a pas de la chance, c'est-à-dire, si, par malheur, il y a des égouts, on se retrouve, dans les égouts.

Cette fois ça y est ! Je soupire. Heureusement que personne ne me voit, ça n'est pas vraiment dans mon genre, de à la lassitude. Je vais pour tirer tout mon paquetage à l'étage, lorsque un bruit de course attire in extremis mon attention. Cliquetis, célérité, sur quatre pattes griffues qui frappent la pierre et fait flop dans quelques flaques. À la fois, ça fait plus de bruit qu'un rat, alors c'est sans doute plus gros, et ça ne ressemble pas à la façon de courir d'un chien. Quel genre d'autre bête peut bien peupler un endroit aussi sordide ? J'ai entendu parler de gangs mutants vivants dans ce genre d’environnement. Mais pas ici. Je suis perplexe, et curieux à la fois. J'ai longtemps pensé prendre un lapin, chez-moi. Un lapin tout mignon. Je doute que la bestiole mystère soit aussi duveteuse. Si elle n'est pas trop malade, peut-être je la ramènerai à la surface. Ça fera un animal de compagnie fantasy.

Le soucis, c'est la luminosité. Un tigre pourrait me passer sous le nez sans que je le vois. Je fais quelques pas en avant, je repère une ouverture d'où tombe quelques rayons du jour. J'écarte les jambes, posture d'arrêt, entre le catcheur et le footballeur américain. Je m'arme d'un large sac en papier. J'aurais le droit à plusieurs essais, c'est l'avantage. L'écho des pas se rapproche. La chose aussi. Je suppose. Dans quel sens va le vent ?
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeDim 16 Juin - 10:08

L’instant aurait été plus poétique si le lieu avait été autre, si le personnage avait été autre. Un cerf majestueux s’élançant entre les arbres centenaires d’une forêt grandioses, oui, là, il y aurait eu de la poésie. Un rat géant, façon molosse, s’élançant dans les sombres et humides conduits des égouts, la scène avait d’avantage sa place dans un film horrifique. Non qu’Ernest soit particulièrement horrible à regarder, encore que quelqu’un  ayant la phobie des rongeurs serait assurément tombée dans les pommes, mais à force d’entrainements soutenus il tenait effectivement de plus en plus du molosse... du petit molosse. Sous son brun pelage, ses muscles saillaient, ses nerfs se tendaient, sa foulée animale était puissante sans être lourde. Un solide museau, une dentition luisante dans la pénombre garnissant une gueule entrouverte, une paire d’yeux rougeoyants exprimant l’exaltation, les oreilles en pointes tirée en arrière comme si le mutant cherchait une forme d’aérodynamisme... tout en lui allait de l’avant. Dans son sillage, cette queue fine, glabre, blafarde. Quand la lumière se faisait trop absente, on ne voyait d’Altérion que cette queue, ses dents, l’éclat de ses yeux, ainsi que ses pieds et ses mains pâles... mais tout le reste de son corps se fondait dans l’ombre.
 
Il voulait ne penser à rien, s’abandonner à ses seules sensations. Au début, il s’y força. Puis, comme dans un demi-songe, il y arriva sans effort. Il courait alors depuis cinq grosses minutes. L’air tiède et malodorant fouettant son visage, glissant sur son corps, sa respiration un rien sifflante mais régulière, les battements de son cœur, la fraicheur sous ses doigts, le tempo de ses griffes... voilà ce qui emplissait son esprit. Et il se sentait léger, libre. Les bouches d’égout se succédaient, chacune accompagnée d’une colonne de lumière déclinante. Au dehors, c’était le soleil qui déclinait. Il enchaina des virages, étudiant instinctivement la meilleure façon de le négocier, comme si c’était une course. Parfois, il glissait sur une flaque, tombait sur le flanc, roulait puis, de nouveaux sur ses pattes, poursuivait, indifférent à cet accro de parcours, indifférent au fait qu’il se salissait. Parfois, pour aller tout droit, il bondissait par-dessus une rigole d’eau souillée, leste comme un félin. Il franchit ainsi des canaux plus larges, des ruisseaux, des rivières saumâtres. Une fois, ce fut trop large et le mutant plongea. N’ayant pas pieds, il dut nager. Néanmoins, trouvant cette variante d’exercice plaisante, il continua de nager, sans chercher à remonter au sec. Quand il le fit enfin, sans doute était-il aussi repoussant que le Vermine d’en temps. Il n’y avait plus trace de la douche matinale prise à l’Institut, plus trace du léger parfum de propre émanant d’ordinaire de sa personne. Puant, dégoulinant, il reprit sa course folle, heureux comme rarement il l’était.
 
Ce fut quelques minutes après la baignade qu’Altérion, au hasard d’un énième virage, vit fondre sur lui quelque chose qu’il n’identifia pas tout de suite. Par pur réflexe, il réagit au quart de tour, comme à l’entrainement. Il roula de côté, dérapa, évitant ce qui était en fait un sac en papier. Jusque là, son mouvement était très animal. Il en alla autrement de la suite car, profitant de sa poussée, il prit appuie sur ses mains, exécuta un salto avant et retomba sur ses pieds. Il demeura immobile, mi-debout, une main au sol, posture hybride par excellence. L’instant d’après, son regard balayait l’espace. Il repéra, à quelques mètres, une silhouette humaine. Difficile de la détailler dans la pénombre. L’éclairage du soir devenait précaire. Ernest, quand à lui, était pratiquement dans le noir.

 
« Raté », commentât-il simplement de sa voix nasillarde et d’un ton qui trahissait son exaltation.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeDim 16 Juin - 13:39

Du courage. Comprendre qu'il m'en faut, pour rester dans un lieu aussi... sombre, humide, fétide, bref, malsain. Même l'enfant curieux et peu prudent que j'étais il y a encore pas si longtemps aurait déjà pris la fuite. Mais cet enfant là n'avait pas quatre ans d'expérience dans la police. Il n'avait pas suivi non-plus le programme d'entraînement destiné aux agents du bureau des affaires mutantes destinés au département intervention. Il n'avait pas davantage la maîtrise parfaite d'un pouvoir lui assurant d'avoir toujours une solution de repli... En définitive, je ne sais pas quelle dose de courage m'est nécessaire, pour rester là, à attendre qu'un animal non-identifié passe sous mon nez. Histoire de me jeter sur lui impunément. Je n'y pense même pas trop. La frousse, elle vient surtout du cadre, de l'obscurité. Il n'y a aucune raison de frisonner. Si ce n'est la tension vive du chasseur attendant sa proie. Ça n'est pas mon genre, d'avoir peur de quelques ombres, de quelques pas et de quelques clapotis ! Ah, ah : non. Je trouve la situation amusante, et puis c'est tout. C'est juste que je n'aime pas à attendre, voilà.

Heureusement, pour moi, je n'ai pas beaucoup à attendre. Même si un instant je crains de pas parvenir à la distinguer. Maigre lumière. Ça n'est pas grave. Dans le noir, une silhouette se déplace avec célérité. Sa forme est imprécise, elle est quadrupède. Je n'ai pas le temps de beaucoup m'y attarder. Juste de voir que j'avais presque juste. Elle a la taille d'un chien. Vaguement l'allure d'un rat, je crois distinguer une queue, des dents, des oreilles. Les miennes ne sont pas si mauvaises, lorsqu'il s'agit d'identifier les bruits de la vermine. Dans mon enfance, il y avait pas mal de rats qui couraient un peu partout dès qu'on avait éteint les trois ampoules de la maison. Sur le plancher en bois, leurs petites pattes griffues faisaient à peu près ce bruit là. Ils savaient que de jour, ils n'avaient pas intérêt à se montrer. Pas qu'ils étaient faciles à attraper : on chassait les plus imprudents, les plus faméliques, avec une pelle. On essayait de leur fendre le crâne, ou n'importe quoi d'autre, avec. Un bon coup de bêche. Hop. Un nuisible de moins. Je n'irai pas jusqu'à dire que c'était le bon temps, mais il y a de ça.

Heureusement, pour elle, je n'ai pas d'intentions aussi belliqueuses à son égard. Et pas de pelle à portée de main. Je me contente de fondre sur elle avec mon sac. Je m'attendais bien à ce qu'elle ait un moment de recul, d'esquive précipitée. De là à ce qu'elle se déporte avec autant de précision, en terminant son mouvement par une pirouette... Bien, mon imagination, pourtant fertile, s'arrêtait là. Le plus étrange, c'est que sa cabriole finale est trop complexe pour avoir été pensée par une bête. Elle ressemble plus à un de ces mouvements que l'on voit dans les films de kung-fu. Le genre de truc que je n'ai jamais réussi à faire, en entraînement. Pourquoi s’embêter à faire des roulades arrières, ou avant, après tout, lorsqu'on peut se téléporter en arrière (et quelques fois en avant) ? C'est une excuse qui me semble parfaitement valable pour justifier mon incapacité à exécuter ce type de pirouette et le fait que je sois un peu raide sur certaines autres.

Mes soupçons sont vite confirmés. On dit que les rats sont particulièrement intelligents, d'accord. Pourquoi pas, l'un d'entre-eux pourrait avoir appris les arts martiaux auprès d'un quelconque quatuor de tortues masquées. Oui, pourquoi pas. Ça se tiendrait. Mais en revanche, je doute qu'on ait encore réussi à en faire parler un. Une histoire de cordes vocales, il faut croire. Alors quand le gros rongeur s'adresse à moi, je dois me rendre à l'évidence : il se moque de moi. Et accessoirement : j'ai affaire à une personne. Le premier point est prioritaire sur le second. Largement. Parce que s'il y a bien une règle de politesse qui dit qu'on attrape pas une personne avec un sac en papier, il y en a une autre encore plus importante qui dit qu'on ne se rit pas de l'échec de son prochain. Fusse avec une ou deux syllabes. Ça non. Surtout quand le prochain, c'est moi.

Je ne réfléchi pas plus que ça. Je souris, peut-être ça se voit un peu, dans la pénombre. Parce que je suis sympa. Parce que je suis pris dans le jeu. Le simple fait qu'il n'ait pas crié au scandale m'incite à continuer. C'est marrant. En m'esquivant, il a fait preuve de sacrés réflexes. Ce doit être un mutant, probablement. S'il n'avait pas eu cette apparence, j'aurais certes eu des doutes. Là, je doute en avoir. Ça tombe plutôt bien. Les mutants, c'est supposé être ma spécialité. On a suivi des formations, sur les différents types de mutants. Alors généralement, à part quelques gros du genre qu'on affronte une ou deux fois dans une carrière, ils n'ont pas quinze pouvoirs. Ils en ont un, voire deux. Mettons deux. Est-ce que ressembler à... ça... c'est un pouvoir ? Admettons. Avec les réflexes, ça ferait deux. Encore des surprises ? Ça reste à voir.

« En français, raté, cela se dit ''rat-ey'' » j'articule sans intonation particulière.

Un pas en arrière, se retirer dans l'ombre, ou faire tout comme. L'instant suivant, je disparais, avec mon sac. Je m'étais promis de me donner plusieurs chances. Ça signifie au moins deux. Je n'ai pas l'intention de lui laisser le temps de se rendre compte que je me suis évaporé. Ma réapparition, derrière lui, ne prend qu'une fraction de seconde. Le temps exact qu'elle prend est difficile à mesurer. Probablement suffisamment proche de zéro pour être considéré comme nul. Alors pour sûr, le mouvement qui suit, rabattre le cabas sur son museau, aussi gracieux soit-il, ne peut rivaliser de vitesse. Le mutant doit faire un bon mètre, il pourrait entrer presque intégralement dans mon sac. Bon, ça n'est pas une arme de neutralisation grand luxe. Ça n'est que du papier un peu épais. Avec un logo coloré. Qui n'a rien d'une rune de protection. Qui n'a rien qui soit capable de résister à des griffes de cette taille.

Sans importance. Le but n'est plus de le capturer. Le but est de laver mon honneur blessé. Enfin : si ça échoue, je ne sais pas si je m'accorderais une troisième chance. Ou alors je m'y prendrais autrement.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeDim 16 Juin - 16:53

L’homme sourit, Ernest le distingua effectivement dans le semblant de clarté nimbant cette partie du conduit. Il dit ensuite quelques mots, une réplique jouant sur les mots, sur les langues. Habile trait d’esprit que cette petite association entre le nom et la syllabe "rat". Du Français ? Etait-il Français ? Et que voulait-il ? Que faisait-il ici ? Attraper des rats ? L’attraper lui ? Altérion, surdoué, réfléchissait vite, et plus encore quand, comme à présent, il s’était libéré d’une tonne de soucis existentiels. Trilingue, le Français était dans ses cordes et il eut donc tout le loisir de constater l’authenticité de l’affirmation, tout en se posant à la suite les questions associées.
 
Mais déjà l’inconnu, son sac en papier toujours en main, reculait, quittant la pénombre, gagnant l’ombre. Le petit mutant força sur sa vision, pour ne pas le perdre de vu. Mais il le perdit tout de même et, l’instant d’après, le sac lui tombait dessus. L’hyperréactivité avait ses limites. Altérion n’eut que le temps de sursauter et hop, il était emballé, enfin presque. Mais que s’était-il passé ? Y avait-il eu depuis le début quelqu’un derrière lui ? L’inconnu était-il doué d’une rapidité surnaturelle ? S’était-il téléporté dans son dos ? Il sentit les mains de l’homme pressant le sac. Et l’homme, lui, dût sentir la douce puanteur du gros rongeur, même si celle-ci fut atténuée par le papier.
 
Si Lenoir avait été dans son état normal, il aurait prit cet acte pour une agression évidente et aurait réagit en conséquence. Néanmoins, le demi-songe persistait, la pause n’avait pas vocation à prendre fin au moindre incident. Il ne voulait plus de stress, plus d’angoisse jusqu’à demain matin. Tel était la règle. Et elle était si absolue, que la notion même de danger était exclue. Pas d’exception, aucune, il jouait sa vie dans ce jeu inconscient. Délicate était sa situation mais c’était bien là l’extase du projet. Stop, stop à tout. Il y avait peu, il était prêt au suicide, d’ailleurs cette folle excursion était peut-être un suicide déguisé. Rien n’importait plus que le plaisir immédiat. Ce fut dans cet état d’esprit que le rat déclara, enthousiaste :

 
« Gagné ! »  
 
Puis, il ajouta, malicieux :
 
« Mais tu as triché. Alors ça compte pas ! »
 
Sur ce, d’un bon coup de griffe, il déchira le sac puis, vif à l’extrême, sauta en avant comme l’eut fait un quadrupède. Comme précédemment, la suite de l’enchainement fut d’inspiration plus humaine. Ernest, se plaisant à une démonstration d’agilité, au moment de ce réceptionner au sol, mains en avant, bascula sur ces dernières et, tête en bas, jambes en l’air, resta en équilibre une poignée de secondes, juste assez pour arriver à l’immobilité, bien droit, les mains au sol. Puis, repliant les jambes, quand il eut les genoux contre le ventre, à deux doigts de rompre son équilibre, il s’envoya une décharge d’adrénaline. Grace à cette impulsion nouvelle et à sa position, il bondit à la seule force de ses bras et exécuta en l’air deux saltos complets. Réception souple, pas de danse tournoyant et hop, il était debout, vraiment debout cette fois, face à l’homme et exposé à la clarté qui filtrait d’une grille en hauteur. Ce qui était le plus important dans l’action entreprise, c’était sa totale inutilité. Au moins, cela lui donnait la classe.
 
C’était d’ailleurs drôle ce contraste entre cette maîtrise gymnastique et son physique primitif à l’hygiène douteuse. Ernest croisa les bras, très fier de lui, et déclara :

 
« T’es qui, toi ? Un collectionneur de rats ? »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeLun 17 Juin - 15:23

Voilà : je suis un as. C'est la seule pensée qui me traverse l'esprit lorsque je sens la masse velue du gros rongeur glisser dans le sac. J'ai pas été très prudent sur ce coup là, d'accord. J'aurais du prendre plus de précautions, OK. Le rat aurait pu mal le prendre, vrai. J'étais pas à l'abri d'un coup de griffe ou de dent, j'admets. Peut-être même il m'aurait refilé le tétanos et la rage, pour sûr. Très bien ! Heureusement, ma mère n'est pas là pour me passer un savon. On peut se demander pourquoi, quand on fait un métier comme le mien, chercher des sensations fortes, même en dehors. On pourrait croire que j'en aurais assez pendant le service. C'est pas comme ça que ça marche. Ça aussi, c'est une drogue à accoutumance. On s'habitue au risque, et il en faut toujours plus pour se donner des frissons. Et encore, je suis pas le pire. J'ai pas survécu à tant de fusillades que ça. Dans la section intervention, certains sont de vrais dingues. Tu les vois tout juste arriver que dans ta tête se joue déjà la BO de Top Gun. Rien que ça.

« Parce que c'est pas tricher, ça ? » je m'exclame en l’apercevant s'extraire de sa prison de carton.

Mais je suis forcé de reconnaître que trois choses, chez le mutant, se valent. Sa puanteur, sa mauvaise foi, et sa virtuosité en matière d'acrobaties. Peut-être est-ce l'obscurité qui me cache quelques défauts de sa chorégraphie. Cependant, je ne connais pas beaucoup de gymnastes capables d'en faire autant. Encore que cela soit d'une utilité douteuse, ça en jette assez. Assez pour me passer l'envie de lui faire remarquer les deux autres points. Ça ne serait pas montrer gentleman. Après tout, il ne sent pas beaucoup plus mauvais que le reste des égouts. Vapeurs fétides, eaux souillées, relents, pestilence, rat géant. Avec l'ambiance, c'est raccord. Rien à redire. Si ce n'est que je risque de klaxonner autant que lui si je m'attarde trop longtemps dans le coin. Dire que je n'était pas supposé y rester plus de quelques secondes. Juste le temps de rassembler mes affaires.

« Un curieux. »

Je n'ai pas envie de faire un monologue sur moi. Pas question de passer pour un voyou un plein ego trip. Laisser faire l'imagination, c'est souvent optimal pour accentuer son effet. Pour peu qu'en face, il y ait un peu d'imagination, évidemment. Pas question non-plus de crier sur tous les toits que je suis plus ou moins flic. J'ai supporté l'insigne assez longtemps comme ça. Puis je suis pas en service. Jouer au gendarme tout le jour, ça suffi. Je disparais. Ma voix retentit de nouveau, à la droite du mutant. Je me tiens à deux bons mètres de distance.

« Tu voudrais être la première pièce de ma collection ? »

Le rat se trouve dans une position singulière. Droite, presque parfaitement humaine... si on exceptait sa silhouette et sa taille. Ce qui reste de la lumière l'extérieur éclaire sa fourrure brune. Quelques gouttes luisent à l'extrémité de ses poils. Pas de doute, notre ami a pris un bain. Malheureusement, cela ne semble pas avoir amélioré beaucoup son hygiène. De profil, sa nature rongeuroïde est encore plus évidente. Des oreilles recourbées, des yeux rouges, un museau prognathe. Décidément, il y a des mutants qui ont moins de chance que d'autre. Moi, je pars avec un plus, mais lui... Avec une tête comme ça, il ne doit pas rentrer partout.

Au poste de police où je bossais, il y a un tableau en liège pas loin de la machine à café. Le principe de l'affichage est le suivant : lorsque, dans une affaire, dans un magazine, dans la rue, on tombe sur un mutant particulièrement laid, loufoque, grotesque, on y accroche sa photo. Parfois assorti d'un commentaire jugé amusant. On y trouvait, pêle-mêle un nain, un arbre vivant, un fauve, un oisillon, un éléphant, un homme d'acier, un homme rose, un homme bleu, un homme vert, un homme à antennes, etc. Le rat y aurait eu tout-à-fait sa place. En réalité, je me demande s'il n'y avait pas sa place. Je mets encore quelques secondes à percuter. Puis mon cerveau reconstitue. Rassemble les fragments de mémoire. Fait concorder les souvenirs. J'ai un moment d'hésitation. Je me téléporte à sa gauche.

« J'suis coursier. J'emmène les gens où ils veulent aller. »

Je devine une cicatrice qui court le long de ce qui lui sert de visage. Ouais. Tout bien réfléchi, j'ai déjà entendu parler de ce type. Pour sûr, c'est un sale type. Enfin, c'est ce qu'on essaie de faire croire, au moins. Je m'abstiens de juger les gens que je connais pas. C'est une règle, du bon sens. C'est vrai : les médias lynchent quelques fois une personne. Surtout si la dite personne est un mutant. J'aime pas la victimisation. Mais faut bien le reconnaître. Faut bien le reconnaître aussi que pour le coup, son casier judiciaire est épais. Heureusement pour lui, je l'ai pas trop en tête. Et quand bien même. Je suis pas en service.

« Tu courrais vite ! Mais vers où ? »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeLun 17 Juin - 16:54

Un coup à gauche, un coup à droite... plus de doute possible, le gars se téléportait. En voilà un chouette pouvoir ! Il devait rendre bien des services au quotidien. La loterie du gène X était ainsi faite, certains gagnaient, certains perdaient. Ernest préféra suivre son interlocuteur à l’oreille plutôt qu’au regard. Il demeurait dans sa fière pause, museau droit, poitrine bombée, bras croisés, jambes fléchies... Pour les jambes, il n’avait pas le choix, c’était son anatomie qui le lui affirmait. Mais bref, il transpirait d’orgueil, attendant un photographe imaginaire. Derrière lui, sa queue ondulait en un mouvement réglé comme une horloge. Une partie de son attention y était spécifiquement dédiée, histoire d’aller au bout du délire.
 
« Vers l’infinie et au-delà ! » répondit-il, avec enthousiasme, à la dernière question.
 
La réplique n’aurait pas été complète sans la gestuelle associée. Un pas en avant, une rotation sur lui-même de 450 degrés exécutées sur la pointe du pied, celui qui s’était avancé, le tout avec déploiement des bras et suivi harmonieux de la queue. Altérion termina face à l’homme, mains brandies vers le ciel. Il frisait le ridicule mais c’était assumé et toujours impeccablement exécuté. Du ridicule de luxe s’il vous plait ! Les mots prononcés, il les avait entendus dans un film d’animation et il les avait jugés tout à fait appropriés. Ses poings tombèrent sur ses hanches et il parut détailler le coursier. En fait, il cherchait à savoir si l’individu pouvait être source d’intérêt pour sa pause. Il finit par le demander sans détours.

 
« Aujourd’hui, ce soir, cette nuit, moi, plus gros des rats supposés de cette belle New York City, voir de l’état, voir du pays, voir du continent, voir de la planète, voir de la galaxie, voir de l’univers, voir du multivers... bref, moi, j’ai décidé d’aller là où ce serait le plus distrayant, car je veux me distraire, car c’est ma pause, car j’ai décidé que c’était ma pause, car je mérite une pause ! C’est la moindre des choses après des mois d’existence merdique, vous en conviendrez je sup pause. Dans le cadre de la fameuse pause, pensez-vous pouvoir me distraire ? Nous venons tout juste de jouer, si je ne m’abuse. Connaissez-vous d’autres jeux ? Aimez-vous le défi, la compétition ? »
 
Pour sortir pareille tirade, il fallait forcément être assez farfelu. On sentait nettement que quelque chose ne tournait pas très rond dans la tête du petit mutant. Paradoxalement, dans cet état, il semblait moins méchant, moins dangereux que d’accoutumé. Il débordait d’énergie, prêt à sautiller partout. Quand il parlait, le débit était rapide, fallait le suivre.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeLun 24 Juin - 22:02

Bluffé, d'accord, je le suis. Le rat a une voix assez désagréable. Mais il parle bien. Beaucoup mieux que ce que son apparence laisse présager. Les premiers éléments le concernant me sont revenus. Ça suffit. D'autres suivent. Je me souviens même de son nom. Ernest Lenoir. Fils de milliardaire, je crois. Voilà qui explique qu'il soit si facile pour lui de s'exprimer. Voilà qui explique moins son goût pour les balades égoutières. Il n'y a pas que des choses agréables, dans son CV. Je veux pas me rappeler de son casier, juré. Pourtant, malgré moi, je déterre de ma mémoire une liste longue comme le bras, voire comme la jambe, des crimes qu'il aurait commis. Au minimum vol, coups et blessures, abus de confiance, meurtre, terrorisme. Si ça se trouve, c'est pas lui. Quelqu'un a pris le temps de recenser tous les mutants rongeur de la ville ? Non. Il doit y en avoir une dizaine, au moins.

Admettons que soit lui. Comme ça, il n'a pas l'air méchant. Pas agressif. Il aurait pu super mal réagir. Un criminel endurci, il est supposé être un criminel endurci, se serait défendu. À la place, spontanément, il l'a pris comme un jeu. Comme un jeu d'enfant. Qu'est-ce que je risque à jouer avec un enfant ? Une personne qui cite Toy Story ne peut pas vraiment être dangereuse. Je me sentais trop fatigué pour faire quoi que ce soit d'utile de ma soirée. L'enthousiasme du rat a ranimé le mien. La bonne humeur, ça vaut cher. Après une journée entière à travailler avec les grincheux, les acariâtres et les aigres du bureau, ça ne fait pas de mal. Je ne vais pas laisser passer ma muse. Même si elle est vraiment velue. Hors de question. Je prends un ton un peu théâtral. Quand même plus sobre que le sien.

« Pour sûr, raton du multivers : j'en connais. Je crois qu'il faudrait, pour te distraire, un adversaire à ta taille. »

Je me téléporte une fois encore. En face de lui. Presque collé à lui. Autant dire que je respire par la bouche. Je lui pose amicalement une main sur l'épaule. C'est-à-dire à environ un mètre du sol.

« Voyageons. » je déclare. Nous disparaissons.

Je constate que mon passager est un peu plus lourd qu'il en a l'air. Sacrément musclé, sous la fourrure. Je ne m'y attendais qu'à moitié. On ne fait pas de saut périlleux sur les mains en tapant sur un clavier d’ordinateur toute la journée, je suppose. Je ne connais pas l'emplacement exact de l'endroit où nous allons. L'un des premiers que j'ai visité, en arrivant ici, d'ailleurs. Cela n'est pas loin. Environ deux kilomètres et trois cent vingt mètres à l'ouest. Nous apparaissons devant une très haute grille en fer. Fermée depuis dix-neuf heures, je crois. Il doit rester à l'intérieur seulement quelques membres du personnel. Qu'importe. Une grille ne m'a jamais arrêtée. Quand bien même elle est parée de l'inscription ''ZOO''. Je lève les yeux. J'incline la tête.

« Presque. » Nous disparaissons de nouveau.

À partir de là, c'est un peu plus simple. Je sais où est l'enclos qui m'intéresse. Une fraction de secondes plus tard, nous y sommes. Nous sommes dans la cage aux tigres. Une fraction de seconde plus tard, j'y suis. Je suis sorti de la cage aux tigres. Et le rat, lui, y est toujours. Pas de soigneur à l'horizon. Ils ont déjà terminé leur tour, avec un peu de chance. Un peu de chance, le rongeur en a. Il n'y a qu'un seul animal dans la cage. Un trou de deux bons mètres de haut, aux parois verticales, clôturé par une petite barrière en béton qui épouse le chemin réservé aux spectateurs, en fait. Il y a pas mal de végétation. Pas sûr que ça suffise à se cacher convenablement. Du haut de mon poste d'observation, j'annonce :

« Voilà le premier combat de la soirée : le prince des rongeurs contre le prince des félins ! Faites vos jeux ! »

Évidemment, je suis ni fou, ni méchant, et encore moins les deux en même temps. Je ne vais pas laisser ce combat se dérouler. Quand le fauve lui aura bien foutu les jetons, j’évacuerais le rat. Mais quoi de plus distrayant qu'une bonne frousse ?
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeMar 25 Juin - 9:14

La surprise fut au rendez-vous. C’était la première fois qu’Ernest voyageait ainsi. Il n’y avait pas à dire, la téléportation, c’était classe. Un instant ici et hop, plus là. Changement radical de décor. Adieux les égouts, bonjours le zoo. Adieux les odeurs fétides vomies par la ville, bonjour le frais parfum d’une nuit naissante. Un air plus vif, plus sain, enveloppa le petit mutant. A nouveau, il eut quelques frissons. Cela faisait longtemps qu’on lui avait fait perdre cette habitude d’aller sans habits. Sitôt sa première arrivée à l’Institut, le retour à la civilisation et ses conventions s’étaient imposées d’elles-mêmes. Seule avait demeuré le besoin d’être pieds nus. Il l’était si souvent qu’on pouvait le déduire en un instant rien qu’à la corne formée sous ses pattes. Oui, il n’était pas du genre à faire la chochotte en marchant sur des graviers ou des herbes rêches.

 
De son sanglant regard, il s’orienta. Une cage, un tigre... alors c’était ça le jeu ? Jamais il n’aurait pu s’y attendre. Il avait imaginé que tout resterait dans les égouts, mieux, que ce serait lui qui mènerait la danse. Etait-ce pour autant un problème ? Non, loin de là. Au contraire, Altérion était ravi. Tout en se frottant les mains, autant pour chasser l’impression de froid que pour manifester son enthousiasme, il déclara :

 
« Ho, que voilà l’annonce d’un digne programme ! Ho, providentiel fut cette rencontre ! D’un sac en papier en guise de prélude, le rideau s’ouvre sur l’éternelle rivalité entre chats et souris. Certes, il est un gros chat et moi une grosse souris, l’un dans l’autre équité est assurée. Je parie sur moi, sans l’ombre d’un doute. Allons minou, joue avec moi ! Tel est le spectacle, tel est le premier acte ! »
 
Si l’homme espérait de la peur, c’était raté. Pourtant, le tigre était une belle bête, un mâle dans la force de l’âge. Quand il eut prit conscience de l’intrusion, il sortit peu à peu de sa somnolence, toisant cet animal bipède qui s’agitait dans sa propre cage. Stressé par une journée au milieu des visiteurs du zoo, il ne tarda pas à devenir agressif, cherchant par sa position et ses grognements félins à intimider l’ennemi. Et l’ennemi lui tira la langue tout en arborant une grimasse grotesque.  Et l’ennemi lui montra son postérieur tout en disant :
 
« Vas-y, mord là-dedans si tu peux ! C’est chaud, c’est tendre,  c’est du rat de luxe ! »
 
En vérité, si le tigre arrivait à mordre, il s’exposait à une contamination à l’Altérium aux conséquences aussi aléatoires que dangereuses. Ainsi provoqué, l’énorme félin bondit subitement en avant avec une telle rapidité qu’il prit même de vitesse l’homme qui observait. Le pire aurait pu arriver en une seconde à peine. En tout cas, tout ce termina en une seconde à peine, mais pas le pire. On aurait dit qu’Ernest avait tout prévu. Il fit un simple pas de côté ». Etant de dos, il pivota avec légèreté, sa main tendue allant frapper le prédateur qui le frôlait. Ce dernier vacilla et s’effondra, assommé sur le coup. Altérion aurait très bien pu rater. Une mini-erreur d’appréciation et il aurait été sous les griffes de l’animal. Sa décharge d’adrénaline ne le rendait pas infaillible. Néanmoins, comme à un jeu de hasard, il avait tenté, il avait gagné. Et pour couronner le tout, il s’assit en tailleur sur le flan de la bête, esquissant un sourire de rat dont il avait le secret.
 
« Gagné ! Je gagne toujours ! »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeLun 1 Juil - 21:34

Du pain ! Des jeux ! Voilà ce que réclamait le peuple de Rome. À l'époque. Pas sûr que ça ait beaucoup changé aujourd'hui. Mon ventre se porte très bien. Ne reste plus que mon esprit à nourrir de choses palpitantes. Cette nourriture là passe par les yeux, au moins en partie. Le spectacle d'un rat géant se dressant face à un chat géant est plutôt savoureux. D'autant que le rongeur sait faire le show. Je ne m'explique pas qu'il soit aussi assuré. Je m'attends à ce qu'il panique, se mette à courir, tente de grimper à la paroi trop raide. Je l'aurais laissé pester, hurler, ou même me supplier, quelques secondes. Le temps de prendre un peu de plaisir. Sentir l'amusant pouvoir que j'aurais eu sur lui l'espace d'un instant. Puis je l'aurais remonté. Nous aurions ri. Enfin, au moins moi.

Le plus courageux des types aurait frémi, même les types du BAM, même juste un peu. Quant à l'enfant le plus naïf, il aurait déguerpi. Mais lui, non. Ernest Lenoir n'est pas du genre à se laisser effrayer par un prédateur naturel de dix fois son poids. Il fanfaronne. Pas un mouvement de recul réflexe, rien. Son instinct de survie, il semble déjà mort. De l'extérieur, ça y paraît. C'est à ce moment que je comprends. Mon analyse : ce mutant là n'est pas celui qu'on nous présente. Ceci n'est une personne ni manipulatrice, ni méchante. Ceci est tout simplement une personne inconsciente. Dingue. C'est ça. Ernest Lenoir est fou. J'ai rencontré pas mal de cinglés. De toutes sortes. Des criminels, des policiers. Des humains, des mutants. Des flippants et des drôles. Et c'est ce truc velu d'à peine plus d'un mètre qui est le pire. Et je ne peux pas dire s'il est plutôt flippant ou drôle.

Sur le moment, je ne m’esclaffe pas trop. Je le regarde, un peu troublé. Un sourire un peu nerveux. Je ne m'inquiète pas. Ça ne me ressemble pas. Simplement, je sens que je ne dois pas l'interrompre. S'il se fait bouffer, tant pis. Je ne sais pas comment attaquent les fauves. Je m'imagine qu'il va sauter. J'hésite. Je ne sais pas trop quoi penser. Si le rat se fait vraiment amocher... après tout, je n'aurais qu'à le laisser là. À qui il manquera ? Pas à l'opinion ou aux médias, la mort d'un assassin ne fait pas pleurer. Sans doute pas à sa famille non-plus, puisqu'il l'a trahie. Pas même au tigre, qui ne se refuserait pas un complément alimentaire. D'accord, ça ne serait pas une belle action. Pas très sympa à se rappeler le soir. Alors autant espérer qu'il réussisse.

L'assaut est violent. Même pour moi. Le rat se dérobe. Une fois encore, encore. Le tigre, lui, s’aplatit. Je ne vois pas très bien la scène. Parce que je suis occupé à me téléporter derrière le mutant. Quand j'arrive sur lui, c'est déjà terminé. Ernest s'apprête à s’asseoir sur le côté de son adversaire vaincu. J'ai un petit mal de tête. Effort trop violent, trop brusque. Même si je m'y attendais. Il passe en un éclair. En même temps que ma mine désorientée. Nous voilà dans un enclos de zoo. En pleine nuit. Avec un fauve assommé net par un rongeur. Un rongeur gladiateur. J’éclate de rire. Rire qui empli la nuit. Nuit qui s'impose.

« D'accord ! C'est toi le plus fort. Tu emportes cette manche. Ça fait un partout. Et tu as rendu justice à tous les rats mangés depuis la nuit des temps par des chats sournois. Tes ancêtres sont fiers de toi, je crois. »

Qu'importe si ses ancêtres sont les même que les miens : sa lignée doit être plus poilue que la mienne. Et je suis sûr qu'ils seraient quand même fiers. Je fais quelques pas vers le rat.

« Quelle sera la suite ? »

Voilà l'invitation. J'attrape le bras velu du mutant. Membre plus musclé qu'il en l'air. Pouvoir envoyer d'un seul coup un fauve au pays de Morphée. Ça n'est pas donné à tout le monde. Tout est histoire de technique, je suppose. Je n'aurais pas parié y arriver. Mais si un truc de cette taille y parvient, pourquoi pas moi ? Il faudra que j'essaie. Un autre jour. J'ai en tête mille endroits. Des endroits étonnants. Des endroits où il n'est sans doute jamais allé. Où le péril pourrait guetter. Mais cette fois, à lui de se creuser la tête. Il est celui qui se connaît le mieux. Personne d'autre que lui ne pourra trouver une épreuve qui nous mettra mieux au défi. Ou qui nous amusera. Oui. À bien réfléchir, nous amuser, cela suffira.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeMar 2 Juil - 13:34

« La suite ? »

Ernest se gratta la tête, de sa main libre, l’autre étant tenu par cet homme providentiel. Providentiel, oui, c’était le mot. Il n’aurait pu faire meilleur rencontre ce soir. Le hasard, ou le destin, avait mis sur son chemin la personnalité idéale pour magnifier sa pause. Elle se devait d’être grandiose, inoubliable, un souvenir d’éternelle jubilation qui contrasterait avec ses songes cauchemardesques. Trop terne, trop triste était sa vie. Des couleurs, de la joie, du rire que diable, même si ce n’était qu’une nuit, même si c’était sa dernière nuit de liberté.

Alors, que pouvait être la suite ? Tant d’idées se bousculaient dans sa tête, les trois quarts d’une totale absurdité. Faire le tri lui fut difficile tant son intellect était en vacance. Qu’est-ce qui était réalisable ? Qu’est-ce qui ne l’était pas ?


« Ho, je sais, je sais !!! »

Il s’était exclamé tout en sautillant, surexcité. Là, il tenait du gamin exubérant. Mais avant même qu’il poursuive, l’éphémère suggestion s’en était allée, terrassée par un soupçon de raison.

« Non, c’est pas possible... »

A présent, il avait l’air déçu, triste. La perspective abandonnée n’était pas sans regret. Mais voilà, c’était oublié. Altérion dressa l’index en l’air, sur le point d’annoncer une nouvelle épreuve. Ses yeux se mirent à pétiller. Il changeait d’attitude à une vitesse folle.

« Ha, ça ! On va... non, non, c’est nul. »

Il avait secoué la tête en signe de négation. Il n’allait pas s’en sortir s’il ne mettait pas au moins un semblant d’ordre dans son cerveau. Son index retomba, ses yeux aussi. Déjà, c’était clair, l’exercice lui était désagréable. Il pouvait donc faire une croix sur toutes perspectives intellectuelles. La suite ne pouvait être que physique, sportive. Se défouler, l’exaltation par un défi de force, de rapidité, d’adresse... de... Le rat observait le tigre assommé. Il resta silencieux plus longtemps. Enfin naquit une idée digne de ce nom. Relevant le museau vers l’homme, il déclara, enthousiaste :

« C’est bon, je sais, je sais pour de bon ! J’ai LA suite ! J’en ai même deux, enfin, deux épreuves pour le prix d’une, la première préparant la seconde mais autant en faire un défi à part entière, n’est-ce pas ? »

Il se fendit d’un sourire en coin, ce qui, avec ses traits bestiaux, fut d’un curieux résultat. Sa main libre se mis à jouer avec sa queue glabre en un mouvement en spiral purement machinal. Son attention était toute à ce qu’il disait. Sans se faire prier, il exposa le projet.

« A mon signal, tu vas faire tout ce qui suit. Peu importe l’ordre, tout doit être fait en... disons... trois minutes. C’est ça, 180 secondes. Je compterais dans ma tête. Sans montre, j’estime ma marge d’erreur à plus ou moins 1 seconde à la fin du compte, c’est raisonnable. Si tu arrives à tout faire avant l’échéance, je passerais dix fois le temps restant à exécuter le moindre de tes ordres en guise de gages. Par exemple, si tu mets 150 secondes, je serais à tes ordres pendant 30 x 10, soit 300 secondes, soit 5 minutes. Sinon, on passera directement à la suite. Voici ce qu’il faut faire :
- nous rendre au beau milieu de Central Parc ;
- avoir trouvé une longue corde ;
- avoir trouvé un pistolet de Paint-ball avec un stock complet de billes ;
- avoir trouvé de quoi prendre une photo ;
- et si t’es un as, avoir trouvé des choses utiles pour les éventuels gages que tu veux me donner. Ce dernier point est donc optionnel.
Tu as tout compris ? Alors, trois, deux, un, top départ ! »


A moins bien sûr que l’homme ait besoin d’un récapitulatif, ou qu’il refuse, Ernest allait se mettre à compter dans sa tête. S’il était téléporté, il allait sagement rester là où on le conduirait, attendant la fin du délai imparti.


Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeDim 21 Juil - 4:15

Le rat réfléchit. C'est tant mieux : ça me laisse le temps de récupérer. J'observe avec un intérêt les mimiques de sa face de rongeur. Je trouve incroyable qu'une figure si peu humaine puisse exprimer des sentiments quand même. Ça me rappelle un peu les dessins animés. Walt Disney, tout ça. Pourquoi est-ce que les enfants aiment autant les personnages anthropomorphiques ? Peut-être parce qu'ils sont moins impressionnants que les vrais humains. Un canard, une souris, c'est plus abordable. Un rat, ça reste à voir… Peut-être parce qu'ils ont quelque-chose d’irréel. Avec eux, on sait de suite qu'on est direct dans le rêve. On ne peut pas s'y tromper. À part que la créature qui est devant moi est tout ce qu'il y a de plus réel. Elle bondit sur place, elle gigote. C'est assez distrayant. Son attitude est presque caricaturale. Soit il pense à une vitesse folle, soit il fait l'imbécile. S'il était idiot, il n'aurait pas fait une si grande carrière de criminel. Il n'aurait pas échappé à toutes les polices, je suppose. Alors c'est sans doute un peu des deux.

Je pourrais adopter différentes attitudes. Je choisis la plus simple. Celle qui me fatigue le moins l'esprit. Adhérer à son délire. Me laisser porter par ce cerveau un peu dément. Le tout dans une atmosphère onirique. Je ne doute pas qu'il trouve rapidement de quoi s'amuser. Je ne me sens pas beaucoup de limites. Ça n'est pas parce que je suis dans un bureau d'agents surentraînés que j'ai plus à respecter la loi que n'importe qui d'autre. Bon, évidement, si on peut éviter de faire exploser des choses ou de tuer des gens, c'est mieux. Essentiellement parce qu'il y a sur mon lieu de travail des télépathes. Des télépathes terriblement indiscrets. Des télépathes qui pourraient tomber sur des souvenirs déplaisants. Je déteste l'idée qu'ils puissent entrer dans ma tête. Hors de question que je leur laisse voir quelque-chose qui pourrait les intéresser. Un petit regard vers le félin. Au cas où le rat ne l'aurait pas frappé assez fort. Sinon, je reste bien sage. Je m'attends à tout.

Pourtant quand la chose est formulée, je suis encore surpris. Elle n'est ni décevante, ni particulièrement géniale. Du moins en apparence. Simplement intrigante. Tout est d'une complexité improbable. Les objets semblent ne pas avoir de rapport entre-eux. Je crois presque à un bogue. Je ne m'imagine même pas quel cheminement mental l'a amené à organiser ainsi son plan. Vers quel but ces éléments convergent ? De quoi est-il parti exactement ? D'une finalité, d'une combinaison, de rien ? Un instant, je me sens écrasé par son possible raisonnement. Puis je me dis que c'est certainement un hasard. J’acquiesce de façon très sérieuse à tout ce qu'il dit. Comme si tout tombait sur le coup de la logique.

« Tes désirs sont des ordres, prince des rongeurs. Enfin, pour l'instant. » je m'exclame.

Je ne perds pas de temps. Ça n'est qu'un jeu de piste, c'est vrai. Mais il est quand même particulièrement difficile. Au bureau, ils ne m'en demandent pas autant. Sans doute parce qu'ils ne m'en croient pas capables. Ils ne faudrait pas non-plus qu'ils me forcent à me fatiguer. Cette fois, je consens à suer un peu. Essentiellement parce que ma fierté est dans la balance.

« Toi d'abord. Je prends de l'avance sur ton gage. Essaie de tout attraper ! »

Le rat géant n'est plus là. Il est parti tout seul. Central Park, c'est presque 450 hectares de vert. J'aurais de la peine si je l'envoyais à côté. En fait, j'essaie de faire un peu mieux que ça. Sinon ça ne serait pas un défi. Je vise le lac. Il apparaîtra au fond. Normalement. Je ne me fais pas de soucis. Les rongeurs nagent très bien, en général. Ou tiennent bien trois minutes en apnée. C'est selon.

Je retiens l'endroit où je l'ai envoyé. Voilà mon point de repère. Il s'agit ensuite de calculer tous les autres déplacements en fonction. Pour ne pas le perdre. C'est de la géométrie mentale. Ça se fait assez bien. J'ai l’encéphale un peu moins hypertrophié qu'Ernest. Par contre, il y a certaines choses qui sont ma spécialité. La localisation rapide d'objets en fait partie. Je me concentre un instant. Je suis chez-moi. Ça n'est pas très grand. C'est un peu fouillis. Je déblaie, agacé, quelques affaires qui traînent. Je donne un coup de pied à un sac plastique qui traîne. Finalement, je l'attrape. J'attrape mon appareil photo, aussi. Je l'ai probablement volé. Je ne sais plus vraiment où. Je ne m'en suis presque jamais servi. Au moins, je suis sûr qu'il a encore des piles. Le bibelot trouve sa place. Je fais vite un nœud. J'espère que la pochette est étanche. J'envoie.

Où peut-on trouver un engin de paint-ball ? Je clignote sur place. Puis je suis sur la place. Je repère un magasin de jouets. Enseigne raton. Les volets sont fermés. Ça ne m'arrête pas. À l'intérieur, il fait noir. Je peste. Je sors mon téléphone portable. Il fait lampe. Voilà au service de quoi est la technologie. Mes yeux ont eu le temps de s'habituer à l'obscurité. Des enseignes sont suspendues en hauteur. Je m’éclipse vers le rayon destiné aux plus grands. Je crois voir des boîtes qui contiennent des choses qui ressemblent à des fusils à peinture. Je ne fais pas trop dans le détail. Je n'ai pas le temps. J'en catapulte trois différents, pour être sûr.

Le dernier magasin est moins problématique. Dédié à la nature, au camping, et d'autres loisirs désuets auxquels je n'ai jamais adhéré. C'est une sorte de grosse serre, avec un toit en verre. Alors la luminosité y est un peu meilleure. À côté des toiles de tentes, il y a un coin cordage. Je choisis une corde d'escalade verte : onze millimètres de long, soixante mètres de diamètre. Ou quelque-chose comme ça. Elle disparaît elle aussi vers les profondeurs du lac.

Enfin, je fais fi de l'efficacité. Quelques bonds de plus et je m’empare d'une couverture. Je la hisse sur mon épaule. J'apparais sur la berge de Central Park. Bien au sec. Je souris, satisfait. Je n'ai pas compté. Je n'ai pas l'impression d'avoir trop tardé. Le délais était quand même serré.

« Tu as tout ? » je lance dans le noir.

Je songe que le rat doit être encore quelque-part dans l'eau. Incapable de prêter attention à ce que je fais. Soit. Je m'autorise à souffler. Je halète un petit moment. Le stress, la précipitation, plus que le véritable effort, m'ont fatigué. Aussitôt qu'il sortira, je lui proposerai le drap épais pour se sécher. Je ne suis pas un monstre. Moi.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité
Anonymous



Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitimeDim 21 Juil - 9:52

Voilà Ernest surpris, doublement surpris même. D’abord, il se retrouva seul. Il ignorait que l’homme pouvait téléporter les autres sans forcément devoir suivre. Ensuite, et surtout, il passa en un clin d’œil dans un environnement liquide, submergé totalement sans même être passé par la phase du plongeon. Une expérience nouvelle, étrange et, il fallait l’avouer, peu agréable. L’eau était froide, petit choc thermique. Rien d’excessif, juste de quoi saisir. Par chance, au moment précis du phénomène, le rat expirait. Il eut le réflexe de passer en apnée mais il ne lui restait alors que peu d’oxygène dans les poumons. Il s’empressa donc de remonter en toute hâte. Etant un nageur fort correct, étant de plus en cet instant hermétique à toute forme de stress, il n’eut pas de mal à gagner la surface. Sortant la tête du lac, retrouvant son souffle, il observa les parages. Pas de doute possible, c’était Central Parc. Aucun signe de son compagnon du moment. Il devait accomplir sa mission. Aucune autre présence dans le coin, personne pour déranger, un bon point.

« Ce type est génial ! » fit Altérion en battant lentement des bras et des jambes, juste pour rester sur place.

Il allait prendre la direction de la rive quand, sans prévenir, un sac plastique lui sauta au museau, au sens propre du terme. Rempli d’air, provenant du fond du lac, le sac avait acquis lors de sa remontée un peu d’élan, assez pour crever la surface en un petit bond de quelques centimètres et ce, juste devant la tête du mutant. Lenoir, toujours aussi réactif, l’attrapa d’une main agile. A l’intérieur du sac, il y avait quelque chose... un appareil photos.


« Ce type est vraiment extra ! »

Quand l’homme débarqua avec sa serviette, le rat était en plein travail. Il avait déjà mis au sec le sac plastique et deux des trois boîtes de Paint-ball. Il était en train d’acheminer la dernière vers ce petit tas.

« Ha, te voilà ! Navré, j’ai perdu le compte. C’est de ta faute ! Le bain, c’était pas prévu ! Mais c’est de bonne guerre. Tel est mon gage. »

Altérion se pressa de terminer. Une fois fait, il accepta volontiers la serviette. La baignade avait eu l’avantage de le nettoyer. Adieux les effluves nauséabondes des égouts, bonjour l’odeur plus anodine d’animal mouillé. L’exercice ne semblait pas l’avoir éprouvé, nouvelle preuve de son excellente forme physique. Il se frictionna énergiquement, se réchauffant par la même occasion. En cet instant, il n’aurait pas été contre quelques habits. Depuis qu’il n’était plus seul, depuis qu’il avait changé le concept de sa pause exceptionnelle en profitant des biens faits de cette rencontre imprévue, la nudité ne se justifiait plus. Néanmoins, pas de souci. La suite allait être sportive, de quoi peut-être suer. D’ailleurs, il ne tarda pas à en parler.

« Passons au sérieux. Tu m’as attrapé dans les égouts, je me suis libéré. Il faut qu’on se départage une fois pour toute. Il faut qu’il y ait un gagnant et un perdant. Il faut que ce soit indiscutable ! »

Le petit mutant jeta la serviette au sol. Son pelage était encore humide mais ne dégoulinait plus. Il s’approcha des diverses choses rassemblées en tas et poursuivit, très sérieux, une lueur de défi dans le regard.

« A toi : la corde. A moi : les fusils de Paint-ball. Au gagnant : l’appareil photos. L’épreuve est la suivante. Elle se déroule dans tout Central Parc et va débuter par une période de dix minutes pendant laquelle on va se séparer. Toi, tu va te barrer, attendre où tu veux mais hors du parc. Moi, je vais me balader dans le parc. Au terme du délai, top départ, tu reviens et les hostilités débutent. Ton but : m’attraper, me neutraliser sans te faire virtuellement tuer. En clair, tu as gagné si je suis pieds et poings liés et que tu t’es pas fait toucher par une bille de peinture. Non, une bille, c’est trop peux. Disons trois. Mon but, te descendre, donc te placer trois billes de peinture. Le gagnant photographie le perdant, lui offre la photo tout en la lui dédicaçant. Si aux premières lueurs de l’aube, ni toi ni moi n’a gagné, il y a égalité. Mais j’espère bien qu’on n’en arrivera pas là. »

Ernest tendit la corde à l’homme et commença à ouvrir les boîtes. Les fusils étaient de simples jouets, loin de représenter fidèlement de véritables armes. Cela ne faisait pas l’affaire du petit mutant, habitué en ce domaine au réalisme le plus total. Néanmoins, il s’en accommoderait. De plus, face à quelqu’un qui se téléportait, il allait surtout s’agir de tir réflexe potentiellement à très courte portée, pour ne pas dire au corps à corps. Il opta d’office pour le fusil le plus court de canon, le plus maniable dans la mêlée.

« Bien sûr, tu peux user et abuser de ton pouvoir et moi, du mien. On peut se cogner dessus, employer toutes les méthodes possibles du moment qu’elles ne sont pas létales. Des questions ? »

Cette fois, oui, c’était du sérieux. Le rat mettait en jeu de sa fierté. Cela l’amusait de se lancer dans une épreuve de ce genre, à l’intérêt immédiat et pourtant anodin. Une épreuve de force en somme, il avait toujours considéré ça comme stupide mais pas ce soir.

HRP : si ton personnage accepte, tu peux faire avancer l’action jusqu’au retour au parc, puis exposer ta stratégie.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Quand Ernest dit stop ! [Libre] Empty
MessageSujet: Re: Quand Ernest dit stop ! [Libre]   Quand Ernest dit stop ! [Libre] Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Quand Ernest dit stop ! [Libre]
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Champ libre - [Libre]
» Yeux rouges, mais quelle couleur de cœur ? [PV : Ernest Lenoir + LIBRE]
» La vérité n'est pas dans les gènes, elle est dans le cœur {Ernest Lenoir + LIBRE sous demande mp}
» [Mission Neutre] Stop Her !
» [Mission Neutre] Stop Her ! [Inscrits]

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
X-men RPG :: Hors Jeu :: Topics Terminés :: Ailleurs-
Sauter vers: