Quelques jours d'absence...

>> "Les soirées de l'ambassadeur sont toujours une trollfest"

Tout était confus. Je sentais à nouveau qu'on me manipulait... Non, pas à nouveau... Je revenais à moi, en fait. Oui, j'étais totalement tombée dans les vapes, et maintenant je revenais à moi. Mes sensations commençaient à revenir progressivement, je sentais qu'on me manipulait. Des gens me touchaient, je ne savais pas trop pourquoi... Ensuite ce fut l'odorat qui revint. Il y avait une odeur... D'hôpital. Mais ça ne pouvait pas être un hôpital, j'avais l'impression que tout bougeait, comme dans une voiture. L'ouïe fut la suivante à revenir... Et la première chose que j'entendis fut une sirène. Ça y est. J'étais dans une ambulance. Les personnes qui me touchaient devaient être des ambulanciers, des médecins, quelque chose du genre. Alors j'avais survécu ?

Je devais avouer une certaine surprise. Quand j'avais fait mon petit coup de bluff avec le flingue, j'estimais mes chances de survie à allez... 30% ? Je savais que le biométal avait une chance d'arrêter la balle, mais à un endroit aussi peu stratégique que mon œil, sachant en plus que l'arme était d'un calibre conséquent, j'aurais pensé que l'impact me tuerait sur le coup. Visiblement, non.
J'étais donc encore en vie... J'ignorais si c'était ou non une bonne nouvelle. Je ne pouvais en tout cas pas bouger : ni ouvrir les yeux, ni parler consciemment, mais certains réflexes restaient actifs. Par exemple, pour une raison incompréhensible, j'eus un bref sourire au coin des lèvres. J'ignorais pourquoi. Peut-être m'avaient-ils filé de la morphine ou quelque chose du genre ? Probablement, parce que je n'avais pas mal à l’œil, et selon ce que j'entendais, je devrais avoir mal à l’œil.

« ...able pour le moment, pupille réactive à gauche... il y a trop de sang à droite, aspiration... pupille fixe et dilatée, on dirait qu'il y a perforation. Prévenez l... »

Je ne comprenais plus ce qu'ils racontaient. J'avais vu qu'un de mes yeux avait été ouvert, puis ébloui par une lumière. Ensuite j'avais senti que quelqu'un m'ouvrait l’œil droit, mais je n'avais rien vu par contre. C'était plutôt inquiétant... Mais mon inquiétude ne fut que de courte durée, étant donné que je me retrouvai encore une fois évanouie...

Je ne restai pourtant pas à l'ouest longtemps, me réveillant presque immédiatement après... Dans une chambre d'hôpital. Non... Combien de temps étais-je restée endormie ? Je ne m'étais pas réveillée instantanément, mais pour moi, ça avait semblé instantané en tout cas. J'avais un pansement sur l’œil droit, et autour, d'ailleurs... Et j'avais bien mal. La chambre semblait occupée par d'autres personnes, je n'avais visiblement pas eu le droit à la suite royale, cette fois-ci, dommage. Un médecin, remarquant mon air confus et désemparé, s'approcha de moi et s'adressa à moi d'une voix rassurante.

« Mademoiselle Spencer ? Savez-vous quel jour on est et où vous êtes ? »
« On est... Je sais pas... Dans mes souvenirs on était... » C'était deux jours après la soirée de fin d'année, que j'avais passée avec Josh. « On était le premier juillet, j'étais dans une soirée donnée par l'ambassadeur de Suède... Mais là je suis à l'hôpital. »
« Très bien. Nous sommes le 3 juillet, vous êtes restée dans le coma deux jours. Savez-vous ce qu'il s'est passé ? » demanda-t-il alors en prenant des notes.

Il était plutôt mignon et avait une jolie voix. Un interne, probablement, vu son âge. Si je n'avais pas eu une migraine atroce, je l'aurais bien croqué pour profiter du réveil... Mais là, il m'était difficile de vraiment réfléchir tellement la douleur dans mon crâne frappait, par pulsations sourdes. Puis je devais avoir une bonne haleine de chacal, en plus, après être restée endormie deux jours. Et ce fut là que je réalisai. Putain DEUX JOURS !? Heureusement que je n'avais pas d'obligation de dormir à l'Institut et que les cours étaient terminés... Sinon j'aurais eu pas mal de problèmes, autant le dire.

« Il y a eu un type armé... Et j'ai pris une balle. » répondis-je.

Le jeune médecin haussa un sourcil, l'air surpris par ma réponse, mais ne dit rien. Pourquoi n'avait-il pas répondu ? Il sourit à nouveau, me signalant que quelqu'un viendrait me voir pour m'examiner et m'expliquer plus en détails. Puis il partit. Pourquoi avait-il eu l'air aussi surpris ? Les fusillades, ce n'était pas non plus très rare, à New York City... Pensait-il que j'avais provoqué la fusillade ? Il y avait des flics, dehors, je les voyais par la petite fenêtre qui donnait sur le couloir. C'était pour moi qu'ils étaient là ? Ils pensaient que j'étais un danger ? Ils allaient m'arrêter ? Je ne comprenais pas... Non, je n'étais pas menottée. J'avais déjà vécu ça quand j'étais dans le gang. J'avais pris des balles dans les bras, et chaque fois, à l'hôpital, il y avait deux flics devant la porte et j'avais des menottes... Mais pas ici.

Un des patients alluma la télé, c'était un reality show à la con sans grand intérêt. Pour ma part, je tentais de rassembler mes souvenirs... La scène me revint en tête, précisément. Le spectre étrange... La balle que je m'étais moi-même mise. Dans l'oeil. Je n'en revenais toujours pas... Mais quelle débile sans rire !?! POURQUOI dans l’œil merde ! J'aurais dû choisir un endroit plus strat... oh, puis tant pis, c'était trop tard de toutes façons.
Mes pensées furent interrompues alors que le journal télévisé commençait. J'y jetai un œil absent, mais... l'absence fut de courte durée, car le premier titre me fit afficher un air sidéré.

« ...lice de New York recherche toujours l'homme pris dans des vidéos amateur, qui a sorti une arme lors d'une réception donnée par l'ambassadeur de Suède. Son signalement a été transmis aux autorités de l'état et un mandat de plus grande envergure devrait être émis afin de le retrouver. Concernant la jeune femme qui semble s'être interposée, ses jours ne sont pas en danger. Pour rappel des faits, un homme asiatique de grande taille qui n'était pas invité à la soirée a sorti une arme, menaçant les invités présents. Une jeune femme, semblant être une mutante au vu des vidéos prises par les téléphones portables des présents, s'est alors interposée, acceptant de se tirer elle-même dessus pour que les vies des invités soient épargnés. Son nom n'a pas été révélé mais un groupe facebook a été form... »

Génial. Parfait. Pile ce dont j'avais besoin. Des emmerdements.
Déjà que je n'étais pas extrêmement bien vue à l'Institut, mais voilà que maintenant je PASSAIS A LA TÉLÉ ! Et l'école voulait rester discrète, là bonjour la publicité... J'allais me faire DÉFONCER LA TÊTE en rentrant. Je me voyais déjà en je ne savais pas trop, conseil de discipline, un truc du genre, pour décider des conditions de mon renvoi... Bon, de toutes façons penser à ça maintenant ne m'apporterait rien. J'étais crevée, alors que je venais de dormir pas loin de deux jours de suite, et je me rendormis donc.

A mon réveil, la soirée avait commencé et un médecin était devant moi. Sûrement celui qui devait venir me voir pour m'en dire plus. Il me reposa quelques questions, genre est-ce-que je connais mon nom, la date, le président des états-unis, ce genre de choses... Mais au final, ça ne m'intéressait pas. Avoir donc répondu cinq ou six fois, je finis par demander en fronçant les sourcils (enfin *un* sourcil, vu que l'autre était sous le pansement).

« Écoutez je sais que vous tentez de vérifier mon état de santé, mais... Mon œil... »

Le type rangea son stylo, affichant un air plus sérieux. Déjà, il n'avait pas l'air désolé ou navré, c'était donc un bon départ... Non ?

« La première chose à savoir est que vous retrouverez très certainement la vue après trois à quatre semaines. Lors de l'impact, un morceau de métal a pénétré l'iris, mais nous avons pu l'extraire et c'est une zone qui cicatrise. En revanche l'objet était métallique, il est donc possible qu'une partie ou totalité de votre iris ne s'assombrisse. Concernant votre vision, la cornée n'a pas été touchée, elle devrait donc rester normale mais vous devrez vous faire examiner toutes les semaines pendant un mois par un ophtalmologiste pour s'assurer que tout va bien et qu'aucun autre corps étranger n'est entré. L'ophtalmologiste passera demain dans la journée pour vous donner plus d'explications. »

Bon, il fallait voir le positif, j'allais probablement recouvrer la vue. Youpiiii... Par contre j'allais avoir un œil "assombri" ? Comment ça "assombri" ? Genre noir, ou un truc du genre ? Il ne me laissa pas trop le temps de réfléchir à tout ça, vu qu'il se remit à me poser des questions avant d'ensuite m'examiner, faire des trucs de routine, blablabla... La soirée fut assez ennuyeuse, le seul moment "différent" étant celui où une infirmière vint me changer le pansement. Je ne pouvais juste pas du tout ouvrir l’œil, pour le moment. Enfin... Trois à quatre semaines. Le repas fut d'une qualité douteuse, et je finis par m'endormir une nouvelle fois...

... Pour me réveiller avec les flics. Ah ben tiens, ça m'aurait étonnée qu'ils ne viennent pas, ceux-là. Encore une fois, ils me posèrent des questions pendant une heure. Qu'est-ce-que je faisais à la soirée. Qui était ce type. Qu'est-ce-qu'il voulait. Pourquoi je m'étais interposée. Chaque fois, je répondis en disant la vérité. De toutes façons, qu'aurais-je eu à gagner en racontant des conneries ? L'un des deux agents m'informa du fait que le B.A.M. voudrait aussi me voir, avant de quitter les lieux. Le B.A.M., alors là mon petit père, pas moyen, j'avais assez d'emmerdes comme ça. Je n'étais pas en état d'arrestation, et je pouvais donc me tirer de l'hosto quand je voulais... Donc s'ils voulaient me voir, ils devraient venir à l'Institut et avec un peu de chance, ce lieu les intimiderait suffisamment pour qu'ils ne m'emmerdent pas outre mesure. Enfin... En supposant qu'on me laisse rentrer et que je ne me fasse pas virer, évidemment.

Le lendemain, le médecin accepta de me laisser partir. Les radios du crâne ne montraient rien d'inquiétant, et j'avais un rendez-vous avec l'ophtalmo la semaine suivante.
Embarquant mes affaires, je quittai finalement la chambre avant de repartir vers l'Institut Charles Xavier, après maintenant cinq jours d'absence... J'avais vraiment peur de me faire fumer ma tête, là... Pas au sens propre, mais je devais à tout prix éviter de croiser qui que ce soit d'important et m'enfermer dans ma chambre pour un bon mois, au moins le temps que l'affaire ne se tasse...