DCVO {Proches de Rachel - One Shot}

C’était un grand jour pour elle, même si on ne le lui avait pas expliqué elle l’aurait très bien compris seule. Tout comme elle avait compris qu’il ne s’agissait nullement d’une simple récompense ou d’un honneur gratuit pour ce qu’elle avait fait mais qu’il y avait bien plus d’intérêts en jeu ; Pete Wisdom avait été étonnamment franc sur la situation pour un agent du MI-13, l’institution britannique en charge des affaires mutantes, d’un autre côté jouer carte sur table lui permettait de minimiser les risques vis-à-vis du pari qui était prit. Après ce qui c’était passé un mois plus tôt, le gouvernement britannique avait du prendre position, décider de s’il y avait eu service rendu ou bien acte de terrorisme génétique, de s’il fallait condamner ou récompenser,  de qui était les héros et les vilains en sommes. Et c’était là qu’ils l’avaient joué britannique, agissant avec habileté et distinction et les conduisant droit à cette situation. Phénix des X-Men ne serait nullement condamnée mais récompensée moyennant une contrepartie implicite : s’ils avaient prit le parti de se servir de la réputation ambigüe des X-Men pour en faire une défenseuse désintéressée des humains dans la bataille qu’elle avait menée à Londres et s’en allaient l’anoblir pour cela il n’en était pas moins question qu’elle s’acquitte des obligations envers la Reine qu’impliquerait son appartenance à un ordre chevaleresque du Royaume-Uni, obligations principalement concentrées dans la collaboration potentielle avec le MI-13 qui avait tout arrangé en sous-main. L’ultime preuve de cela se trouvant dans l’ordre honorifique qu’elle allait intégrer, à savoir l’Ordre Royal de Victoria, qui était le seul où les décorations n’étaient pas décernées sur la proposition du gouvernement mais sur seule volonté du souverain sans consultation de quiconque. Le BAM n’avait su faire face à l’apparition du Phénix en décembre 2012 et le MI-13 escomptait bien ne pas faire cette erreur même s’il restait à prouver s’ils tentaient réellement de collaborer ou simplement de se tenir proche d’un danger potentiel, le plus probable étant un mélange des deux.  

Mais cela importait peu à Rachel car elle y voyait non seulement un moyen de faire bien voir les X-Men auprès des gens, à défaut de faire bien voir les mutants en règle générale, de tisser des liens plus diplomatiques avec une institution de maintient de l’ordre spécialisée dans la mutation, chose déjà faite avec le BAM même s’il s’agissait plus de tolérance que de coopération si elle avait tout comprit, et d’obtenir une chose qu’elle n’avait pu avoir autrement : une identité. Les britanniques ne pourraient la surveiller à l’Institut quant à l’appeler à l’aide elle restait seule décisionnaire de ses actes et une X-Woman avant tout, donc cela ne changeait à ses yeux pas grand-chose avec ce qu’elle pouvait déjà être amenée à accomplir, cependant disposer d’une existence légale lui permettrait de ne plus avoir à se cacher, à craindre des interventions de la police lorsqu’elle essayait de parcourir le monde ; tout intégrée qu’elle ait été cela lui avait manqué, malgré qu’on lui ait fait de faux papiers, et plus d’une citoyenneté honorifique c’était une citoyenneté qui lui faisait du bien. Combien d’années qu’on lui avait retirée la sienne ? Non, elle ne la regagnerait pas, elle ne serait même pas américaine, mais être reconnue comme citoyenne de quelque part la touchait énormément. Nom : Summers ; Prénom(s) : Rachel Anne ; Sexe : F ; Né(e) le : 05.09.2007 à Graymalkin Lane, Etat de New York ; bon, ce n’était pas parce qu’elle était vraie que sa carte d’identité attirerait moins la suspicion qu’une fausse considérant qu’elle avait été franche sur les données mais elle faisait ce qu’elle pouvait !

Une chose qui continuait d’ailleurs désormais que la cérémonie commençait. Malgré la journée de préparation ou peut-être à cause d’elle et de toutes les explications et indications qu’on lui avait fournies pour l’adoubement, Rachel stressait bien plus qu’elle n’avait eu l’occasion de le faire jusque là. La liste des choses à ne pas faire était si bien gravée dans sa mémoire qu’elle s’attendait à la suivre comme on suivait un plan de route et l’apprêtement avait été si long et minutieux qu’elle l’avait cru commandé par des obsessifs. Non, elle ne comprenait que trop bien ce qui allait ce passer et ça ne l’aidait pas à déstresser ; vêtue d’une robe blanche d’une complexité insoupçonnée car corsetée de tissus qui s’en descendaient jusqu’à quelques pas derrière elle, maintenue par une unique bretelle lui passant contre la nuque et brochée à la poitrine de perles argentées en lui comprimant tant cette dernière que le ventre, Rachel avait tant les bras que le haut du dos et du torse libre, laissant ainsi voir au niveau de ses clavicules les extrémités de la Marque du Phalkon ainsi que les diverses cicatrices présentes sur son épaule et son bras gauche, maquillées pour être cachées au mieux à l’instar des Marques d’Assermentation des Limiers qui étaient invisibles. Mais le maquillage n’avait pas été l’étape la plus désagréable, considérant qu’on lui avait clairement certifié qu’elle ne « prenait pas assez soin d’elle » avant de la forcer à subir une manucure et un coiffage, réunissant ses cheveux en un chignon tenu d’un ruban blanc. L’horreur quoi ! Outre qu’elle était parfaitement capable de se coiffer toute seule et qu’elle n’aimait pas s’attacher les cheveux, même si elle restait capable de le faire en cas de besoin, l’Echo du Phénix emmerdait ces espèces de Jade de la présentabilité autant qu’ils l’avaient emmerdée. Oui, elle ne devait pas se présenter comme une pouilleuse devant Lizzie (ni l’appeler Lizzie d’ailleurs) mais non, elle n’était pas pouilleuse en arrivant ! Encore que ça restait à voir considérant le décor et les personnes présentes.

La Chapelle de Savoie était une église située le long du Strand dans la Cité de Westminster à Londres, construite en 1512 et dernier reste de l’Hospice de Savoie démoli au XIX siècle, servant de chapelle à l’Ordre qu’elle allait intégrer. A défaut de connaitre les dimensions de cette église anglicane de style Tudor, Rachel devait bien admettre que c’était aussi luxueux que Buckingham malgré une sobriété bien plus grandes. Des murs blancs immaculés et percés de grande fenêtre à vitraux, un parterre de moquette bleue sombre qui répondait à un plafond quelques mètres plus haut où similaire couleur se voyait contenue de sculptures dorées qui faisaient écho à celles du fond de la pièce, derrière l’épais autel de bronze, voici qui justifiait à lui seul que les gens présents sur les prie-Dieu de bois soient sur leur trente-et-un. Et des gens, il y en avait beaucoup, ces proches tout d’abord, ainsi que des membres de l’Ordre de Victoria et d’autres personnalités nécessairement présentes à un déplacement de la Reine. Pas de journalistes dans la chapelle même mais plein aux alentours, au-delà de la sécurité imposée. Beaucoup de monde, en somme, avec la majeure partie en trop, à ses yeux.

Yeux qui ne quittèrent pas ses connaissances des yeux à moins qu’ils le dussent tant elle suppliait sœur, ami(e)s et protégées, d’elle ne savait trop quoi d’ailleurs mais avec une ferveur aussi grande que son malaise. Heureusement que cela n’allait pas prendre l’après-midi et qu’il n’y avait pas de banquet en soirée… à si ? C’était la merde, d’autant plus avec une robe aussi blanche et des gens aussi… britanniques.

La cérémonie se déroula sans encombre, la jeune femme répondant à ce qu’on lui demandait et récitant ce qu’on lui demandait pour la forme comme on lui avait demandé avant de recevoir le Badge de Dame Commandeur de l’Ordre Royal de Victoria, en se disant que le nœud sur lequel il était accroché retiendrait parfaitement les poils de chat perdus par Cerberus et en ne se souvenant plus de si elle devait dire merci ou non, puis l’Insigne argentée de son rang, se rappelant qu’il ne fallait surtout pas appeler ça un pin’s même si ça y ressemblait et remerciant à voix basse dans le doute. Ni vague ni maladresse, ni crise cardiaque d’ailleurs, et tout ce passerait bien, c’étaient là les objectifs premiers et ils furent accomplis peu ou prou, faisant d’elle la Dame Rachel A. Summers DCVO.

Non, cette journée ne fut pas traumatisante ; absolument pas. Rachel fut convaincue qu’il lui était plus facile de se battre à mort sur le bitume que de tout bien faire comme ces personnes l’attendaient d’elle et elle eue la chance d’avoir un porte parole pour éviter de déclencher un incident diplomatique par mauvaise-éducation ; « sois belle et tais-toi » fut un concept qu’elle comprit parfaitement ce jour-là et dès que ces obligations le lui permettaient (voir un peu avant d’ailleurs) elle s’en allait retrouver ses proches car si elle avait aujourd’hui la reconnaissance intéressée d’étrangers avec qui elle partagerait désormais une nationalité elle n’en perdait pas moins l’affection désintéressée et réciproque qu’elle avait avec ses proches, citoyenne de leurs cœurs depuis bien longtemps déjà.

Qui aurait cru que cela se terminerait ainsi ?

Considérant ce qui c’est passé, ce qui est arrivé, qui elle est, qui aurait cru que cela se terminerait dans une chapelle et une robe blanche ? Que ce se terminerait par une récompense non une condamnation ? Même si je vois les enjeux géopolitiques derrière je ne l’aurais pas cru si je n’y avais été. Mais j’y suis. Ça a été difficile considérant la rancune qu’a mon aimée contre Londres qui lui a prises deux personnes chères à son cœur, rancune que je comprends sans réellement partager et qui si elle a compliquée notre venue ne l’a pas empêchée tout de même puisqu’après tout, l’une des deux personnes ayant connue un sort funeste ici même connait une résurgence inédite ; cela n’effacera pas la mort de Daniel et l’orobe que cela a jeté sur la capital britannique mais on doit aller de l’avant sa oublier le souvenir, non se raccrocher à lui ou le rejeter comme on peut être tenté de le faire. C’est lui qui me l’a apprit et j’espère lui faire honneur en respectant cela. Tout comme j’espère faire honneur à l’amitié que je porte à celle qui connait sa première reconnaissance officielle.

Je la regarde aussi à son aise qu’une Rachel n’ayant pas le droit à la moindre maladresse sociale et devant se conformer à un code aussi stricte que différent de sa nature ; ce qu’elle est, assurément. La robe et la coiffure sont trop complexes pour elle, même si elles lui vont très bien, et elle les porte aussi bien qu’elle le peut. Nous faisons tous des efforts pour être ici, dans cette grande église luxueuse comme seuls les Britanniques en font. Pour ma part, niveau vestimentaire, cela s’est limité à une robe fourreau légèrement brillante et un peu trop moulante me remontant jusqu’au plexus, laissant ainsi mes bras et mes épaules libres d’adopter les divers signes de gêne et d’encouragement que je peux manifester en plus des naturels contacts avec ma famille, fille comme femme. J’espère que ce trente-et-un qui m’est inhabituel plait à Caitlyn car plus que souligner la finesse de ma silhouette et de légèrement mouler poitrine et hanches son contact est doux et je la pense comme prévue pour être ôtée, tant elle n’est tenue que par l’élastique thoracique et qu’ainsi elle dévoilera une à une les parties de mon corps lorsqu’elle glissera jusqu’à mes pieds ; chose qui arrivera dès que nous seront retournées en Irlande dans l’un de nos chez-nous, je lui fais confiance pour cela.

Mais pour l’heure je reste concentrée sur celle au centre des projecteurs même si son anonymat, à l’instar du nôtre, sera préservé, les journalistes maintenu éloignés par la sécurité et les interviews se faisant par communiqué officiel, même celles concernant l’héroïne du mois précédent. Si je milite pour un visage médiatique chez les X-Men je ne pense pas qu’y mettre Phénix y soit une bonne idée connaissant parfaitement Rachel, sa franchise et ses maladresses. Franchise et maladresses qu’elle tente de contenir au mieux en nous jetant des regards suppliciés, réussissant par miracle à n’exprimer que de légères grimaces mais s’en revenant toujours à nous à la première occasion. Il y a beaucoup de monde, en effet, surtout pour elle ; mais on est au premier rang et c’est une bonne chose dans la « gestion » de son stress.

C’est une belle cérémonie, je n’aurai pensé en voir une un jour mais je me rends bien compte dans les ombres de qui je me trouve ; des légendes en devenir, des personnes qui marqueront l’histoire et, peut-être, changeront le monde. Je suis fière d’avoir été entrainée par l’une d’elle, je suis contente d’avoir put aider et d’être amie avec l’une d’elle, je suis heureuse d’aimer, d’être aimée et d’avoir construite ma vie avec l’une d’elle ; je n’ai jamais été préparée à tout cela et ne serai jamais leur égale mais je ne cherche pas à l’être, juste à être là, pour elles, avec elles.

Voir la Reine d’Angleterre en personne, c’est impressionnant, indépendamment d’un quelconque culte de la célébrité cela reste un personnage historique et une femme qui malgré son âge reste forte, déterminée et bienveillante. La voir se pencher sur une personne que l’on connait lors d’une cérémonie qui ne nous était jamais venue à l’idée est un grand souvenir aussi. Je pense que de tous mes siècles de vie ce sera celui-ci, le premier, qui m’aura apporté le plus de ce genre de souvenirs car je crains qu’une fois les découvertes passées ne vienne un moment où l’on sera blasé du monde et de ce qui s’y déroule, même proche de nous. La nouveauté, on ne peut s’empêcher de la chercher et c’est normal cependant si elle amène à avancer et à progresser ne risque-t-il pas de venir un moment où l’on aura l’impression de ne plus le faire ?

Ce n’est pas mon cas pour l’heure et je sais qui interroger à ce sujet. Alors je passe outre cette pensée pour me concentrer sur l’instant présent et cette broche argentée si importante symboliquement. Dame Rachel Anne Summers DCVO… elle qui était contente que ses initiales fassent « RAS » vient de gagner quelques ajouts à mettre dans les formulaires qu’elle remplira ; parce qu’elle en aura à remplir, désormais qu’elle existe légalement, surtout si elle veut résider aux USA. Sans doute qu’il y aura du piston pour faciliter son arrivée mais il est des étapes auxquelles elle n’échappera pas. C’est la grande leçon de la journée pour elle, je crois.

Mais elle s’en remettra. On s’en remettra tous et on conservera de beaux souvenirs et de belles photos même si les meilleurs moments ne seront qu’à nos mémoires. La grimace quant on lui a rappelé qu’il y avait banquet en son honneur est tout simplement indescriptible et je crois que l’Agent Wisdom s’en amuse autant que nous. Il est surement la personne la plus impliquée dans l’affaire mais je pense qu’on peut lui faire confiance. Il a agit avec une réelle bienveillance envers Rachel depuis le début et ne s’est pas caché des raisons guidant les actes de sa hiérarchie, il s’est arrangé pour que ce soit au mieux et qu’on puisse récupérer la notre sans conflit d’intérêt même si son allégeance ne se discute pas plus que la nôtre. Il fera un bon agent de liaison et Rachel agit avec lui comme si elle le connaissait même si elle ne semble pas en avoir conscience. Je lui en parlerai, plus tard. Elle a suffisamment à penser et trop de choses à ne pas faire.

Combien de temps lui faudra-t-il pour se remettre ? Plusieurs jours je pense. Mais je pense également qu’il vaut mieux se remettre de cela que de ce qu’on connait habituellement ; c’est une belle fin, peu de nos aventures en connaissent une similaire. Il y a un prix à payer, toujours, mais ici elle l’a déjà payé personnellement et s’ils croient pouvoir exiger quelque chose d’elle ils se trompent. Elle agit et agira par le cœur et ce ne sont pas un titre ou des lettres post-nominales qui corrompront cela.

Je n’aurai jamais pensé que cela se termine ainsi mais je ne pense pas non plus vouloir que cela se termine autrement, pour elle.