Emotions Fortes [PV : Franklin Richards]

Karma n’était pas la seule à avoir la poisse, désormais Amy en était convaincue. Donc, les mettre ensemble dans un endroit, c’était être sure d’attirer tous les anges de la malchance en ce lieu. Première rencontre, attaque de dauphin géant et arrêt cardiaque, seconde rencontre, morsure d’araignée vénéneuse et tachycardie. Etait-il possible que dans un ennui mortel Magnéto décide de faire s’écraser un satellite ? Si oui, et que Shan et Nephilim buvaient un thé à ce moment là, ben c’était là-bas que ledit satellite se serait craché. On pari ?

En tout cas, l’italienne s’en était personnellement mieux sortie que la dernière fois : arrivée consciente, (presque) capable de marcher seule et pas en hypoglycémie ni enduite de vomi était une amélioration par rapport à la dernière fois. Elle devait juste se reposer et faire de la photosynthèse pour récupérer, ses pouvoirs n’ayant même pas disparu cette fois !

Par contre, l’autre victime de cet incident semblait allait plus mal ; et Nephilim était restée veiller sur lui. Franklin Richards, fils de l’un des plus grands génies de la planète, le mec qui avait inventé les molécules instables (ouais, même qu’il c’était fait un magnifique costume bleu trop classe et qu’il avait refilé des noirs et jaunes même pas dignes de servir de papier-peint à l’Institution, mais bon, c’était comme pour les cadeaux, c’était l’intention qui comptait – à savoir si cela ne l’incriminait pas plus d’ailleurs). Bref, un fils de célébrité et de mutant, lui-même mutant Télékinésiste de ce qu’elle en avait vu. Premier jour de classe et tombé dans celle du duo de la malchance, il se faisait piquer. Ça ce passait de commentaires.

Fièvres et sueurs froides avaient été ses symptômes, mais Irina Cameron l’avait guérit. A force d’y faire des allers-retours, Amy commençait par la connaitre l’Infirmerie, alors même qu’elle avait jugé inutile de retenir l’emplacement de ce lieu à sa première visite. L’infirmerie en elle-même n’était pas une simple pièce, mais un couloir dans l’une des ailes de l’Institut : cela avait été aménagé par Xavier lorsqu’il avait fait de sa demeure une école. Ainsi, en plus de l’Infirmerie elle-même, une grande pièce avec plusieurs lits et des espaces d’osculation, il y avait plusieurs chambres dans le même couloir, pour les personnes en observation ou nécessitant des soins plus longs. Les deux infirmières, une jeune et grande brune à peine sortie de l’école d’infirmière et doté de pouvoirs d’analyse et de guérison tactiles nommée Irina Cameron, et une cinquantenaire également brune nommée Teryl Ticalamira, s’occupaient des divers patients quant ils arrivaient. C’était assez caricatural quant on y pensait : Irina était ici depuis moins d’un an et était gentille et bienveillante, tandis que Ticalamira faisait beaucoup plus pensée à une marâtre. Bon, pour en avoir discuté avec cette dernière après sa première admission en état de mort cardiaque, Nephilim savait que c’était une histoire de la mauvaise infirmière et de la gentille infirmière, comme pour un interrogatoire : les jeunes têtes brûlées avaient droit à Ticalamira pour qu’ils ne recommencent pas et les autres à Cameron. Bon, on ne va pas faire de commentaires non-plus ; surtout qu’à part l’expérience, elles pouvaient être aussi bienveillante l’une que l’autre, même s’il en coûtait beaucoup plus à Irina de soigner du fait de son don qui pouvait pas l’affaiblir. C’était peut-être cela le fin mot de l’histoire : pour éviter qu’Irina n’use de ses dons pour soigner des idiots faisant des bêtises, son aînée donnait une image moins sympathique. Bref.

Franklin avait les yeux fermé, allongé dans un lit de la salle principale, puisqu’une fois réveillé, il pourrait y aller : Irina avait neutralisé le poison et soigné les dégâts qu’il avait faits, de telle manière que le jeune garçon n’en aurait pas une trace. Pendant ce temps, Amy avait elle eut droit à de nouvelles prises de sang pour trouver ce qui n’allait pas, mais comme d’hab’, les résultats allaient revenir normaux. Elles allaient insister pour que Nephilim fasse une étude plus poussée auprès de Beast, mais le scientifique bleu avait plus important à s’occuper que le cas de l’italienne, selon elle. Puis des « oui-oui » avaient suffis à ce que Ticalamira la laisse en paix, donc tout allait bien. Le truc qui la préoccupait encore plus que le réveil de Franklin, c’était si Caitlyn apprenait pour la crise. Les deux dernières fois avaient été un de ses foins. Mais comme elle n’était pas morte, pas besoin de lui dire ; enfin, c’était comme cela que raisonnait l’italienne. Elle ne mentait pas, mais il était vrai qu’elle oubliait parfois certaines choses, comme l’endroit où Fuzzy avait rangé sa guitare lorsque l’italienne avait interro le lendemain.

Assise sur une chaise à côté de Franklin, Amy attendait simplement qu’il se réveille. Elle n’avait aucun contact physique avec lui, se tenant à une distance respectable, ni trop près ni trop loin.

Lorsque le visage du garçon commença à s’exprimer, annonçant un réveil soudain, Nephilim se releva, approchant d’un pas en se tenant le bras qui avait été piqué.

- Sa va Franklin ? demanda-t-elle doucement, pour l’aider à émerger. T’es à l’infirmerie, on s’est occupé de toi. Tu devrais te sentir mieux. Pas top les émotions fortes pour un premier jour, hein ?

Elle lui sourit, bien consciente qu’un visage souriant était plus agréable au réveil qu’une baffe. Faudrait l’expliquer à Cait’ d’ailleurs.

Franklin rougit immédiatement après son réveil, gêné. Simultanément à cela, pour lui laisser de l’air libre et ne pas être intrusive, Amy se recula d’un pas, toujours souriante.

Il lui parla, lui demanda depuis combien de temps elle était là, fort malaisé dans son vêtement de patient, et visiblement pas au mieux de sa forme. Il tira sur les bras, pour se mettre au chaud, surement. Par cette chaleur ? Mauvais signe. Même si Cameron avait usé de ses dons sur lui, il était possible qu’il reste des traces de poison ; le toucher guérisseur ne fonctionnait pas toujours, et dans certains cas, pas du tout. Amy était de cette catégorie, quant elle était revenu en hypoglycémie, la régénération n’avait servie à rien. Mais contre du poison, cela devait avoir marché.

- Bah en fait, depuis le début. J’ai dit à Karma que je restais près de toi, puis j’ai eut aussi un problème qui m’a emmené ici ; d’une pierre deux coups, comme on dit.

On pouvait difficilement être plus évasive qu’elle, pour le coup. Amy détestait le mensonge, et était honnête à toute épreuve d’ailleurs, sauf que pour le coup, elle n’avait pas envie de parler de ses crises après avoir entendu les infirmières lui tenir la jambe avec durant un certain temps. Ce n’était pas du mensonge par omission, c’était de l’omission tout court ; elle pouvait être d’une incroyable mauvaise fois sur ce sujet.

Franklin tenta de se redresser, et chu sur le côté, tant et si bien qu’il s’écrasa au sol. Amy réagit rapidement, contournant le lit pour l’attraper et l’y remettre sans grand effort. Seigneur, il était brûlant. Une fois le jeune garçon à sa place, réinstallé, Nephilim sortie précipitamment dans le couloir, cherchant l’une des deux infirmières. Bon, il ne fallait pas crier dans l’établissement, surtout au sein de l’infirmerie et de la bibliothèque. Tant pis, fallait pas non-plus descendre au sous-sol.

- Mlle Cameron ; Mlle Ticalamira ; On a un problème !

Sortant tout aussi précipitamment de l’une des chambres, Irina la regarda interdite puis accourue, alors que l’italienne rentrait vers Franklin. Le touchant, l’infirmière ferma les yeux. Analyse tactile : Irina était capable de savoir quelles étaient les défauts d’un corps animal rien qu’en le touchant, et ensuite, par un dérivé de Biokinésie, elle les éliminait, ses défauts. Maladies et blessures ne lui résistaient pas, même si la gravité prenait toujours plus d’énergie à la mutante.

- Pourquoi cela n’a pas marché ?

- Je guéris, je ne purifie pas. La question c’est : quel venin a des effets à retardement ?

Fermant les yeux, Irina commença à se concentrer, guérissant Franklin. L’italienne attendait, impuissante, regardant la guérisseuse et son patient, tour à tour. Elle détestait se sentir inutile comme cela et incapable d’aider les autres. C’était rageant. Prendre des initiatives : Nephilim se saisit de sa chaise et alla la porter jusque derrière l’infirmière, qui en aurait sans doute besoin aux vues de la crispation de son visage, puis elle allait jusqu’au robinet remplir deux verres d’eau, un pour Irina et un pour Franklin, dans le même état d’esprit.

Une fois les deux verres pleins en main, elle n’eut plus qu’à attendre. Elle détestait ne pas pouvoir partager son facteur guérisseur ; Warren le pouvait, lui. Elle, son sang était un véritable poison, toxique pour les gens normaux du fait de la sur-présence de CO².

Quant Irina fit un pas en arrière, interrompant le contact avec Franklin, elle semblait plutôt fatiguée. Amy avait eut le temps de se remettre de ses émotions, Cameron moins. L’infirmière s’assit sur la chaise et prit le verre d’eau, puis l’italienne put tendre le sien au jeune garçon.

- Sa va aller vous deux ?

- Je ferai avec. Et toi Franklin ?

Irina Cameron semblait plus que fatiguée, il y avait quelque chose qui n’allait pas. De la peur, il y avait eut une micro-expression de peur sur son visage. Invisibles à la plupart des gens, mais pas à l’italienne.

- Qu’est-ce qui va pas, Mlle Cameron ?

- Je ne suis pas sure, il faudra que j’aille vérifier quelque chose. Continue de lui tenir compagnie, tu veux ?

Alors que l’infirmière se relevait et quittait la pièce, Amy priait que Franklin aille mieux au moins le temps qu’elle revienne.

- Tu tiens le coup ? demanda-t-elle, inquiète, au jeune patient.

Franklin, avec une timidité attendrissante, déclara aller mieux et la remercia de rester avec lui, effrayé à l’idée de rester seul dans l’infirmerie. Amy le comprenait, n’aimant pas non-plus les lieux semblables à des cliniques ou des hôpitaux.

- Aucun problème, si je peux faire quoi que ce soit pour t’aider, je veux bien, sourit-elle.

Le verre d’eau, bien que but trop rapidement, semblait avoir cependant été apprécié, et toujours debout, Nephilim le gardait dans les mains. Avant de partir, Irina avait posé le sien sur la chaise ; Amy devrait penser à les nettoyer une fois qu’ils auraient fini leur utilité.

Franklin avait à nouveau entreprit de se redresser, avec plus de précaution cette fois. Il semblait aller mieux, comparé à quelques instants plus tôt, cependant il n’était toujours pas au mieux de sa forme.

- La dame qui m'a soigné semblait un peu inquiète, tu crois que c’est grave cette morsure d’araignée? Et tu es venu pourquoi ici? Ho! Pardon, je peux vous dire, tu…

Sa phrase terminée précipitamment fut ponctuée par une régurgitation des plus copieuses ; tient, encore une constante de l’alliance Amy/Karma ? Bon, la différence, hormis la cible et la personne, c’était que le contenu. A vue de nez, cette expression n’ayant d’ailleurs jamais été mieux employée, donc à la vue et à l’odeur, c’était ce qui avait été des spaghettis bolonaises. Mais le gros plus qu’avec Nephilim face à Shan, c’était qu’elle n’avait pas été arrosée. Bon, sa face marquait bien son dégout envers le vomi, une chose que ses pouvoirs comme son expérience personnelle ne l’avait pas habitué à côtoyer.

Mal à l’aise dans le vomi, Franklin se débattit un peu, la dévisageant les larmes aux yeux, honteux, s’excusant. Contournant le lit, Amy posa le verre à côté de l’autre, puis l’aida à ôter les draps.

- T’en fais pas, c’est pas grave ; laisse-moi t’aider, dit-elle en reliant la couverture, fronçant le nez et essayant autant que faire ce peut de ne pas s’en mettre sur elle. Puis oui, comme je l’ai dit tout à l’heure, tutoie-moi, j’ai pas deux fois ton âge donc ça va. Amy s’interrompit un instant dans sa tâche pour faire un clin d’œil au jeune garçon. Si tu veux une nouvelle couette, j’irai la prendre sur un autre lit, par contre pour l’habit… faudra que je farfouille.

Le rendu empaqueté et plié, l’italienne le déposa dans un coin de la pièce, contournant comme elle pouvait la chaise. Manquait plus qu’elle casse les verres, tient. Se tournant vers les meubles de soin, elle se baissa pour fouiller, consciencieusement, porte après porte (les tiroirs étant, selon toute probabilité, trop petits pour les nuisettes de patient), prenant attention à remettre correctement à la place originelle ce qu’elle bougeait. Sa méthode d’investigation trahissait d’une organisation habituelle des choses, partant de gauche à droite et de haut en bas. Finalement, quant elle eut enfin mit la main sur une réserve de ces vêtements encore sous film plastique. Elle déchira la protection du plus petit qu’elle trouva, qui devait encore être un peu grand pour Franklin, puis lui amena.

Amy se stoppa lorsqu’elle lui tendit, une idée percutant son cerveau comme une mouche s’écrasant sur un pare-brise : et s’il avait besoin d’aide pour changer de tenue ? Peu probable à la vue de la simplicité du truc, mais on sait jamais. Autant dire que Nephilim n’était pas très à l’aise avec l’idée de se retrouvée en présence d’un garçon nu, même si ce dernier était au début de sa puberté. Pour les filles, ce n’était pas pareil – surtout à cause de l’absence de pudeur de Cait’ en fait – mais pour un mec… surtout qu’il ne devait pas être beaucoup plus à l’aise à cette idée qu’elle.

- Tu vas arriver à te changer seul ? Si oui, je sors le temps que tu le fasse et… si non… euh…

Amy baissa les yeux, se mordant les lèvres et passant une main derrière la tête, bien gênée à l’idée qu’elle venait d’évoquer implicitement. Oh, si Franklin avait besoin de son aide, elle lui apporterait, mais elle ne garantissait pas de tourner au rouge-tomate.

Elle appréhendait avec une pudeur infantile cette éventualité, alors qu’elle était majeure (dans son pays) et plutôt responsable et mature. Son éducation à l’orphelinat avait inculqué quelques tabous, et elle ne les avait pas encore dépassés, malgré l’acharnement de sa sœur de cœur dans ce sens.

- Tu vas arriver à te changer seul ? Si oui, je sors le temps que tu le fasses et… si non… euh…

- Tu peux me changer s'il te plait?

Ep… Dommage. Amy releva les yeux, pour tomber sur le grand sourire qui bardait le visage de Franklin, lequel éclata presqu’immédiatement de rire ; c’était une blague. Nephilim eut également en rire, sec et stressé ; sale gosse. C’était fait avec une naïveté innocente, mais l’italienne considérait la nudité comme un tabou, particulièrement envers le sexe opposé, et cela l’avait plutôt bien mi mal-à-l’aise.

Cependant, Dieu semblait être de son côté, le destin lui-même conspirant pour retourner la plaisanterie de Franklin contre lui. Amy avait toujours trouvé drôle la « punition divine », l’expression voulant qu’après que tu fasses une idiotie, elle se retourne contre toi, et ne put s’empêcher d’avoir un rire plus sincère, bien que potentiellement vexant, lorsque Mlle Ticalamira pénétra dans la pièce comme une furie, se mettant en tête d’aider le garçonnet à se changer, conformément à sa demande précédente. Sans la moindre délicatesse, elle s’empara de l’espèce de chemise de nuit, enchainant droit sur le patient pour le changer. L’italienne était gênée pour Franklin, et tellement interdite qu’elle ne ferma même pas les yeux. Cependant, elle ne fit aucun commentaire, pas même dans sa tête.

- Quoi? Fais pas cette tête gamin, c'est mon job et elle ce n'est pas une gamine.

Certes, Amy n’était pas une gamine : elle était majeure dans son pays, et même ici, si elle n’avait pas été considérée comme émancipée, elle aurait eut le droit aux rapports sexuels sans risque de détournement de mineur, mais cela n’empêchait pas qu’elle avait été élevée avec une morale plutôt chrétienne et qu’elle avait une grande pudeur à ce niveau là ; ainsi, ce fut la première fois qu’elle se trouvait en présence d’une personne du sexe opposé nue dans la même pièce. Elle détourna les yeux, alors que Teryl partait sur une prise de sang. Analyse antipoison, probablement, puisque les soins de Cameron n’avaient été suffisant.

Nephilim releva les yeux par reflexe, remarquant que Franklin la fixait, de la peur sur le visage. L’italienne compatissait, n’aimant pas non-plus des piques, mais ayant déjà eut droit à son lot aujourd’hui. Finalement, une fois le cas du jeune garçon réglé, pour l’instant du moins, se fut elle qui retourna au centre de l’attention.

- Bah je reprends des forces, étant donné que j’ai réussit à stopper ma crise avant l’arrêt cardiaque, je pense m’en être bien sortie. Puis mes pouvoirs n’ont pas disparue, donc ma résistance à l’effort me permet de récupérer plus rapidement, comme d’hab’ quoi.

- d’ailleurs, une idée de pourquoi ils sont restés actifs, alors que les dernières fois ils avaient disparu ?

- Pas vraiment, peut-être qu’en cas d’arrêt cardiaque, les Sanguis meurent également, donc je ne peux plus transporter la biomasse, et par conséquent je n’ai plus de pouvoir.

- Oui, je pense aussi, on verra bien si tes fameuses cellules sont encore présentes dans ton sang quant tes analyses reviendront. Tu devrais vraiment aller voir le Fauve, il est le seul à avoir les compétences de génétique pour vraiment comprendre ce qu’il t’arrive.

- Je sais, j’irai quant il aura le temps.

Il était inutile de continuer cette discussion close quelques temps auparavant, Amy n’avait pas changé d’avis : Beast devait surement être surchargé de travail, avec des cas beaucoup plus important qu’elle. Inutile de lui faire perdre son temps pour deux arrêts cardiaques et un pouvoir qui ne nuisait qu’à elle, sachant que certains mutants pouvaient faire exploser des choses ou projeter des rayons destructeurs. Elle, tant qu’elle évitait les crises, tout était normal. Donc, il lui suffisait d’éviter les crises et de ne pas se servir de son facteur guérisseur accéléré plus que de normal. Simple en théorie, plus dure en pratique.

Le silence se fit, Amy ne sachant sur quoi ré-enchainer après la gêne que venait de subir Franklin, et Teryl commençant à marquer l’échantillon de sang du nom de son propriétaire pour le faire descendre au labo. Aucune remarque ne lui fut faite pour son initiative, et l’italienne regarda ses pieds sans rien dire.

- Il doit rester encore un peu ici, tu peux rester avec lui si tu veux et si tu a besoin de quelques choses, tu peux nous appeler. Et toi jeune homme, ne me regard pas comme ça où la prochaine piqure sera pour ton derrière.

Jusqu’à ce que Cameron revienne, oui, Nephilim l’avait bien comprit ; outre qu’elle voulait le fin mot de l’histoire, elle n’allait pas laisser Franklin seul dans une pièce pseudo-hospitalière, c’était déprimant puis elle avait promit à Karma de veiller sur lui. Par contre, le jeune garçon semblait éviter le contact visuel. Bon, cela partait bien : ils regardaient tous les deux leurs pieds, même si ce n’était que par intermittence chez Amy, lorsque Teryl quitta la pièce.

Finalement, après un silence aussi long que stupide et inutile, Franklin reprit la parole, la regardant en souriant. Oui, sa plaisanterie lui était retombée dessus, l’italienne sourit à cette constatation. Il prenait cela avec humour, c’était bien pour relancer la conversation. Puis le garçon déclara être arrivé hier, en plein milieu du mois de juin.

- Ah ok, t’arrive en fin d’année et tu passe les vacances ici toi ? Je suis arrivé en décembre d’Italie, et j’ai fais mon année de L1 en un semestre à la fac, d’ailleurs j’ai pas encore fini de rattraper tous les examens du premier semestre, celui que j’ai manqué. Je pense que j’ai mes chances, Mlle Frost me donne des cours du soir pour rattraper là où j’ai du mal.

Franklin reprit l’un des verres trainant sur la chaise, probablement celui d’Irina vu qu’il avait fini le sien, et le bue, avec précaution cette fois. L’italienne réagit en allant chercher l’autre, pour le remplir à nouveau après l’avoir rincé.

- Tu es malade ? Tu a quoi comme genre de pouvoir ? Tu sais, l’infirmière à raison, le professeur Mc Coy pourrait t'aider, j'ai lu beaucoup de livres qu'il a écrit, j'adore celui sur les modifications génétiques. J’aimerais bien le rencontrer un jour, tu as déjà parlé avec lui ?

- Pas vraiment, mais mes pouvoirs sont un peu déréglés. En fait, je suis Photosynthèsiste, cela signifie que je me nourris par photosynthèse, comme les plantes. Mes yeux si étranges que tu as vu tout à l’heure sont en fait des paupières internes qui captent la lumière, comme des feuilles. Ensuite, je guéris plus vite, grâce à la biomasse produite. Après Mutant Town, je suis parvenue à accélérer ma régénération, mais depuis une tentative d’enlèvement au Met, bah c’est tout mon organisme qui accélère. Donc en gros, quant je tombe en panne de biomasse, je fais un arrêt cardiaque. Il ne suffit de ne pas utiliser mes pouvoirs et de ne pas paniquer et je cours aucun risque, donc sa va, mon cas est pas urgent. Il y a plein de mutants qui ont plus besoin de son aide, car ils ont des pouvoirs plus incontrôlables ou dangereux que les miens. Je veux dire, un Télékinésiste ou un Pyrokinésiste que ne ce contrôle pas peut faire beaucoup de dégâts, moi pas. Donc j’irai le voir quant il aura du temps.

Cela faisait déjà plus de deux mois qu’elle disait cela, et ne l’avait toujours pas approché.

Marchant calmement jusqu’à la chaise, elle s’y assit, l’un des verres étant dans les mains de Franklin et l’autre dans les siennes. Il la remercia de rester, lui disant qu’elle pouvait partir. Elle eut un sourire à sa réplique.

- Tu m’embête pas du tout, tant que tu me vomis pas dessus, dit-elle pour plaisanter, bien que le fait qu’elle soit presque à portée n’était pas étranger à la remarque. Sinon toi, ton pouvoir c’est Télékinésie, c’est cela ? C’est un beau pouvoir, on peut faire plein de choses avec : vol, déplacer les choses, etc. J’aimerai bien voler, un jour, mais mes ailles sont trop petites pour l’instant, dit-elle avec un petit sourire gêné, cette phrase nécessitant des explications. Tous les doc’ qui m’ont jamais examiné sont d’accord sur un point, je suis très étrange, biologiquement parlant. Un hybride mammifère serait plus proche d’un humain normal que moi, si on s’en tient au fonctionnement du corps. Mes poumons par exemple, ont des excroissances qui sortent de mon dos sous la forme d’ailes, pour améliorer la collecte de CO², car je respire le dioxygène et le dioxyde de carbone. Du fait que la photosynthèse consomme le second et produise du premier, et que la respiration humaine fasse l’inverse, je produis partiellement l’air que je respire. Bref, je suis une curiosité de la nature, et beaucoup me chambrent en me comparant à un tournesol ou à une fougère. Je n’ais pourtant nulle hybridité avec une plante ou rien en commun avec elles, sauf la photosynthèse.

Elle tentait de faire la conversation, et du fait s’imposait en étant trop active dans cette dernière, posant une question sans attendre la réponse. Elle eut un geste de gêne à cette pensée.

- Excuse-moi si je te parle de trucs compliqués et pas forcément intéressants. Donc du coup, t’arrive à voler avec ta TK toi ?

Franklin eut une immense tristesse à l’évocation de Mutant Town ; peut-être avait-il perdu un proche dans se massacre qui c’était déroulé en début d’année, quelques mois auparavant, en tout cas il semblait si affecté qu’Amy regretta d’avoir prononcé le mot. Mais le garçonnet se remit bien vite, dissipant ses idées noires simplement en secouant la tête.

- Tu sais, j’aime bien les choses compliqués, tous ce qui tourne à la génétique, l'ADN et la science. C'est des trucs d'adultes mais, j'aime bien ça et si un jour je rencontre le professeur Mc Coy j’aurais plein de questions à lui poser. J’aimerais bien aussi lire des livres écrits par des scientifiques étrangers, mais je parle que l'anglais. C'est dommage, en Europe il y a plein de grands scientifiques, qui sont peut-être aussi doués que le Fauve et mon père. D’ailleurs si mon père n'était pas partit en mission avec ma famille il aurait pu t'aider mais, ils sont en plein voyages et pour plusieurs années, c’est une mission secrète mais, chut hein? Et c’est aussi pour ça que je suis obligé de rester à l'Institut pendant les vacances...

Une mission secrète ? Amy fut surprise. Elle n’allait pas demander des détails, s’eut été stupide : secrète voulait bien dire secrète. Un moyen de l’impressionner ? Peut-être, peut-être pas. Ses parents étaient parmi les plus célèbres mutants au monde, là où elle-même ne les avait même pas connus, et elle n’allait pas s’enorgueillir des exploits de Cait’. Par contre, elle pouvait parfaitement comprendre le sentiment d’abandon que Franklin pouvait ressentir ; cela elle avait bien connu.

Elle ne dit cependant rien : Franklin ne sembla pas plus triste que cela, passant rapidement à autre chose. Après quelques instants de réflexion, il répondit, exposant le fait qu’il n’avait pas un don unique mais plusieurs : lire et parler dans la tête des gens, empathie – c’était cela qui l’avait fait souffrir à cause de Mutant Town –, déplacer les objets par la pensée et projeter son corps astral. Télépathie, Télékinésie et Empathie, wow, c’était du mutant cela, puis vu son âge, il devait avoir un grand potentiel ; cool pour lui qu’il apprenne à s’en servir ici, vu ses dons, cela pourrait mal se passer s’il n’arrivait pas à les maîtriser. Elle était presqu’admirative de ses pouvoirs lorsqu’il se mit à rougir, s’excusant de tant parler et la complimentant innocemment. Amy voulut parler mais n’en eut pas le temps ; s’il parlait peu à l’habitude, elle était contente de le faire parler autant.

Il lui expliqua qu’il avait deux autres pouvoirs, au potentiel incroyable et inimaginable : prescience et altération de la réalité. Mon Dieu, mais c’était qui ce gosse ?! Vu l’âge, le nombre de pouvoir et lesdits pouvoirs, si sont potentiel était illimité, elle avait en face d’elle un Mutant Oméga ; la classe (autant la classe Oméga que la classe de l’être). Bon, il avait bloqué ceux trop dangereux, mais c’était une preuve de plus qu’entre les mains de pareilles personnes, le monde ne pouvait que s’améliorer.

Franklin lui sourit et Amy lui rendit son sourire. Elle n’avait pas rencontrée beaucoup de Télépathe, juste Emma Frost à sa connaissance, et si elle n’était pas à l’aise avec l’idée qu’on puisse manipuler son esprit sans son consentement, violant ainsi la règle divine du libre-arbitre, elle n’avait pas spécialement peur qu’on lise ses pensées : elle n’avait rien à cacher et rien d’intéressant pour qui que ce soit. Pas de potentiel illimité ou de capacité unique, elle était anonyme dans la foule.

- Peu être que tes ailes vont grandir…

- Oui, elles grandissent en permanence ; entre cinq et sept centimètres l’an, mais c’est pas leur taille qui importe, c’est leur force. Bref, je sais pas encore si je pourrais voler un jour de mes propres ailes, mais si tu parviens à soulever quelqu’un pour voler avec ta TK, appelle-moi.

Amy lui fit un clin d’œil ; elle avait faillit voler une fois, Warren lui ayant proposé de l’emmener en deltaplane, mais elle n’avait pas put, à cause des cours. Si Franklin restait là pendant les vacances, où même l’année prochaine, et s’entrainait avec ses dons, peut-être parviendrait-il à soulever un poids suffisant pour elle. C’était moins risqué qu’un autre, puisqu’elle régénérait. C’était une idée stupide, prise sur un coup de tête et très probablement impossible à mettre en œuvre. Mais bon.

Franklin lui posa des questions sur ses origines, s’intéressant de près à l’italien. Amy pinça les lèvres lorsqu’il lui demanda où elle était née, mais répondit sans véritable détour.

- Je suis italienne, oui, quant à savoir où je suis née… ou même quand, c’est une excellente question. J’ai été abandonnée le 3 Septembre 1993 à l’orphelinat d’Avellino, par un homme qui est reparti sans même donner son nom. Lauro est la commune où il a prétendu m’avoir trouvé. Mon âge, mon lieu de naissance ou même mes parents me sont inconnus, j’ai passé ma vie dans cet orphelinat avant de venir ici. Pour ce qui est de cours d’italien, tu veux parler en cours particulier ? J’enseignerai la langue en assistante dans votre classe l’année prochaine, mais si tu veux pousser plus loin, cela sera possible, mais après juin ; d’abord, faut que je termine ma L1 de psycho, et c’est pas gagné, vu que j’ai eut qu’un semestre au lieu de deux. Mais après, non c’è problema.

Franklin sembla partager de façon croissante l’enthousiasme d’Amy pour ses pouvoirs, lui répondant qu’il aimerait bien voler avec elle, pour faire les oiseaux au-dessus des nuages ; le principal défaut des Télékinésistes dans le vol était qu’à moins d’un certain niveau, ils ne pouvaient voler trop haut dans le ciel par manque d’oxygène ; elle n’avait pas se problème, le produisant partiellement et ayant des capacités respiratoires décuplées, ce qui lui permettait de faire d’incroyables apnées, en théorie. Il voulait partager sa projection télépathique, car il se sentait seul en la pratiquant. Amy fut triste pour lui, elle comprenait la solitude, mais ne pouvait rien faire pour l’aider ; le psychisme n’était pas son domaine.

Le garçon fut également triste quant il apprit qu’elle était orpheline, probablement plein de compassion, ce qui la fit sourire. Il était vraiment adorable.

- C'est triste, tu as jamais voulu retrouver ta vraie famille? Moi je viens d'arriver à l'institut et ma famille me manque déjà.

- L’homme qui m’a déposé n’a pas laissé son nom, et lorsque je questionnais sur lui, on m’a dit en grandissant que je lui ressemblais nullement. Je me suis toujours demandé qui étaient mes parents, ma famille, mais je n’ai jamais eut le moindre indice pour remonter jusqu’à eux. C’est triste à dire, mais maintenant, cela me ferait peut-être plus de mal que de bien de les rencontrer : je me suis construite sans eux, et si j’ai des questions à leur poser, ils pourraient détruire tout ce que j’ai bâti en débarquant à l’improviste, dit-elle, triste.

Pour ne pas la laisser dans la tristesse, Franklin enchaîna avec le sourire, lui déclarant qu’il aimait apprendre et la questionnant sur son avenir puis lui parlant du sien. Il voulait être scientifique pour aider les mutants, ou alors super-héros, chose pouvant paraitre stupide dite à haute voix mais pas si improbable que cela dans le monde où ils vivaient. Mais suivant ses pensées dérivantes, le petit garçon arriva à des interrogations plus tristes.

- Je ne sais pas si les gens veulent être sauvés ou si c’est le monde réel qui inspire la BD, mais ce que je sais, c’est qu’il y a des personnes mauvaises dans le monde, qu’elles soient humaines ou mutantes, ce qui prouve que nous ne sommes pas différents. Je ne pense pas qu’une séquence génétique puisse définir un individu, c’est lui-même qui choisit ce qu’il ait, en faisant ses propres choix. Dieu a donné le libre-arbitre à l’Humanité, libre à elle de commettre ses erreurs. Hommes comme mutants veulent faire du mal aux autres parce qu’ils en ont peur, car il est plus facile de combattre sa peur, avec courage, que de l’outrepasser. Pourtant, il suffit généralement de comprendre sa peur pour l’apprivoiser. Sinon, je suis en Licence de Psychologie, et ensuite je passerai sur un Master 2 spécialisé dans l’étude et l’analyse du langage corporel et des expressions et micro-expressions faciales, en gros je deviendrais une empathe humaine, ou un détecteur de mensonge sur patte, selon le point de vue. Encore que concernant ce dernier point, c’est déjà le cas.

Amy avait vainement tentée de changer de sujet, mais Franklin poursuivit dans ses idées noires.

- Peu être qu'on à pas notre place dans ce monde. Je me souviens dans mon ancienne école, une fois des parents d’élèves m'avait giflé à la sortie de l’école parce que je parlais à leur fils. Ils m’ont dit de ne plus m’approcher, que j'étais un monstre et que je devais finir en cendre. Il y avait plein de gens au tour et personnes n'a bougé pour m'aider, il y en a même qui rigolait et se moquait de moi en disant que je devais pas vivre. Je...je me... suis enfuis en pleurant...et… je voulais plus aller a l’école… mais, j’ai pas voulu en parler à mes parents...

Amy resta interdite à cette histoire, de bien sombres pensées pour un esprit enfantin ; elle-même avait connue la solitude et la crainte des autres enfants, mais là où elle avait été élevée, on prônait l’acceptation et jamais elle n’avait subit pareil traitement, surtout pas de la part d’adultes. Franklin avait commencé à pleurer, forçant Nephilim à agir. Elle se leva de sa chaise, venant prendre le garçon dans ses bras, pour le consoler et le rassurer.

- Pourquoi n’aurait-on pas notre place ici ? Nous sommes des créatures de Dieu, un fruit de l’évolution, comme les hommes, les animaux et les plantes. Tous ne sont pas prêts à l’accepter, mais je crois que rien n’arrive par hasard. Les parents qui t’ont frappé sont dans leur tord, mais si je n’aurai pas l’hypocrisie de te dire que c’est mal de ne pas en avoir parlé ; c’est mal, certes, mais comme il me faut des mois pour oser confesser mes problèmes, je comprends parfaitement ta réaction. Leur fils était-il d’accord avec ses parents ou t’avait-il accepté comme tu étais ? Et pour les autres, l’un de mes encadrant à l’orphelinat a dit un jour : ne fais jamais à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse. Tu ne veux pas que l’on te vole tes affaires, alors ne vole pas, car le sentiment que tu ressentirais alors, quelqu’un d’autre le subirait. Tu veux que l’on t’accepte ? Alors accepte les autres. Ils n’ont pas été capables de t’accepter, mais toi, les as-tu rejetés ? Non, car tu étais prêt à les accepter ; en cela, tu valais mieux qu’eux. Est-ce positif ? Je ne crois pas, je suis juste triste pour tous ces gens dont la valeur est gâchée par leur intolérance. Si quelqu’un te crachait à la figure, l’abandonnerais-tu pour autant s’il avait besoin de ton aide ?

Amy se tue, se souvenant du Purificateur à Mutant Town, qui malgré une blessure par balle, lui avait craché du sang à la figure quant elle avait tenté de lui venir en aide, la traitant de monstre. Elle l’avait laissé là, passant à une autre personne. Les Purificateurs, peut-être la preuve que ce qu’elle avait dit n’était que paroles…

Franklin resta sans rien dire lorsque l’italienne le prit dans ses bras. Amy s’améliorait dans le contact physique avec les autres grâce à l’insistance et la pratique qu’elle acquérait auprès de Caitlyn. Cela faisait parti des choses qu’elle avait améliorées depuis son arrivée à l’Institut : ses relations sociales. Elle s’ouvrait plus facilement, avait plus de contacts physiques…

- J'étais devenu un peu copain avec lui en l'aidant à faire ses devoirs mais, quand il a découvert que j'avais des pouvoirs, il m'a rejeté et l'a dit à ses parents, c'est à ce moment là qu'ils ont été méchants avec moi. Je voulais juste être son ami et l'aider mais, je crois qu'il ne voulait pas de l'aide d'un mutant, un peu comme le purificateur qui t'avait craché dessus à…

Amy fut tellement surprise qu’elle en rompit le contact, tenant Franklin au bout des bras en le regardant, interdite.

- Que ? Comment tu sais ?

Elle n’en avait jamais parlé, de cet homme qu’elle avait abandonné au profit d’autres victimes, car elle avait l’impression de l’avoir laissé mourir. Ce souvenir était particulier dans Mutant Town même, car son acte remettait en question la philosophie qu’elle proclamait avoir. Comment pouvait-il savoir, comment l’avait-il percé à jour ?

Le visage du garçonnet trahissait de la colère, de la peur et de la tristesse : de la honte ; pourquoi de la honte ? De quoi avait-il honte ?

Amy réfléchissait aussi vite qu’elle le pouvait, alors que Franklin s’éloignait à son tour, la fixant dans les yeux avec toujours plus de regret sur le visage. Elle avait pensé à ce souvenir et il l’avait su. Télépathe, il était télépathe !

- T’étais dans ma tête ?!

Dire qu’elle était parfaitement rassurée aurait été mentir, car elle devait avouer avoir un peu peur, même si c’était majoritairement de la surprise, du fait qu’il ait pénétré son esprit en douce. Comme elle l’avait déjà pensée lorsqu’elle avait apprit pour les capacités de télépathe du garçon, elle n’avait rien à cacher et rien d’intéressant dans son esprit, donc elle n’avait pas spécialement peur qu’on lise ses pensées ; mais il fallait s’arrêter là. Comme toute personne sensée, l’idée même qu’on lui vole son libre-arbitre en manipulant son esprit contre sa volonté était des plus effrayantes, car cela revenait à laisser quelqu’un d’autre être soi. Dès lors, nous n’étions plus rien, juste des objets, des marionnettes dans les mains d’un autre, des jouets…

Vu ce qu’exprimait le visage de Franklin, le gronder n’aurait pas été la bonne solution : il culpabilisait déjà seul.

- Evite de faire cela s’il-te-plait, ou préviens-moi. Pour me parler, ok ; pour m’espionner, pas vraiment. Je sais pas jusqu’où tu peux pousser ton pouvoir, mais honnêtement, les télépathes capables de modifier les esprits me font peur : qui sommes-nous si quelqu’un d’autre peut-être nous ? Manipuler l’esprit d’autrui c’est violer toutes ses libertés, c’est le réduire à l’état d’esclave ou d’objet. Je ne pense pas que tu le feras un jour, mais j’aimerai quant même que tu me promettes de ne jamais user de tes pouvoirs ainsi.

Le malaise allait s’installer, c’était inévitable ; Franklin avait brisé le pied d’égalité en forçant les portes de l’esprit de Nephilim, et cette dernière avait, pour gérer la panique, formulée une demande inutile au garçon mais qui prouvait un doute dans la confiance qu’elle lui accordait. Leurs deux visages trahissaient leurs mal-être respectifs, et si elle ne détendait pas l’atmosphère, la conversation allait tourner court, dans le meilleur des cas.

Amy se mordit la lèvre inférieure quant une idée lui vint, mais elle n’avait pas beaucoup d’autre moyen de prouver qu’elle n’avait pas perdue confiance ou ne tenait nullement rigueur à Franklin pour ce qu’il avait fait. Elle se rassit sur sa chaise et eut un moment d’hésitation.

- Tu… tu préfère qu’on parle mentalement ? Moi… tant que tu reste sur mes pensées de surface, et que tu ne bidouille rien, je… je veux bien qu’on essaie. Je pense pas que tu puisses souvent utiliser ton pouvoir, ou t’exercer à celui-ci, donc si tu veux essayer de t’entrainer à communiquer avec moi, je veux bien. Parler et écouter, rien de plus, ok ?

Elle était pas rassurée mais était prête à le faire. Elle lui faisait confiance.

*Tu m’entends ?*

Sans grande surprise, Franklin avait promit, mais il développa même la chose, déclarant qu’il voulait parfois ne plus avoir ses pouvoirs, souhait réalisé pour certains. Il ne considérait pas la mutation comme une maladie, mais voulait s’intégrer plus facilement, comme beaucoup.

- Tu sais, nous sommes ce que nous sommes, et les autres aussi, ainsi, s’il en est qui ne sont pas capables de nous accepter, d’autres le peuvent et le font. Cependant, c’est normal de vouloir ressembler à la normalité, c’est plus facile, et se changer c’est plus facile que de s’accepter. Se changer, c’est la seule chose qui ne changera jamais, car la seule constante de l’univers est le changement. Tu n’as pas besoin de choisir, car tes pouvoirs ne t’empêchent pas de mener la vie que tu souhaite, car c’est toi qui en fais usage. Bon, t’es prêt ?

Amy le regarda dans les yeux, voyant qu’il était mal à l’aise. Cependant, elle lui offrait une opportunité qu’il ne devait pas rencontrer souvent, ainsi lorsqu’elle vit qu’il était près, elle pensa bien fort :

*Tu m’entends ?*

*Oui, je t’entends très bien Est ce que je te fais mal quand je te parle comme ça ? Ça me fait bizarre, les gens ont peur quand je parle dans leur tête d'habitude, j’espère que je vais pas te faire mal.*

*Pas du tout, même si c’est assez étrange d’avoir une autre voix dans sa tête, on ressent rien d’autre. T’inquiète pas, Frankie.*

Pour lui confirmer physiquement que tout allait bien dans sa tête, même si aux vues de la situation on pouvait en douter, l’italienne fit un clin d’œil au garçon. Elle n’avait aucun moyen de savoir ce qu’il voyait, entendait ou tout autre impression que le fait d’être plongé dans l’esprit d’un autre pouvait donner, mais savait qu’il s’avait qu’elle se posait la question, puisqu’il entendait ses pensées, donc son raisonnement.

S’il était dans son cerveau, sans doute devait il aussi savoir qu’elle considérait la situation comme étrange ; nullement douloureuse, mais parfaitement étrange. Le stresse passa vite cependant, car elle était maîtresse d’elle-même, comme le prouvait son acte précédent.

Franklin sembla éprouver quelques difficultés, plissant les yeux de concentration ; cette fois-ci par contre, Amy fut parcourue d’un frisson. Tout son corps, depuis la pointe de ses longs cheveux jusqu’au bout de ses orteils, de ses doigts fins à son nez grec, de ses ala-pulmos, qui bien que repliées dans sa cage thoracique continuaient d’exister, à sa frêle et discrète poitrine qui était naissante, fut parcouru d’un étrange frisson, bref et irréel. Mais la chose la plus étrange ne fut pas sa réaction à elle, mais celle de Franklin : le garçon semblait étrangement absent. Elle se pencha sur lui, le regardant dans les yeux et l’appelant par son nom, inquiète de son absence soudaine.

* Amy! Tu m'entends toujours? Je... je sais pas ce que j'ai fait....tu a mal?...Amy?*

- Non pourquoi ? Qu’est-ce qui va pas ?

*Amy… j'ai peur… tu es là ? ...On est à deux dans ton corps ?*

Pardon ?!

Transit de surprise, sachant cela parfaitement possible et sure que Franklin ne plaisanterai pas là-dessus, l’italienne se figea. Bien involontairement, sa première pensée alla à ce qu’un jeune garçon en pleine puberté pouvait bien vouloir faire s’il se retrouvait dans le corps d’une jeune femme du sexe opposé ; Oh mon Dieu. Par réflexe, elle posa ses deux mains sur sa bouche en inspirant rapidement, se voyant déjà nue devant la glace, une main sur la poitrine et l'autre dans son sexe, les deux ayant de brefs et répétitifs mouvements ; image à elle seule en était gênante, d’autant que Franklin la voyait aussi, puisqu’il était dans ses pensées. Mais où s’égarait-elle ?! C’était Franklin, il n’accomplirait jamais pareil acte, même avec un corps qui n’était pas le sien.

- Désolée, dit-elle à haute voix, toujours ses mains sur sa bouche.

Elle avait parlé et elle avait agit conformément à sa volonté ; elle avait le contrôle. Bon, ce n’était pas cela qui l’empêchait de paniquer : de nouvelles questions se posant alors, mais son cœur accélérait dangereusement alors qu’elle tentait de trouver une solution.

*Réfléchissons calmement* dit-elle en accélérant le pas, tournant en rond dans la pièce, accélérant le pas à mesure que son cœur s’accélérait. Cela t’es déjà arrivé un truc pareil ? Est-ce consciemment que tu me laisse le contrôle où te fatigues-tu ? T’as une idée de comment sortir de cette situation ? Tu…

Merde, ses pensées s’accéléraient aussi ; crise de biologisme. Le décor commença à se ralentir alors qu’elle-même pensait beaucoup plus vite que Franklin, l’accélération de ses connections synaptiques allant de pair avec celle du reste de l’organisme. Elle bougea vite, de plus en plus vite, alors que son biologisme s’accélérait. Le plus dure devait être pour Franklin, qui non content de devoir suivre des penses bientôt cinq fois plus rapide que les siennes, ressentaient également les émotions amplifiées d’Amy, elles aussi cinq fois plus forte. Mais c’était faisable, surtout qu’elles allaient en vitesse croissante, n’ayant pas atteint les extrêmes pour l’instant.

*Merda-Shit-Merde-Scheisse* pensa-t-elle rapidement, jurant dans toutes les langues qu’elle connaissait avant de se rendre compte qu’elle avait un enfant dans la tête. *Hop-pardon* rajouta-t-elle à la même vitesse, toujours croissante.

Le hic, c’était qu’elle n’avait pas la moindre idée, ses compétences étant purement physiques. Ils devaient trouver une solution à deux, sans quoi, dans peu de temps…

*Une-idée-vite !* s’écria-t-elle mentalement, alors même qu’elle n’était pas la seule à paniquer.

- Amy !!! Amy !! Je veux sortir... laisse moi partir...

C’était le son de sa propre voix qui avait raisonné dans la pièce, même si ses paroles lui étaient adressées directement ; c’était quoi le délire ? Elle pensait à deux choses à la fois, comprenant rapidement qu’en réalité, la barrière spirituelle qui séparait les deux esprits en elle s’amenuisait. Là où lors de la transmission de pensées, celles de Franklin avaient été parfaitement étrangères, ce n’était plus le cas à présent, et elles se fondaient les unes dans les autres, à la panique des deux protagonistes. Laquelle était sienne et laquelle était celle de Franklin ? Etait-ce elle qui tentait vainement de projeter son esprit à l’extérieur, mais qui paralysée de peur n’y parvenait pas ?

Lorsque Karma l’avait possédée, elle n’avait prit que le contrôle de son corps ; là, c’était l’inverse, Amy avait toujours le contrôle, mais ses pensées et celles de Franklin devenaient toujours plus intimes, partageant souvenir et histoire.

- J'ai mal, je vois tous flou et tout bouge dans la pièce, c’est moi qui fais ça ou c'est toi ?

C’était étrange de constater que malgré l’affolement et le biologisme accéléré, lorsque Franklin parlait à travers elle, ses paroles étaient normales, au niveau de la vitesse comme de la prononciation. Mais en effet, la pièce commença à trembler, alors qu’il, ou elle, perdait également le contrôle de ses pouvoirs.

- Pour-le-flou-je-suis-en-pleine-crise-donc-mon-corps-s’accélère-pour-les-tremblements-c’est-lié-mais-c’est-pas-moi.

Elle n’arrivait pas à être sure cependant, le moi ayant tendance à s’effacer progressivement alors que deux esprits se rapprochaient encore et toujours, partageant pensées et souvenirs. L’italienne se souvenait avoir été un jeune blond à la naissance difficile mais à la vie familiale heureuse, fils de mutants qui avaient pourtant tenté d’effacer ses pouvoirs, des pouvoirs qui n’avaient nulle limite de temps ou d’espace. Elle vit le maire de NY mourir avant que cela n’arrive, elle vit les difficultés à distinguer le monde réel lorsqu’on devenait capable de le modifier et elle vit comment la psyché avait censuré certaines de ses capacités. Non, pas les siennes, celles de Franklin. D’ailleurs, cette pensée simultanée devait également être au profit du jeune homme, qui se retrouvait dans son passé à elle, petite orpheline qui même sans sa famille avait toujours était plus ou moins heureuse. Il n’y avait plus de secrets lorsque deux êtres étaient si proches, deux êtres qui partageaient corps et esprits.

Franklin lui faisait confiance et tentait de se calmer, Amy faisant de même par répercussion. Ils réfléchissaient comme un seul être à deux pensées pour trouver la solution.

- Amy, d'habitude quand j'utilise ma projection astrale et que quelqu’un bouscule mon corps, je le réintègre plus facilement. Essais de... met moi une gifle s'il te plait. Je-peux-pas-ma-force-est-améliorée-durant-mes-crises-je-pourrais-te-blesser !

L’idée était simple et ils n’en avaient pas d’autre, et si cela pouvait marcher, Amy refusait de risquer de blesser Franklin. Cependant, le corps du jeune garçon saignait du nez ; l’effort demandé le blessait déjà. Mais il y avait une différence entre un saignement de nez et un coup de poing donné avec plus de force qu’un champion de boxe, lequel pouvait être très dévastateur. Alors que les objets commençaient à léviter autour d’eux, une pensée traversa sa tête : ils avaient peur qu’un choc émotionnel ne ponctue leur séparation.

- Arrête! Tu me fais mal, tu réfléchis trop vite...

La pensée était souffrante ; malmenée par les pensées trop rapides d’Amy, Franklin perdait le contrôle, semblant s’affaiblir et se dégrader, comme s’il disparaissait. Une pensée fut bien plus effrayante que les autres : sa pensée était si proche de celle d’Amy mais n’étant pas égalitaire et aucun d’eux n’ayant réellement le contrôle, elle commençait à se dissoudre dedans. Bientôt, ils ne seraient plus qu’un. Bientôt, il n’y aurait plus de Franklin Richards ou d’Amy de Lauro. Bientôt il n’y aurait plus qu’un seul être, un nouvel être qui aurait résulté d’une fusion. Un nouvel être doté de son corps, de sa psyché mais des pouvoirs et des capacités des deux parties ; cela faisait presqu’envie.

Non, elle refusait d’avoir de telles pensées ; c’était le fait qu’elle ne parvenait plus à les canaliser qui lui faisait penser cela ; elle s’excusait auprès de Franklin pour de telles pensées, s’en voulant énormément. Elle ne parvenait pas à se calmer et aurait bientôt plus de biomasse, ce qui signifiait l’arrêt cardiaque. Amy l’aurait accepté avec joie si elle n’avait pas la certitude que Franklin en aurait souffert aussi. Il n’y avait qu’une seule solution : elle réfléchissait et paniquait beaucoup trop vite pour pouvoir calmer son cœur, mais le jeune garçon restait à un stade de pensée normale.

Amy avait toujours eut peur de la possession, mais elle n’avait pas le choix.

- Prends-le-contrôle-et-calme-nous !

Il ne devait pas avoir grand-chose à faire, puisqu’elle peinait déjà à différentier sa pensée de celle de Franklin ; probablement que son cerveau réagirait normalement si le garçon tentait de bouger. Il lui faudrait alors les calmer comme s’il venait de faire un marathon, la psyché d’Amy suivant la vitesse du corps. Pour l’aider, Nephilim déploya les Ala-pulmos, qui passèrent dans les déchirures de son t-shirt ; c’était surement très étrange à vivre, car c’était comme avoir des bras dans le dos, sauf que ces bras n’avaient nuls doigts et bien plus d’articulations, et qu’ils respiraient, directement relier à ses poumons. Ensuite, l’italienne se réfugia dans un coin d’elle-même, se laissant faire pour que la pensée affaiblit qui n’était pas sienne puisse le devenir, puisse être aux commandes sa rencontrer de résistance ; elle n’était plus que la marionnette d’un esprit étranger, une spectatrice dans son propre corps, ressentant et voyant sans pouvoir agir. Malgré la peur, elle devait se laisser faire, ne pas luter, laisser tout son être, de la prunelle de ses yeux auxquels elle tenait tant jusqu’à son intimité la plus profonde, au loisir et à la volonté d’un autre. Heureusement que cet autre, c’était Franklin…

Elle s’était immobilisée pour laisser les clés de son être, car avec l’agitation des crises, elle ne tenait véritablement plus en place. Cependant, pour une fois, elle était parfaitement immobile, n’étant plus aux commandes. Ou pas, d’ailleurs, elle n’en savait rien. Elle se souvenait avec demandé à Franklin de les calmer, car elle-même en était incapable, et qu’il ne devait plus rester trop de temps avant l’arrêt cardiaque ; mais était-ce Franklin, et était-elle Amy ? Elle commençait à en douter, à moins que ce ne soit lui ; la promiscuité était telle que la notion d’être n’avait plus réellement d’existence, à cet instant précis. Il aurait put être propriétaire de ce corps comme elle-même aurait put être la psyché étrangère, une expérience qu’ils pensaient… intéressante ? Sans la panique, la peur, l’accélération du biologisme et la tachycardie imminente, sans l’absence de contrôle total et avec le consentement des deux parties, cela aurait put, oui. L’idée de retenter se présenta dans son esprit, sans vraiment savoir d’où elle venait ; Amy aurait bien aimé s’essayer aux pouvoirs de télépathie et de télékinésie, indubitablement, même si cela impliquait de se retrouver dans une situation d’une telle étrangeté. Encore que plus leurs pensées se fondaient, et moins la situation devenait étrange, puisqu’il n’y avait plus réellement de différence entre eux. Le véritable risque était que cela ne devienne permanent, chose qui aurait été à l’avantage de Nephilim ; restait à savoir qui était Nephilim.

- Je... je vais... essayer Franklin… heu… Amy pardon… ho ; je suis perdu…

Le corps commença à lever doucement son bras ; à lever normalement son bras. C’était incroyable, lorsque la psyché non-accélérée de l’être contrôlait se dernier, Amy agissait avec une vitesse naturelle, au lieu de celle accélérée. Cependant, c’était dure de bouger au ralentit, mentalement parlant. C’était très différent que le marionnettiste auquel elle c’était attendue, car le mélange des psychés faisait qu’elle n’était pas réellement étrangère à tout cela ; en tout cas, elle n’avait pas l’impression de l’être. L’ordre ne venait pas d’elle, mais c’était tout comme ; peut-être était-ce cela le pire, ne pas savoir que l’on était manipulé.

Lorsque la psyché calme était aux commandes, le corps d’Amy était également plus calme, car même si son cœur battait à tout rompre, c’était comme agir lentement : parfaitement faisable. Mais il fallait garder le contrôle de ses pensées, comme ils le faisaient en cet instant. Sa psyché à elle était toujours aussi affolée, mais pas l’autre, une preuve qu’elle était Amy et lui Franklin. La respiration de son corps était calme, car l’apport en air plus assuré par les Ala-pulmos que par la trachée, elle n’avait nullement besoin de haleter. Franklin agit de nouveau, immobilisant son enveloppe charnelle d’adoption ; immobile comme une statue, chose qu’elle avait l’impossibilité même de faire à cause des symptômes d’hyperactivité qui allaient de pair avec ses crises. Les objets se calmaient en même temps que son corps, le contrôle de Franklin sur la situation s’accroissant de pair avec sa confiance en lui et la satisfaction qu’il avait à tout maîtriser. Toutes la pièce, depuis les tiroirs jusqu’à la jeune femme, appartenait à la pensée de Franklin ; c’en était grisant, ce contrôle, cette sensation de pouvoir… Tout arrivait selon leur volonté, ni plus ni moins. Rien ne pourrait les surprendre ou les déranger, car ils dirigeaient tout.

Non, pas ils ; Franklin, juste Franklin. C’était le jeune garçon qui contrôlait tout, elle y comprit. Mais du fait de leurs esprits unis, elle ou lui n’avait pas vraiment d’importance, en réalité. Ils ne s’étaient pas mélangés, pas encore, mais leurs pensées se côtoyaient et suivaient le même courant, étant entrelacée, celle d’Amy c’étant calmée grâce au calme de Franklin. Les risques d’absorption et d’unification semblaient réduits, ainsi Nephilim voulait expérimenter. Elle n’était plus aux commandes, car son corps et son cerveau obéissaient à un autre ; mais cet autre, pouvait-elle l’influencer ? Franklin découvrait un nouveau corps, elle découvrait un nouvel esprit. Sauf qu’influencer l’autre esprit signifiait devenir encore plus proche qu’elle ne l’était déjà. S’il y avait eut séparation, avec une pensée gouvernante et une pensée soumise, s’eut été impossible, mais là… curiosité.

Il n’y avait plus de véritable différence entre eux, ainsi peut-être que si elle tentait d’agir avec les pouvoirs de Franklin, comme lui-même le faisait avec son corps, peut-être pourrait-elle les contrôler. C’était une chance de voler !

Amy se remit en mouvement, ou plutôt le physique d’Amy, se dirigea vers la chaise pour répondre à la fatigue du garçonnet devenu temporairement jeune femme. Cependant, la marche ce n’était pas encore cela, car si Franklin maitrisait relativement bien les muscles de l’italienne, leurs connaissances partagées lui permettant d’user de ce corps comme s’il était sien, puisqu’après tout il se l’était attribué bien involontairement, mais sa vitesse de pensée inférieure à celle nécessité le rendait gauche et malhabile. Les gestes allaient trop vite, il ne parvenait pas à anticiper et ce qui devait arriver arriva : Franklin fit se viander son corps d’Amy. La chute eut un effet étrange, car si l’italienne ne ressentait pas la douleur, quelque chose s’arracha d’elle avant qu’elle ne touche le sol, le nez en avant. Non, elle ne volait pas.

- Amy !!!!!!

La voix de Franklin ; la voix de Franklin avait raisonnée dans la pièce, et disparut de sa tête. C’était fini.

On pas tout à fait. Un bruit de hoquet résonna dans la pièce.

- Amy? Est ce que ça vas ? Je suis désolé, je t'ai fait mal en te faisant tomber ? Je crois que le choc et la fatigue et surtout tes conseils mon aidé à retourner dans mon vrai corps.

Son vrai corps… chacun chez soi comme de norme ; il fallut plusieurs secondes pour que l’italienne se remette les idées en place. Plusieurs secondes et un nouveau hoquet. Elle était Amy de Lauro, c’était confirmé : elle avait certes les souvenirs de Franklin et une partie de ses connaissances (connaissances qu’elle n’aurait jamais comprise autrement d’ailleurs), mais elle était Amy. Et elle était la seule Amy, Franklin étant redevenu Franklin. C’était spé rien que d’y penser.

Mais plus que tout, si le petit blond n’avait pas été très à l’aise dans son costume de jeune brune (enfin, à la fin il avait commencé à douter d’être bien le garçon et pas la jeune femme, donc il aurait surement été prêt à prendre ses aises) conduisant maladroitement son corps à cause de l’accélération biologique, il était parvenu à arrêter cette dernière ; quelques secondes avant le point de chute, sans doute. Mais il l’avait arrêté d’une bien drôle de manière : le hoquet.

Hop, un nouveau hoquet. Amy serra les poings, face contre terre, reprenant peu-à-peu ses marques en elle-même. Les premières choses qu’elle parvint à re-maîtriser furent ses ailes, fruit de l’entrainement avec Jubilee sans doute. Les Ala-pulmos se replièrent sous l’épiderme. Le sol froid contre sa joie et ses paumes atténuait un peu la sensation de douleur qu’elle avait eut en tombant en avant, de se retenant même pas par réflexe. Elle se sentait épuisée, et se dit qu’elle n’était pas si mal contre le sol. Bah, c’était plus la fatigue que reprendre le contrôle d’elle-même qui la maintenant ainsi, car elle était épuisée.

- Mi scusi se non rispondo subito, ma sono stanca, finit-elle par répondre, quelques hoquets plus tard.

Elle se souvenait des connaissances scientifiques, mécaniques et technologiques que Franklin, en bon surdoué qu’il était, avait déjà mémorisé, donc en toute logique, elle n’avait pas besoin de se griller les méninges en essayant de parler une langue étrangère, puisqu’en ayant été elle, il devait avoir apprit aussi. D'ailleurs, c'était fou ce qu'il savait.

Elle était épuisée, l’accélération de son corps l’ayant tué, au sens figuré du terme. Si, c’était important de préciser, puisqu’elle l’avait déjà tué littéralement. Mais grâce à Franklin, la crise avait cessé ; mieux, grâce à lui et au contrôle qu’il avait exercé, Amy était sure de pouvoir agir normalement, si elle parvenait à vaincre la panique et à se calmer. Bon, le dérèglement de son pouvoir était peut-être exploitable, mais elle n’allait pas risquer de s’y bruler, courageuse mais pas téméraire, comme toujours.

La fraicheur savoureuse du carrelage disparue bientôt, mais l’italienne n’avait toujours pas bougé. Toujours sur le ventre, face contre terre, elle récupérait. Franklin avait mit les pieds au sol, put n’avait plus bougé ; il l’attendait, surement. Bah il risquait de l’attendre longtemps, car elle aurait un mal fou à ce relever seule. Ce n’était pas une question qu’elle n’en avait pas envie, mais sa fatigue musculaire était grande après ses crises, d’autant que celle-là avait été particulièrement longue, sans en être fatale pour autant.

- Je suis content que tu n’ai rien, j'ai eu très peur et je croyais que je t'avais assommé.

Arf, s’il avait comprit ses paroles, il souhaitait pourtant continuer de s’exprimer en anglais. Aller, un effort pour l’italienne, elle était trilingue après tout.

- Euh… nan. Je suis crevée de fatigue, cause de la crise, mais je suis encore… consciente ? Oui ça doit être cela.

Le petit garçon se leva dit lit, ayant surement décidé de venir lui donner la main. En fait, non, Fraklin la contourna, se rendant à la fenêtre pour ne plus rien dire.

Amy non-plus ne savait pas quoi dire : il la laissait au sol comme un tapis, le gougeât ! Nan, elle le connaissait mieux que cela, leur union psychique forçant, et savait qu’il avait juste la volonté de la laisser récupérer à son rythme, il ne viendrait l’aider que si elle le lui demandait.

Se retournant avec difficulté pour se retrouver sur le dos, elle essaya de se redresser, au moins pour s’assoir ; peine perdue, elle le comprit rapidement. Erf, fallait qu’elle récupère encore un peu. La position était plutôt gênante, car elle nécessitait une explication : le malade regardait le parc, et celle sensée veiller sur lui était allongé à terre, exténuée. Le plus gênant en fait, c’était l’explication en elle-même : elle n’allait pas déclarer à l’infirmière textuellement que deux jours après son arrivée, le jeune Richards avec eut quelques problèmes avec ses pouvoirs et s’était retrouver paré du corps d’une italienne un tiers âgée de plus que lui, et ceux durant une crise de dérèglement de pouvoir de cette dernière ; cela aurait certes put se terminer tragiquement, mais avait été évité : pas d’arrêt cardiaque pour la jeune femme, ou de fusion psychique laissant le jeune blond en mort cérébrale, son esprit à jamais intégrée à une personne du sexe opposé. La créature qui aurait résulté de leur fusion aurait put être une fausse divinité, dotée de son corps à elle, d’un mélange de leurs psychés et de leurs pouvoirs à tout les deux. Amy ne préférait pas y penser et ne pouvait s’empêcher d’en rêver.

S’il fallait retenter l’expérience, il faudrait que leurs psychés restent séparées, hors seul Franklin avait un contrôle là-dessus. Mais avant de penser à retenter l’expérience, Amy voulait déjà s’en remettre, reprendre des forces, avoir ses examens… bref, attendre un moment.

Une nouvelle tentative pour se lever fut encore un échec, et Amy ricana ; qui veillait sur l’autre maintenant ?

- Euh… Frankie ? Tu pourrais me donner un coup de main s’te plait ?

Nephilim tendit son bras pour qu’il l’aide à se relever, voulant s’assoir et n’y parvenant seule. Franklin viendrait l’aider, elle en était sur, maintenant restait à savoir comment il s’y prendrait. L’italienne avait déjà une petite idée.

- Franklin, tu pense pouvoir me relever avec tes pouvoirs ? Si un jour tu veux voler ou faire voler quelqu’un avec ta Télékinésie, faudrait déjà que tu sois capable de soulever une personne ; et je suis pas parmi les plus lourdes, donc essaie.

Aller, après un léger froirage en Télépathie, le garçonnet devrait pouvoir rencontrer une meilleure réussite en Télékinésie, à moins qu’il ne se trompe de pouvoir. Ce n’était pas possible, n’est-ce pas ?

Franklin se déclara trop fatigué pour utiliser ses pouvoirs, et ayant peur de mal s’y prendre et de la blesser ; bon, son facteur guérisseur ne devait plus être des plus efficaces, donc Amy préférait éviter les blessures physiques, sans mentir. Ce qui lui déplaisait le plus dans la phrase de Franklin, c’était qu’il se fustigeait encore.

- T’en fais pas, c’est pas grave, dit-elle, toujours allongée sur le sol la main en l’air, attendant que Franklin ne vienne l’aider. C’est le manque de pratique justement qui fait que t’as dû mal à communiquer, ou que tu communique involontairement. L’espionnage c’est pas forcément agréable, mais tu l’as pas fais exprès, et t’as rien modifié ; t’en fais pas va, tu parviendras à maîtriser. J’en suis sure.

Franklin arriva à son niveau, prenant son bras pour l’aider à se relever, lui parlant.

- Appuie toi sur moi Amy, c’est pas grave si tu me fait mal, c'est de ma faute si tu est comme. Grâce à toi, j'ai découvert pleins de choses, alors que je viens juste d'arriver à l'institut et tu est toujours près de moi et je n'oublierais pas que tu m'a tendu la main pour me ramener avec les autres élevés et je te promets que je ferais pareil quand les gens auront besoin de moi. Et pourtant, je t'ai mis dans un mauvais état et j'arrive même pas à t'aider.

- Arrête de t’en vouloir, y’a pas de quoi : regarde, t’es entier et je le suis aussi. Crois-moi que de temps à autre, cela fini bien plus mal qu’une grosse fatigue, avec certains pouvoirs. Je suis en vie, c’est déjà un progrès par rapport à mes crises, et c’est grâce à toi. Je suis contente que tu veuille aider les autres, mais le fait pas par obligation ; fais-le parce que tu le veux, sans quoi tu le regretteras. Tu m’aide là, nan ? Alors arrête de t’en vouloir. Et j’ai pas l’intention de te faire mal.

Elle lui sourit, un beau sourire bienveillant, alors même qu’ensemble, ils tentaient de la relever. Amy n’était pas bien lourde, environ 45kg, mais du fait de son âge, Franklin l’était encore moins. Il était à son côté, son bras autour du cou pour la tracter vers le haut. Redressée sur les fesses, Nephilim fit cela par étape : d’abord, se mettre à genoux, au moins un contre terre, pour répartir le poids. Ensuite, se lever simultanément pousser sur la jambe non-agenouillée et s’aider du fait que son appui fasse pareil pour garder l’équilibre, équilibre assuré par la seconde jambe. Agir avec adresse et intelligence dans un système de logique mécanique pour disposer d’une bonne coordination… et c’était elle qui pensait comme cela ?!

Merde, de la mécanique, elle qui n’était pas capable de faire fonctionner une machine a café. Cela, c’était les connaissances de Franklin utilisées par son cerveau, selon toute probabilité. Perturbant ; plutôt sympa comme méthode d’apprentissage du fait de l’économie précieuse de temps, mais perturbant. Surtout qu’elles semblaient moins bien intégrées que ses connaissances à elle, surement du fait qu’elles aient été transmisses chaotiquement. Les Télépathes pouvaient apprendre en absorbant les connaissances droit dans le cerveau d’un autre, ce qui était de la triche en comparaison des heures d’études nécessaires aux autres, mais était plutôt cool, quant c’était soi-même qui apprenait quelque chose.

Bref, se relever.

- A trois ; uno, due, tre, dit-elle, un peu d’italien ne faisant pas de mal.

Amy avait trouvé un autre italien, Samuele, pour pouvoir parler leur langue natale car, si c’était comme la bicyclette et qu’une langue maternelle ne s’oubliait pas, ne pas la parler était fort dommage, surtout quant elle était aussi poétique que l’italien. Puis Franklin avait exprimé le souhait de l’apprendre, et si comme pour Amy, les connaissances étaient en bordel dans son cerveau, les faire travailler permettrait de les maintenir en état.

Une fois relevé avec une difficulté certes assez élevée mais loin d’être insurmontable, l’italienne se dirigea jusqu’à la chaise, s’affalant dessus en mode adolescent des années 2.000 : bras tombant et tête posée contre le dossier.

- Merci Frankie, sourit-elle a nouveau, le regardant. Que d’émotions pour ton premier jour d’école ; t’en fais pas, ils ne seront pas tous comme cela. Même à l’Institut, il y a une majorité de journées « normales » ; bon, c’est pas le cas de celle-là, mais tu verras, c’est sympa ici. Je… je vais pas essayer de te vendre l’Institut non-plus, puisque tu sais déjà ce que j’en pense et ce que j’y ai vécu. Cette conversation va être étrange, nan ? On sait déjà tous l’un de l’autre, mieux qu’il n’est humainement possible en tout cas. Bah au moins, on ne peut être que sincère l’un envers l’autre, et c’est cool. J’ai pas vraiment de questions à te poser, du fait. Je pense pas que cela te gène que je déploie mes membranes nictitantes, puisque dans un sens, tu les as eut aussi ; je vais avoir besoin d’emmagasiner de l’énergie pour ma photosynthèse, histoire de me remettre plus facilement.

Elle déploya ses secondes paupières, transformant ses yeux en émeraude, dans l’espoir de capter un minimum de la lumière naturelle que laissait entrer la fenêtre. Evidemment, s’eut été plus efficace si elle se trouvait devant, ou même dehors, mais bon.