Retour: Imprévu haut en couleur. ( Pv Logan )

Pas le moindre serrement de cœur ne vit le jour sous ce large torse battu par les vents qu’imposait la vitesse. Ras de remords et encore moins de regrets alors que défilaient à ses côtés le ravissement de paysages toujours plus familiers. Il n’en avait, pour ainsi dire, jamais éprouver le moindre tout au long de sa conséquente existence alors se n’était pas en ce jour qu’il commencerait à se torturer l’esprit. D’autant que la brouille survenue avec le Professeur X n’avait, dans le fond, eu que le mérite de lui proposer un intermède dans son existence confortable à l’institut pour retrouver ce qui resterait comme une bonne partie du sel de son existence : la Cavale ! La simple idée de rester sédentaire pour quelques temps lui arracha un pauvre sourire au coin des lèvres et intima un mouvement brusque sur son poignet. Sollicité si soudainement, le lourd moteur rugit sa plainte et monta crescendo dans les tours pour griser Serval d’une ultime pointe de vitesse.

Le sombre bolide semblait glisser sur le bitume entre les rangées de pin zébrant d’ombre la sombre surface. L’odeur de résine emplissait l’odorat du mutant canadien qui voyait poindre au loin la douce fragrance des eaux placides proche des terres où Xavier avait niché l’œuvre de sa vie. Un frémissement parcourut la peau des bras massifs de l’Arme X. Il n’était consécutif à aucune fraicheur, seulement à l’impression bizarre qu’il renouait là avec une existence qui avait, probablement, du lui manquer… Un fait que jamais il ne pourrait avouer ! Renfrogné par ce constat qui trahissait une humanité que camouflait tant bien que mal toute sa bestialité, Wolverine finit par lever le pied et sa lourde cylindrée ne tarda pas à cesser de galoper. Adoptant un rythme plus lent, le puissant moteur vrombissait ses roulements beaucoup plus détachés alors que les grilles de l’institut étaient en vue.

Les pans battants de la lourde veste de cuir sombre, passée sur son dos, cessèrent de claquer dans le vent alors que la vitesse se faisait marche définitivement. Un coup d’œil sombre sur les grilles de métal confirmèrent leur ouverture, signe que son véhicule n’avait point été banni des fichiers et de la quelconque base de donnée régulant les entrées comme les sorties… Un bon point qui crispa la mâchoire de Logan en un énigmatique sourire. A la route lisse succéda l’allée déformée et les suspensions de la moto jouèrent tant bien que mal leur rôle. Les crissements des pneus sur la voie ne manqueraient pas d’attirer l’attention du commun et Wolverine en jura intérieurement. Ses entrées comme sa vie se faisaient, la plupart du temps, en silence et il n’aimait pas vraiment être au centre des attentions, ne trouvant sa place véritable d’un peu en retrait dans les ombres à la manière des Ronins protecteurs vigilants. S’il pouvait être un véritable meneur d’homme en première ligne à la guerre, la vie civile imposait à son caractère sauvage bien plus de précautions pour faire cohabiter avec les autres son côté grognon…

Rallier les derniers mètres le séparant de la façade familière de l’institut se fit donc sous le regard de quelques étudiants curieux que le mutant canadien dévisagea de rapides coups d’œil rendus furtifs par les verres fumés de ses lunettes aviators. Enfin immobile à l’emplacement destiné aux véhicules visiteurs, Serval anima un vif coup de talon pour disposer béquille au sol et couper le moteur d’un simple mouvement de ses doigts. Le silence de la machine autorisa les oreilles du mutant à s’emplir de cette symphonie qu’il n’avait pas entendu depuis bien longtemps. Le bruissement du vent sur les feuilles des arbres sous lesquels bavardaient de jeunes résidents, les heurts sourds du cuir d’une balle de basket autour de laquelle s’écoulaient les souffles de jeunes hommes hors d’haleine qu’accompagnait le gloussement timide de quelques élèves féminines. L’application des plus vieux à aiguiller les plus jeune de leur ton rassurant ou encore les rires subits et cristallins d’amis mutants vagabondant dans les jardins… Tout ceci arracha au vieux soldat un sourire attendri par l’harmonie qu’avait sur créer, ici, le Professeur.

Mais sentiments et Wolverine ne font que rarement bon ménage et c’est Presque immédiatement que Logan chaussa de nouveau son masque renfrogné pour se débarrasser des lunettes qui obstruaient, maintenant, sa vue. Ses yeux se plissant légèrement sous le retour de la vive lumière, il s’ébroua tel un loup pour détendre les puissants muscles de son coup alors que nul casque n’avait à quitter son crâne. A quoi bon en mettre un quand on dispose d’un indestructible squelette après tout ? La sécurité routière n’était, de toute façon, pas son fort… Un rapide passage d’une de ses larges mains dans ses cheveux redressa tant bien que mal la taille si particulière et la reformation de la coupe singulière arracha des murmures audibles aux oreilles animales du fauve canadien. Des murmures de résidents plus anciens qui chuchotaient aux plus récents l’identité du nouvel arrivant comme des bribes de sa légende.

Indifférent aux commérages, Serval se figea contre sa moto, sortant de ses poches uses un cigare sombre et pour le moins parfumé. Glissant le barreau de tabac sous son nez pour en humer les effluves, il finit pour le figer au coin de sa mâchoire et l’embraser d’une allumette grattée sur ses favoris drus. A défaut d’avoir un briquet… Tirant de son souffle pour emplir ses poumons de fumée, c’est tout naturellement que Logan chargea sur son dos son unique sac de voyage sur ses épaules alors qu’une sombre berline passait à son tour dans l’allée. Indifférent à son environnement, le mutant canadien l’étoffe de jute sombre dans laquelle se trouvait le fourreau où reposait la lame de Murasama. Disposant l’arme aux attaches aménagées sur son sac, Logan laissa nonchalamment la poignée du Katana émerger des étoffes quelque peu retombées. Pas ici qu’on se battrait pour la lui subtiliser après tout…

Son œuvre finalement achevée et l’ensemble de ses possessions ainsi rassemblée, Wolverine se figea un instant pour goutter les rayons du couchant sur sa peau. Toujours aussi peu désireux de verser dans le sentimental, Serval émit une sorte de grognement devant son propre comportement et ne tarda pas à tourner les talons pour se diriger d’un pas tranquille vers le hall d’entrée. Son cigare aux lèvres lui vaudrait surement les brimades de Xavier, mais il espérait bien que son retour calmerait le courroux du divin chauve. Enfin, il verrait bien… Aussi bien que la scène que lui offrait professeur et résident en l’instant. Se figeant pour ne pas entraver la bonne marche de l’éducatrice, Wolverine observa d’un œil scrutateur les forces en présence. Deux élèves facilement oubliables que semblaient opposer des disputes de mômes à un âge bien inférieur à celui qu’ils devaient réellement avoir. L’un d’entre eux, cherchant le secours de son professeur pour régler ses propres conflits, s’attira sans le savoir tout le mépris que pouvait offrir le Code d’Honneur du X-Men. Livrer seul ses combats était un des leitmotiv du canadien et ce n’est pas peu dire qu’il abhorrait les faibles et les plaintifs, estimant qu’on était en droit de se plaindre aux autres qu’à partir du moment où l’on avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour changer les choses…

Laissant ses yeux dériver sur la nouvelle reine de ce pathétique jeu d’échecs. Et c’est pas peu dire que l’énergie de la jeune femme surpris Wolverine. Le rapport de force était très clairement en défaveur de l’étudiant qui se voyait mis en pièce par les attaques verbales ciblées d’un petit bout de femme à l’incontestable autorité naturelle. Pas désagréable à regarder, sa beauté naturelle relevait des origines asiatiques qui plongèrent Logan dans le souvenir de quelques périples Chinois comme Japonais et Viet-Namien dont il n’avait, toutefois, pas l’entière mémoire. Mais comme pour beaucoup des réminiscences de son passé, celles-ci se voyaient tâcher par le sang comme le feu… Feu que soufflait la jeune femme aussi bien que la glace, manipulant son interlocuteur avec une aisance telle que Logan en arqua un sourcil. Elle avait des méthodes assez intéressantes et conclut l’affaire par la promesse maladroite de son élève à dépasser ses difficultés pour tenter de fournir un travail demandé. Pas mal… Vraiment pas mal s’avoua l’Arme X en croisant ses bras sur son large torse.

Silencieusement, son sempiternel masque neutre poignant ses traits, Wolverine accueillit l’avancée de la jeune femme superbe sans s’en émouvoir. Elle ne semblait pas totalement dans son assiette en l’instant et Serval en vint à penser que son éternelle aura de menace était à l’origine de ce trouble passager. Il écouta ses excuses sans piper mot, son cigare fumant toujours au coin de ses lèvres. Se nourrissant des réactions de la jeune femme, Logan ne répondit pas à ses questions, se murant dans le silence alors qu’elle lui exposait un trousseau de clés et se contenta d’hausser un sourcil broussailleux quand elle avança des dommages ayant perturbé la morphologie des lieux. Tant qu’il retrouve ses quartiers et ne soit pas forcé de dormir au milieu des marmots… Toujours est-il que, malgré son apparence de statue de sel froide à toute réaction, le mutant canadien appréciait cette rencontre rafraichissante, la jeune lui laissant l’impression de ne pas être auréolée d’artifice, une qualité appréciable pour le mutant amateur de lignes et au caractère aussi direct qu’immédiat ! Mais à la lueur de ses yeux, il pouvait lire que son existence n’avait pas été aussi rose que le laissait présager son caractère entier. C’est qu’ils se reconnaissent aisément entre eux, ceux que la vie a abimé plus que de commune mesure… Finalement, il la laissa reculer de quelques pas sans la quitter du regard et crispa un peu plus ses dents d’animal sur son cigare en l’entendant préciser qu’elle ne mordait pas. Non… Il était le fauve ici. Figé, il accueillit par le silence son questionnement. Un silence aussi pesant que celui des steppes du Grand Nord et qui sembla courir comme une éternité avant que le mutant canadien ne décline deux syllabe pour prouver qu’il n’était pas vraiment muet :

" Logan . . . "

Bourru, comme à sa sauvage habitude, il se contenta de rajuster son sac de voyage sur le dos avant de s’avancer vers son “ guide ” d’un jour. Les plaques pendant à son cou, frappées du pseudonyme de Wolverine, scintillaient au point du jour et battaient son large torse à chacun de ses pas lourd sur le bitume et bientôt sur les marches menant à l’intérieur de l’institut. Cigare au coin de la bouche, Wolverine s’attendait à une montagne de reproches sur le fait d’être un mauvais exemple pour la jeunesse, mais Xavier lui-même avait fini par désespérer de le priver de ses cigares dans l’enceinte de l’école. L’ancien pensionnaire du département H désespérait par avance de trouver une mousse dans cette école. Pas peu dire qu’il n’avait pas la moindre intention de siroter du lait fraise ici ! C’est comme s’il était constamment de mauvaise humeur… Surement pour cacher qu’il était, intérieurement, assez heureux de revenir dans ce qui s’apparentait le plus à un chez lui finalement. Mais la pudeur misogyne interdisait bien sur de montrer ses sentiments à la face du monde. Plutôt endosser l’image d’un vieil ours…

Emboitant le pas de la jeune femme dont il n’avait pas jugé utile de questionner le nom, il se comportait en inquiétante ombre silencieuse. Tout juste décernait il quelques coups d’œil aux étudiants qu’il avait déjà formé aux Arts Martiaux dans le temps ou bien aux X-Men avec lesquels il avait partagé quelques missions. Quelques hochements de tête répondaient aux discrets gestes amicaux, mais pas d’embrassades pour le mutant canadien. Tout juste s’autoriserait il ce genre d’attention pour les deux jeunes femmes qu’il imaginait être les plus proches de ce qu’on pouvait appeler des filles : Laura Kinney & Kitty Pride. Diablo & Colossus recevraient probablement des bourrades amicales, Tornade un baiser respectueux et Jean… Mais ça ne se bousculait pas au portillon. Au point que le colossal porteur d’Adamantium passa son cigare entre deux doigts avant d’en recracher la fumée et apostropher son guide sur des questions qu’il n’avait pas jugé de renseigner durant sa longue absence :

" Lugubre pour un vétéran. A croire que c’est Cyclope qui tient l’endroit maintenant ! Ca sera pas du luxe d’aller arrondir les angles avec Charles avant d’me coucher faut croire ! "

Un instant, il accompagna ses remarques d’un sourire amuse par son propre humour particulier avant de se renfrogner tout aussi vite, imaginant quelles erreurs il avait bien pu commettre depuis que le petit bout de femme l’avait pris en charge. Dans le temps, il lui suffisait de déverser son patronyme à la face d’un résident pour qu’on comprenne ce qu’il venait faire là, d’où son absence de réponses aux questions de la jeune femme. Sauf que maintenant, combien de temps s’était écoulé depuis son départ ? Presque deux ans ? De quoi en voir passer des figures blondes… Intériorisant ses réflexions, Wolverine sembla tout à coup encore plus renfrogné que d’habitude. Reconnaitre ses erreurs n’était pas vraiment son fort et les corriger encore moins. Et alors qu’ils débouchaient sur une allée extérieure pour se voir nimbés des rayons de l’astre couchant, Logan reprit pour lui l’habit du silence…