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 Opening night [Lilian]

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Nikolaï M. Kolyakov
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Nikolaï M. Kolyakov


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MessageSujet: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeDim 4 Mai - 10:02

Le temps est une chose bien amusante. Indispensable et pourtant foncièrement incompréhensible. Il nous donne la sensation de le maîtriser pour mieux nous échapper au dernier moment. Il domine chaque instant de notre vie de toute sa hauteur, nous frôlant de ses mains si pesantes puis s’éloignant à nouveau pour nous laisser respirer, le tout jusqu’à ce que nous finissions par crouler sous son fardeau. Il se joue de nos conventions pour le mesurer, s’amusant à nous mettre devant nos propres contradictions. En cet instant par exemple, je vis un paradoxe que je ne sais si trouver amusant, déconcertant ou tout bonnement irritant. Me trouvant à New-York en ce soir du 31 décembre, je vis actuellement les dernières heures de l’année 2013. Pourtant, comme le message guindé signé des noms de ma mère, mon père et mon frère – même si je sais que ce dernier n’a en réalité rien eu à faire avec l’affaire – me le rappelle depuis désormais quatre heures, le reste des Kolyakov résidant à Moscou, ils profitent déjà tous du début de l’année 2014. Autrement dit, je me retrouve en décalage d’un an avec eux. Une situation qui me tirerait l’esquisse d’un sourire, si je n’étais pas en retard sur eux.

Car c’est bien là l’inconvénient d’avoir changé de continent. J’ai certes mis plus de 7000km entre ma famille et moi, ce dont je ne me porte on ne peut mieux. Néanmoins, comme Alekseï se plaît à me le rappeler lors de nos réunions trimestrielles pour discuter de l’état des affaires de la famille – réunions dont Dieu sait que je me passerai – j’ai huit heures de retard sur lui, ce qui n’est jamais bon pour les affaires. Vous me direz, et vous aurez raison, qu’il s’agit là d’une bien maigre différence. Cependant, lorsqu’une rivalité a atteint le niveau de celle entre mon aîné et moi, le moindre prétexte est bon pour enfoncer le couteau dans la plaie béante de l’adversaire. Une attitude dont je ne suis peut-être pas des plus fiers, mais dont je ne sais plus me passer. Heureusement, l’occasion de ce soir est trop belle pour me laisser envahir par les pensées désagréables qu’amène la simple évocation de l’existence d’Alekseï.

Ce soir voit en effet mon casino ouvrir. Ce fameux projet lancé en juillet dernier et mis enfin sur les rails par ma rencontre - pour le moins déstabilisante - avec Lilian d’Eyncourt a enfin abouti. Après cinq longs mois de travaux et d’une relation professionnelle dont je ne sais jamais trop quoi penser entre froideur inattendue et intimité mal placée, les locaux sont fin prêts et les invités ne devraient pas tarder à arriver. Le service marketing s’est en effet surpassé en envoyant des invitations à tout ce que New-York compte de beau monde au passé plus ou moins trouble. Bien entendu, tous n’ont pas répondu présents, la date étant souvent réservée pour d’autres types de festivité. Néanmoins, les cartons de réponse qui nous ont été renvoyés sont largement suffisants pour entamer les affaires dans d’excellentes conditions.

Je jette d’ailleurs un coup d’œil satisfait à la décoration. Après d’intenses séances de discussion avec Lilian, nous avons fini par nous mettre d’accord sur un style années 20, destiné à rappeler volontairement la période de la prohibition. Un décor trop moderne n’aurait de toute façon convenu à aucun de nos goûts. Il fallait néanmoins trouver le bon équilibre entre incitation à la débauche et retenue distinguée, pour ne choquer personne dès l’entrée. Nous aurons tout le temps de le faire plus tard, pour les clients intéressés. L’aura de mystère romancée de la période d’Al Capone nous a donc semblé convenir au mieux. Sans compter que l’ironie de la situation ne m’a pas échappé et pour autant que notre association n’ait pas dépassé certaines limites de confidentialité, je doute qu’elle ait réellement échappé à Lilian. L’art déco a donc toute sa place dans les vastes locaux de mon établissement situé sur les quais du Vernon Boulevard dans le quartier d’Astoria, donnant une vue imprenable sur l’Upper Esat Side juste de l’autre côté du chenal. L’achat du terrain m’a certes coûté une petite fortune, mais je ne doute pas un instant que les profits à venir seront largement à la hauteur de l’investissement premier. Car quoi de mieux pour donner des frissons à la clientèle qu’un lieu légèrement décentré et donc ô combien inquiétant mais toujours à portée de vue de leur terrain de jeux habituel ?

Pour ce qui est des festivités de ce soir, c’est Lilian qui s’en ait chargé, il s’agissait en effet là de la répartition initiale des tâches. Bien entendu, j’ai donné mon accord mais je ne m’y suis pas attardé plus que cela, manquant sincèrement d’imagination dans ce domaine d’où mon offre initiale au Petit Prince de l’Information. Cependant le passage incessant d’acteurs et actrices, courant dans tous les sens sans regarder où ils vont me rassure sur la qualité du spectacle principal qui aura lieu à 22h30, le temps de laisser aux derniers retardataires la possibilité de s’installer. Le casino ouvrira en effet ses portes à 21h30 pétantes, soit dans une demi-heure précisément. Dimitri semble d’ailleurs fort peu heureux de cela puisqu’étant en charge de la sécurité de l’évènement, il considère que la moitié des hommes à sa disposition sont de complets incapables. Rien de nouveau sous le soleil, vous dirai-je. Je suis même agréablement surpris qu’il soit satisfait de la moitié des montagnes de muscle à son service, c’est un quasi record sachant qu’il ne les a pas recruté lui-même.

Quoiqu’il en soit, pour le moment, la personne que je désirerai réellement croiser avant l’ouverture définitive c’est Lilian. En effet, son nom a été associé au projet tout du long, et nous nous sommes mis d’accord sur sa présence publique ce soir. Or, je ne le vois nulle part. Pas de quoi s’inquiéter encore vu l’heure mais je préfèrerai pouvoir échanger deux-trois mots avec lui avant de laisser les gens entrer si possible. C’est d’ailleurs précisément la raison pour laquelle j’ai choisi de venir non accompagné, plutôt que de m’assurer charmante compagnie à mon bras. En effet, outre l’inconvénient que toute femme invitée à ce genre de soirées se croit en droit d’exiger ensuite de vous une réelle relation – car non, je n’ai pas besoin de recourir à des escort-girls lorsque je désire avec une belle fleur à mes côtés de manière à rentrer dans les codes habituels de notre société patriarcale, merci bien – je n’aurai pas pu parler librement avec Lilian en présence d’un tiers. Et je ne connais aucune femme à qui je fasse suffisamment confiance pour la laisser seule entretenir mes tout premiers clients. Je suis donc seul ce soir, m’étant volontairement construit une image de beau célibataire ténébreux pour séduire ces dames en enfilant un costume taillé sur mesure qui fait ressortir ma carrure imposante, le tout rehaussé d’un foulard et un mouchoir rouge vermillon qui seraient surfaits en toute autre circonstance mais qui je ne doute pas un instant raviront les esprits étriqués de mes hôtes à venir, trop heureux d’y retrouver une référence à la mafia. Tout au moins telle qu’Hollywood se la représente.
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Lilian D'Eyncourt
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeLun 12 Mai - 21:23

Un an, songea-t-il. Les souvenirs de Sibérie le poursuivaient encore. Il était difficile de croire qu’il avait passé le dernier réveillon seul, à l’autre bout du monde, en compagnie de presque inconnus, rayés de sa vie trois semaines plus tard. Revenu d’entre les morts, tiré de son ermitage à travers l’Europe, Lilian avait replongé dans un rythme social intense. Décembre avait filé au son des appels téléphoniques et alertes de sa messagerie. Du matin au soir, il rédigeait des courriers, fixait des rendez-vous, gérait des entretiens selon des fuseaux horaires très stricts. Certaines nuits, évidemment, il coupait tout, prolongeait la pose une journée, en appréhendant l’avalanche de mails et sms qui déferleraient sur lui quand il oserait se connecter, puis se résignait, et rattrapait son retard en soupirant. L’organisation de la soirée d’ouverture d’un casino huppé en même temps que le nouvel an était un sujet brûlant. Certes, un bon moyen de marquer le coup mais, comme tout le monde le savait, les gens étaient deux fois plus excités et stressés pendant les fêtes de fin d’année, surtout lorsqu’ils entraient dans la catégorie « artistes ». Très pragmatique, comme à son habitude, il avait su gérer la crise au mieux, en brisant très sèchement ses contacts avec les harceleurs névrosés professionnels qui n’étaient pas fichus de prendre une seule initiative sans lui poser une centaine de questions. La plupart de ses collaborateurs avaient donc très clairement retenu une chose de ce projet : Monsieur D’Eyncourt ne doit Jamais être dérangé pour rien. Le soir du 24 d’ailleurs, son message avait été très clair, le premier à le relancer sur le travail, même « subtilement », après un « Joyeux Noël » de circonstance, risquait de perdre définitivement toute compréhension de sa part.

D’une manière générale, Lilian était très satisfait par cet excès d’animation. Tout ce qui lui permettait de ne pas songer à ses problèmes personnels était forcément positif. Il fuyait Mélo par « manque de temps », continuait de fréquenter Icare sans avoir à s’interroger sur l’avenir de leur relation (ils se voyaient trop peu pour y songer) et ses entretiens réguliers avec Nikolaï l’amusaient follement. Il rencontrait de nouvelles personnes, s’éloignait peu à peu des autres… Oui, un an après la Sibérie, tout allait parfaitement dans sa vie. Le renouveau était en marche, comme il se plaisait à le penser. Néanmoins, le britannique n’était pas encore prêt pour un basculement trop radical. S’il avait distribué de nombreuses invitations à des figures importantes de la société New-Yorkaise et plusieurs personnalités colorées dont la seule présence rendait tout plus divertissant, il n’avait pu se résoudre à venir seul. Au milieu de tous ces presque inconnus, il lui fallait quelqu’un de confiance, plus précisément, Délia, une amie très solidement attachée à son passé. Pour une fois, il avait évincé Mélo. Le choix de faire un nouvel an à part s’était décidé très simplement. Son complice avait l’intention de commettre toutes les folies et soupirait à la seule idée de devoir surveiller son attitude un soir où il avait toujours l’ambition d’être incroyablement décadent. « Mon pauvre Lilian, tu deviens tellement sérieux. Je te jure que tu seras vert de jalousie quand je te ferai le résumé de touuut ce qui s’est passé pendant que tu t’ennuyais avec tes mafieux russes. » Il l’avait laissé s’en persuader, plutôt que lui objecter que, du point de vue de n’importe qui, la mention de « nouvel an avec des mafieux russes » seule suffisait à rendre son programme terriblement excitant. Comme il tenait à garder sa relation avec Icare, il avait trouvé un compromis en s’éclipsant avec lui deux jours dans son appartement de la Nouvelle-Orléans pour les fêtes de Noël. Il avait laissé de côté l’homme d’affaires, renoué avec quelques fantasmes d’enfants en décorant son intérieur de guirlandes lumineuses et boules argentées. Il s’était oublié au point de sentir la honte lui monter aux joues en imaginant quelles visions consternantes Nikolaï pourrait découvrir dans ses souvenirs récents. Maudit télépathe.  

Délia lui avait réservé sa date depuis plusieurs semaines. Elle refusait rarement une occasion de le voir, surtout lorsqu’il la laissait près d’une année sans nouvelles. Ses relations avec la mutante n’avaient jamais été très simples. Ensemble, ils devenaient fusionnels, peu importait la durée de leur séparation et, pourtant, aucun mot n’aurait pu exprimer les sentiments qui les liait. Ce trouble mêlé à une entente aussi évidente, l’incitait à tenir la jeune femme à distance, comme cette amie très spéciale qu’on ne peut sortir de sa vie, tout en regrettant parfois de l’y avoir fait entrer. Plus proche de lui que n’importe qui, Délia connaissait les nombreux chemins escarpés de son existence, elle était même devenue une sorte de docteur particulier, une experte du gène x derrière le statut plus sobre d’entomologiste. Son évolution la fascinait, d’ailleurs, à un niveau presque gênant depuis qu’il lui avait confié les dernières manifestations troublantes de son sang. Ses diagnostics, toujours jetés sans la moindre compassion, l’effrayait d’autant plus qu’elle semblait véritablement curieuse de pouvoir les vérifier dans l’avenir. « Je crois qu’il grandit lui aussi, à sa petite échelle. Pour l’instant, ce n’est rien de plus qu’un parasite très instinctif, mais assez intelligent pour s’adapter, contourner chaque nouveau problème nuisible à sa survie… », lui avait-elle dit l’hiver dernier. Quand il lui avait demandé, inquiet, s’il devait s’attendre à le voir changer de comportement, elle s’était contentée de répondre, avec un sourire cruel : « Il semble que cela fasse partie de ta mutation. Et, comme tu le sais, le gène x peut faire des évolutions de plusieurs millénaires en quelques semaines. Il apprendra avec toi, si ce que tu vis le force à devenir plus intelligent, j’imagine. » Depuis, Lilian s’était appliqué à tout faire pour ne pas rendre son « sang » (si l’appellation tenait toujours…) plus malin. Il en prenait soin, le nourrissait régulièrement, restait attentif à tous ses besoin pour ne pas lui donner la moindre idée de rébellion, le laisser à sa léthargie ronronnante. Retrouver Délia ce soir ne l’inquiétait donc pas. Il n’avait rien à lui signaler et était très heureux de la décevoir.

En revanche, il s’exprima très longuement sur sa rencontre avec Nikolaï. Ses paroles ne dépassèrent pas le cadre de la relation humaine et très particulière qu’il entretenait avec le russe. Il savait qu’elle serait assez intelligente pour saisir les entrefilets de l’intrigue. Il savait également qu’elle n’aurait aucun intérêt pour leurs affaires. En dehors des mutations et des insectes, la jeune femme recherchait avant tout la distraction à travers les histoires croustillantes de Lilian. De ce fait, elle s’était montrée beaucoup plus pressée de savoir s’ils avaient déjà couché ensemble que de savoir d’où lui venait son argent. Elle était directement arrivée au casino en fin d’après-midi, au milieu de ce chaos général qui précédait généralement les spectacles : un tas de problèmes auxquels personne n’avait pensé se présentait au dernier moment, il fallait gérer les incompréhensions, les « Mais je t’avais dit de t’en occuper ! » « Pas du tout. Tu m’as dit que Michel le ferait… », enfin, les imprévus de dernière minutes qui rendait les techniciens à moitié fous, et les artistes plus désorientés que jamais. De fait, lorsqu’elle se présenta, Lilian avait depuis longtemps arrêté de marcher sur les pas des uns et des autres. Epuisé, il jouait les médiateurs depuis un fauteuil en vidant soigneusement une bouteille de vodka et ses réserves de meth. Très élégante, comme toujours, Délia s’était montrée dans une robe courte de soie émeraude qui mettait merveilleusement en valeur ses cheveux cuivrés et ses yeux verts. La matière fluide donnait à son corps très frêle et très pâle, un aspect fragile qu’il adorait. Avec son visage poupin, sa froideur naturelle et ses formes osseuses, l’entomologiste plaisait à sa manière… On ne pouvait pas dire que la plupart des hommes la contemplait avec une pointe de jalousie lorsqu’elle était à son bras. Leurs regards, néanmoins insistants, tenaient plus d’un mélange de curiosité, défiance et interrogation profonde… Ils ne savaient pas s’ils trouvaient cette femme désirable ou non, et Lilian appréciait cet effet. Il n’aurait, pour rien au monde, remplacé son « escort girl » habituelle par une bimbo sans saveur.

Quand tout le monde s’était accordé une pause pour dîner vers 19h30, Lilian et Délia s’étaient retirés dans une loge, comme deux adolescents à la recherche d’une bêtise excitante à commettre. Ils n’en ressortirent pas avant vingt-une heures, pour voir si les personnes les plus éminentes des célébrations étaient enfin arrivées. En apercevant Nikolaï, Lilian retira vivement la bouteille de champagne des mains de Délia, avant que celle-ci, les joues rosies, n’en porte le goulot à ses lèvres. Il lui souffla quelques mots à l’oreille, posa l’alcool sur le premier socle qui se présenta, et s’avança vers son collaborateur en se composant instantanément un sourire amène de circonstance. Il portait, pour sa part, une chemise noire élégamment coupée, faussement retroussée sur les avants bras et un jean gris foncé, une tenue assez simple qui, avec l’ajout d’une croix ansée à son oreille et d’un chapelet dont les perles colorées déclinaient une série de saints à son poignet, parvenait à lui donner un air de mauvais garçon. De son côté, le russe préférait un hommage discret à l’imaginaire mafieux. Etait-ce bien prudent ? Chacun ses vices après tout. Il le détailla avec un grand sourire. Délia, le fixa aussi froidement qu’intensément.

- Quelle élégance mon cher Nikolaï, serait-ce moi que vos yeux cherchaient si fébrilement ? lança-t-il à moitié ironique avant de lui désigner sa compagne : Je me suis permis d’amener une invité avec moi, Delia Sutherland, amie et éminente entomologiste dont vous n’aurez probablement aucune envie de connaître les travaux.
Un pli, dont il était difficile de saisir l’expression, tira les lèvres diaphanes de la jeune femme. Elle tendit une main nonchalante à Kolyakov. Ses bras étaient criblés de légères cicatrices, fines et blanches, parfois encore rouges, comme des morsures d’insectes. Plus gênantes étaient les trois traces de sang encore fraîches malgré une absence de blessure évidente que Lilian remarqua sur son cou. Il devrait les lui signaler rapidement avant que les gens ne posent des questions.
- Lilian m’a fait une présentation assez élogieuse de votre projet commun, je suis ravie de vous rencontrer, dit-elle sobrement.
- Bien sûr, si vous voulez discuter en privé avant que les hordes sauvages ne se déversent en ces lieux, Délia saura trouver d’autres compagnons de jeux. – Elle opina doucement. Et, sans transition : - Comme vous le voyez, l’ambiance est assez… énervée du côté de la scène. Les artistes adorent se faire quelques frayeurs avant de se produire mais, quoiqu’il se passe dans leur tête en cet instant, ils devraient être au point tout à l’heure.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Sam 31 Mai - 11:35, édité 1 fois
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Nikolaï M. Kolyakov
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 20 Mai - 18:26

Installé nonchalamment contre un des murs du casino, j’observe avec un détachement amusé la frénésie qui semble s’être emparée de tout un chacun au fur et à mesure que l’heure de l’ouverture approche. Avec un certain plaisir, je me fonds dans le décor, observant ce microcosme qui, tout frétillant qu’il soit, n’existait pas encore il y a de cela seulement quelques mois. C’est mon travail en chair et en os qui se démène devant mes yeux. Un sourire satisfait se fait traîtreusement sa place sur mes lèvres et j’évite de justesse de me faire écraser les pieds par une danseuse aux talons plus longs que sa main. Son physique avantageux me laisse pourtant froid et je continue à laisser mon regard déambuler, m’attachant aux détails incongrus. Tel cet ingénieur du son aux chaussettes clairement dépareillées ou cette serveuse qui, étrangement, ne semble nullement apprécier le fumet du plat qu’elle transporte jusqu’au buffet. Mais, ma divagation visuelle prend bientôt fin lorsque mon regard tombe sur la silhouette que j’attendais.

Instinctivement, je me redresse de toute ma hauteur, incapable de retenir cette volonté quasi inconsciente de plaire à mon auditoire, qui plus est lorsqu’il est de la trempe de Lilian. L’esquisse d’un sourire provocateur vient donc répondre à sa demande. A lui d’en tirer les conclusions qui lui plairont. Quant à moi, mon attention est déjà tournée vers cette invitée surprise qui me toise avec une froideur qui me rappelle les plus guindées de mes parentes. Mes lèvres s’étirent donc dans un sourire sans chaleur, purement professionnel, tandis que je m’empare de sa main tendue pour la porter à mes lèvres. Je doute que ce fût la réaction à laquelle elle s’attendait, à condition qu’elle se fût seulement attendue à quelque chose, mais peu m’importe. Je suis plus intrigué par sa présence aux côtés de Lilian que par son opinion de moi.


-Le plaisir est partagé Miss Sutherland.

Il n’est nul besoin de pouvoirs télépathiques pour se rendre compte que l’échange de formalités nous ennuie tout autant l’un que l’autre. Elle n’est là que pour se conformer aux convenances du jeu social, se contrefichant probablement royalement de mes projets, et je m’intéresse plus aux multiples marques sur sa peau qu’à ses intérêts profonds. Certes, la voir arriver aux bras de Lilian a attiré ma curiosité et, en une autre occasion, je n’aurais pas résisté à aller me délecter de ses plus noirs secrets mais, pour le moment, elle semble aussi pressée de nous quitter que moi d’avoir mon associé pour moi seul. Bien entendu, le parallèle avec un triangle amoureux ne m’a pas échappé mais, plutôt que de me repousser, l’idée m’amuse sincèrement. Force est en effet de constater que Mr D’Eyncourt laisse rarement qui que ce soit indifférent et je ne suis pas suffisamment naïf pour ne pas voir le petit jeu auquel il s’adonne avec moi depuis notre première rencontre mais l’attrait de la nouveauté m’interdit de mettre un nom précis sur la nature de notre relation. Le flou artistique a tellement plus de charmes. Sans compter que je ne suis pas prêt à laisser un tel électron libre s’approcher plus de moi qu’il ne l’a déjà fait. Ainsi, sautant sur l’occasion provoquée par le choix de formulation bien étrange de Lilian, je congédie Miss Sutherland avec autant de chaleur que de sincérité.

-Je vous souhaite de vous amuser.

Un instant j’observe sa silhouette quasi squelettique et pourtant si impactante se perdre dans la foule grouillante d’artistes et techniciens, ne sachant pas complètement si son départ me réjouit ou me frustre, avant de retourner mon attention sur les paroles de Lilian.

-Je vous crois sur parole. Le monde de la scène, avec ses multiples incohérences et contradictions, m’a toujours laissé perplexe mais, après tout, n’est-ce pas là ce qui fait son charme ?

La question étant rhétorique, j’enchaîne sur la suite, voulant régler les derniers détails techniques avant de pouvoir m’adonner librement à l’entertainment des clients.

-Le plan de salle pour le spectacle principal n’a pas été trop compliqué à terminer ? C’est, après tout, toujours un tel casse-tête de manier avec la délicatesse qu’il se doit les susceptibilités et préférences de chacun. Un faux pas et c’est le drame.

A vrai dire, durant un certain temps, nous avions même envisagé de laisser le placement libre mais, finalement, nous avons décidé de faire une exception pour la soirée d’ouverture. Histoire de marquer le coup. Chaque table est donc placée stratégiquement pour avoir une vue parfaite de la scène, le tout sans empêcher les discussions de se dérouler durant le reste de la soirée. Toute la difficulté a donc été de déterminer qui placer à côté de qui. Pire qu’un mariage. Car les conséquences détermineront les retours futurs de nos hôtes de ce soir. Pourtant, j’ai une pleine confiance en nos capacités à gérer la situation. Entre le réseau de sources indiscrètes de Lilian et mes propres moyens d’obtention d’information, nous avons réussi à régler les principaux problèmes d’affinités. J’ai cependant laissé le peaufinage à Lilian et c’est de ce dernier que je m’informe désormais. Car, si problème il y a, nous sommes encore à temps de le régler.

En effet, si je suis en réalité plus impulsif que je ne le laisse habituellement paraître, en affaires, je ne laisse jamais rien au hasard. Le perfectionnisme est incrusté dans mes gènes, engendré par des années d’une éducation sans concession aucune. Le moindre détail se doit d’être savamment anticipé et chaque situation a sa solution déjà préparée. Bien entendu, il s’agit là d’un scénario idéalisé et la réalité est toujours plus floue mais cela ne m’empêche pas de chercher toujours à m’approcher le plus possible de la perfection. C’est ce qui me rend insupportable aux yeux de tant de mes collègues et irremplaçable aux yeux des autres. J’en demande autant des autres qu’à moi-même. Et sachant mon degré de narcissisme, ce n’est pas rien.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeSam 31 Mai - 13:21

Sans perdre son sourire, Lilian se laissa distraire par le jeu de politesse entre Délia et Nikolaï. Il vit la jeune femme se raidir d’incompréhension en recevant un baisemain, et son collaborateur s’attarder sur les irrégularités de sa peau. Il imaginait avec plaisir les questions qu’il devait se poser en cherchant à saisir le rôle que s’apprêtait à jouer cette étrange compagne entre eux. Très sincèrement, le britannique n’avait rien envisagé de précis. Il lui présentait juste l’un de ses meilleurs atouts, une femme intelligente, fidèle, dont les charmes glacés avaient figé plus d’une ardeur. A observer la manière qu’il avait de la détailler, de la suivre du regard alors qu’elle s’éloignait, d’un pas droit assoupli par l’alcool, Lilian ne doutait pas qu’il pût la trouver attirante. C’était un homme curieux, elle avait tout pour le piquer au plus profond. Mais Délia n’avait rien de la séductrice sournoise sous des dehors guindés. Elle n’était pas de ces fiertés vaniteuses qui aiment se faire désirer et brisent le masque des apparences au moindre compliment. Sa beauté sauvage ne mentait pas. Il avait vu tellement de prétendants se faire éconduire, qu’il n’aurait su dire s’il était possible d’atteindre son cœur. Miss Sutherland s’attrapait par des moyens détournés. On ne la choisissait pas, elle vous élisait si elle vous estimait digne de son intelligence, certainement pas de son amour. Mais, la plupart du temps, elle avait des questions plus importantes à traiter. Un intérêt tout « scientifique » l’inciterait peut-être à approcher Nikolaï. Peut-être parce que son ami s’intéressait à lui voudrait-elle entrer à son tour dans la partie… Il venait de poser sur l’échiquier un pion imprévisible, dirigé par un esprit qu’il n’avait jamais véritablement pu saisir.

Et, soudain, comme si les présentations n’avaient jamais eu lieu, Nikolaï s’inquiéta des placements. Malgré la légèreté de sa tournure, Lilian le devinait encore un peu tendu. Au cours de ces derniers mois, il avait pu noter une tendance à vouloir toujours tout maîtriser, au détail prêt. Sa gestion des événements étaient très éloignée de la sienne. Plus désinvolte, Lilian surveillait de loin. Il n’avait aucun problème pour déléguer les choses et pour rejeter la faute sur les autres quand une erreur souillait tout « son » travail. Son talent relevait plus de sa capacité à inspirer la peur à ses associés que de son organisation. Simple question de méthode. Avec le russe, bien sûr, il veillait à ce qu’aucune poussière ne se glisse au milieu des préparatifs. Ce soir, il jouait aussi sa réputation, et le problème des placements avait nécessité quelques réunions de la plus haute importance avec ses meilleurs collaborateurs. Ils avaient été jusqu’à engager des détectives privés pour s’assurer discrètement qu’aucun secret bien gardé ne viendrait corrompre la bonne ambiance d’une table ou, au contraire, pour savoir quelles personnes avaient les meilleures chances de s’entendre. Si quelques associations pouvaient se sceller après quelques verres de champagnes, les convives ne garderaient qu’un meilleur souvenir de l’inauguration et percevraient le casino comme un lieu où l’on pouvait rencontrer du beau monde, faire des affaires tout en prenant du bon temps.

- Vous savez bien, Nikolaï, que je n’aurais rien pu laisser au hasard et risque que les égarements de l’alcool ne fassent éclater une sombre histoire d’adultère au milieu de la soirée, dit-il d’une voix onctueuse. Bien sûr, nous ne sommes jamais totalement à l’abri d’un coup d’éclats… Les gens sont si peu disciplinés. Vous leur assignez une place, et vous les trouvez trois tables plus loin une heure plus tard. Si certains préfèreront sans doute céder à de futiles affinités, je ne doute pas que la plupart des convives s’entendront avec leurs voisins. Cela chasse-t-il vos principales inquiétudes ou avez-vous d’autres requêtes urgentes à me faire ?

Il leva un regard vers la scène. L’arrivée du grand patron avait signifié aux artistes qu’il n’était plus temps de réclamer un énième dernier réglage. Tous avaient retrouvé leurs loges ou discutaient en petit groupes comme les clients les plus banals du monde. On reconnaissait cependant des personnalités de taille. Tout en respectant ses goûts, Lilian avait opté pour une sélection de musiciens, danseurs et comédiens triés sur le volet, pour lesquels les médias culturels les mieux avisés avaient la plus grande bienveillance. Parmi quelques références pointues qui sauraient séduire les connaisseurs, on trouvait bien sûr de l’un peu plus « commun », les noms qui étaient les plus certains de revenir dans les bouches de ceux qui vanteraient la soirée à leurs amis, et de tout un grand public qui regretterait de voir leurs personnalités préférés se produire dans un endroit où ils ne pouvaient réclamer d’invitation. Ainsi, la réputation du casino touchait déjà toutes les couches éduquée de la société et rayonnait bien au-delà de New-York. D’emblée, le lieu s’imposerait comme l’endroit où venait se produire les meilleurs, de quoi faire de l’ombre à toutes les salles qui visaient le même type de programmation avec un budget plus modeste.
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Nikolaï M. Kolyakov
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeVen 6 Juin - 10:31

Durant les premiers mois de notre association, j’ai appris à me fier de la confiance en lui de Lilian. Il a horreur de l’échec et décevoir les attentes qu’il a lui-même fixées ne s’accorde nullement avec son caractère. Il en va d’une sorte de fierté surdéveloppée qui l’amène à user de tous les moyens à sa disposition et plus pour obtenir le résultat voulu. Ce n’est en rien similaire à mon perfectionnisme maladif, c’est plus une question de tempérament. Son besoin de réussite découle ainsi moins d’une volonté de contrôle que d’un désir intrinsèque d’être admiré. Il a besoin d’être reconnu car il s’abreuve du respect des autres. Par conséquent, il s’assure toujours que ses projets voient le jour dans les meilleures conditions possibles. C’est donc pour cela que, lorsqu’il me déclare que tout est réglé côté placement, je ne mets pas sa parole en doute. Avec d’autres, j’aurais exigé plus de détails, un exemple concret, un détail matériel, mais, avec lui, sa certitude nonchalante que tout ira bien me suffit.

Parfois, je m’en inquiète. Il aura suffi de quelques mois pour qu’il mette à bas une partie de mes défenses intrinsèques. Je me surprends ainsi plus souvent qu’il ne conviendrait à lui faire confiance, sans jamais remettre en doute sa parole, une attitude qui ne me ressemble en rien. Je ne sais si c’est l’incapacité à me rendre à ma guise dans son esprit sans connaître les conséquences qui pourraient en résulter au vu de l’inconnue majeure que représente son pouvoir ou bien son talent naturel pour mettre les gens à l’aise qui ont provoqué ce changement inattendu mais plus les jours avancent et plus je dois faire d’efforts pour ne pas le laisser s’approcher plus que de raison. Parallèlement, la possibilité de déléguer sans arrière-pensée une partie importante du travail sur lui s’est révélée un immense atout.


-Rien qui ne me traverse l’esprit maintenant. J’ai fait une dernière inspection des cuisines il y a une heure et tout semblait en route, quant au personnel des tables de jeu et à la sécurité, ils sont tous à leur poste. Les choses me paraissent donc se dérouler aussi bien qu’on puisse l’espérer en prenant en compte l’imprévu qui s’invite toujours sans être le bienvenu.

Car, tout maniaque du contrôle que je puisse être, je n’en suis pas pour autant naïf. Je sais pertinemment que le hasard fait toujours une apparition inattendue mais c’est en engageant les personnes les plus à même de s’y adapter et d’improviser que l’on y fait face. Après tout, la perfection a un petit côté ennuyant. Ce qui assure la pointe de piquant nécessaire à toute situation, c’est bien le grain de sel qui sans faire dérailler l’ensemble oriente l’engin dans une direction légèrement différente de l’originale, n’est-ce pas ?

-Il ne me reste donc plus qu’à vous proposer de me rejoindre à l’entrée – avec ou sans votre accompagnatrice, selon votre préférence - dès que vous serez prêt. Les portes sont sur le point de s’ouvrir et il ne conviendrait pas de décevoir notre public. Car je suis certain que bon nombre d’entre eux seront venus tout autant pour se faire une première impression du nouveau lieu de débauche chic de la Grosse Pomme que pour pouvoir déclarer au prochain dîner mondain qu’ils ont eu l’occasion de serrer la main du Lilian d’Eyncourt.

Je laisse échapper un sourire mi amusé, mi narquois.

-C’est que votre réputation sulfureuse fait presque de vous une attraction en soi.

Raison, entre autres, pour laquelle j’ai voulu associer son nom au projet. La bonne société peut en effet apprécier les délires décadents d’un jeune magnat du gaz qui décide d’ouvrir un casino pour passer le temps mais elle est sûre d’être happée par l’aura magnétique d’une des personnalités culturelles les plus influentes de la ville. Car, pour autant qu’ils refusent de le reconnaître, plus d’un bien-pensant qui franchira le seuil de l’établissement d’ici quelques minutes éprouve la même fascination pour tout ce que représente Lilian que moi. Cet air désinvolte drapé de quelque chose de profondément malsain que l’on ne sent jamais complètement mais dont il est quasi impossible de se débarrasser totalement est ce qui attire à lui les gens comme la lumière du foyer attrait les éphémères papillons jusqu’à leur brûler les ailes.

Satisfait de mon compliment aux allures de moquerie, je lui adresse donc un dernier hochement de tête amical en guise de signe d’adieu et me dirige vers l’entrée. Libre à lui de m’y suivre ou d’aller régler les derniers soucis requérant sa présence d’abord. Il reste après tout encore dix minutes avant l’ouverture officielle et il ne me fait pas l’effet d’être de ceux qui terminent tout à l’heure mais plutôt d’être du genre influencé par tous les artistes qu’ils côtoient qui aiment tant se faire attendre. Je prends donc place à droite des hautes portes en chêne et inconsciemment mon regard cherche de nouveau la silhouette excentrique de Miss Sutherland. Je la trouve adossée au buffet, grignotant sans grande conviction un amuse-bouche sûrement volé au plateau d’un serveur de passage. Un instant, je m’imagine profiter de son manque d’attention pour m’immiscer dans son esprit mais, sans compter la difficulté supplémentaire que les passages incessants de gens dont les pensées qui brouilleraient la connexion directe suppose, je ne veux pas perdre le contact avec la réalité si peu de temps avant le grand début. Simple précaution élémentaire.
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Lilian D'Eyncourt
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeLun 16 Juin - 14:28

Nikolaï avait un certain don pour la flatterie, et il y était plus sensible qu’il ne le laissait paraître. En lui rappelant qu’il serait sous le feu des projecteurs ce soir, le russe aurait peut-être une chance de le plier à un jeu social auquel il sacrifiait très peu. Attendre devant une porte ? Serrer des mains ? Se montrer, d’entrée de jeu, disponible, soucieux d’accorder une importance égale à tous ses invités ? Ce protocole tombait à côté de ses habitudes. Il n’avait certainement pas mérité sa réputation sulfureuse à force de courbettes. Cependant, l’idée d’affirmer son succès auprès de son partenaire lui plaisait beaucoup. Et, quoique nombre de convives fussent aussi bien attirés par la nouveauté du lieu que par ses extravagances, tous ne le portaient pas dans son cœur. Lilian savourait d’avance les visages désespérés de ceux qui espéraient participer à la soirée sans avoir besoin de le saluer.

- Allons, ne m’espérez pas trop vite à vos côté, je craindrais de vous voler la vedette, murmura-t-il, le regard brillant.

Il n’avait pas réellement d’autres choses à vérifier avant le début des hostilités. La gestion de la salle n’était plus son affaire depuis deux heures. Mais il préférait garder ses distances avec les premiers arrivants, ne surtout pas donner l’impression d’attendre tous ces êtres dont il se fichait. Ne venaient-ils pas pour lui ? Il n’avait aucune raison de remercier des personnes qui, en bonne connaissance de cause, avaient préféré son divertissement à ceux des autres. Il attrapa une coupe à champagne et guetta au loin une arrivée opportune en gardant un œil sur Nikolaï. Ce dernier le surveillait aussi, il le savait. Il restait également attentif aux déambulations ennuyées de Délia. Oserait-il percer son esprit ? Lilian avait pris un risque en l’approchant d’une amie intime. Néanmoins, même si le télépathe s’autorisait une intrusion, il n’aurait pas le temps, pendant la réception, de récupérer des informations intéressantes. Et la jeune femme connaissait les risques. Il la savait assez pudique pour refuser de s’isoler avec un individu capable de découvrir ses secrets les mieux cachés. Il regrettait presque d’avoir laissé découvrir le potentiel danger d’une mutation à sa compagne. Si elle ne détenait pas tant d’informations sur lui, il aurait aimé ouvrir une fenêtre sur les brumes de ses pensées.
Il la rejoignit d’un pas tranquille. Elle lui tourna un sourire mutin, et lança :
- Charmant. Et il a l’air si sérieux… Aurais-tu tiré une croix définitive sur les partenaires extravagants ?
- Tu sais bien que jamais rien n’est définitif avec moi Délia, répliqua-t-il. Mais certaines choses me lassent. J’ai besoin de nouveauté, moins d’agitation et plus de danger.
- Cela se tient. Je serai prête à te rayer de ma vie dès que ta tête sera mise à prix.
Elle lui prit le verre des mains et le vida d’une traite. Ironique, Lilian renvoya :
- J’étais sûr de pouvoir compter là-dessus. Délia, je ne mérite vraiment pas une amie aussi dévouée que toi. Tu voudras bien m’épauler devant une horde d’admirateurs prêts à tout pour arracher des lambeaux de mon corps ?

Il attrapa son poignet osseux et l’attira vers les premiers invités. Son œil s’affuta, à la recherche d’une première cible, un homme blond guindé, affligé d’un début de calvitie. Terrence Thompson le croisait dans la plupart des soirées mondaines. Auteur médiatisé d’une littérature socialo-philosophique bas de gamme, il était assez reconnu pour posséder sa tribune dans un journal concurrent. Leur première rencontre ne s’était pas nécessairement mal passée. Thompson, de dix ans son aîné, avait montré beaucoup de curiosité, et de condescendance, pour ce jeune anglais qui avait la folle ambition d’investir dans des groupes américains. Il avait essayé d’en faire son élève, de l’initier à ce monde cruel, en gardant la ferme conviction que le jeune D’Eyncourt ne resterait jamais rien d’autre qu’un doux rêveur agréable à fréquenter. En voyant le piège grossier se tisser autour de lui, Lilian l’avait flatté dans ce sens, allant jusqu’à convaincre le parasite qu’il tombait amoureux de lui. Il avait troublé son hétérosexualité convaincue jusqu’à l’inciter à lui faire des avances qu’il avait refusées avec une surprise feinte en déclarant qu’il n’avait jamais eu aucune idée déplacées à son sujet. Une querelle interminable s’ouvrit alors. Victime auto-désignée, Terrence était ce genre de salaud qu’il ne se lassait pas de tourmenter. Toute l’énergie que ce dernier mettait à entretenir sa haine était touchante. Et, preuve de tous ses efforts, l’écrivain répondait présent ce soir.

- Oh mon ami ! s’exclama-t-il en ouvrant les bras. Combien de fois faut-il que je vous le dise, votre présence m’enchante presque autant que ma vue vous déplaît. Aurais-je le plaisir d’avoir une tribune qui s’appliquera, encore, à dépeindre toute mon immoralité ?
- A votre place je ne paraderais pas tant D’Eyncourt. Je ne suis pas venu profiter de vos spectacles de mauvais goûts, et j’aurais bientôt suffisamment de matière pour faire cesser toutes vos magouilles crapuleuses, dit-il entre ses dents mais assez fort pour être entendu des personnes les plus proches.
- Par pitié, ne recommencez pas avec ces affaires, répondit-il d’un air affligé. Tout le monde ici sait comme les choses se sont mal passées la dernière fois que vous avez eu la fantaisie de calomnier son mon compte !
Et disant cela, il se tourna vers d’autres arrivant qui eurent un sourire amusé à l’évocation du scandale qui s’était retourné contre l’auteur l’été dernier. En ignorant une éventuelle répartie, il serra les mains qui se présentèrent à lui, adressa quelques sous-entendus complices à ceux et celles qui jouaient un jeu de séduction avec lui et attira de nombreuses oreilles indiscrètes en présentant, sous une impulsion soudaine, Délia comme sa femme à un homme qui la rencontrait pour la première fois.
- Oui, depuis quelques semaines maintenant. C’était une nuit à Vegas, avec une strip-teaseuse sur le retour déguisée en Madonna. Le pire mariage de ma vie, je ne ferai plus jamais confiance aux goûts de Délia, surtout dans un état aussi avancé d'ébriété.
Cette dernière pouffa de rire derrière sa main, pendant qu’une large frange des spectateurs hésitait entre la plaisanterie ou la vérité. Il y avait déjà matière à lancer une rumeur toute la nuit.

En fait, Lilian ne resta pas exactement près de l’entrée du casino. Il allait d’une personne qui happait son regard à l’autre sans s’intéresser à la moitié des arrivants et en évitant soigneusement les bavards qui brûlaient d’en savoir plus sur sa nouvelle association. Une vingtaine de minutes plus tard, il revint près de Nikolaï, qui tenait une conversation polie avec un couple, et attendit que l’entretien se termine en allumant une cigarette. Il l’écrasa machinalement du bout du doigt quand son associé se retourna vers lui et demanda comme un enfant impatient :

- Pouvons-nous rentrer ou faut-il encore honorer l’arrivée de la seconde moitié de la liste ?


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Mer 25 Juin - 19:28, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeVen 20 Juin - 8:39

Me voler la vedette ? En voilà une drôle d’idée. Son existence est par essence plus intéressante que la mienne. Du moins aux yeux du public. Si je l’ai invité c’est donc bien pour qu’il me « vole la vedette » et qu’il rende la soirée plus attractive aux yeux des invités. Ce qui ne signifie pas pour autant que j’ai besoin de lui pour entretenir mes hôtes. Je lui adresse donc un signe de la main en guise d’au revoir et me dirige vers mon poste. L’attente ne dure pas longtemps car voilà que les deux gardes à l’entrée actionnent le mécanisme d’ouverture des lourdes portes d’entrée et la ruée commence. Bien entendu, il s’agit d’une ruée de haute catégorie, les invités entrent donc dans l’ordre et sans se bousculer mais l’impression de cohue qui en ressort n’en est pas moindre. Je me décale donc sur le côté pour leur laisser le passage, préférant que les intéressés viennent me voir d’eux-mêmes plutôt que de m’abaisser à aller lécher les chaussures cirées de tout un chacun. La partie mondaine de la soirée sera déjà bien assez lourde comme cela.

Le premier à m’approcher, à ma grande déception, est un associé de longue date de mon père. Un sexagénaire texan dont l’aïeul s’est rempli les poches avec le pétrole et qui a continué la lignée depuis. A vrai dire, j’avais envoyé l’invitation à son domicile plus par politesse qu’autre chose, je ne m’attendais pas à le voir débarquer. Mais, apparemment, à l’écouter déblatérer sur sa vie, il était à New-York pour affaires et l’idée d’une soirée au casino a attiré son attention. Je réponds donc avec un intérêt poli mais feint à chacune de ses remarques, tout en cherchant discrètement des yeux un regard à happer pour attirer près de moi d’autres invités qui pourraient me tirer de ce mauvais pas. Mais il faut croire que Donald Gruff est suffisamment connu et respecté en ce monde pour que personne ne juge opportun de nous interrompre. Du moins jusqu’à ce que sa femme et une jeune fille ravissante fassent leur apparition à ses côtés.


-Veuillez nous excuser du retard Mr Dmitriev, Elissa n’en finissait pas de se préparer.
-Comme vous et sa mère alors très chère.
-Donald !

L’exclamation outrée de Mrs Gruff tire un gloussement étouffé à l’adolescente et je lui lance un clin d’œil discret, appréciant également le potentiel comique de la situation. Rien de plus amusant qu’un vieux couple qui ne s’assume pas. Mais, je reprends bien vite mon sérieux lorsque Gruff m’adresse à nouveau la parole.

-Voici ma petite-fille la plus jeune, Elissa. Elle vient d’entrer à Columbia cette année.

Elle est déjà à l’université ? Bon sang de bon soir je ne lui aurais pas donné plus de seize ans. Je ne perds cependant pas mes moyens et lui baise la main avec délicatesse, recevant une très légère rougeur de sa part en récompense. Il faut croire que la demoiselle en a vu d’autres dans le milieu où elle a été élevée.

-Toutes mes félicitations mademoiselle.
-Oui, nous sommes tous très fiers d’elle. J’aurais personnellement préféré qu’elle ne s’éloigne pas tant de la maison mais puisque c’est son choix.

Je ne rate pas la moue contrariée d’Elissa et en déduit facilement que la résignation de Gruff n’a pas dû être si évidente à obtenir, mais je fais celui qui n’a rien remarqué. Ce ne sont pas mes affaires. Heureusement, après quelques minutes de plus, Mrs Gruff exige une boisson et le trio se dirige vers le buffet. Un instant je plains la jeune femme – elle est bonne pour s’ennuyer terriblement ce soir – mais j’oublie bien vite la demoiselle et ses problèmes lorsque je vois arriver la fournée suivante de mes hôtes. Qu’importent les soucis des autres lorsque l’on possède les siens propres ? Je m’empare donc d’une coupe de champagne au passage pour me donner du courage et continue à adresser compliments surfaits et autres poignées de mains à tirelarigot. Je suis présenté à deux autres héritières, toutes deux bien moins charmantes et dégourdies que ne m’a semblé Elissa, mais j’ai perfectionné depuis longtemps l’art de détourner la conversation lorsque cette dernière ne me plaît pas alors je m’en donne à cœur joie. Je n’ai aucune intention de m’attacher un boulet au pied et une femme au bras pour le moment. Et, même si l’occasion venait à se présenter, ce n’est pas dans ce milieu guindé que je la chercherai.

J’ai accepté une demi-douzaine d’invitations à tout un tas de galas et bals en tout genre lorsqu’enfin des invités intéressants se dirigent vers moi. Galina Olevna, la meilleure mezzo-soprano de sa génération à mon humble avis et son mari et violoniste de génie Albert Thames. Je les ai rencontré il y a de cela dix ans à une soirée organisée par Mère qui est une fan inconditionnelle de la voix de Mrs Olevna et depuis j’aime à penser que nous entretenons une véritable relation d’amitié malgré notre différence d’âge. Après tout, Albert et moi éprouvons le même genre d’ennui pour les soirées mondaines et c’est boudant tous les deux dans un coin que Galina nous retrouva ce jour-là, entamant immédiatement une discussion avec l’adolescent renfrogné de la maîtresse de maison comme si c’était la chose la plus naturelle du monde. Il faut dire aussi que cette femme a une force de caractère immense.


-Alors, mon petit Kolia, tu es enfin entré dans la cour des grands !
-Galina, mon amour, Nikolaï n’est plus un enfant, tu devrais peut-être te retenir de l’appeler ainsi en public tout au moins.
-Ne t’inquiètes pas Albert, il n’y a qu’elle qui peut m’appeler comme ça, répondis-je amusé.

Et c’est vrai. Tout comme j’ai horreur que mon frère use de ce surnom enfantin, la façon maternelle dont Galina l’utilise ma toujours plu. Elle est tellement plus chaleureuse que ma propre mère.


-Alors c’est vrai que les Hooks jouent ce soir ?


Je réprime un fou rire devant l’air de jeune fille en pamoison de Galina et le visage résigné d’Albert, j’avais oublié que Galina était fan de pop-rock malgré son choix de carrière, ce qui n’est clairement pas le cas de son mari qui ne jure que par le classique.

-Absolument. Si tu veux, je pourrais même m’arranger pour te récupérer un autographe du chanteur à la fin du spectacle.
-Ouiiiiiiii.
-Ne l’encourage pas je t’en prie.

Cette fois-ci je rie réellement et l’excentrique couple prend congé, bien vite remplacé par un autre bien plus ennuyant. Je ne réprime donc pas mon soulagement lorsque Lilian fait son apparition une fois ces derniers partis.

-Comme dit le proverbe : « Après l’heure, ce n’est plus l’heure ». Je considère qu’on a assez donné de nos personnes, alors allons-y.

Je m’apprête donc à rentrer, accompagné du Britannique, lorsque mon attention est attirée par la façon dont il a éteint sa cigarette. S’il avait été humain, il se serait nécessairement brûlé, j’en déduis donc aisément qu’il vient là d’user de sa mutation sans s’en rendre compte. Le problème étant que les possibilités concernant la dite mutation sont encore bien trop nombreuses. Régénération cellulaire ? Immunité au feu ? Quoiqu’il en soit, j’ai bien l’intention d’en apprendre plus au cours de la soirée. Et pour ça, il faut que je reste à ses côtés. Jetant donc un regard à ma montre, je constate qu’il reste un peu moins d’une demi-heure pour le début du spectacle principal, je m’adresse donc à Lilian.

-Une petite partie vous intéresse avant le grand show ? Roulette ? Blackjack ? Autre ? Je suis prêt à tout pour me changer les idées à vrai dire. A l’exception de la discussion avec Mrs Olevna et Mr Thames, je me suis ennuyé à mourir. Il faudra que je vous les présente d’ailleurs, je suis sûre que Galina vous plairait.

Je ne propose pas de partie de poker malgré mon goût pour le jeu. Tout d’abord parce qu’on n’a pas le temps avant le spectacle et que, même si rien ne nous oblige à nous y rendre, je préfère qu’on soit présents tout au moins au début pour constater que l’organisation suit son cours. Et, deuxièmement, car Lilian connaissant mon pouvoir, il risque fort de refuser.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMer 25 Juin - 22:57

Issus de milieux très différents, Lilian et Nikolaï s’étaient très naturellement partagé l’accueil des invités. Plus qu’une inauguration, la soirée fêtait aussi la mise en commun des deux mondes. Le britannique apportait une foule tapageuse composée de journalistes, d’artistes en vogue, de publicitaires, d’héritiers et d’entrepreneurs excentriques, et le russe rééquilibrait la balance avec les figures d’une haute-bourgeoisie plus digne, dont les traits évoquaient souvent des origines soviétiques. Malgré toutes ses simagrées, Lilian parvint à saisir quelques occasions pour étudier l’entourage de son associé à la dérobée. Il retint quelques visages, rien de précis. A cette heure, chaque inconnu semblait plus aimable que le précédent. Il était difficile de savoir où se trouvaient les individus potentiellement dangereux, ou les pièces maîtresses d’une future intrigue. Il se réjouissait cependant de toutes les perspectives de rencontres à venir. Après sept années à fréquenter les mêmes réceptions, New-York n’était plus une ville si vaste qu’elle en avait l’air. Les combinaisons possibles finissaient par se raréfier, ou, simplement, soulever moins d’excitation qu’au début. Où était le plaisir de l’attente, de la surprise, lorsqu’on maîtrisait toute la chaîne sur le bout des doigts ? Ici, la mise était énorme, et il avait fait ses jeux, avec une mise qui dépassait de loin celle de quelques jetons colorés sur un tapis vert. En réalité, absolument tout pouvait lui arriver au cours de la nuit. Il connaissait d’avance les pires scénarios et, pourtant, ses sourires, ses plaisanteries légères et son insouciance apparente renvoyait l’image d’un homme étourdi par un heureux moment de gloire.

Quand il renonça à ses obligations sociales pour se glisser entre les interlocuteurs de Nikolaï, ce dernier ne se gêna pas pour se soustraire à une discussion qui ne semblait pas vraiment le passionner. Pris dans son élan, rendu moins méfiant à force de jouer à distraire l’assistance, Lilian releva à peine l’utilisation de son pouvoir. Pour éteindre une cigarette, il lui suffisait de recouvrir son doigt d’une pellicule de sang, rien de plus simple avec ses capacités mutantes. Il songea néanmoins en rangeant la tige à peine consommée dans sa poche qu’il devait veiller à ne pas la rallumer en public, son extrémité rougie risquait d’attirer la curiosité de son associé. A l’inverse de la plupart des personnes présentes, son collaborateur ne laisserait passer aucune bizarrerie. Ils étaient aussi là pour ça, pour se sonder l’air de rien dans un contexte faussement décontracté. Nikolaï le lui rappela efficacement lui proposant une partie sur le matériel de casino, un excellent prétexte pour continuer à discuter en feignant d’être trop occupé pour s’intéresser à d’éventuelles sollicitations, tout en ayant l’air impliqué dans un groupe. En effet, peu de parties se lançaient à deux personnes et il y aurait bien de véritables passionnés des mises et paris pour se jeter sur les tables à peine entrés. Cependant, voulaient-ils supporter aussi la conversation des participants ? Tandis que Lilian réfléchissait à la meilleure réponse, son attention fut ravivée par un nom, une certaine Galina qui lui plairait.

- M’avez-vous donc si bien cerné que vous auriez déjà des amis, des prétendantes à me présenter ? répliqua-t-il amusé. Du reste, je ne suis pas contre un blackjack et je vous propose de choisir avec moi les cinq autres participants. Tu te joindras bien à nous Délia ?

La jeune femme, qui regardait distraitement ailleurs, apparemment très intéressée par une proche conversation, hocha doucement la tête. Son regard changea du tout au tout, passant de l’indifférence à une hostilité plus expressive quand une grande femme très mince, très élégante, le corps découpé dans un serre-taille étroit se dirigea d’un pas vif vers eux. Naturellement blonde mais toujours teintée de noir, vêtue à la mode d’années folles revisitées par les meilleurs créateurs du moment, Elena était une de ces riches héritières moitié-mannequin moitié-poseuse. Elle se donnait un style pour faire parler d’elle, et ramassait d’importants droits sur les photos dérivées en toutes sortes de produits grâce à un physique avantageux qui séduisait tant les femmes, folles de ses tenues, que les hommes. Redoutable en affaires, la jeune fille – elle n’avait en réalité que vingt-deux ans – manquait encore beaucoup de maturité sur le reste. Lancée dans le cinéma trop tôt, elle faisait tout pour s’accrocher à une reconnaissance qui lui semblait due, et apparemment peu prisée par les réalisateurs depuis ses quinze ans, qui considéraient son heure passée, elle avait trouvé avec les photos pin-up un moyen plus certain d’attirer l’attention. Vendre son corps en se créant une personnalité faussement originale était porteur, quand on avait une excellente équipe pour mener la barque. Lilian la connaissait depuis deux ans, à cause d’une réception assez floue où elle avait décidé que l’action était de son côté et refusé de le lâcher d’une semelle, pour rire joyeusement à toutes ses facéties. Derrière les projecteurs, dans l’intimité, Elena était une fille assez ravagée, dans une phase où il était difficile de dire si elle tirerait sa révérence du sang plein le nez en étalant une salive bilieuse sur une cuvette de toilettes ou si, elle réussirait à passer la trentaine et devenir une des plus brillante business-woman de sa génération. En attendant, son tempérament destructeur s’était entiché de Lilian et ils s’étaient épisodiquement retrouvés pour partager une nuit, généralement quand sa relation tordue du moment venait de lui briser le cœur et qu’elle ne voulait plus y penser, ou imaginait se « venger » en allant voir un autre. Et, rivalité féminine obligeant, Délia ne semblait pas apprécier son intrusion. Elle aima encore moins le baiser qu’elle donna à ses lèvres sans s’inquiéter d’interrompre la discussion, et que Lilian reçut d’ailleurs le plus naturellement du monde.

- Je suis tellement contente de te voir ! S’exclama-t-elle vivement. Et… Wah ! Je viens d’arriver mais ça a déjà l’air grandiose, j’ai encore du mal à croire que tu te sois lancé dans un plan pareil !
- Le hasard, sourit-il.
- En tout cas c’est gentil de m’avoir invitée, depuis le temps que je recevais plus de nouvelles, je commençais à m’inquiéter, et puis il paraît que tu as quelqu’un maintenant, c’est vrai ? J’ai même entendu des gens dire que tu allais te marier en venant, ne me dis pas que tu as décidé de te ranger quand même ?!
- Les gens disent beaucoup de choses… Beaucoup de bêtises surtout…
Il répondait sobrement pour ne pas lui redonner la réplique et risquer de lui laisser lâcher trop d’informations sur sa vie privée. Ce n’était pas forcément avec l’intervention d’une post-ado déjà sous un excitant qu’il voulait s’ouvrir un peu plus à Nikolaï. D’ailleurs, en parlant du russe, il passa un bras autour d’Elena et la força à s’intéresser à son entourage :
- Mais avant le début des festivités, laisse-moi te présenter Nikolaï Kolyakov, mon très cher associé, et Délia… Tu connais Délia non ?
Soudain, un éclair de compréhension, appuyé par le regard froid de la rousse, passa dans les beaux yeux turquoises d’Elena. Si elle n’avait jamais rencontré l’autre femme, il lui avait déjà donné son nom un soir où ils s’étaient amusés à échanger sur leurs amants réguliers.
- Oooh ! Oh oui Délia ! Vraiment enchantée de te rencontrer, mais je suis désolée, j’ai dû vous interrompre. N’hésite pas à venir me voir si tu as un peu de temps libre dans la soirée Lilian !
Et elle se retira aussi vite qu’elle était venue pour se jeter sur le premier groupe de personne qui l’invita avec de grands sourires. Délia poussa un soupir moitié soulagé, moitié moqueur.
- Même si je ne m’attends pas à un commentaire, je ne veux rien savoir… Notre ami non plus je pense, à moins qu’il n’ait aussi un véritable talent pour s’acoquiner avec les pires énergumènes du show-biz.
Quelques étincelles malicieuses brillèrent dans le regard qu’elle leva sur le jeune homme. Lilian s’empara aussitôt de la perche qu’elle lui tendait pour effacer la tornade Elena. Il trouvait le modèle réellement touchant, dans le fond, mais préférait s’en tenir éloigné pour la soirée, tant pis s’il la vexait.
- N’oublie pas qu’il a signé un pacte avec moi, c’est déjà un bon début… - Un mimétisme assez dérangeant lui fit tourner le même genre d’expression que Délia sur le russe. Mais, après un silence, il repartit aussitôt : - Donc… Cette partie de cartes ?


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Lun 7 Juil - 22:52, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 1 Juil - 9:28

La simple idée d’un couple formé par Galina et Lilian me tire un rire à la limite de l’hystérie que je tente tant bien que mal de contrôler. Il ne conviendrait pas de passer pour un fou devant tant de monde. Mais que voulez-vous ? L’image mentale qui s’est imposée à moi est tellement ridicule que j’ai craqué. Tout homme a ses limites. Et pour moi une alliance sentimentale entre ma cantatrice préférée et le journaliste favori du Tout New-York correspond exactement à cela : ma limite. En effet, si je ne doute pas un instant que leurs personnalités toutes deux excentriques se combineraient à la perfection pour dominer le monde ou Dieu seul sait quel autre plan tordu, jamais ils ne s’accorderaient sur le plan sentimental. Ce serait comme chercher à associer un chihuahua surexcité et une vipère provocante. La recette pour un désastre en formation. Je réponds donc, après avoir repris légèrement mon calme.

-Prétendante, certainement pas. Mais, vous feriez de bons amis, j’en mets ma main à couper.

Vous avez le même grain de folie, rajoutais-je dans les confins de mon esprit. En privé, j’aurais prononcé à voix haute cette légère provocation mais devant public, autant garder nos piques personnelles pour plus tard. J’aurais probablement aussi allongé un peu mon explication concernant leurs différences et similarités, attisant ainsi la curiosité du Britannique, mais mon esprit est bien vite happé par l’idée de choisir nos partenaires de jeu. Après tout, pourquoi me fatiguer à lui décrire Galina alors que je peux la lui présenter en chair et en os ? La cinquantenaire a en effet une véritable faiblesse pour les jeux d’argent, au grand désespoir de son mari.

Ainsi, avec l’acceptation de Miss Sutherland – acceptation qui me rendrait presque, insistance sur l’adverbe, heureux– nous voilà déjà à quatre. Plus que trois personnes à choisir. Mais le choix est soudain retardé par l’arrivée flamboyante d’une superbe blonde qui, à la surprise générale, embrasse langoureusement D’Eyncourt, provoquant par-là une jalousie mal dissimulée chez Miss Sutherland. Immédiatement, la scène m’amuse et je ne me fais pas remarquer pour continuer à profiter de ce spectacle gratuit. Sans compter que c’est un moyen facile d’en apprendre plus sur Lilian à travers ses – étranges – connaissances. D’ailleurs, le voilà qui me présente et, offrant un sourire charmeur à la jolie créature, je ne manque pas le regard appréciateur mais peu intéressé qu’elle lance à mon physique avant de tourner son attention vers Miss Sutherland. Pour un peu, on verrait les étincelles fuser. La tension est quant à elle palpable et si le présent n’était pas déjà suffisamment entraînant à lui seul, j’irais bien faire un tour dans les esprits des participants au petit show pour me régaler encore plus de leurs opinions respectives. Malheureusement, les festivités se terminent un peu trop vite à mon goût et Miss Sutherland se venge des vexations subies sur le principal intéressé. Qui choisit de se sortir de ce mauvais pas en m’impliquant dans la discussion. Alors, profitant de la semi-intimité que nous avons retrouvé, je déclare, sourire mystérieux aux lèvres :


-J’aime profiter de mes partenaires jusqu’au bout avant d’en changer.

C’est que D’Eyncourt n’est pas le seul à savoir manipuler les sous-entendus et autres implicites faciles. J’évite néanmoins de poursuivre sur ce chemin dangereux vu les lieux en enchaînant sur le changement de conversation proposé par le Britannique.

-Nous n’avons qu’à nous séparer le temps de récupérer nos joueurs, rendez-vous dans dix minutes/un quart d’heure devant la table principale de Black Jack. Miss Sutherland ayant déjà accepté, je vous propose de choisir deux personnes chacun.

Et sur ces mots, je leur lance un signe d’adieu. Connaissant les goûts d’Albert, je me dirige droit sur le buffet où je suis sûr de le trouver, probablement accompagné de quelques autres invités déjà blasés. Et, effectivement, le voilà. M’excusant auprès de ses compagnons de discussion, je serre quelques mains par politesse et lui demande s’il sait où se trouve Galina. Aux dernières nouvelles, elle était en train de discuter avec un groupe de fans près de l’entrée. Je m’y dirige donc et aperçoit immédiatement sa silhouette imposante, d’autant plus remarquable que sa robe vert pomme se voit de loin. Je m’approche donc du groupe et réussit à ce qu’on nous laisse seuls. Lui exposant ma proposition, je la rassure que la performance des Hooks n’aura pas lieu avant au moins une bonne heure, et elle accepte alors avec plaisir.  Nous partons alors tous deux chercher la deuxième personne que j’ai en tête.

Galina a l’air surprise lorsque je prends la direction des coulisses, mais je délaisse bien vite les quartiers des artistes pour m’aventurer dans le domaine des techniciens en tout genre. Et, sans surprise, c’est là que je tombe sur l’homme – ou plutôt l’adolescent – que je cherche. Il est à quatre pattes sous une des tables de commande, en train de bidouiller lui seul sait quoi, tous les techniciens présents formant un cercle silencieux et respectueux autour de lui, l’un d’eux lui passant de temps à autres un outil quelconque. La scène me tire un sourire affectueux mais je n’ai pas de temps à perdre, je me racle donc la gorge pour me faire remarquer. Une tête rousse complètement ébouriffée affublée d’une paire d’yeux vairons sort de dessous la table et me fixe quelques secondes avant qu’un sourire d’oreille à oreille se dessine sur ses traits.


-M’sieur Kolyakov ! J’suis en train de réparer votre machine, le circuit principal était mort. J’espère que ça ne vous dérange pas ?
-Non Owen, ça ne me dérange pas, mais si tu as bientôt fini, j’ai une offre plus intéressante à te faire. Que dirais-tu d’une partie de Black Jack en ma compagnie, celle de Miss Olevna ici présente et quelques autres personnalités tout aussi intéressantes ?

Ses yeux s’illuminent à l’écoute de mes propos.

-Sûr ! Mais Père ne me laisse pas parier d’argent.
-Allons Owen, ne me dis pas que tu n’as pas ta propre réserve pour des cas comme celui-ci ?

Un sourire malicieux apparaît sur ses lèvres et il se lève, nettoyant la poussière que son smoking a accumulé sur le sol.

-Ça c’est un secret M’sieur Kolyakov.

Une fois que le gosse a donné ses dernières directions aux techniciens pour qu’il finisse de régler le problème seul, je le recoiffe légèrement et on se dirige vers la table de Black Jack. Sans surprise, nous sommes les premiers sur place. J’indique donc à mes invités de prendre place et les présente l’un à l’autre. Sans surprise, Owen, de son nom complet Owen Perceval Jonathan McDuff, héritier du deuxième empire pharmaceutique américain, génie certifié – si mes souvenirs sont bons son QI se situe dans les 170 où quelque chose du style – et bien plus intéressé à l’idée de devenir ingénieur – dans quel domaine, il n’a pas encore décidé - que businessman au grand dam de McDuff senior noie la pauvre Galina de questions pointues sur le fonctionnement de la machinerie d’un opéra. Bien évidemment, cette dernière est bien incapable de répondre à la moitié de ses questions mais l’enthousiasme de l’adolescent – le foutu mioche a tout juste dix-sept ans – est contagieux et, bien vite, les voilà engagés dans une discussion passionnée. Il ne nous reste plus qu’à attendre le reste des participants.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeJeu 10 Juil - 8:21

Sa plaisanterie lancée au hasard à propos de Galina provoqua une hilarité inattendue chez son associé. Il semblait qu’une image très plaisante venait de s’imposer à lui et, loin d’en prendre ombrage, Lilian songea que la rencontre avec cette femme n’en serait que plus intéressante. Il pouvait au moins en déduire de manière assez sûre que leurs caractères ne seraient jamais sentimentalement compatibles, un caractère trop fort ou trop excessif, sans doute. Mais, en un sens, le britannique doutait que la moindre personne pût s’entendre durablement avec lui. Il ne croyait pas en ces idées selon lesquelles un genre d’attitude en attirait une autre. Josh, Mélo, Délia, et même Elena, tous étaient diamétralement opposés. Il leur trouvait cependant un charme particulier, comme il trouvait un intérêt à Nikolaï lorsqu’il imaginait le séduire. Ses envies, ses humeurs, étaient trop changeantes pour se fixer sur une seule relation pendant une durée déterminée. Il voulait concentrer trop de vies en une seule existence. On le constatait aisément avec l’apparition brutale de la jeune mannequin et l’hostilité glaciale de Délia. La réaction de la rousse ne l’étonnait qu’à moitié. Ils n’étaient liés par aucun serment, elle savait qu’il entretenait des relations croisées trop complexes pour être comptées et, cependant, elle réagissait toujours mal au contact d’une autre amante. Pour les hommes, c’était différent, elle y trouvait une sorte d’intérêt parfois un peu dérangeant. Il lui arrivait de se demander si la situation lui convenait vraiment, mais évinçait très vite le problème en songeant que son caractère ne lui permettrait jamais d’exiger quoique ce fût. Il maintenait donc l’illusion d’un équilibre, évitait au possible les désagréments imprévus que pouvaient provoquer l’arrivée d’une femme comme Elena, si différente de la mutante qu’elle se mettait en danger sans le savoir. Délia n’avait encore jamais utilisé ses pouvoirs de manière impulsive. Il ne souhaitait pas voir ce genre d’incident arriver un jour, car il en connaissait trop bien le potentiel destructeur. Souvent, il se disait que la jeune femme n’avait jamais implosé pour éviter, elle aussi, le réveil de son gène x. Sous des apparences complices, ils tournaient aussi l’un au tour de l’autre comme deux prédateurs certains de s’engager dans un combat à mort si les choses venaient à dégénérer.

Conscient d’entrer sur un terrain brûlant, ils s’en tirèrent par quelques piques et un report vers Nikolaï qui fit malgré lui un effet tampon. Ce dernier se prêta au jeu en détournant l’ambigüité sur lui et tirant par la même occasion ce genre de sourire éloquent que Lilian aimait adresser à tous ceux dont les invitations masquées pouvaient l’intéresser. Ses lèvres tirées formaient alors une mise-en-garde espiègle. Il y avait une part d’incube en lui, on ne lui cédait jamais sans se faire drainer un bout de soi.
Mais l’heure n’était pas venue de retourner à leur badinage tordu. Ils se séparèrent pour trouver d’autres compagnons de jeu, deux autres chacun. Lilian réfléchit très rapidement aux meilleures possibilités. Il lui fallait des personnalités colorées, qui n’avaient pas d’intrigues avec lui, et ne risquaient pas non plus de s’intéresser à ses affaires. En somme, il devait miser sur des artistes, des techniciens, des scientifiques, des mondains assez déconnectés du monde réel pour laisser passer tout ce qui pourrait se jouer entre Nikolaï et lui.
- Il me semble que tu t’entends assez bien avec Samantha Crawford non ? demanda-t-il à sa compagne en portant son regard vers une femme de la quarantaine à l’air perdu qui avait coiffé son chignon de travers.
- La célèbre éthologue ? Je ne la connais pas personnellement, nous avons surtout échangé par mail l’année dernière…
- Parfait, tu ferais bien d’aller te présenter avant qu’elle ne se fasse dépasser par des débats sur les divers comportements du bichon maltais, tu sais comme les gens deviennent bavards sur le sujet des animaux domestique.
La jeune femme roula ironiquement des yeux et s’en alla saluer sa collègue. Lilian ne connaissait Samantha que de réputation. Ses études brillantes sur le comportement animalier l’avaient rendu célèbre au point de « l’obliger » à ouvrir un cabinet de consultation très privées pour les stars complètement gaga de leurs animaux. Elle gagnait grâce à ce business des sommes tout à fait incroyables qu’elle investissait dans des recherches autrement plus utiles, même si D’Eyncourt ne s’y intéressait pas franchement, c’était plus du registre de Délia qui était une mine d’or au sujet du comportement des insectes, ses amis les plus proches… De ce qu’il en savait, la spécialiste aimait autant sa clientèle que les occasions de la fuir en soirée, et savait mener d’agréables conversations, elle saisirait probablement l’opportunité.

De son côté, Lilian alla jusque dans les loges pour une visite à Dean. Il savait que le guitariste ne tenait pas en place et risquait de finir tout le stock de bière avant le début de son concert avec les Hooks si on ne l’occupait pas un peu. Ils s’étaient déjà croisés à de nombreuses soirées, alors qu’il n’était encore qu’un jeune rêveur dont le seul lien avec les rock star était de finir la moitié de ses soirées dans le caniveau. A jeun Dean était très sympathique, plein d’humour, gentiment provocant. Dès qu’il s’alcoolisait, un truc dans son cerveau craquait totalement et il devenait incontrôlable. Tous ceux qui le connaissaient bien disaient que ça finirait mal, Lilian le trouvait quant à lui distrayant.
- Oh, je vois que Mister D. snobe la bière ce soir ! s’exclama-t-il en entrant sans frapper.
Le jeune homme buvait une bouteille de champagne rosé au goulot, nonchalamment affalé sur un tas de cousins au fond de la pièce. Il était plutôt beau garçon, à condition d’aimer les tatouages sur tous les endroits imaginables du corps (exception faite du visage), les corps très secs, et les piercings, tant qu’à faire. Il portait un débardeur déchiré qui laissait presque apparaître ses tétons et rendait visible le squelette d’une chauve-souris déployée tracé à l’encre noire sur toute sa poitrine. Une idée atrocement stupide mais réalisée, il fallait l’avouer, avec beaucoup de talent.
- Yo Lil’ ! T’en veux un coup ?
- Allons, tu sais bien que je ne bois que du sang mon chéri, dit-il en souriant.
- Tu veux mon sang ? enchaîna l’autre en haussant les épaules.
- Je te veux surtout en forme pour ta prestation.
Dean était une des rares personnes au courant de sa mutation, en partie parce qu’il possédait aussi le gène x, un pouvoir assez creepy d’ailleurs, il pouvait accélérer la décomposition de tout ce qui n’était pas un organisme encore vivant, faire d’une table toute neuve un vieux tas de bois croulant en posant ses bras nus dessus, une véritable catastrophe domestique. Le musicien n’avait cependant pas une idée très précise du pouvoir de Lilian. Sa nature excentrique avait parfaitement validé l’explication « Je suis une sorte de vampire » et, même s’il n’avait pas cherché à comprendre comment son compagnon arrivait effectivement à lui aspirer le sang – il s’en fichait totalement – il avait trouvé cette originalité parfaite pour les répliques un peu glauques dont personnes mis à part eux ne comprenaient la portée. Après tout, quoi de plus étonnant que deux marginaux en train de discuter joyeusement d’hémoglobine ? Lilian prenait le risque de le présenter à Nikolaï, parce qu’il était assez convaincu du chaos total que pouvait représenter l’esprit d’une personne aussi désinvolte et toujours partiellement bourré. Mais, dans un tout autre sens, il trouvait plus piquant de mettre le russe au contact de personnes capables de lui donner involontairement des indices. Pour jouer aux devinettes, il fallait bien semer quelques pistes.
- Je cherche des personnes pour un Black Jack, tu te joins à nous ?
- Ooooohhouais…, lâcha-t-il paresseusement. Je suppose que j’ai rien de mieux à faire à part me toucher en attendant le concert pas vrai ? On joue avec quoi, de l’argent, de la drogue, des gosses ?
- Je te laisse deviner.
Dean soupira comme s’il allait faire la chose la plus ennuyeuse du monde, mais Lilian le savait, en vérité, très heureux de partir à « l’aventure ».

En retournant dans la salle de jeux, il remarqua que Délia était lancée dans une grande conversation avec Samantha et s’exprimait avec une vivacité qui signifiait clairement que la partie n’était déjà plus à l’ordre du jour. Il lui fit donc signe pour la rappeler à l’ordre et l’engager à le suivre.
- Ok, au moins une belle nana, je note, je peux la draguer ou c’est ta meuf ? lança Dean avant l’arrivée des deux femmes.
- Nous sommes plus ou moins ensemble, tu peux la draguer, mais… tu n’es pas du tout son genre.
Il avait appuyé la fin de la phrase au moment où la rousse se plantait devant eux.
- Surtout pas, poursuivit-elle en allant vers la table où les attendait Nikolaï, Iphigenia a vraiment un goût atroce.
L’évocation du flirt qu’avait vécu sa protégée avec le guitariste fit ricaner doucement Lilian.
- Oh, elle a retenu la leçon. J’ai beaucoup aimé la scène de votre rupture.
- Pff arrêtez, cette fille est à moitié folle, se vexa Dean. En plus, elle m’a envoyé un sms la semaine dernière.
La discussion aurait bien entendu pu se poursuivre en ragots sur toutes les histoires que pouvaient engendrer la vie d’un cercle fermé de mutants « non identifiés » mais Lilian préféra repousser les débats plus superficiels à une autre fois. Il ne donna donc pas la réplique au jeune homme et s’intéressa aux partenaires de Nikolaï, une femme dans les cinquante ans, plutôt élégante, et assez imposante ainsi que, plus étonnant, un adolescent qui devait avoir tout juste dix-huit ans. Il semblait que son partenaire avait fait à peu près le même type de choix que lui, des personnes absolument en dehors de leurs intérêts communs.

- Eh bien monsieur Kolyakov, vous voudrez peut-être bien nous présenter nos nouveaux partenaires de jeu ? Voici les miens, Samantha la perspicace, Dean, l’idole des jeunes et, pour ceux qui ne la connaissent pas encore, mon amie Délia… Assez ingrate cependant pour me préférer des organismes à six pattes.

Seule Samantha réagit d’une manière assez ordinaire en hochant la tête avec un petit sourire. Dean se contenta d’un vague signe de main qui donnait plutôt l’impression qu’il essayait d’intercepter un serveur, et Délia était déjà trop occupée à étudier les deux nouveaux protagonistes, en particulier le rouquin – elle adorait mettre les adolescents mal à l’aise - pour penser à les saluer.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Mer 23 Juil - 20:44, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 15 Juil - 20:24

Après une vingtaine de minutes de discussion, Galina est quasiment sur le point d’adopter officieusement Owen – il a toujours su charmer les femmes d’âge mur à défaut d’intéresser les donzelles de son âge – lorsque Lilian fait son apparition en compagnie de ses propres invités. Miss Sutherland se tient légèrement en retrait, précédée de peu par une quarantenaire à l’air un peu perdu, tandis que Lilian dirige le cortège, le typique spécimen du rocker destroy à ses côtés. La présence de ce dernier ne me surprend pas vraiment au vu des cercles fréquentés par D’Eyncourt mais je suis curieux de connaître l’identité de la mystérieuse femme qui détonne tant dans le trio formé par Lilian, Miss Sutherland et le rocker.

Comme je m’y attendais néanmoins, Lilian ne lâche que des bribes d’informations sur ses connaissances, le tout avec un air désinvolte qui ne fait que titiller encore plus ma curiosité déjà d’ordinaire bien développée. En effet, si les péripéties probablement musicales et sans doute aucun hautement alcoolisées du fameux Dean me laissent particulièrement froid, connaître la raison pour laquelle « Samantha » est perspicace m’intéresse fortement. Cependant, force est de constater que les tatouages du rocker m’impressionnent sincèrement. Tous ne me plaisent pas - que dire du mauvais goût patent qu’il faut posséder pour se faire tatouer un crâne aux couleurs du drapeau américain sur la clavicule ? – mais certains m’attirent réellement. Le squelette de chauve-souris que l’on aperçoit partiellement sous son débardeur par exemple pourrait aisément me fasciner si on me laissait le temps de l’observer plus longuement. J’ai après tout toujours eu un véritable goût pour le body art – le milieu familial aidant bien entendu – et il faut reconnaître le talent de l’artiste tatoueur qui a réalisé ce dessin. Peut-être que plus tard dans la soirée, je pourrais en discuter avec le principal intéressé. C’est que ce n’est jamais inutile de connaître un bon salon dans New-York pour le jour où je me découvrirais une envie soudaine d’agrandir ma propre collection.


-Je pense que je devrais réussir à faire les présentations sans trop de difficultés. De mon côté, voici Galina l’élégante cantatrice …
-Flatteur ! Les médias préfèrent excentrique à élégante, déclare-t-elle amusée.
-… et Owen l’héritier surdoué.
-Cette expression ne veut rien dire. Cela signifierait être plus doué qu’une normale qui n’est pas quantifiable puisqu’il s’agit d’une simple estimation relative.
-Rappelle-moi ton QI tu veux bien ?
-172.
-C’est ce que je disais.

Réprimant un air victorieux devant la couleur rivalisant avec sa chevelure qu’acquiert le visage de l’adolescent, je reprends la parole.

-Et puisque nous en sommes aux adjectifs qualificatifs, Galina, Owen, je vous présente Lilian le célèbre Prince de l’information. Samantha, Délia, Dean, rajoutais-je en direction des trois autres, je laisserai à Lilian le plaisir de me décrire. Il est si difficile d’être impartial avec soi-même, n’est-ce pas ?

Je termine ma tirade d’un demi-sourire envers Lilian. A lui désormais de se débrouiller pour me présenter à ses connaissances. J’ai personnellement choisi la facilité en usant de son surnom médiatique mais il n’aura pas cette chance puisque, jusqu’à nouvel ordre je n’en ai pas. Mais qui sait, je vais peut-être avoir une surprise. Quoiqu’il en soit, Lilian va devoir faire un choix limité par les personnalités autour de nous. En effet, il ne conviendrait pas de dévoiler de trop en présence de tant de gens.

-Sur ce, prenez place que l’on commence.

Je fais signe à un croupier et il s’approche en quatrième vitesse. Il sort trois jeux de cartes et les étend devant la tablée pour que chacun puisse confirmer que les cartes sont en règle. Puis pendant que tout ce petit monde s’installe confortablement, il commence à distribuer et à rappeler les règles.

-La mise minimum est à dix dollars, le maximum à cinq cent. Le jeu…

Je me désintéresse bien vite de ces phrases que j’ai entendu un bon million de fois en grandissant lorsque je visitais les casinos familiaux pour murmurer à l’oreille d’Owen qui se trouve sur ma droite alors que Lilian a pris place sur ma gauche. Ensuite, se trouvent Dean, Galina, Samantha et enfin Délia qui observe Owen avec un intérêt dissimulé mais qui annonce une suite de soirée mouvementée.

-Pas de comptage de cartes tant que je suis là, si tu veux plumer une ou deux baleines plus tard, fais-toi plaisir mais pas avec mes invités, on est d’accord ?

Il me fait un sourire innocent et je tourne mon attention vers le jeu en déposant un billet de dix dollars devant moi pour entamer les hostilités. Pendant que les autres convives font de même, je me penche discrètement vers Lilian et déclare :

-La soirée s’annonce soudain plus intéressante, n’est-ce pas ?
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMer 23 Juil - 23:04

Ils formaient un petit clan étrange, composé de personnes qui, même vues de loin, n’avaient à l’évidence rien à faire ensemble. Si Délia et Sam’ avaient des profils de scientifiques zélées, chacune gardait un style étrangement opposé, l’une avait ce côté femme fatale faussement prude, et l’autre ne portait aucune attention notable à la sensualité. Le guitariste d’un groupe de rock s’associait étrangement avec une cantatrice, et le petit génie de l’informatique donnait l’impression de s’être trouvé là par erreur. Alors, des amitiés ou inimitiés inattendues se créeraient-elles en cours de partie ? Il tardait à Lilian de découvrir de quelle manière s’affirmeraient les caractères de chacun. Après les vagues présentations de ses nouveaux partenaires, il écouta avec attention celles que lui fit Nikolaï. Contrairement à lui, le russe se montra moins avare en détails. Il rencontrait donc la fameuse Galina, une femme un peu trop âgée pour lui finalement, mais elle semblait amusante. Le gamin était l’héritier d’il ne savait quel gros ponte et n’appréciait visiblement pas de voir ses qualités intellectuelles mises en avant. Son petit accrochage avec Nikolaï sur la question du QI lui arracha un sourire de biais. Il appréciait toujours de rencontrer des individus qui ne faisaient pas d’un diagnostic donné par un psy le trait essentiel de leur personnalité. La discussion lui rappela aussi un instant comme il s’était rebellé plus jeune contre les spécialistes qui avaient essayé de chiffrer sa manière de raisonner pour expliquer ses difficultés d’adaptation en classe. Il y avait mis tellement de mauvaise foi que, si on ne le savait pas si éveillé pour son âge, les résultats l’auraient fait passer pour un débile profond.

Puis, son associé le présenta en retour, l’anoblissant par la même occasion et l’invita à lui rendre la pareille. De nombreuses espiègleries lui venaient en tête, mais aucune ne se prêtaient à son auditoire. Seuls Délia et Dean s’en seraient amusés. Les autres n’étaient pas suffisamment intimes avec lui pour comprendre la portée de ses sous-entendus. Il opta donc pour la plaisante anecdote.

- Voici Nikolaï, un étranger perdu sur le continent américain qui eut un jour le projet fou de construire ceci.

Et, par un rond de bras excessivement gracieux, il désigna l’ensemble des lieux. Samantha réagit de la manière la plus civile – et insondable - possible :
- Je suppose que je dois vous féliciter alors. Je ne m’attendais pas à me joindre si tôt à la table du propriétaire. C’est un beau projet.
Quand à Dean, il se contenta d’évaluer le russe d’un air scrutateur assez dérangeant. Connaissant Lilian, deux questions lui venaient d’emblée. La première, se posait sur sa mutation. Il savait le « prince de l’information » plus prompt à s’associer avec ses semblables. Et, la seconde question que l’on se posait inévitablement quand le britannique se trouvait un nouvel ami à l’allure plutôt séduisante était : avaient-ils couché ensemble. Evidemment, il n’était pas assez stupide pour lancer ce genre d’information sur la table – ou son niveau de lucidité restait, du moins, contrôlable.
- Cool. Moi, tant qu’on m’fait jouer, ça me va. Je crois que Lilian a pas l’habitude de signer de gros trucs avec n’importe qui, alors enchanté.
Il observa ensuite le tapis de jeu comme s’il n’existait rien de plus fascinant autour de lui et Lilian lui tapa négligemment sur les doigts qu’il commençait à appuyer sur le bord de table. Dean refusait de porter des gants pour préserver le reste du monde de sa mutation. Il l’assumait parfaitement et se fichait d’altérer en quelque minutes les objets neufs qu’il saisissait. A l’état passif, son pouvoir n’était heureusement pas très puissant, il fallait compter un gain d’une année par minute restée à son contact. Pendant que le croupier distribuait les cartes, Délia rompit soudain le silence pour demander au plus jeune de sa voix velouté :
- Et que fait donc un garçon si jeune d’un esprit si brillant ?
Lilian n’y prêta pas réellement attention. Malgré les années, Délia restait un être étrange qui s’amusait sans but précis de toutes les personnes qui avaient le malheur de la fasciner. Elle était d’ailleurs capable de s’en désintéresser tout aussi vite, ce qui était parfois difficile à comprendre pour les interlocuteurs qui commençaient à être séduits.
Lorsque les premiers dollars furent posés sur la table, Nikolaï lui murmura que la soirée devenait enfin intéressante. On aurait pu croire qu’il mentionnait l’arrivée d’enjeux financiers sur le tapis, mais Lilian doutait qu’il s’intéressât de si près à l’argent. Cette partie n’était qu’un prétexte et il n’avait jamais été très adepte de ces pratiques. D’ordinaire, l’anglais fuyait les jeux comme la peste. Il menait des intrigues grandeur nature avec des sommes d’argent impossible à faire tenir dans une poche et cela était bien suffisant. Ses soirées, il aimait les faire les plus folles et inconséquentes possibles.

- Dire que j’espérais que ma resplendissante présence suffirait à rendre votre soirée intéressante…, soupira-t-il avant d’ajouter : Mais j’ai l’intention de ne pas m’ennuyer. J’ai très lamentablement fêté mon dernier nouvel an par chez vous, alors celui-ci compte pour double.

Lâchée de la manière la plus anodine du monde, la précision soudaine de sa visite en Russie avait de quoi attirer l’attention de son associé. Pourtant, cet élément ne lui serait qu’à moitié utile. La raison de son voyage ne dépassait pas son histoire personnelle. Il n’avait aucun contact réellement sérieux là-bas pour ses affaires.
Il regarda ses cartes sans grande passion. Un quatre et un huit, pas de quoi hurler de joie. Il demanda une carte, un deux. Puis une autre, un as. Arrivé au nombre 15, la donne devenait plus tendue et il décida d’en rester là. Au moins, le Black Jack tenait trop du hasard pour requérir une attention poussée, sauf quand on était un joueur acharné doué d’une mémoire particulièrement efficace pour prendre des paris sur les prochaines cartes à tomber. Souvent, il finissait par le faire sans s’en rendre compte lui-même, mais il n’arrivait pas à solliciter trop passionnément sa réflexion sur des données qu’il jugeait trop incertaines.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Mer 13 Aoû - 19:29, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeJeu 31 Juil - 10:14

Comme à son habitude, Lilian ne déçoit pas son auditoire au moment de me décrire. Il réussit à donner à une phrase anodine une grandeur dramatique qui tire un sourire amusé à Galina et un regard curieux à Owen. Quelque chose me dit que celui-là a tout juste eu le temps d’admirer les lieux en arrivant avant de se diriger quasi inconsciemment vers les coulisses. Je le laisse donc à son observation de la salle tandis que j’accepte avec un hochement de tête discret les compliments des amis de Lilian. Leurs caractères sont d’ailleurs tellement différents que je dois me faire violence pour ne pas lancer un regard amusé à Lilian. S’il me fallait encore une preuve que le Britannique aime à s’entourer de toute sorte d’énergumènes tirés tant des plus hautes sphères de la société que des bas-fonds les plus crasseux, cette soirée aura fini de me convaincre. Mais, après tout, c’est sûrement là une des choses qui m’attire le plus chez lui, cette capacité à se transformer en permanence, à toujours surprendre, empêchant la routine de s’installer jamais.

Une fois les politesses de circonstance échangées, le croupier se lance dans l’explication des règles et le regard d’Owen se met à briller plus fort. Je sens que mon conseil lui ait déjà sorti de l’esprit. Enfin, on verra au fur et à mesure de la soirée, s’il compte de trop je le retournerai à ses activités premières, je doute qu’il perde au change. Quoique, à l’écoute de la question de Miss Sutherland, mes prédictions changent. Peut-être que finalement l’attention d’Owen sera concentrée sur autre chose que le jeu. Parce que le ton de voix de l’entomologiste était volontairement sensuel ou je ne m’y connais plus en techniques de drague. Or, si personne ne me fera croire que l’intérêt de la jeune femme envers l’adolescent à ma droite est réellement romantique, elle semble néanmoins prête à lui faire perdre tous ses moyens et ce n’est certainement pas moi qui vais m’interposer entre une femme au caractère clairement déterminé et sa proie. Surtout que voir le pauvre Owen se débattre entre les griffes d’une femme plus âgée a de grandes chances d’être hautement distrayant.


-Pas grand-chose de productif malheureusement. Père refuse de m’inscrire au MIT ou à CalTech sous prétexte que pour lui succéder les connaissances dont j’ai besoin sont essentiellement managériales, mais dans un an j’aurai terminé mon master de marketing et je serai toujours trop jeune pour prendre les rênes de l’empire donc j’espère réussir à le convaincre de me laisser m’inscrire dans une de ces deux universités en attendant. Néanmoins, à côté de cela, j’accepte tout type de demandes individuelles de création d’objets spécifiques aux besoins du consommateur si jamais vous êtes intéressée.

Et bah dis donc, il m’impressionne le mioche. Moi qui m’attendais à le voir se décomposer sous le regard perçant de Miss Sutherland, voilà que ses gènes de businessman ressortent. J’apporte donc mon grain de sel avant de me désintéresser de leur conversation.

-Le jeu en vaut la chandelle, j’ai eu la chance de bénéficier de ses talents pour la création d’une sorte d’enduit révolutionnaire servant à isoler phoniquement une pièce, ce fut une véritable réussite.
-Ce n’était pas un enduit à proprement parler mais …

Un regard de ma part calme les ardeurs d’explication du gamin. Parce que si je le laisse s’embarquer dans des précisions techniques on y sera encore demain et, dans le fond, les détails n’intéressent personne. Pour moi tout ce qui comptait quand je lui ai fait cette demande c’est que son invention marche. En effet, au vu des effets secondaires de mon pouvoir, pouvoir, lorsque je suis en voyage, isoler une pièce – au moins partiellement – en peu de temps et pour peu de frais est un avantage majeur. Or, l’invention marche, par conséquent, à partir de là, tout le reste est superflu. Je me tourne donc de nouveau vers Lilian et m’adresse à lui. Quant à sa réponse quasi pathétique, titille immédiatement ma curiosité. Il était en Russie l’année dernière ? Pour quelle raison ? Réfrénant légèrement ma curiosité, je lâche, observant en même temps mes cartes :

-Et bien vous avez été au pays plus récemment que moi. Néanmoins, si l’accueil n’a pas été le correct, c’est que vous n’étiez probablement pas bien accompagné. Il faudra peut-être que je vous fasse le tour du propriétaire un de ces jours. En attendant, je m’assurerai personnellement que cette soirée tienne ses promesses.

Et comme pour tenir parole, je demande une carte de plus. C’est qu’avec un trois et un six, je ne vais pas loin. Discrètement je soulève ma carte et découvre une dame. Dix-neuf, c’est plus que ce à quoi je m’attendais pour un premier tour. Etant l’avant-dernier joueur à exiger mes cartes (on commence après tout toujours à gauche), j’observe donc rapidement les cartes visibles des autres joueurs pour savoir comment poursuivre. Délia a un sept et un deux ainsi que deux cartes face cachée. Samantha un quatre et un trois mais elle a demandé trois autres cartes. Galina a commencé avec un neuf et un deux et a osé demander deux cartes de plus. Donc, soit elle est très proche du Black Jack soit elle s’est plantée. Quant à Dean, avec un huit et un neuf, il ne me surprend guère en ayant exigé une carte de plus. Il a l’air d’être un joueur qui aime le risque, néanmoins je doute qu’il ait eu de la chance dès le premier tour. Enfin, Owen possède un cinq et un as. La partie s’annonce donc serrée mais j’ai promis à Lilian de l’excitation et je tiens toujours parole. Un sourire provocateur sur le visage, je déclare donc :

-Je triple ma mise.

Les réactions ne se font pas attendre, ou plutôt l’absence de ces dernières. Galina est la seule à faire une légère moue contrariée. Owen est trop concentré sur son propre jeu pour réagir, quant aux amis de Lilian, ils ont apparemment l’habitude de ne rien révéler à la table de jeu. Reste à savoir s’ils sont prêts à risquer de perdre trente dollars – à condition qu’ils en aient tout simplement la possibilité – ou non. Quoique tout puisse encore arriver, Owen n’a pas joué et le croupier non plus or même si le cinq et le deux de ce dernier ne sont pas particulièrement menaçants, au Black Jack, jusqu’à ce que toutes les cartes soient retournées, tout est toujours possible. C’est ce qui m’amuse. Le fait que, tant qu’on en fait pas de folie avec son argent et qu’on ne cherche pas à compter – le jeu perd sinon tout son suspens – on peut passer un bon moment à se triturer les méninges mais sans jamais perdre de vue le rôle essentiel joué par le hasard.
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Lilian D'Eyncourt
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMer 13 Aoû - 21:29

Le débit du petit génie est impressionnant. Avec une question faussement désintéressée, Délia vient de libérer un intarissable flot de paroles. Le pauvre garçon s’écoute parler et c’est bien dommage pour lui. De belles occasions finiront par lui échapper s’il n’exerce pas son intelligence sociale en évitant, notamment, d’endormir son interlocuteur avant de réussir à en obtenir ce qu’il souhaite. L’idée de baratiner suffisamment une personne pour la forcer à l’intéresser à ses activités lucrative reste à creuser, si, du moins, la stratégie est consciente. C’est une méthode qui vous rend immanquablement insupportable, détestable, mais assure toujours un bon succès sur les esprits faciles à impressionner. Il se laissait absorber malgré lui dans ces observations par défaut professionnel et Nikolaï mit heureusement un terme à ses explications chimiques qui ne parleraient à personne sauf, peut-être, à la sournoise entomologiste dont les prunelles continuaient de briller d’intérêt. Il était vrai, soi dit en passant, qu’un produit insonorisant aussi efficace présentait de nombreux avantages. Chose que Dean ne manqua pas de faire remarquer en lançant à moitié narquois :
- Si c’est vrai mec, les voisins des batteurs du monde entier vont vouloir ton corps.
- Et les tueurs à domicile…, appuya Délia, une expression incroyablement malsaine sur le visage. Elle souriait, apparemment fière de sa plaisanterie qui eut le don de ramener tout le monde à ses cartes.
Un vague instant, Lilian espéra que l’humour délicat de son amie ne soulignait pas involontairement les loisirs secrets de l’éminent Kolyakov. Il écarta cependant vite l’idée en jugeant que l’homme ne paraissait pas assez sociopathe pour vanter sans émotion les qualités d’un enduit appliqué avant des séances de torture. Délia était, quant à elle, retombée dans un profond silence contemplatif, mais il savait qu’elle reviendrait à l’attaque au moment où Owen l’attendrait la moins. Si le pauvre garçon était élu proie de la soirée, la paix ne lui serait pas assurée avant quelques heures, surtout que la jeune femme n’était pas tout à fait sobre et nourrissait, de ce fait, des pensées deux fois plus obsessionnelles qu’à l’ordinaire.

Alors que chacun plaçait ses cartes sur la table, Nikolaï accepta l’amorce d’une conversation anodine au sujet de la Russie. Lilian se réjouissait de voir que sa perche fonctionnait. Il s’amusait à le mener tout à la fois sur des pistes riches en révélations ou complètement ennuyeuses. L’entendre parler d’un accueil « peu correct » et d’une « mauvaise compagnie » lui arracha presque un sourire ironique. Oh, l’habitant n’était pas bien méchant. Mais il était certain que la personne qu’il était venu rencontrer lui avait servi le pire accueil possible de son existence. Entre le bunker, les mutants dégénérés, les robots tueurs, il avait à peu près déployé tout l’apparat nécessaire pour écourter n’importe quelle visite de bienséance. Pourquoi choisir ce sujet s’il lui rappelait de si terribles images ? Parce qu’il les liait, en un sens. Son associé était né dans ce pays et, surtout, il le soupçonnait d’avoir vu les souvenirs qui le ramenaient à son père. C’était peut-être sa manière de l’exorciser et une manœuvre assez enfantine de livrer des confidences qu’il n’osait dire.

- J’ai, certes, manqué de compagnie, dit-il évasivement. Mais après cette soirée, je ne doute pas que ce fiasco sera loin derrière moi…

Nikolaï soutint ses promesses en annonçant qu’il triplait sa mise. Dean renchérit par fierté, et Lilian par stratégie. Les impressions qu’un joueur donnait de sa manière de procéder en début de partie étaient souvent décisives. Avec son quinze, il donnerait l’impression de mal jouer, d’être du genre à ne pas savoir quoi faire de son argent, et de ne jamais s’inquiéter de ce qu’il pourrait perdre. Cependant, avec une spécialiste du comportement et Délia qui connaissait par cœur ses petites manipulations, il devait s’attendre à des ruses tout aussi fourbes. Dean pouvait aussi les surprendre. Sous ses airs d’imbécile abruti par une vie trop intense, il possédait sans vraiment le savoir des ressources qu’auraient pu lui envier Owen. C’était, en quelque sorte, le surdoué raté, celui que la richesse d’esprit effrayait, qui se réfugiait dans la boisson pour la faire taire, faute de réussir à la canaliser, et n’arrivait à l’exploiter que pour ce qu’il assimilait à de la distraction. Ainsi, au jeu, le guitariste était un adversaire terrible, capable de calculer plusieurs coups d’avance avec une aisance troublante, cela même à moitié défoncé. Quand les cartes tombèrent, qu’on vit que Dean était largement au dessus du score, et que Délia devançait Nikolaï d’un point – alors qu’elle n’avait pourtant pas fait bouger sa mise – Lilian revint sur sa conversation avec le russe de la manière la plus naturelle du monde et pourtant ambivalente sans que l’on sût dire pourquoi :

- Sauf si vous me refusez une visite dans mon manoir anglais, je me ferai une joie de profiter de votre compagnie pour redécouvrir votre cher pays.

Puis, le jeu se lança pour de bon avec tout ce qu’une partie composée de joueurs aux griffes acérées avait d’excitant. Les piques allèrent bon train, les plaisanteries aussi, et presque personne ne se priva de coups-bas pour déstabiliser les uns et les autres. Il était difficile de dire qui dominait le mieux, d’autant plus que l’on n’hésita pas à se voler les stratégies des uns et des autres à un point où cela confondit l’analyse de la malheureuse Samantha. Avec des esprits aussi versatiles que ceux de Lilian, Délia et Dean dans la partie, il était difficile de faire plus chaotique avec un jeu de hasard. Lilian, surtout, se désintéressa vite de l’objectif principal du jeu – sa richesse aidant bien sûr – pour faire ce en quoi il était le plus doué, c'est-à-dire jouer les trublions. Changer totalement de style à chaque tour l’amusait beaucoup, et il préférait conspirer à ruiner l’un ou l’autre des participants plutôt que s’inquiéter de sa cagnote. Par conséquent, faire tomber des joueurs à chaque tour lui tirait des sourires victorieux insupportables, et ce fut bien entendu Délia qui en paya le plus lourdement les frais. Bientôt, leur table fit tant de bruits et des sommes tellement incroyables étaient jetées sur le tapis, qu’ils s’attirèrent un public de curieux, déjà prêts à leur accorder toute leur sympathie. La bonne humeur qu’ils dégageaient engagea d’autres invités à jouer et une véritable ambiance de fête se propagea autour d’eux.
Quand il ne resta plus que quelques tours, Dean, malgré ses nombreuses pitreries et les quelques autographes qu’on lui avait demandé de signer entre deux tours (il acceptait sous condition qu'on lui apportât un verre ou qu'on bût au goulot de sa bouteille de champagne), s’en sortait plutôt bien et pouvait même gagner. Pour le reste, Lilian avait un peu perdu le fil des scores. On le voyait plus intéressé à retenir ses spectateurs qu’à suivre les comptes.

- Je crois que le casino risque de plutôt bien marcher ce soir, souffla-t-il ravi à Nikolaï alors que tout le monde retenait son souffle pour l’avant dernier tour.

Son regard brillant faisait oublier qu’il était déjà quasiment assuré de perdre. Sa victoire était sur un autre plan, elle flottait autour de lui, grâce à l’ambiance de fête qu’ils commençaient à inspirer dans cette première partie de soirée où il était toujours difficile de pousser les gens à se lâcher.
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Nikolaï M. Kolyakov
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeJeu 21 Aoû - 11:17

Soyons honnêtes, je ne m’attendais pas à une telle réussite lorsque l’idée de proposer une petite partie de Blackjack à Lilian m’a traversé l’esprit. J’avais plutôt en tête la possibilité d’un petit moment de détente facile en bonne compagnie. Mais le public que notre rassemblement peu commun de fortes personnalités nous a rameuté est loin de me déplaire. Bien au contraire. Je ne pouvais rêver mieux comme commencement à cette soirée d’ouverture. Après tout, quoi de mieux que de provoquer chez mes futurs clients l’envie de jouer ?

Du côté de mon jeu, on ne peut pas réellement dire que la victoire soit proche. A la place, je me suis limité à ne pas perdre de sommes trop faramineuses car, une fois l’attention générale attirée vers nous, le calcul a été vite fait. Mieux valait éviter que le propriétaire gagne, voire même il était préférable que je perde assez ostensiblement sinon le risque de critiques et d’accusations de triche en tout genre ne tarderait pas à faire leur apparition et c’est loin d’être le genre de commentaire que je désire pour une soirée d’ouverture. Sans compter que tout le monde sait qu’on se fait bien plus d’amis en perdant. Or, qui dit amis, dit potentiels clients. Alors que sont quelques centaines de dollars de perdus s’ils me rapportent en échange des milliers ?

Rassuré sur le bon déroulement de la soirée, je délaisse le début de conversation que j’avais entamé avec la délicieuse créature qui a élu place derrière mon épaule comme pour me « consoler » de mes pertes et reconcentre mon intérêt sur le jeu. Comme l’avait prédit Albert, Galina, malgré une certaine chance en milieu de partie lui ayant permis d’éviter la catastrophe totale, va définitivement finir la soirée avec un portemonnaie bien plus léger qu’à son arrivée. Quant à Owen, il est désormais le seul à se battre encore pour la première place contre Dean. Après encore quelques tours bien serrés entre les deux jeunes hommes, c’est Dean qui finit par l’emporter avec une audace miraculeuse au dernier tour. Je n’aurais personnellement jamais misé le tout pour le tout sur un dix-huit mais il faut croire que la déesse Fortune lui a souri. Bon, cela et peut-être un peu d’aide de la part de Miss Sutherland. Parce que j’ai trouvé la question qu’elle a posée à Owen et qui a détourné légèrement l’attention de l’adolescent au moment fatidique étrangement bien calculée. Enfin, peu m’importe. Les profits de l’héritier lui permettent de repartir la tête haute et la bourse remplie quoiqu’il en soit, alors je n’ai aucun intérêt à me mêler des magouilles des amis de Lilian. Sans compter que je ne serai pas étonné de savoir que la nouvelle fascination d’Owen pour Miss Sutherland à en croire les regards qu’il lui a jeté régulièrement au cours de la soirée lui fera bien vite oublier sa défaite. C’est qu’il en aurait presque un crush le gamin ! Enfin, ce ne sont pas mes affaires dans le fond.

Une fois les gains répartis, le public s’éparpille pour profiter des dernières minutes avant le début du concert. Ma compagne des dernières minutes – Emily ? Elena ? Je n’ai pas vraiment écouté, me contentant de profiter de sa plastique de rêve – dépose un baiser qui en dit long sur ma joue et glisse sans grande discrétion son numéro dans la poche de mon veston. Je lui adresse un sourire charmeur tout en sachant qu’il y a peu de chances que je la rappelle. En d’autres circonstances, je me serai fait un plaisir de partager sa couche un soir ou deux mais j’ai trop de choses en cours pour m’encombrer de fausses attaches sentimentales. A la place, je serre la main de Dean qui prend congé pour se diriger vers les coulisses. Owen et Galina, quant à eux, vont prendre place, en première file pour cette dernière, confortablement installé à sa place désignée pour le premier. C’est qu’apparemment, il a beau apprécier la musique pop, il n’en est pas pour autant un fan inconditionnel des Hooks. Ce rôle est spécifique à Galina. Celle-ci n’oublie d’ailleurs pas de me rappeler ma promesse de lui présenter le groupe une fois leur performance achevée avant de quitter les lieux.

Réprimant à grand peine un sourire affectueux devant son comportement digne d’une groupie adolescente – il y a trop de monde pour me laisser aller à de pareilles démonstrations d’affection – je me tourne de nouveau vers Lilian et ses deux accompagnatrices. Honnêtement, j’espère qu’elles ont l’intention de se rapprocher de la scène ou tout au moins de nous laisser seuls. En effet, après ce moment de socialisation et désormais que la soirée est lancée et n’a plus besoin de nous en continu pour se poursuivre sans accroc, j’aimerai profiter de mon associé en privé quelques instants. Nous avons après tout un bon paquet de choses à nous dire, tant professionnellement qu’amicalement. C’est qu’avec ces derniers mois de travail, nous ne sommes finalement que peu croisés et lorsque l’occasion se présentait, les détails pratiques ne nous laissaient pas tellement de temps pour discuter d’autre chose. Or, croyez-le ou non mais croiser le fer dans un nouveau duel verbal avec le Britannique m’a manqué. Ce n’est peut-être pas la seule chose qui m’a manqué mais je ne suis pas prêt à me lancer dans cette pente pour l’instant. Je me contente donc de lui murmurer à l’oreille pour éviter d’attirer l’attention des indiscrets :


-Que diriez-vous d’aller nous consoler de nos pertes respectives dans un des salons VIP fermés au public pour ce soir ? J’ai un whiskey 15 ans d’âge dont vous me direz des nouvelles. A moins que vous ne soyez un fan caché des Hooks auquel cas, je m’en voudrais de vous retenir loin de vos idoles.

C’était plus fort que moi, je n’ai pas pu m’empêcher de terminer sur cette petite pique, mais ce n’est que justice après le nombre de fois où il a joué à chaud et froid avec moi.
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Lilian D'Eyncourt
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeLun 25 Aoû - 21:27

Une fois le jeu bien lancé, le temps passa à une vitesse folle. Nombreux étaient ceux qui essayèrent d’attirer l’attention des joueurs en se prenant d’une passion soudaine pour la partie. Dean gérait ses groupies avec sa désinvolture habituelle, n’hésitant pas à insulter celles qui s’avisaient de le déconcentrer, une belle créature essayait d’imposer sa présence aux côtés de Nikolaï, et Délia ignorait superbement les œillades qu’on lui lançait, trop occupée à s’amuser avec son « mignon » du soir. Lilian gagna les rieurs et jetait de fausses attentions aux dames qui l’approchaient. La plupart d’entre elles l’avaient déjà croisé dans d’autres soirées. Il s’arrangeait toujours pour séduire des personnes sur le long terme, leur servir ce qu’il fallait de connivence afin de les attacher à lui, les laisser espérer une conversation privilégiée avec lui. Toutes n’étaient bien évidemment pas des écervelées prêtes à se pâmer d’amour devant lui, mais il les fascinait, dosait mystère et séduction pour leur paraître aussi inaccessible qu’intéressant. Quand tout se termina enfin, le britannique en ressentit un profond soulagement. Mêler le jeu à son image sociale requérait une concentration immense. Il avait œuvré pour donner envie à tous les spectateurs de prendre leur place, et de leur voler la vedette. La partie ne devait pas lui donner la victoire non plus. Nikolaï semblait du même avis. Ils n’avaient rien à prouver aux invités de cette soirée, et ceux-là savaient très bien ce que leur défaite signifiait. Ils laissaient gracieusement la gloire à leurs amis, ce qui les rendait plus amicaux. Et, après tout, si les propriétaires perdaient avec le sourire, quelle honte y avait-il à se faire plumer en retour ?

Comme prévu, les premiers groupes de jeu se formèrent alors qu’ils s’éloignaient de la table. Cette partie du casino promettait de ne pas désemplir avant une heure avancée. Certains semblaient même prêts à en oublier le concert, ce qui n’était pas un mal. Beaucoup de personnalités venaient davantage se montrer qu’apprécier un spectacle. Le milieu mondain était rempli de rustres qui ne pensaient qu’à boire et se distraire selon les caprices de leurs instants. Ils se réjouissaient d’un programme presque autant qu’ils s’appliquaient à le mépriser quand ils participaient à la soirée. Lilian observait le résultat de leur partie avec satisfaction. Le petit groupe si charmant qu’ils avaient formé se dispersait pour le spectacle. Délia revint vers Samantha pour poursuivre le plus naturellement du monde la discussion interrompue près d’une heure plus tôt, mais il voyait qu’elle gardait un œil discret sur la position d’Owen. Il commençait à se demander jusqu’où elle serait capable d’aller pour tourmenter ce pauvre garçon. Que la jeune femme s’attache de cette manière à un adolescent était assez rare. Mais, au fond, qu’est-ce qui était courant avec elle ? Ses lubies ne répondaient à aucune logique. Elle n’était pas sa principale priorité de toute manière. Loin de se vexer, Lilian était enchanté que sa compagne se soit trouvé d’autres sujets d’intérêts et n’ait pas dans l’idée de le coller jusqu’à la tombée du rideau. Ils avaient tous deux été très clairs sur le fait qu’ils étaient libres d’agir comme bon leur semblait tant que cela ne mettait pas en péril l’image de l’autre.

Ainsi, il ne resta que Nikolaï et lui, enfin seuls, libres de disposer dans leur temps sans être obligés de s’intéresser à l’existence de quelque fâcheux. Lilian le laissa faire un premier pas vers lui. Il ne bougea pas tandis qu’il lui susurrait son invitation à l’oreille. Un sourire ravi s’esquissa sur ses lèvres. Oh, le russe avait l’art de lui donner envie de le suivre. Sous ses airs très sociale, l’héritier D’Eyncourt s’épuisait vite au milieu d’une foule, et il n’aimait rien de plus que s’isoler avec quelques personnalités choisi à des moments clés des soirées. Il se ménageait de cette manière, se montrant juste assez présent pour donner l’impression d’avoir été actif durant tout un événement, alors qu’il n’en était rien.

- Les Hooks se passeront de moi, je les ai vus bien assez pendant les répétitions, et vous savez bien que c’est vous que j’admire en secret…, répondit-il en lui rendant malicieusement la politesse.

Il y avait, au fond, une part de vérité dans cette déclaration. Pendant tous ces échanges professionnels qu’ils avaient entretenus, leur étrange et dangereuse complicité lui avait manquée. Depuis le début de la soirée, il n’attendait qu’une chose, trouver un prétexte pour reprendre leur fascinante discussion là où ils l’avaient interrompue quelques mois plus tôt, mais en lui ajoutant toutes ces petites piques qui avaient jalonné leur correspondance et échange téléphonique pour les mener en un point encore inconnu.

- Où se trouve donc ce salon ? poursuivit-il en se dirigeant vers les coulisses.

Ses doigts effleurèrent un instant son épaule, avec autant de familiarité que d’ambigüité, comme si aucune camaraderie n’était jamais tout à fait naturelle avec lui. Il laisserait à Nikolaï le soin de choisir la pièce, dans le cas où il avait déjà une idée très précise en tête.

- J’ai déjà bu assez de champagne pour ne pas en vouloir avant plusieurs heures. On se lasse décidément trop vite de cette boisson.

Et, comme il ajoutait cela, rien dans son attitude ne semblait justifier une trop grande consommation d’alcool depuis le début de la soirée. Ce n’était pourtant pas faute de l’avoir vu vider presque deux bouteilles depuis l’arrivée des premiers invités. Il buvait par habitude, aimait le goût et la courte griserie qu’il réussissait à provoquer en exagérant les doses. Comme les gens faisaient généralement peu attention à ce que faisaient leurs semblables pendant ce genre de soirée, et avaient plutôt tendance à s’étonner qu’un de leurs amis ait une overdose alors qu’il « n’avait presque rien pris », il se surveillait assez peu.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Lun 8 Sep - 20:51, édité 1 fois
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Nikolaï M. Kolyakov
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeVen 29 Aoû - 10:05

A l’écoute de la réponse de Lilian, je laisse apparaître un sourire satisfait sur mes traits. Je me sens quelque peu comme un adolescent complimenté par son premier béguin mais, avec le temps écoulé depuis notre première rencontre, j’ai accepté que le Britannique fait partie de ces rares personnes capables de me déstabiliser d’un seul mot et que j’aurais beau me débattre et nager à contrecourant, la tendance ne s’inversera pas. Alors autant se laisser porter et profiter du voyage. Car, les sensations provoquées par Lilian sont souvent inattendues, parfois franchement déconcertantes mais rarement désagréables. Je guide donc mon compagnon à travers le dédale des multiples salles composant la partie VIP du casino, profitant simplement de la conversation de ce dernier.

Nous traversons trois salons aux dimensions imposantes sans que je fasse mine de m’y attarder pour arriver enfin dans une pièce plus petite, moins grandiose, mais procurant une atmosphère plus secrète, plus intime. Déposant ma veste sur l’accoudoir d’un fauteuil, je fais signe à Lilian de s’installer où bon lui semble. Ce ne sont pas les choix qui manquent, puisqu’une demi-douzaine de fauteuils ainsi qu’un sofa pouvant accueillir trois personnes peuplent la salle. Puis je réponds amusé à sa remarque sur l’excès de champagne :


-Les vins pétillants sont attrayants lors d’un toast mais ils ne restent pas assez en bouche pour pouvoir les déguster sur la distance à mon goût. Sans compter que les bulles ont une sale manie de monter beaucoup trop vite à la tête. Il en va tout autrement d’un whiskey correctement distillé.

Je me dirige alors vers une étagère sur ma droite et, après avoir jeté un coup d’œil rapide aux différents alcools y reposant, porte mon choix sur un Lagavulin seize ans d’âge – je n’étais pas si loin du compte au final – ainsi que deux verres à whiskey. J’amène le tout sur la table basse près de laquelle nous avons pris place et remplit les verres. La couleur vieil or à reflets ambrés du liquide attire immédiatement mon attention. Je ne suis pas particulièrement spécialiste – mon business c’est le vin, de Bourgogne plus précisément - mais j’aime à m’adonner à une petite dégustation de temps à autres. Pas suffisamment pour me ruiner avec une bouteille introuvable mais certainement assez pour avoir toujours une bonne bouteille à proximité. Je lève donc mon verre en l’air et propose un toast :

-A une association des plus productives et une soirée réussie !

Puis, me renfonçant plus confortablement dans mon siège, je laisse l’ambiance détendue m’envahir et m’abandonne à une question personnelle. De toute façon, ce n’est pas comme si nous ne jouions pas en permanence avec la frontière régissant nos relations, tantôt purement professionnelles, tantôt proches d’une intimité dont nous semblons tous deux fantasmer et nous défier à parts égales.

-Etes-vous toujours si populaire avec la gente féminine ? Car si je ne peux pas réellement m’avouer surpris de cette découverte, je ne m’attendais pas réellement à voir deux jeunes femmes démontrer une animosité si forte - bien que bien dissimulée je le reconnais - l’une envers l’autre au moment de se disputer vos charmes. Je vous accorde néanmoins que vous savez les choisir. Miss Sutherland a un charme mystérieux et un air de désintérêt et quasi mépris pour la société qui la rend fascinante et compense largement la froideur qu’elle peut dégager. Quant à la belle pousse qui s’est attiré les foudres de Miss Sutherland, son physique seul justifie sa compagnie. Possèderait-elle d’autres qualités que je ne pourrai que louer d’autant plus vos goûts.

Une fois mes remarques terminées, je prends une première gorgée de whiskey et la saveur tourbée du liquide me surprend. J’avais oublié cette particularité. Je déguste néanmoins avec plaisir l’alcool écossais, laissant à Lilian le temps de réfléchir à sa réponse tandis que mes pensées se tournent vers mes propres conquêtes. Et je suis bien obligé de constater que j’ai été assez sage – peut-être trop ? – ces derniers temps. Si l’on laisse de côté la belle rousse qui me faisait des avances il y a de cela quelques minutes et dont le numéro repose désormais dans la poche de ma veste, ma dernière aventure remonte à plusieurs mois de cela. Quatre pour être plus précis. Et l’appeler aventure est peut-être un peu trop aventureux pour l’étendue de nos échanges. Disons plutôt que j’ai rendu les deux semaines de visite à New-York de Maria Castellini, représentante de l’ENI venue conclure un marché avec les entreprises Kolyakov, plus intéressantes que prévu. Et le fait que notre compatibilité au lit ait aidé à arrondir les quelques angles malvenus du contrat n’a été qu’un bonus de plus. Mais depuis son retour à Rome, je suis resté chaste. J’ai bien été tenté plus d’une fois par des femmes et quelques hommes assez entreprenants pour m’approcher lors d’un gala ou autre mais je ne me sentais pas d’humeur. Aucun/e n’a su attirer suffisamment mon attention pour que j’envisage sérieusement de lui accorder mon temps et je n’étais pas assez en manque pour accumuler les nuits sans lendemain. Le travail prenait toujours le dessus, en particulier avec les multiples difficultés que l’ouverture du casino a engendrées. Ne serait-ce que la paperasse requise pour obtenir l’autorisation de construire, la licence de servir des boissons alcoolisées et le permis de jeu nous a pris pratiquement un mois. Heureusement que nous savons nous entourer de gens compétents sinon Dieu seul sait quand nous aurions pu ouvrir au public.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeLun 8 Sep - 22:30

- J’aime que les bulles me fassent tourner la tête, déclara-t-il d’un air frivole en s’enfonçant nonchalamment dans un canapé.
Il ferma les yeux un instant pour apprécier le silence de la pièce. L’agitation du casino n’était plus qu’un bourdonnement lointain, surtout porté par les lourdes vibrations de la scène. Sur toutes les loges possibles, Nikolaï avait opté pour l’une des plus confinée. C’était un excellent choix. Il leur épargnerait les importuns, et le malaise de se trouver au milieu d’un vide immense qui ne demande qu’à être comblé. En entrouvrant une paupière, il vit le jeune homme se diriger vers une étagère sur laquelle reposait déjà – semblait-il – son bar personnel. Comme promis, il lui présenta un whisky de marque, boisson que presque tout homme d’affaire digne de ce nom se devait d’apprécier. Lilian gardait un goût prononcé pour tous les alcools de qualité, en particulier ceux dont le sucre ne lui attaquait pas le palais. Les liqueurs l’écœuraient vite, l’amertume lui convenait à merveille. Il trinqua dans un sourire ravi, et goûta généreusement au liquide ambré. Il aimait cette impression de chaleur qui vous traversait le corps pendant la première gorgée d’une boisson forte. Son pouvoir, au moins, ne le privait pas de ce plaisir.

Très rapidement, Nikolaï orienta la conversation sur son succès auprès des femmes. Son regard étincela d’intérêt, d’amusement. Il étudia le russe avec une attention accrue tandis qu’il lui expliquait toute la curiosité qu’un sujet aussi sulfureux lui inspirait. La contrariété de Délia quand Elena s’était jetée sur lui n’avait pas échappé à son œil alerte. Il était vrai que cette réaction donnait l’impression que certaines étaient prêtes à s’entretuer pour lui. Ce n’était pas tout à fait faux, même si sa « cavalière » se montrait rarement aussi possessive. L’histoire de ses amours pouvait former la trame d’un roman fleuve en plusieurs tomes. Il était lui-même incapable de tout retracer avec précision et, lorsque le sujet était abordé, il semblait à ses interlocuteurs les plus fréquents qu’il avait toujours une aventure plus terrible que la précédente à rapporter. Lilian était un véritable coureur et ne s’en cachait pas. Il avait débuté sa « carrière » très tôt, et s’était accordé très peu de poses. Il était l’abonné des relations de quelques nuits, des liaisons passionnelles qui se rompaient brutalement après des semaines d’effusions, et gardait des contacts réguliers avec les partenaires dont il appréciait la compagnie occasionnelle. Il ne pouvait s’empêcher de séduire, et il lui fallait absolument conclure pour considérer la partie gagnée. D’autres fois moins glorieuses, il refusait simplement l’idée de dormir seul. En presque quinze ans, il ne se souvenait pas avoir connu une solitude sexuelle plus d’un mois. Mais, pourtant, il sélectionnait ses conquêtes avec choix, avait l’œil pour repérer une personnalité originale, un être réellement charismatique dans une foule, et ne lâchait plus sa proie avant d’en avoir révélé tous les mystères. Nikolaï semblait très agréablement surpris par la pertinence de ses choix.

- Je pourrais finir par croire que vous m’enviez ces dames, plaisanta-t-il. Si vous désirez découvrir Elena, je doute que ce soit difficile, mais c’est une enfant perturbée, qui demande une attention soutenue. Elle n’est pas inintéressante, à condition d’aimer les âmes brisées par l’éclat éphémère de la gloire. – Disant cela, il termina son verre. – Délia est une très vieille amie, nous entretenons une liaison sporadique depuis des années, je ne saurais vraiment vous dire quel genre de relation nous lie… C’est particulier… Je pourrais dire qu’elle est à l’image de ma femme idéale et, pourtant, rien ne deviendra jamais sérieux entre nous, et j’avoue ne pas toujours la comprendre non plus. Mais je crois surtout qu’elle n’aime pas Elena, trop opposée à ses valeurs, ou qu’elle ne tolère que de me voir avec des hommes lorsque nous sommes ensemble.
Par respect pour la rousse au regard polaire, Lilian se garda d’évoquer sa vie et ses blessures personnelles. Il laissait au russe le loisir de la découvrir – puisqu’elle le fascinait tant – s’il le désirait. Le ton léger emprunté pour sa dernière réplique, qui s’accompagnait d’un regard complice à l’adresse de Nikolaï, lançait un nouveau sous-entendu difficile à ignorer. Il était heureux d’être engagé sur un sujet aussi personnel que propice à des rapprochements.
- Mais pour répondre à votre première question, je ne peux pas nier que la popularité me suive dans ce domaine. Je m’excuse d’ailleurs d’avance si me fréquenter vous jette comme tout à l’heure, sur le théâtre de quelque drame sentimental. La vie galante a parfois des revers malheureux, mais j’essaye de me calmer…

Il soupira doucement, l’air de prononcer un vœu pieu. Pourtant, il tentait, au fond, de construire quelque chose de sérieux depuis quelques mois avec Icare. Et qu’avait-il fait, à peine Délia arrivée ? Qu’était-il en train de faire en cet instant sinon jouer un jeu dangereux avec un autre homme ? Certes, il ne courait plus les soirées à la recherche d’une nouveauté à mettre dans son lit, appelait moins ses « partenaires réguliers » qu’avant, résistait aux avances désespérées de Mélo, mais se dire qu’être avec quelqu’un devait contrarier ses envies les plus brûlantes l’ennuyait beaucoup. Il se répétait que cela ne changeait rien. Son compagnon n’avait pas besoin de connaître ses gestes lorsqu’ils ne se voyaient pas. Et il avait été très clair avec lui sur le fait qu’il n’était pas prêt à l’intégrer complètement dans son existence.

- Mais vous me paraissez plus sage… Ou, peut-être, moins démonstratif que je ne le suis. J’imagine que vous gardez une meilleure maîtrise que la mienne sur vos relations… Vous n’aimez pas céder sur un coup de tête, je ne risque pas de vous découvrir une quelconque amante éconduite et enragée pendant la soirée…

Plutôt que des questions, il s’amusait à employer des phrases affirmatives, pour le forcer à parler en lui donnant l’illusion de le comprendre, pour tenir un double discours où autre chose semblait se préparer entre eux. Il était évident que ce registre lui était d’un parfait naturel.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeVen 12 Sep - 17:02

La description de sa relation Miss Sutherland me surprend, allant jusqu’à me provoquer une pointe de malaise. Comment peut-il considérer avoir trouvé son idéal et, dans le même temps, déclarer ne pas le comprendre et préférer ne pas l’approcher de trop près ? Ce n’est pas tant la contradiction inhérente à ce discours qui m’étonne – j’ai accepté depuis longtemps que je ne suis attiré que par les personnalités aussi complexes voire perverses que la mienne – mais la finalité avec laquelle il déclare ressentir un attachement si fort à une femme qu’il avoue par la même occasion ne pas bien saisir. Jamais je ne pourrais lier mon destin à celui de quelqu’un dont les motivations me seraient aussi floues. Partager sa couche avec une énigme vivante, très bien, excellent même, quoi de mieux qu’un petit mystère pour rajouter du piment à sa vie sexuelle ? Mais envisager plus sans savoir ce que l’autre désire, pire sans savoir ce qu’il pense vraiment, cela m’est totalement inconcevable. Mais c’est peut-être bien ce besoin pathologique de contrôle qui fait que je suis encore célibataire.

En effet, ce ne sont pas les occasions qui ont manqué. J’ai bien rencontré deux ou trois partenaires avec qui il aurait été possible d’envisager une véritable relation mais, à chaque fois, lorsque le moment de franchir le pas de l’intimité intellectuelle et non plus seulement physique est arrivé, j’ai fait marche arrière toute. L’idée de baisser réellement mes défenses en présence d’un ou une égal/e m’effraie. Car c’est différent de se présenter tel que je suis à certains de mes hommes dont je contrôle le destin que d’offrir une partie de moi à une personne que je mettrais sur un pied d’égalité avec moi. Il s’agirait d’une preuve de confiance en l’humanité que je n’ai jamais été particulièrement enclin à tenter, encore moins depuis que mon pouvoir s’est développé. Il est si facile de découvrir les pires défauts des gens en fouillant leur esprit que leur accorder une réelle chance de vous prouver qu’ils peuvent être meilleurs que l’image que vous êtes fait d’eux demande un temps que je suis rarement prêt à accorder à qui que ce soit.


-Mais vous me paraissez plus sage… Ou, peut-être, moins démonstratif que je ne le suis. J’imagine que vous gardez une meilleure maîtrise que la mienne sur vos relations… Vous n’aimez pas céder sur un coup de tête, je ne risque pas de vous découvrir une quelconque amante éconduite et enragée pendant la soirée…

Comme en écho à mes pensées, les paroles de Lilian me ramènent à la réalité, m’incitant à en dévoiler plus sur moi-même. Et, sans grande surprise à ce niveau de là de la partie – il m’a été suffisamment prouvé que le Britannique pique suffisamment ma curiosité pour que je sois prêt à le laisser m’approcher de près en échange de pouvoir faire de même – je me laisse entraîner dans son jeu. De séduction ? De manipulation ? Sûrement un savant mélange des deux et c’est bien ce qui me plaît.

-Il a déjà été dit que j’avais une tendance au contrôle total. Je n’aime pas les imprévus, en amour comme pour le reste. Alors, désolé de vous décevoir si vous espériez que je vous rende la pareille mais vous ne pourrez pas vous entretenir avec les frasques de mes anciennes conquêtes. Je me fais toujours un devoir de laisser clair ce que je désire au début d’une relation, et c’est à prendre ou à laisser. Et si un amant ou une amante cherche à changer les règles du jeu en cours de partie, je me fais un plaisir de lui montrer la sortie.

L’image de ce grand Afghan aux yeux de charbon dont j’ai oublié le nom depuis longtemps que j’avais rencontré lors d’une de ces mémorables soirées étudiantes de la LSE, à qui j’avais accepté de laisser exceptionnellement le contrôle le temps d’une nuit et qui avait tenté d’en profiter pour se lancer dans des jeux de domination pour lesquels je n’avais pas signé me revient en mémoire et un sourire mauvais étire mes lèvres, sans que je ne fasse de réel effort pour l’en empêcher. Il avait fini en bien piètre condition. Un véritable gâchis au vu de ses performances précédentes. S’il n’avait pas tenté d’en avoir plus que convenu, on aurait pu continuer longtemps en ce qui me concernait mais il faut croire que certains ne savent pas s’arrêter à temps.

-Bien entendu, je vous mentirais si je vous disais que tout se termine toujours bien. Il n’est pas rare qu’un partenaire finisse par se bercer d’illusions sur la teneur réelle de nos échanges, en particulier s’ils sont répétés, mais je peux remercier le Tout-Puissant des charmes qu’il m’a accordés en la matière et qui me permettent en règle générale d’éviter le pire.

Faisant inconsciemment tourner le whiskey dans mon verre, j’en termine la dernière gorgée avant de nous resservir, réalisant soudain qu’en vingt-cinq d’années d’existence, autrement dit bien peu pour ce que j’ai accompli – non il ne s’agit pas d’auto-compliments mais de la constatation que j’ai été grandement favorisé par la vie et que j’ai su en profiter au mieux pour me faire ma place au soleil ou plutôt à l’ombre au vu de mes activités principales – je n’ai pas connu une seule relation sérieuse. Des flirts prolongés certes, mais une relation où l’on accorde réellement son cœur à l’autre personne, jamais. Ce qui est peut-être bien dû au fait qu’au-delà de l’inconvénient de ma paranoïa naturelle nourrie par mon pouvoir, je ne suis jamais tombé amoureux. Parfois je me demande même si je ne passe pas à côté de quelque chose mais très vite le quotidien me rattrape et je me désintéresse de ce genre de questionnements pseudo-métaphysiques.

-Quoiqu’il en soit, je reconnais sans difficulté que je n’ai pas de Miss Sutherland à mon palmarès. Je n’ai jusqu’ici jamais lié amitié et attirance. Mais je n’ai peut-être tout bonnement pas encore rencontré la bonne personne, finis-je avec ma propre pique.

Car ne croyez pas que j’ai laissé passer son sous-entendu sur la tolérance de ladite Miss Sutherland à ses aventures masculines. J’ai simplement préféré faire semblant de ne pas comprendre pour reprendre un peu les rênes de la conversation. Parce que, si je ne sais pas vraiment jusqu’où j’ai envie de pousser ces provocations incessantes, il est au moins certain que je n’ai aucune intention de mettre un terme à notre duel verbal. Encore moins lorsqu’il se double d’une séance de confidences alcoolisées.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMer 24 Sep - 21:42

Pour un homme aussi obsédé par le contrôle absolu, Nikolaï glissait sur une partie très dangereuse où il était assuré de perdre. Lilian restait plus serein, moins surpris par ses confidences. Il avait l’habitude d’attirer dans ses filets des individus comme lui, des esprits d’une grande rigueur qui n’osaient pas affronter leurs propre chaos. Sa tendance à céder à tous les caprices que ses pensées lui soufflaient le rendait lumineux. Ils venaient à lui sans savoir pourquoi, puis attendaient de se laisser guider par ses mots, ses actes, sur le chemin de leur propre destruction ou, en tout cas, de ce qui semblait l’être. Délia était la femme la plus frigide du monde avant d’entrer dans son jeu, Mélo sortait d’une adolescence pathétique, pendant laquelle il n’avait cessé d’être rabaissé, avant de se transformer en un viveur sans limites. Réorganiser, avec art, la conscience de ses partenaires, les forcer à laisser sortir la « bête » en eux, était une chose qui amusait beaucoup le britannique. Contrairement à ce que semblait croire Nikolaï, il n’espérait pas lui découvrir un parcours aussi sulfureux que le sien. Les personnes trop libérées ne l’intéressaient pas, elles étaient comme achevées, sauf si, à l’image d’Elena, elles se perdaient dans leur propre désordre. Lilian restait quand à lui sur un fil tendu. Il gardait un certain contrôle sur son existence, sans quoi, il n’aurait jamais pu la porter à ce niveau, mais il alternait lucidité extrême et besoin terrible de s’oublier, de n’être rien, d’envoyer valser la terre entière. Il feignait d’avancer en équilibriste mais connaissait toujours par avance les limites à ne pas dépasser, frôlait les bords jusqu’à s’en donner le vertige, et ne sautait jamais, même si le vide le fascinait. Après tout, qu’était une petite maladresse en société quand il pouvait ensuite s’abriter derrière son influence, son nom et son argent pour régler le problème avec une campagne d’intimidation ?

- Oh par pitié, ne vous excusez pas. Je n’ai aucune envie d’entendre des histoires que je pourrais raconter moi-même, plaisanta-t-il pour balayer l’obligation que se sentait presque le russe de lui évoquer ses piètres frasques sentimentales.

Il ne le croyait cependant pas lorsqu’il affirmait ne pas aimer les « imprévus ». Son for intérieur devait les adorer pour accepter un tête à tête avec lui, et sa remarque à propos de la manière dont il remerciait les personnes qui parvenaient à lui déplaire ressemblait plus à une invitation qu’à une menace. En tout cas, Lilian l’interprétait de cette manière, d’autant plus encouragé par le soin qu’avait pris le jeune homme à lui souligner à son tour sa bisexualité. L’information nouvelle ne l’étonna pas, il l’attendait un peu. Mettre en place la relation ambivalente qu’ils entretenaient depuis quelques mois n’aurait clairement pas été possible si Nikolaï était certain de n’être attiré que par les femmes. Il lui avoua ensuite qu’il connaissait, aussi, les ruptures pénibles, les partenaires dont il est délicat de se défaire, mais pour le reste, sa vie sentimentale semblait assez terne, comme s’il n’avait rien d’autre à présenter qu’une succession de conquêtes presque anonymes. A l’inverse, Lilian venait de lui prouver que les personnes avec lesquelles il se liait gagnaient parfois une place toute particulière dans sa vie. Elles ne faisaient souvent que passer, mais laissaient une marque. Il fallait que l’être sur lequel il jetait son dévolu l’aime, peu importait la manière, il devait devenir important à ses yeux, sinon, il était peu probable qu’il accepte l’intimité, même pour une nuit. Son cher associé savait au moins par instinct ce qu’il faisait en lui signifiant sur un ton qui en disait long qu’il n’avait pas encore rencontré la bonne personne. Il se laissait doucement piéger, acceptait de lui donner cette importance indispensable à qui voulait le retenir. Et le britannique sourit comme s’il s’agissait d’une gentille plaisanterie sans conséquence. Il but une nouvelle gorgée d’alcool, et reprit tranquillement :

- Je ne pourrais pas vous donner tort, mélanger amour et amitié est une pratique risquée, à laquelle je m’adonne trop souvent. Peu de personnes sont prêtes à signer de manière définitive pour une relation de ce type… Et si je peux me permettre cette confidence – ajouta-t-il soudain plus grave – rien n’est plus difficile que s’en défaire. Les sentiments finissent souvent par l’emporter d’un côté, et les attentes par changer. Alors, on risque de perdre une personne précieuse sur ce qui devient un malentendu…
Il s’interrompit un instant, laissant ses pensées vagabonder vers Mélo qui ne supportait pas son éloignement depuis qu’il essayait de mener une vie de couple sérieuse. Vie qu’il n’arrivait pas à avouer à Nikolaï, parce qu’il sentait une attirance s’affirmer entre eux et refusait de se voir autrement qu’en homme libre.
- Mais les relations humaines les plus passionnantes sont chargées d’imprévus. Cette « bonne personne » dont vous me parlez n’est pas un être que vous pourrez modeler à votre guise… Les plus sages n’envisagent jamais qu’un fade mariage. Il existe entre les rapports de soumission et de domination les plus primaires, tout un nuancier vers lequel vous tendez. Sinon, je suppose que vous ne serez pas ici, à me parler de ce besoin de contrôle absolu qui vous protège autant qu’il vous emprisonne. Mais nous avons tous nos démons intérieurs… Le mien est peut-être à l’exacte opposée du votre, et je suis heureux que vous n’osiez plus sonder mon esprit, il eût été regrettable que je vous fusse ennuyeux avant de pouvoir ouvrir la bouche, ne trouvez-vous pas ?

Il se redressa légèrement sur son siège, comme pour rompre fictivement la distance qui les séparait. L’amorce devenait de plus en plus évidente mais, enfin, depuis les mois qu’il s’amusait à le taquiner, il aurait été idiot de faire l’enfant en passant à côté d’ouvertures aussi claires. Ils ne resteraient pas toute la soirée dans cette loge, ils connaissaient tous deux parfaitement les raisons de leur présence ici. Si Nikolaï voulait se confier, il se mettait dans une position où l’échappatoire se compliquait à chaque nouvelle réplique, et il semblait avoir besoin de relâcher un peu toutes ces barrières dressées autour de lui, à cause de son pouvoir, de sa famille peut-être. C’était un plaisir que de l’y aider.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Jeu 9 Oct - 18:09, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 30 Sep - 15:44

Tomber sous le charme d’une connaissance. Un malheur que nous connaissons tous à un moment ou un autre de notre existence. Y succomber là est tout le danger. La tentation de goûter aux plaisirs interdits est en effet forte mais il devient alors bien vite compliqué de dresser clairement la ligne entre cœur et corps. Autrement dit, des étreintes physiques on désire peu à peu passer à une communion plus profonde, plus intime. Et c’est là que la situation peut très vite dégénérer en catastrophe. Découvrir néanmoins que malgré cela Lilian s’est aventuré dans cette voie plus d’une fois est loin d’être une surprise. C’est plutôt une attente à laquelle il aurait été presque inconvenant de sa part de ne pas répondre. C’est qu’à force de se créer une image, il faut pouvoir s’y conformer, au risque sinon de décevoir son auditoire. Pourtant, je ne m’inquiète pas outre mesure.

Peut-être est-ce une erreur de ma part mais je ne sens pas en danger de tomber dans les filets du sieur D’Eyncourt. Ou plutôt correction, je me sais totalement envoûté par le charme indéniable qu’il dégage, charme suffisant pour que j’envisage une fin de soirée mouvementée à ses côtés mais, à aucun moment, je n’ai ressenti envers lui le désir brutal que certains ou plus précisément certaines de mes anciennes conquêtes ont su faire naître en moi. L’attrait de Lilian est avant tout cérébral. C’est par conséquent un attrait bien plus dangereux et qui pourrait me causer bien des ennuis si je venais à découvrir que j’avais surestimé mes capacités à résister à ses atours – l’ironie du télépathe envoûté par les pensées d’un autre ne m’échappant pas – mais il m’évitera les folies que provoque habituellement la passion. Jamais je n’envisagerai quoique ce soit de sérieux avec un être aussi élusif et dangereux que Lilian. Car ce serait m’adonner là au pire de mes penchants, celui qui tend vers mon autodestruction progressive.

Ainsi, si je dois reconnaître à regret que je serai désormais tout aussi incapable de me défaire définitivement de l’emprise du Britannique sur moi – une nouvelle qui donnerait une attaque à ce pauvre Dimitri – que d’envisager un futur aux côtés du journaliste. Car il a le malheur – ou le bonheur ? – d’être non ce que je recherche chez un autre mais ce que je désire chez moi. Il a une capacité à manipuler sans vraiment le faire qui m’est devenue familière au cours de ces quelques mois d’association et qui dépasse grandement toutes mes aptitudes en la matière. Il suffit en effet de constater que je ne pourrais plus me passer de sa conversation pour de trop longues périodes. Et il le sait, je le lis aussi clairement dans ses yeux que dans son esprit. Il sait exactement quel fil tirer, quel bouton titiller pour m’amener là où il le désire. Sa provocation facile d’aller jeter un coup d’œil à ses pensées est ainsi un piège tellement évident qu’un enfant de quatre ans saurait le reconnaitre et malgré cela, je me jette dedans les bras grands ouverts. Avec cette certitude amère qu’il est déjà trop tard pour faire demi-tour. Et que le pire c’est que je n’en ai pas vraiment envie. Je suis accro et j’en suis parfaitement conscient. Mais comme tout bon addict, la connaissance n’est pas suffisante pour me motiver à échapper aux griffes du danger. Au contraire, ce n’est qu’une invitation de plus à me vautrer dans la fange.


-Je doute que vous me soyez ennuyeux, plongée dans votre esprit ou non, déclarais-je donc avec honnêteté et plus de calme que je n’en ressens en réalité.

Je me sens en effet soudain comme excité, attiré par la récompense qui n’attend plus que je tende la main pour l’attraper. Cette récompense qui risque bien de n’être qu’un miroir déformant me présentant une entité me ressemblant moins que je ne le voudrais. Car ce qui a commencé comme une sorte de délire narcissique : deux individus alpha – la tendance à la manipulation du Prince de l’Information ne laissant aucun doute sur sa place dans la hiérarchie sociale pour autant qu’il aime à se rendre plus inoffensif qu’il n’est – se provoquant sans savoir s’ils veulent se détruire ou s’apprivoiser a fini par tourner à une fascination malsaine que je suis cependant encore assez lucide pour reconnaitre comme ce qu’elle est. Dommage que je ne sois plus capable de m’en échapper avant de sombrer dans des profondeurs dont il ne sera pas évident de ressortir. Car, plus je fréquente Lilian et moins je me fais confiance en sa présence. Et moi qui suis habitué à toujours dominer les situations, cette ambigüité qu’il crée en permanence autour de lui, ne laissant jamais clair s’il est prêt à céder ou s’il ne fait que contourner la difficulté pour mieux vous embobiner par la suite m’attire tout autant qu’elle me révulse. Et ce pour une raison bien simple : il est bien meilleur à ce jeu-là que moi et ça, mon ego se refuse à l’accepter et c’est ce qui fait que je continue à jouer avec le feu. Reste à savoir s’il se contentera de me réchauffer ou bien s’il finira par me consumer définitivement.

Un instant, je ferme les yeux et me délecte des pensées chaotiques qui forment son esprit alambiqué et qui furent les premières à ancrer leur marque en moi. Cet esprit qui est la pierre d’achoppement d’une stratégie de séduction dont il ne fut peut-être même pas conscient en premier lieu mais qu’il a su user au mieux pour son intérêt depuis, nul doute à avoir sur la question. A tel point que l’idée de ne pas finir la nuit avec lui n’est tout simplement plus envisageable. Ce qui suivra cette nuit reste encore un grand inconnu mais c’est bien là tout l’intérêt. Car dans le fond, ce n’est pas tant son corps qui me passionne – bien qu’il soit loin d’être désagréable à regarder – que son esprit, cet objet fascinant que j’aimerais décortiquer à plaisir. Seulement pour y avoir accès, je dois accepter qu’il s’infiltre dans le mien et force est de constater qu’il y est parfaitement arrivé. Je relance donc la discussion pour tenter comme faire se peut de reprendre quelque peu pied dans cet univers étrange qu’est celui de Lilian D’Eyncourt.


-L’inverse reste encore à prouver.

Dans une autre situation, j’aurais par-là cherché à recevoir les compliments que tout futur amant considère comme son dû mais ma remarque cette fois-ci est d’un tout autre ordre. Il s’agit tant d’une remarque destinée à le – me ? – convaincre que je ne suis pas dupe de ses intentions et qu’après la vie aventureuse qu’il a eu, je ne me mens pas en imaginant pouvoir tenir la comparaison avec certains de ses partenaires qu’une façon de tenter de savoir ce qu’il désire de son côté. Si tant est qu’il désire vraiment quelque chose. Car ses pensées sont si décousues que l’on en vient presque à se demander s’il ne s’agirait pas d’un stratagème savamment calculé pour contrer mon pouvoir maintenant qu’il le connaît. Ou alors il est simplement un chaos ambulant mais je n’y crois qu’à moitié. Tout être humain a besoin d’un certain nombre de repères pour avancer et un homme de l’intelligence de Lilian ne peut pas uniquement être du type « génie fou ». Il a y a un machiavélisme derrière la plupart de ses actes qui contredit son apparence je-m’en-foutiste. Et c’est bien là ce qui en fait un adversaire redoutable. Peut-être est-ce finalement pour cela que je m’acharne à l’avoir plutôt comme allié ? Ou bien je suis simplement une autre de ses victimes incapables de s’en rendre compte.
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeJeu 9 Oct - 20:50

Nikolaï n’était pas le seul à se mettre en danger. En l’invitant presque ouvertement à entrer à nouveau dans ses pensées, Lilian s’exposait. Il ignorait toutes les capacités de cet homme. Que pouvait-il lire au juste ? A quel point pouvait-il décrypter ses pensées les plus profondes ? Ce pouvoir l’inquiétait autant qu’il le fascinait. Il redoutait d’être mis à nu, dépouillé de toutes ses défenses, voir sa forteresse mentale s’effondrer et chercher dans les ruines ce qui pourrait l’aider à se redresser. En même temps, une petite voix lui sifflait depuis l’enfance qu’il serait intéressant de comprendre. De comprendre qui il était, ce qu’il désirait, si ces réponses étaient, au final, quelque part en lui. Mais il en doutait. Toutes ses actions, ses extravagances, ses folies, le menaient au néant. Derrière les caprices, il ne trouvait jamais rien. Aussi loin que ses souvenirs le portaient, il se voyait comme un être vide, avide de sensations, incapable de désirer réellement quelque chose. Souvent, en y songeant, il se voyait comme une aberration de la nature. Sans sa mutation, tout cela n’aurait pas dépassé l’adolescence, et son esprit avait puisé dans des ressors surhumains pour rester lucide, survivre, créer un quelque chose sur un socle de verre fissuré de toutes parts. Aujourd’hui, il avait dépassé ce stade. Il ne voulait plus mourir, il ne passait plus la moitié de son temps à culpabiliser d’être un mutant profondément lié à la destruction. En allant jusqu’à son père, il avait vaincu ses pires démons, et il errait désormais sans but véritable, mais sans mal-être derrière lequel se cacher. C’était une nouveauté, une nouveauté dont il ignorait encore les conséquences et, en jouant avec un télépathe, en lui laissant mesurer une partie de ses béances, il se mettait à l’épreuve. Pour la première fois, et sans doute parce qu’il avait du respect pour cet homme, il n’était pas gêné, honteux, de dévoiler tout ce sinistre qui tournoyait en lui. Mais, après tout, il devinait aussi que, conformément à ses craintes les mieux dissimulées, il n’y avait rien à tirer de ce chaos.

Bientôt, cependant, le russe connaîtrait un élément bien plus essentiel. Il aurait une approche plus précise de son pouvoir, et la révélation était un enjeu bien plus grand que toutes ses divagations d’âme en peine. Si le jeune homme était toujours accroché à ses pensées, alors il ne pouvait ignorer qu’en cet instant même, Lilian écoutait avec une attention accrue les palpitations de son cœur, ses bouillonnements sanguins, identifiait de quelle manière son rythme se modifiait subtilement lorsqu’il essayait de sonder son esprit, et comment une tension fébrile montait peu à peu en lui. Ce dernier indice était probablement le plus troublant. Il est difficile d’ignorer des pulsions érotiques que l’on peut ressentir aussi concrètement malgré la distance, surtout quand la phase de séduction est entamée, semble bien décidée à s’accélérer. Mais pourquoi rechercher les compliments ? Pour s’assurer d’être son égal ? Se rassurer, avoir l’assurance de n’être pas une tête de plus à épingler sur un tableau de chasse ? Lilian lui tourna un sourire qui, dans cette circonstance particulière, avait un quelque chose de carnassier. Sa réplique était banale, et, à la fois, parfaitement adaptée. Nikolaï l’autorisait à faire un pas en avant plus franc vers lui. Chacun son tour. Il lui laissait cependant le rôle du meneur.

- Ce n’est pas avec vous que je serais beau parleur. Vous ne me croiriez pas. Si j’aime la flatterie, je n’ose jamais la rendre en toute sincérité. J’aimerais vous dire que personne ne m’a aussi intéressé que vous depuis longtemps, que je ne m’imagine pas me lasser d’échanger avec vous un jour, mais tout peut basculer si vite… - Il posa son verre sur la table et fit quelques pas dans la pièce pour s’arrêter derrière le dossier de son fauteuil, comme si le rapprochement n’avait rien d’intentionnel. – On croit ne jamais pouvoir faire le tour d’une personne quand, soudain, on réalise qu’elle n’a plus rien à nous apprendre, que tous ses actes et paroles semblent déjà programmés, spécialement pour nous irriter d’être aussi prévisibles.

Il laissa glisser sa main sur le coude du meuble, puis, avec nonchalance, posa une jambe dessus, pour se mettre à la hauteur de son complice et, le regard provocateur, murmurer :

- Mais vous vous estimez sans doute au-dessus de ça. Tout le monde, même l’imbécile fini se croit plus étonnant que ses semblables. Auriez-vous l’affront de me le prouver ?

A sa manière de faire, Lilian témoignait d’une timidité qui ne s’avouait pas. Tout était savamment calculé, jusqu’aux compliments enrobés de circonvolutions, de réflexions abstraites dont le seul intérêt était de provoquer Nikolaï et l’inviter – si besoin était – à être plus démonstratif. Il n’aimait pas les chemins directs, et il préférait toujours que l’on vienne à lui. Avec obstination, il tournait en rond autour de sa proie, guettait, attendait le bon moment pour la cueillir en douceur. Cependant, la tentation de s’abandonner devenait forte, et semblait sur le point d’atteindre une dimension inédite. Il sentait violemment les pulsions de désirs entre leurs corps, et son monde se réduisait à cette unique perception. Son pouvoir, d’ordinaire en accord avec ses désirs, réagissait étrangement à l’idée de « posséder » Nikolaï, comme s’il le lui fallait absolument, au-delà d’un besoin physique, pour se confronter à un égal, l’asservir un instant, et s’abandonner soi-même à un être qui, il l’espérait, ne succomberait jamais totalement. C’était une sensation délicieuse, et dangereuse aussi, parce qu’elle réveillait des instincts primitifs qui le dépassait, n’étaient peut-être pas vraiment les siens. Quelque chose changea dans son regard, une lueur plus sauvage. Nikolaï ne pouvait savoir dans quoi il se jetait vraiment, lui-même n’aurait su le dire, et il songeait déjà qu’il était certainement sur le point de commettre une grave erreur en saisissant ses lèvres, alors que le sang commençait à s’écouler abondamment le long de ses bras et sur ses mains.
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Nikolaï M. Kolyakov
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 14 Oct - 15:56

Sa voix me ramène sur terre, comme le rappel à la fois inquiétant et délicieux que je n’ai pas qu’un esprit face à moi, et je quitte presque à regret le chaos de ses pensées. Un chaos qui contraste d’autant plus fortement avec la minutie avec laquelle chacun de ses mots est pesé. Ses propos, tout comme ses gestes, ressemblent à une symphonie savamment calculée où chaque détail est là pour s’attirer mes grâces tout me laissant toujours percevoir la faille. Cette béance qui attire le regard de celui qui lui accorde une attention suffisante. Cette incongruité qui vient non pas tant s’opposer que se superposer à ses belles paroles, permettant alors d’entrevoir un instant l’être sinueux et tortueux qui se cache derrière le masque du jeune homme blasé.

Je me laisse donc entraîner dans sa chorégraphie, suivant des yeux le moindre de ses mouvements jusqu’à ce qu’il vienne s’installer face à moi, envahissant de manière plus que bienvenue mon espace vital. Sa fausse sincérité m’intéresse d’ailleurs moins que la découverte tout aussi passionnante que terrifiante qu’il perçoit le moindre battement de mon cœur aussi clairement que si j’avais installé un haut-parleur près de celui-ci. Je fais alors l’expérience particulièrement étrange de réaliser mes passions à travers la vision d’un autre. L’attirance qu’il provoque chez moi s’étale soudain dans mon –son – esprit à coups d’excitation sanguine, m’en dévoilant plus sur son pouvoir en l’espace de quelques secondes que toute l’information que j’ai pu récolter ces derniers mois. Je ne saurais dire si j’en suis fasciné ou dégoûté. Tout ce que je sais c’est que sa voix se perd loin dans mon esprit, me permettant tout juste d’enregistrer sa provocation directe, laissant le devant de la scène à un spectacle ô combien plus passionnant. Celui des lèvres de Lilian sur les miennes. Car avant même de les sentir, je les vois claires comme de l’eau de roche dans son esprit et cela ne fait que dédoubler le plaisir qui me parcourt lorsqu’enfin pensées et réalité se confondent.

Je me déconnecte alors de son esprit pour profiter amplement de mes propres sensations. C’est que si mon narcissisme s’est richement gorgé de la vision de moi que j’ai trouvé dans l’esprit de mon vis-à-vis, je ne ferai pas l’erreur de vivre par procuration cette première étreinte charnelle que j’attends depuis plus longtemps que je n’oserais l’avouer. Je m’empare donc quasi brutalement de celui qui vient de m’accorder le droit de l’envisager comme mon amant tout au moins pour une nuit et mes mains viennent enserrer ses tresses aile de corbeau, tandis que mes lèvres cherchent à s’abreuver chez leurs compagnes. Tout à ma folie, je ne sens pas le sang qui vient progressivement tâcher ma chemise, comme pour s’associer à la couleur vermillon de ma cravate, trop obnubilé par le boucan que fait mon palpitant. Car depuis que j’ai découvert à travers Lilian les battements affolés de mon cœur, je n’ai plus besoin de son intermédiaire pour réaliser l’effet qu’il me fait. Le sang me bat suffisamment dans les oreilles pour cela.

Mais alors que naturellement je cherche à franchir le seuil de ses lèvres pour batailler avec sa langue, dans la poursuite logique de nos duels multiples, l’odeur du sang se fait plus puissante et je me reconcentre sur la situation présente. Instinctivement je le repousse, cherchant à savoir qui de nous deux est blessé et suis incapable de retenir ma surprise devant l’état des avant-bras de l’homme sur mes genoux. J’avais réalisé après mon passage dans son esprit que son pouvoir étant de nature sanguine mais je n’aurais jamais imaginé une seconde quoique ce soit de comparable. A vrai dire, je ne sais pas vraiment ce qu’il se passe. Je sais juste que, quoiqu’il en soit, ce n’est pas suffisamment pour supprimer mon désir pour lui. Ce serait presque le contraire, une fascination morbide naîtrait presque en moi face à ce phénomène complètement anormal. Néanmoins, parce que lorsque je choisis un partenaire, son bien-être devient une de mes priorités - tout au moins le temps de notre union - je ne peux m’empêcher de poser LA question qui me taraude, pour ne pas dire m’inquiète.


-Ce n’est pas douloureux ?

Parce que si la perte de sang n’est pas en soi douloureuse – il suffit d’aller faire une preuve de sang pour le savoir – je ne peux pas concevoir que se vider de son fluide vital soit une situation agréable. Sans compter que je ne voudrais tout de même pas que Lilian se meurt dans mes bras. Je suis en effet tout prêt à reconnaître le romanticisme tragique d’un tel acte mais, sans compter les ennuis que me causerait la mort d’une telle célébrité dans mes locaux, je refuse catégoriquement de voir l’homme dont j’ai mis tant de temps à connaître la saveur s’éclipser de ma vie avant même d’avoir pu entièrement le dire mien. Mon désir de possession s’éveille rarement à de tels degrés alors désormais que j’en ai fait de nouveau l’expérience, je ne suis pas prêt de le frustrer, encore moins pour une simple histoire de pouvoir, pour aussi déconcertant qu’il soit.
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Lilian D'Eyncourt
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeLun 20 Oct - 21:15

Il aimait sentir le désir de l’autre, se savoir attendu avec force, et rien ne l’attirait plus que les accélérations sanguines de ses partenaires. Elles étaient à ses sens un appel violent, un cri puissant, qui ne demandait qu’à être apaisé, qui lui donnait une perception aussi agréable qu’entière d’un corps étranger. Son pouvoir s’excitait souvent dans ces circonstances. Il lui était déjà arrivé d’en perdre le contrôle, non parce qu’il se consumait d’une passion sauvage pendant l’étreinte, mais plus généralement à cause d’une faim toute autre. Il avait tué accidentellement, vidé des amants de leur sang, en les dévorant plus qu’il ne leur faisait l’amour sans s’en rendre compte. Des années le séparaient de ces drames cependant. Il avait fini par arrêter de lutter contre les envies répugnantes de son pouvoir. Il ne LE laissait jamais « en manque », et l’appel du sang ne l’emportait plus pendant ses ébats. Il en fallait beaucoup pour le faire ressurgir. Avec Délia, il s’autorisait quelques écarts, mais ils n’avaient rien à voir avec toute la sauvagerie qui éclata en lui, empourpra sa vue, à l’instant où le désir de Nikolaï le frappa de plein fouet, où il l’attira brutalement à lui pour l’emporter dans ce qui s’annonçait comme un duel charnel particulièrement enfiévré. Lilian sentait à peine le sang qui ruisselait sur sa peau. Il lui semblait que sa mutation s’accordait à ses pulsions, qu’elle voulait aussi goûter sa proie, cet homme qu’il désirait sur deux plans diamétralement opposés. Il ne l’idéalisait par en se fondant sur des critères esthétiques, comme Icare, qui incarnait une vision très précise de la beauté, ce n’était pas une conquête de plus, à obtenir par jeu, ni un ami qu’il trouvait rassurant de serrer contre lui. Il voulait Nikolaï et, en même temps, il rêvait sa destruction. Son sang le devinait. Son sang répondait à son envie de lui faire du mal, mais aussi de le posséder tout entier, comme il n’avait encore jamais osé refermer son emprise sur personne.

Et, d’une certaine manière, il sentait que le russe désirait la même chose. C’était peut-être la raison pour laquelle il ne se retint pas. Même s’il se fit repousser à cause de l’odeur métallique qui commençait à s’élever entre eux, il percevait un désir vibrant, que ni la proximité de la mort, ni la vue du fluide vermeil, ne semblait décourager. Il s’arrêta pour lui demander avec une inquiétude sincère s’il ne souffrait pas. La question prit suffisamment Lilian au dépourvu pour calmer un instant ses ardeurs. Lorsqu’il dévoilait son pouvoir, il se préparait toujours à recevoir des réactions plus ou moins désagréables, mais personne ne l’avait jamais interrogé sur la douleur qu’elle impliquait. Nikolaï était un être plus sensible qu’il n’y paraissait. Au fond, il aimait certainement cela aussi chez lui. A moins que ce ne fût l’inverse ? Rien n’était sûr.

- Un peu…, avoua-t-il. Mais, avec le temps, je régénère plus vite.

Il ne tenait pas à s’égarer dans des explications maintenant, lui dire comment son gène x le tourmentait depuis plus de dix ans, comment, par bien des aspects, ce n’était rien d’autre qu’une maladie du sang. Ses pouvoirs connaissaient de nettes améliorations ces dernières années et, pour l’instant, c’était l’essentiel. Les globules rouges se renouvelaient plus vite, il pouvait se laisser aller sans risquer l’anémie, même si un mince filet rouge le reliait à Nikolaï. Il aspirait le russe modérément, et la sensation lui plaisait. Il le laisserait certainement plus épuisé que prévu, cependant, ce n’était pas ce qui comptait, et il préféra éloigner ces questionnements pour se couler contre lui et l’embrasser avec vigueur. Le sang se détacha de ses bras, se sépara en plusieurs membres filiformes, dont la consistance et la tiédeur rappelait des langues, pour caresser et s’accrocher à la peau de l’homme, s’infiltrant sous ses vêtements avant qu’il n’ait entrepris de lui dénouer la cravate. Lilian n’avait encore jamais osé prendre une telle liberté avec son pouvoir et il en retirait une impression de puissance déroutante, aiguisée par la conscience de plus en plus forte du corps dont il prenait possession. Les sortes de terminaisons nerveuses de son sang étaient diablement plus développées que celles de sa peau. Il espérait que Nikolaï ne prendrait pas peur, il lui serait impossible d’arrêter maintenant, il ne s’était jamais senti aussi bien, dans un accord quasi parfait avec son pouvoir, et il perdait le contrôle avec la conviction de ne pas finir avec son associé desséché dans les bras. Il voulait le détruire et le garder à la fois, l’humilier autant que lui donner du plaisir. Il voulait le briser, et ce n’était pas une pensée sérieuse. Quelle satisfaction s’il y arrivait ? Son existence était encore trop précieuse.


Dernière édition par Lilian D'Eyncourt le Jeu 6 Nov - 19:07, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opening night [Lilian]   Opening night [Lilian] Icon_minitimeMar 28 Oct - 17:05

Rassuré sur sa santé, nous reprenons à l’endroit où nous nous étions arrêtés mais nul doute que la vitesse supérieure a été enclenchée. Car au moment où nos langues s’entrechoquent enfin avec toute la violence refoulée de leurs propriétaires respectifs je commence à sentir ces étranges tentacules sanguins caresser ma peau. A vrai dire il s’agit moins de caresses que de sortes de succions sensuelles qui me causent des frissons de plaisir à chaque passage. Un coin de mon esprit – le seul à n’être pas encore embrumé par le désir – me hurle que les dites succions sont plus vampiriques que sensuelles et que c’est un peu de mon fluide vital qui m’échappe à chaque ponction mais je m’empresse de le faire taire. Sans compter que Lilian ne déroge pas à la légende : vampirisme et luxure ont toujours été liés. Et si vous ne me croyez pas relisez Dracula. Eros et Thanatos y sont merveilleusement joints dans une morale on ne peut plus victorienne : qui succombe à la chair s’abandonne à la mort. Orgasme = petite mort et tous ces amusements pseudo-psychanalytiques, vous vous souvenez ?

Personnellement, c’est le dernier de mes soucis pour le moment. Je me contente de chercher à compenser nos attitudes et à défaut d’avoir des membres en trop pour me gorger de mon partenaire, je fais avec les moyens du bord. A savoir que mes mains s’empressent de détacher les boutons de sa chemise qui se dressent de façon bien malvenue entre moi et son torse. Sauf qu’il est loin d’être aisé de détacher des boutons lorsqu’on a les mains tremblant fébrilement et, qui plus est, sans regarder ce qu’on fait – vous ne voudriez tout de même pas que j’arrête de l’embrasser pour me concentrer sur une tâche aussi bassement matérielle ? Alors, tandis que ma frustration grandit parallèlement à mon désir, j’envoie la précaution se faire voir et appliquant plus de force à mes gestes arrache les deux bords de la maudite chemise, faisant voler les boutons dans la pièce. J’en profite pour décoller nos lèvres – le besoin d’air commençait à se transformer en question pressante - et lui adresser un sourire nullement contrit, satisfait je dirais même. Je saurais compenser ce léger désagrément croyez-moi.

Je fais ensuite glisser sa chemise jusqu’au sol et me gorge enfin de la vision mi envoûtante, mi terrifiante, qu’il m’offre. Les filaments reliant ses avant-bras à mon torse sont d’un vermillon fascinant et j’en oublie tous mes projets de caresser autant de sa peau qu’il ne le fait de la mienne. Pourtant ce n’est pas qu’il ne soit pas attirant – tout le contraire même – mais il est si rare que mes partenaires me procurent un tel plaisir sans que je n’aie rien à faire que je m’abandonne à ses bons soins sans qu’il s’agisse seulement d’une décision pleinement consciente. Il s’agit tout bonnement de mon désir prenant le contrôle des rênes. Je ferme donc les yeux un instant, laissant ma tête aller contre le dossier du sofa pour profiter à fond des sensations procurées par son étrange pouvoir. En temps normal, je me préoccuperai de savoir comment il fonctionne mais cela fait longtemps que mes capacités cognitives sont allées se coucher.

Néanmoins, il ne s’agirait pas non plus d’être totalement passif. Je ne voudrais pas qu’il se lasse de moi avant la fin des festivités tout de même. Ainsi, mettant à profit nos positions respectives, je délaisse mon idée première de m’attaquer à son torse et dirige mes mains droit sur son délicieux postérieur pour le malaxer comme il se doit. Puis je décide qu’il est temps de lui rendre la monnaie de sa pièce et, l’attirant vers moi, attache mes lèvres à son cou, très précisément là où je sens son pouls s’affoler presque autant que le mien.

Je commence donc par lécher et embrasser sa peau, y mettant tout mon empressement. Et, ainsi, usant de la moindre parcelle d’expérience dont je dispose en matière de suçons, m’applique à laisser ma marque là où tout le monde la verra. J’ai toujours eu un côté très possessif. Amants comme amis, je ne partage pas. Ce qui m’appartient m’appartient. Même si ce n’est que pour une nuit. Autrement dit, peu importe où nous en serons demain matin, je n’ai nulle intention de le laisser oublier cette nuit de sitôt. Et c’est pourquoi, alors qu’une succion plus puissante de son pouvoir me fait quasiment voir des étoiles, j’enfonce mes dents dans sa peau jusqu’à en percer l’épiderme. Ce n’est rien de bien dangereux, juste un peu de violence mal contrôlée. Par précaution néanmoins, je nettoie le tout d’un coup de langue – la salive est un des désinfectants naturels les plus couramment utilisés après tout – et remonte doucement le long de son cou pour aller murmurer à son oreille, décidant que nous avons largement dépassé le stade du vouvoiement :


-Nulle raison que tu aies le monopole du fétichisme vampirique.
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