Le bilan et l'heure des choix [Emma Frost]

Amy s’y était prise en avance, ce jour là. Cela faisait presqu’un moi depuis les évènements du Met et des Cyborg, et grâce à la bienveillance de Caitlyn, elle s’était non-seulement remise plus vite, n’ayant été attristée de la barbarie du monde que quelques jours là où il lui avait fallut presqu’un moi la première fois, et elle avait également entreprit un entrainement encore plus régulier. Les deux sœurs de cœur avaient donc progressé ensemble, bien qu’Amy continuait de suivre des cours en-dehors de l’Institut. Puis elle avait rencontré le professeur Logan, des cours de self-défense, ce qui faisait que la jeune Nephilim, jadis pacifiste acharnée, était désormais bien contente de pouvoir guérir les bleus en une minute lorsqu’elle entrainait la suractivité de sa régénération. Du fait, elle n’était pas marquée quant elle allait en cours à la fac !

C’était pour ce dernier point qu’on l’avait convoqué ; l’italienne avait prit les cours en milieu d’année, au début du second semestre, et malgré qu’elle ait bossé personnellement pour rattraper son retard avant même d’aller à l’université et qu’elle ait un très bon niveau scolaire, les examens approchaient et avec le nombre de mésaventures qu’elle avait vécues, bah la réussite était encore loin.

Vêtue d’un t-shirt sombre, d’un jean et d’une veste verdâtre, les cheveux réunis en deux tresses et une queue de cheval, la jeune femme au trait juvénile attendait devant le bureau du professeur, relisant son relevé de note encore une fois. Ce n’était pas trop mal, mais très en dessous de ses capacités. Son visage était déçu, son harmonie naturelle assez contrariée par les commentaires, parfois désagréables mais véridiques, qui accompagnaient les matières. Elle avait non-seulement était une petite fille modèle toute sa vie, mais également une élève modèle ; donc, les remarques « trop discrète » ou « ne participe pas assez » étaient son lot depuis un petit moment, mais les « dort en cours » ou autre « manque de concentration » étaient aussi nouveau que malvenu. Bon, elle n’allait pas nier : les cours du début d’aprèm’, à l’heure de la sieste, elle avait du mal à les tenir. Surtout depuis qu’elle s’entrainait avec Caitlyn. Même en se couchant avec le soleil et se levant avec lui pour trois à quatre heures de photosynthèse, fallait tenir le coup. C’était le vendredi le plus dure, puisque c’était la seule journée où elle avait cours le matin. Pas de photosynthèse, entrainement à Xingu Luihe Quan le jeudi soir, autant dire qu’on faisait rien d’elle jusqu’à dix heure… forcément que les profs se plaignaient.

Bref, scolarité moyenne pour une personne qui avait habituée à mieux.

Mais il n’y avait pas que pour cela qu’on l’avait convoquée. N’importe quel prof qu’elle connaissait à l’Institut aurait put lui faire la remontrance. Mais c’était une nouvelle qui allait la recevoir. Amy connaissait son nom : Emma Frost. Et savait aussi ses pouvoirs : Télépathe, et transformation en diamant. Cool.

L’italienne n’avait pas vraiment peur qu’on entre dans sa tête ; pour voler quoi ? Puis elle faisait confiance au personnel de l’Institut, et encore plus au X-Men.

Ce qui ne l’empêchait pas de stresser à mort ; elle était devenu moins timide grâce à la Tite Rousse, certes, mais bon, fallait pas lui demander d’arriver la gueule enfarinée version… Cait’, justement.

Bref, elle attendait sur une chaise, devant un bureau qu’elle estimait semblable à celui de Warren, qu’on vienne la chercher.

- Dio, faccia che non mi rimprovera per i miei noti, murmura-t-elle entre ses dents.

Aller vers les autres était déjà compliqué, mais quant on avait une chose qui pour elle se rapprochait d’une bêtise entre les mains, c’était comme attendre un jugement. Elle n’avait jamais attendu devant quelque bureau que se soit après avoir été convoqué, et cela ne figurait rien de bon. Elle n’avait jamais fait de bêtises digne de ce nom ; bon, elle en aurait bien mit une à Caolán, un moi plus tôt, mais elle s’était abstenue. Elle avait fait quelques sorties autres que pour ses cours avec la voiture prêtée par l’Institut pour s’y rendre, mais elle ne l’avait ne serait-ce qu’égratignée. Même ses notes, cela restait valable, car bien que les premières furent en dessous de la moyenne, toutes celles de sa période post-récupération de Mutant Town avaient été au-dessus de la moyenne de classe !

Nan, ils n’avaient aucune raison de la réprimander. Si ?

Amy avait légèrement froissé le bas de sa feuille de bulletin trimestriel lorsque finalement, la porte s’ouvrit ; l’italienne se leva de concert, regardant Mlle Frost.

Elle était toute pâle et pas très rassurée.

Le craquement résonna dans toute la salle. Le trait jusque là fin et précis se terminait en une arabesque étrangement fourchue. Emma souffla pour évacuer le petit morceau de mine qui continuait de rouler sur la feuille. Elle se pensait sereine et avait désormais la preuve que ce n'était pas le cas. Elle profita que le crayon était engagé dans la petite boîte noire pour se détendre les épaules, tout en laissant ses pensées se perdre au son de la mécanique du taille-crayon. Elle tenait à ce que son prochain cours soit prêt. Dire qu'elle voulait bien faire aurait été une erreur. Emma était une Frost, et donc une invétérée perfectionniste. Elle voulait que son travail soit irréprochable et ne pouvait imaginer laisser la moindre place à un quelconque échec.

La prise de ses nouvelles fonctions se faisait petit à petit et plutôt bien par rapport aux difficultés qu'elle avait imaginées. Elle était soulagée d'avoir déjà l'expérience de l'enseignement et de la direction d'établissements scolaires. Elle s'était constitué ainsi des bases particulièrement solides qui facilitaient son intégration à l'institut Xavier.

Ce jour-là, elle avait prévu de rencontrer une élève qui faisait sa scolarité dans un autre établissement. Elle avait rapidement parcouru son dossier. Parcouru parce qu'elle tenait à avoir un minimum d'information sur elle, mais rapidement parce qu'elle préférait se faire son jugement sur la personne elle-même plutôt que sur ce qui pouvait en être écrit. La petite Amy avait raté une partie de son année qu'elle avait du rattraper, ce qui était une circonstance assez néfaste pour une élève, même en université. Le détail qui avait attiré l'attention d'Emma était que la jeune fille étudiait la psychologie. Elle avait alors imaginé plusieurs moyens de booster un peu les résultats de la jeune fille. Mais c'était à elle de dire ce qu'elle en pensait.

Tout en réfléchissant à cela, elle refît sa queue de cheval pour qu'elle soit bien tirée et indique bien qu'il n'y avait pas de place pour la perte de contrôle dans sa vie. Elle se leva de sa chaise, et redressa sa blouse blanche qui recouvrait son chemisier et une partie de son pantalon, blancs eux aussi. Elle hésita quelques secondes à convoquer Amy par télépathie puis se ravisa, considérant que c'était une manière peu catholique d'établir un premier contact avec quelqu'un. Elle s'avança donc jusqu'à la porte de sa salle de cours, l'ouvrit d'un geste net et précis, puis se plaça dans l'embrasure, avec un petit sourire aux lèvres.

Mademoiselle De Lauro ? Elle attendit d'avoir l'attention de son interlocutrice. Bonjour mademoiselle. Veuillez entrer, s'il-vous-plait.

Tout en gardant la main sur la poignée, Emma se colla contre la porte pour laisser l'étudiante passer. Puis, une fois cette dernière à l'intérieur, elle referma la porte et retourna s'asseoir à son bureau, non sans indiquer le siège le plus proche d'elle : Vous pouvez vous asseoir.
Elle croisa les jambes et posa ses coudes sur le bureau pour joindre les mains devant son menton. C'était une posture qu'elle avait naturellement tendance à prendre quand elle abordait un sujet sérieux et qu'elle avait besoin d'obtenir l'attention d'autrui. Elle pouvait imaginer que la jeune fille allait être émue, voire un peu confuse et décida qu'il valait mieux lancer rapidement un sujet qui ne la mettrait pas mal à l'aise.

Vous me connaissez peut-être déjà, mais laissez-moi me présenter. Je suis mademoiselle Emma Frost. Je suis ici en tant qu'adjointe de direction, mais aussi en tant que professeur. Je vais sous peu ouvrir un cours de psychologie à l'institut qui pourra s'adapter à tous les niveaux.

Elle reprit une posture plus détendue, les coudes dans le vide et les avant-bras sur le bureau, le dos un peu plus en retrait que précédemment.

En fonction de votre emploi du temps et de vos besoins, je peux vous proposer deux choses : soit vous rejoignez mon cours en plus de votre cursus à l'université, soit nous établissons un système de cours particuliers adaptés qui vous permettront de revoir avec moi les cours que vous avez déjà à l'université.

Elle referma son carnet devant elle et le déplaça sur le côté pour pouvoir se pencher à nouveau en avant, se rapprochant ainsi de la jeune fille.

Pour prendre la meilleure décision, je pense qu'il faudrait d'abord cerner votre situation. J'ai bien sûr votre dossier, mais j'aimerais que vous me donniez votre propre ressenti sur la situation actuelle. Comment se passe votre scolarité ? Arrivez-vous à suivre ? Devez-vous fournir du travail intensif en plus de vos cours ?

Emma avait pris la psychologie comme prétexte, mais elle espérait avoir un peu plus de détail sur les autres matières et sur la vie d'Amy, en général. Elle se préparait donc à laisser peut-être quelques silences meublés uniquement de son sourire, pour lui faire comprendre qu'elle n'était pas là pour parler à sa place, mais avant tout pour l'écouter. Même si cette pensée était totalement déplacée, la situation lui rappelait un peu quelques consultations qu'elle avait pu avoir en tant que sexologue.

Amy n’eut pas énormément le temps de se stresser toute seule comme une grande que la porte du bureau s’ouvrit sur la personne qui devait être Emma Frost. Grande, blonde aux yeux bleus, fine et proportionnée, vêtu d’un ensemble blanc, la directrice adjointe de l’Institut aurait tout aussi bien put sortir d’un film ou d’un magasine.

L’italienne déglutie lorsqu’elle l’appela, se levant et passant rapidement alors que la professeure lui tenait la porte. Elle lâcha un bref « merci » une fois entrée, et attendit qu’on lui en donne l’autorisation avant de s’assoir. Gardant son dossier sur les genoux, les mains par-dessus, elle attendit que la X-Woman prenne la parole.

Les postures de Mlle Frost en indiquaient presqu’autant à Amy que son visage : coude sur le bureau et mains jointes près de son visage, cela lui permettait de contracter ses muscles de façon à ne rien laisser paraitre. Technique classique qu’elle-même utilisait durant les oraux, de manière à ne pas trembler comme une feuille. Après une brève présentation, elle se détendit, changeant de posture pour une plus ouverte mais tout aussi professionnelle.

Amy avait un choix à faire : prendre double cursus ou faire des cours particuliers adaptés. OK ; elle ne c’était pas attendue à cela. C’était positif cependant : non seulement elle n’allait pas se faire gronder, mais en plus, on lui laissait le choix !

Par contre, elle devait répondre à des questions pour prendre la bonne décision ; des questions banales, sauf qu’elles touchaient à du beaucoup moins banal pour la jeune italienne.

- J’arrive à suivre, sauf qu’il y a des moments où c’est un peu dure. Pas forcément la psycho, juste que je commence à croire que je porte la poisse. Du fait, mon travail personnel est moins important qu’il ne devrait. J’ai eut pas mal de problème, et je suis partie du mauvais pied avec quelques profs, du fait que j’ai séché les deux premiers jours de classes. Bon, j’étais pas la seule, mais on va dire que les débuts ont pas, mais alors vraiment pas, été des plus brillants. Je me suis pointée le mercredi avec une ancienne élève de l’Institut qui me faisait visiter, j’ai passé la nuit chez elle et on a été prise dans l’Attaque des Purificateurs ; elle y a même perdue la vie. Donc mes trois premières semaines de classe ont été assez « vides », j’étais présente physiquement, mais tellement déprimée que je suivais pas réellement les cours. Sa c’est amélioré par la suite, même si j’avais un semestre pour en faire deux. Donc, le travail fourni était assez conséquent, mais pas suffisant. J’ai toujours eut la capacité à faire une dose conséquente de boulot pour avoir mes notes ; huit heures de révisions dans une journée n’est pas inenvisageable, je l’ai déjà fait de nombreuses fois ; mais à l’Institut, réussir à se libérer huit heures d’affilées, c’est dur, très dur. Il y a les autres cours, les gens ; puis j’ai commencé à m’entrainer presque huit heures par semaines aux arts martiaux pour pouvoir me défendre. Ajouter à cela mes quatre heures de photosynthèse journalière et mine de rien, même avec un emploi du temps aménagé, j’ai pas des masses d’heures libres. C’est pas la langue qui me pose problème, si c’était cela votre question, en tout cas. Après, en ce qui concerne mes notes, ben oui, c’est pas ce que j’avais en Italie, mais entre le niveau et les événements, je pense que parvenir à me maintenir au-dessus de la moyenne c’est pas si mal. Quant à savoir si je compléterai mes UE et réussirait les examens de fin d’année, c’est une autre histoire. Sur qu’il va falloir que je bosse plus, beaucoup plus, mais est-ce que j’aurai le temps… Je sais pas. J’ai des problèmes avec mes pouvoirs, qui ont faillit me tuer – et même y sont arrivé – au Met, on a des problèmes avec Caitlyn concernant son « coma » des trois dernières années, et c’est perturbant aussi. Bref, je me demande s’il ne serait pas mieux que je redouble. Je pense que la décision la plus sage est de finir l’année normalement, essayer de passer les examens et voir ce que cela donne. Si c’est possible, je reprendrai la seconde année de Licence en interne à l’Institut, cela ne me réussit pas les escapades dehors. Après faut pas que je m’enferme complètement non-plus. Honnêtement, et c’est là le problème, je pense, j’ai un peu trop de trucs à faire en ce moment, donc je suis assez paumée. Après, s’il y a moyen comme vous me l’avez proposé de faire des cours de révision, je suis pour. Au moins jusqu’à la fin de l’année…

Amy s’arrêta de parler, se rendant compte qu’elle avait plus ou moins balancée ses pensées dans l’ordre et la confusion dans lesquelles elles venaient, ce qui n’était pas des plus judicieux.

Elle était à l’habitude une personne organisée et consciencieuse, mais là, elle avait pondu un véritable nœud de spaghetti, et des spaghettis version italienne.

Elle baissa les yeux, faisant constamment des allers-retours entre ses chaussures et le visage d’Emma Frost.

- Excusez-moi, Mlle Frost. Pour répondre vraiment à vos questions : ma scolarité se passe plutôt chaotiquement, j’arrive à suivre mais mon travail n’est pas aussi assidu que je le voudrais.

Emma écoutait attentivement les paroles de la jeune fille. Si elle pensait que cette dernière avait besoin de parler, elle ne pensait pas qu'elle le ferait aussi facilement, et finalement, elle se sentait plutôt flattée de cette ouverture à son égard. Sur son visage, certaines expressions trahissaient son ressentiment : parfois de l'inquiétude, parfois de la compassion, parfois du respect, parfois une profonde réflexion...

Les idées qui lui assaillaient l'esprit étaient trop nombreuses pour se résumer en quelques mots, mais les talents de télépathes d'Emma lui permettaient de gérer une grande quantité d'information à la fois. A plusieurs reprises, elle avait été tentée d'ouvrir un peu son esprit pour saisir quelques idées ou émotions que la jeune fille pouvait associer à ses mots, mais elle devait admettre que ses paroles étaient suffisamment claires pour ne pas nécessité d'explication supplémentaire.

Elle était avant tout touchée par le vécu de la jeune fille. Se retrouver au milieu d'une attaque de purificateur, ça devait être aussi dangereux que traumatisant. Surtout, le décès de son amie lui rappelait sa propre histoire. Au détail près que son amie à elle n'était pas la victime, mais l'assassin. Et elle avait manipulé son petit ami pour ça. Tous ces souvenirs ne méritaient pas de remonter, et surtout pas à l'instant présent.

Je suis désolée d'apprendre que vous avez été la cible d'attaques xénophobes. Perdre une camarade est une chose très difficile à votre âge. J'espère que vous avez eu l'opportunité d'en discuter avec votre entourage. Si vous avez besoin, vous pouvez demander à être accompagnée par membre du personnel de l'institut.

Emma regarda la jeune fille pour voir comment elle gérait cette émotion. Elle ne voulait pas l'assaillir de questions, mais elle voulait lui laisser l'opportunité d'envoyer un signal, si elle en ressentait le besoin.

La grande différence entre les élèves de l'institut et ceux du monde extérieur était qu'ils avaient non seulement à gérer leur scolarité, mais aussi à s'adapter à leur propre mutation, qui, pour la plupart d'entre eux, était un élément nouveau et capricieux. Emma nota que la mutation de la jeune fille avait un lien avec les plantes. Elle avait cité la photosynthèse comme exemple. Elle devait être hybridée avec des éléments végétaux. La question principale était de savoir quelles répercutions cela pouvait avoir sur sa scolarité.

Je ne connais pas particulièrement votre pouvoir. Vous avez parlé de la photosynthèse, est-ce que c'est une obligation ? Devez-vous passez plusieurs heures au soleil pour récupérer de votre fatigue ou est-ce que c'est une voie d'alimentation secondaire qui vous permet au contraire de gagner du temps de sommeil par exemple ?

L'enseignante réalisait que la vie à l'institut demandait beaucoup d'investissement à l'élève. Elle ne se doutait pas que l'on pouvait attendre autant de la part d'une enfant. Il fallait être réaliste : étudier, s'entrainer aux arts martiaux et vivre à côté, cela représentait probablement plus d'heure d'investissement qu'il n'y en avait dans la temporalité de l'univers.

Je vois que vous êtes déjà très chargée. Il serait déraisonnable de vous investir en plus dans des cours supplémentaires à l'institut. La solution des cours de soutien semble effectivement la meilleure. Je vous propose la chose suivante : Vous me donnerez chaque dimanche, par email, un ou deux créneaux dans la semaine pendant lesquels vous voulez que l'on reprenne vos cours. Ce sera à votre guise et vous avez tout à fait le droit de ne pas vouloir de soutien pendant une semaine. Je serai là pour vous aider si vous pensez avoir du mal à cerner quelques notions. En plus, de cela, je peux aussi, essayer de demander à l'université de vous laisser jusqu'en août pour passer certaines UE. C'est à vous d'en décider.

Après un instant de surprise face au discours d’Amy, Emma Frost laissa paraitre de nombreuses émotions pendant qu’elle parlait. Il était particulièrement facile de lire sur son visage, même si l’interprétation était parfois difficile : tristesse et peur, de l’inquiétude… Amy savait voir les micro-expressions sur les visages, des expressions faciales involontaires et extrêmement rapide qui trahissaient les émotions simple à un moment donné, ce qui lui permettait de repérer les mensonges avec exactitude mais également de « lire » les émotions sur les visages, littéralement, bien mieux que quiconque. Capacité partagée par 0,25% de la population, mais qu’elle-même avait entrainée pour l’utiliser intellectuellement. Ainsi, la directrice adjointe de l’Institut, de par l’expressivité faciale qu’elle montrait, gagnait plus facilement la confiance de Nephilim, qui était sure de savoir plus ou moins ce qui se passait dans sa tête. Pas aussi bien qu’une télépathe, certes, mais si l’italienne disait quelque chose qui déplaisait à la professeure, elle le remarquerait de suite et corrigerait le tir. De plus, elle n’avait aucune raison de se méfier de Mlle Frost, personne visiblement agréable et gentille, qui voulait l’aider.

Elle commença par se désoler de l’implication de l’italienne dans les flammes de Mutant Town, s’inquiétant pour elle et lui proposant un suivit psychologique ; Amy eut un petit sourire amusé, car étudiant la psycho, elle n’avait jamais pensé avoir besoin de se faire analyser elle-même. Le plus dur aurait été de trouver le temps, et honnêtement, Nephilim pensait s’en être bien mieux remit qu’elle n’aurait dû. En tout cas plus vite ; son Facteur Guérisseur avait surement un effet psychologique. Bon, passé les premières mutilations volontaires, tout était redevenu normal, l’accélération de son pouvoir étant devenue sous contrôle. Sauf que maintenant, c’était plus seulement le Facteur Guérisseur qui accélérait, mais tout l’organisme.

Amy resta interdite quant Emma lui parla de son pouvoir ; sure qu’elle le connaissait pas : la photosynthèse, même chez les plantes, c’était pour se nourrir, pas pour se reposer.

- En fait, même si j’ai rien à voir avec une plante, je peux me nourrir par le biais de la photosynthèse, comme elles. Je peux aussi le faire normalement, mais mon Facteur Guérisseur dépend de la quantité de biomasse produite par ma photosynthèse, qui non seulement me nourrit, mais également me régénère. Donc, si je pratique pas ma photosynthèse, j’ai pas de guérison accélérée. Les quatre heures, je sais pas vraiment pourquoi je le fais autant ; cela m’est venu… naturellement. Sans tests plus poussés sur mon organisme, je peux vous décrire qu’en gros, j’ai des organes et des excroissances d’organes qui me permettent de faire cela, et des cellules sanguines supplémentaires. Les principales modification de mon apparence sont des membranes nictitantes, pour capter la lumière et l’absorber, alliant le geste à la parole, Amy cligna des yeux pour déployer ses secondes paupières d’un vert émeraude, comme les feuilles d’un plante ou un panneau solaire, et une excroissance pulmonaire prenant la forme d’ailles, qui m’aide à mieux m’oxygéner, malgré qu’elles soient encore petites. Les médecins pensaient qu’à partir d’un certain stade d’évolution, mes Ala-pulmos pourraient représenter entre 95 et 99% de mes capacités respiratoires, même si pour l’instant elles sont dans les 20%. Ensuite, même si sa reste marginale, la photosynthèse produit du dioxygène en consommant du dioxyde de carbone et la respiration humaine fait l’inverse, donc je produis partiellement l’air que je respire. Il est envisageable qu’un jour, je puisse totalement me passer de nourriture ou d’air, mais en aucun cas d’eau. Après, sans analyses plus poussée, cela reste des suppositions.

Encore un beau discourt assez bordélique sur son pouvoir qui, bien qu’en principe simple, était incroyablement compliqué.

Je vois que vous êtes déjà très chargée. Il serait déraisonnable de vous investir en plus dans des cours supplémentaires à l'institut. La solution des cours de soutien semble effectivement la meilleure. Je vous propose la chose suivante : Vous me donnerez chaque dimanche, par email, un ou deux créneaux dans la semaine pendant lesquels vous voulez que l'on reprenne vos cours. Ce sera à votre guise et vous avez tout à fait le droit de ne pas vouloir de soutien pendant une semaine. Je serai là pour vous aider si vous pensez avoir du mal à cerner quelques notions. En plus, de cela, je peux aussi, essayer de demander à l'université de vous laisser jusqu'en août pour passer certaines UE. C'est à vous d'en décider.

- Par email, c’est pas plus simple que je vienne vous voir ici ? Pour le décalage, c’est de ma faute si j’ai pas rejoint les cours à temps, donc je préfère ne pas avoir de traitement de faveur, mais je vous remercie du geste. Sa me fait plaisir.

Amy sourit à la Directrice adjointe, admirant son savoir faire ; ouverte et professionnelle à la fois, on voyait sa connaissance de la psychologie. La blancheur des vêtements était aussi une idée bonne tant cette couleur avait une connotation positive et lumineuse. Déjà, le fait qu’on lui proposa de l’aide plutôt que de la réprimander pour sa baisse conséquente en matière de notes avait été une bonne surprise, mais en plus on se pliait en quatre pour le faire correctement. L’italienne était sincèrement touchée ; de plus, la position plutôt proche du Professeur Xavier incitait à la confiance, car quelque part Frost était la seconde de Xavier. Nephilim lui faisait donc entièrement confiance, même si c’était peut-être accordé un peu trop vite. De plus, si elle allait passer les quatre ou cinq prochaines années dans ses cours, c’était positif qu’elle l’apprécie.

- Vous allez surement trouver que j’essaie d’en faire un peu trop, mais… comme j’aimerai rester ici après mes études, voir si je suis assez forte pour faire parti des X-Men et si je peux aider d’autres mutants à vivre ici, j’aurai voulu savoir si, l’année prochaine, je pouvais participer aux cours de langue, comme assistante bénévole. J’en maîtrise pas mal, et surtout en italien, je pourrais me rendre utile. De plus, je sais que les personnes ayant déjà une situation établie ont plus facilement accès à la nationnalité.

Emma écoutait la jeune fille parler de son pouvoir. Ce qui était sûr, c'est que les potentialités étaient énormes. Tant qu'elle avait accès au soleil, elle était apte à se régénérer à l'infini, ce qui permet de se sortir de beaucoup plus de situations qu'on peut le croire. L'enseignante essayait de trouver les points négatifs de ce pouvoir. Elle n'en voyait pas et c'est justement ce qui lui faisait peur. Elle se rappelait d'elle-même plus jeune. Un pouvoir qui n'a pas ou peu de limitations avait en fait un énorme inconvénient : il risquait de renforcer le sentiment d'invulnérabilité que l'on peut déjà ressentir quand on est jeune. Emma l'avait eu, et elle se demandait si la jeune fille en face d'elle ne risquait pas de suivre le même chemin. A se croire immortel, on risque de finir en se détachant du reste du monde, en se coupant de la réalité, en perdant tout contrôle sur soi-même. Elle se mordilla la lèvre inférieur d'anxiété.

Vous pouvez venir me voir, bien sûr, mais il est possible que je ne sois pas disponible à tout moment. Faîtes comme vous pensez qu'il sera le mieux. Pour ce qui est d'avancer trop vite, en effet, pensez à vous ménager. Vous êtes une jeune fille intelligente, vous me donnez l'impression d'avoir conscience de votre propre empressement, je pense que vous serez capable de le tempérer.

Emma changea de posture, pour son propre confort, mais aussi pour donner un peu plus de présence. Elle marqua une petite pause avant de reprendre :

Je pense qu'il est envisageable pour vous de prendre un rôle de lectrice d'italien. Vous serez en charge d'animer des discussions pendant des cours, entièrement en italien. L'objectif est de permettre aux élèves de s'habituer à penser uniquement dans la langue qu'ils étudient, pour sortir un peu du cadre scolaire des cours normaux. Pour ce qui est de votre ambition de rejoindre les Xmen, je ne peux que vous y encourager. Plusieurs groupes sont en train de se monter avec les différents encadrants de l'institut. N'hésitez pas à les solliciter et à en rejoindre un. Ca vous donnera une bonne idée de ce que les Xmen peuvent être amenés à vivre.

Emma se leva, satisfaite de la tournure qu'avait pris la discussion. Elle était elle-même du genre ambitieux, et voir cette même ambition chez une jeune fille était comme un écho à sa propre existence. Elle esquissa un sourire, puis, ne pût se retenir d'émettre une dernière mise en garde :

Vous savez, votre pouvoir est très grand et vous offre une certaine protection. Il est tentant de repousser systématiquement ses limites quand on a un pouvoir de la sorte. Elle se changea en diamant. Sous cette forme, il ne peut presque rien m'arriver. Je n'ai besoin ni de manger, ni de boire, ni de respirer, ni de dormir. Pourtant, c'est sous cette forme que je suis le plus en danger, parce que sous cette forme, je perds toute émotion, et je perds la connaissance de ma propre limite. Je risque de me mettre en danger inutilement et de mettre aussi les autres en danger. Elle reprît sa forme normale. C'est exactement pour ça que je ne l'utilise qu'occasionnellement. Vous ne pouvez pas, pour votre part, laisser de côté votre pouvoir, alors essayez de garder au maximum à l'esprit vos limitations : votre pouvoir pourra sauver votre corps, mais il ne pourra pas ressusciter vos amis. Vous devrez toujours penser à ceux que vous aimez, car c'est là-dessus que vous serez probablement la plus vulnérable.

Emma réalisait qu'elle était peut-être un peu trop direct, ce qui était le risque en se transformant en diamant, mais elle voulait faire passer le message. Elle essaya quand même de radoucir son visage pour se faire plus rassurante.

Je ne dis pas ça pour vous faire, mais je veux vous épargner de passer par les mêmes épreuves que j'ai dû subir. La sagesse, c'est la qualité d'apprendre par l'expérience des autres. Vous une jeune fille brillante, je suis sûre que vous serez aussi une fille sage.

L'enseignante se dirigea vers la porte, prête à l'ouvrir.

Je ne voudrais pas vous retenir trop longtemps, vous avez apparemment assez de quoi vous occuper. Est-ce que vous avez d'autres sujets que vous aimeriez aborder ?

Mlle Frost accepta les visites d’Amy pour convenir des horaires, bien qu’elle parla de l’éventualité qu’elle fût prise à certains moments. Normal quant on y pensait : co-directrice d’un centre de mutant, c’était déjà plein de problèmes à gérer, alors quant en plus on faisait parti des X-Men… Elle conseilla à l’italienne de ce ménager, lui disant qu’elle était assez intelligente pour en avoir conscience et se ménager. Bon, déjà une chose de sur, ne pas parler de ses problèmes de pouvoirs, sans quoi la professeure aurait une grosse désillusion. D’ordinaire, Amy gérait sa vie comme on lui avait aprit : avec organisation. Depuis Mutant Town et le Met, son organisation avait prit un sacré coup. Ses notes le témoignaient d’ailleurs.

La X-Woman changea de position, effaçant par la même la légère peur qui lui faisait se mordre la lèvre. Elle reprit la parole, proposant un rôle de lectrice d’italien, d’assistante chargé d’animer des discussions durant les cours ; un truc à la mesure de son inexpérience quoi. C’était déjà cela, et Amy en était contente. Aider les autres à penser dans la langue qu’ils étudient… c’était pas gagné, étant donné qu’il lui avait fallut des années pour penser en langue étrangère, et que l’anglais n’avait pas été la première à laquelle elle s’essayait. D’un autre côté, fallait vraiment être immergé dans une culture linguistique pour pouvoir penser en cette langue : elle-même pensait en anglais, ici aux USA, mais si elle retournait en Italie, elle n’était pas sure d’y parvenir encore.

Vous savez, votre pouvoir est très grand et vous offre une certaine protection. Il est tentant de repousser systématiquement ses limites quand on a un pouvoir de la sorte, commença Mlle Frost, se changeant en diamant sous les yeux d’une Amy complètement abasourdie. Sous cette forme, il ne peut presque rien m'arriver. Je n'ai besoin ni de manger, ni de boire, ni de respirer, ni de dormir. Pourtant, c'est sous cette forme que je suis le plus en danger, parce que sous cette forme, je perds toute émotion, et je perds la connaissance de ma propre limite. Je risque de me mettre en danger inutilement et de mettre aussi les autres en danger, expliqua-t-elle avant de reprendre sa forme normale, Amy ne voyant pas en quoi elle était concernée. C'est exactement pour ça que je ne l'utilise qu'occasionnellement. Vous ne pouvez pas, pour votre part, laisser de côté votre pouvoir, alors essayez de garder au maximum à l'esprit vos limitations : votre pouvoir pourra sauver votre corps, mais il ne pourra pas ressusciter vos amis. Vous devrez toujours penser à ceux que vous aimez, car c'est là-dessus que vous serez probablement la plus vulnérable.

Penser à ceux qu’elle aimait, oui, elle le faisait souvent. Cait’, Billy, Samy, Jub’, il y avait plein de personnes qu’elle aimait à divers degrés d’amitié voir même de fraternité, mais elle ne voyait pas en quoi il était tentant avec son propre pouvoir de repousser les limites. Est-ce à l’accélération forcée du Facteur Guérisseur, et aux mutilations volontaires légères qu’elle c’était infligée pour parvenir à l’enclencher, que la directrice adjointe faisait référence ? Ou alors au fait que l’accélération ait complètement dégénérée et l’ait tué une fois ? Non, Nephilim n’était pas aventureuse par nature, ainsi elle évitait de forcer ses pouvoirs maintenant qu’ils déconnaient, bien qu’elle n’en parlait à personne non plus. Elle n’avait pas de sentiment d’invulnérabilité, car ses pouvoirs, même si elle les adorait, étaient nuls. Nuls comparé à certains mutants, nuls comparés au régénérateur moyen, nuls comparé à des types comme Wolverine qui non seulement guérissaient de tout, mais également bien plus vite qu’elle. Son Facteur Guérisseur à elle, non accéléré, n’était d’aucune utilité, la guérissant certes deux fois plus rapidement qu’un humain normal, mais même pour une petite entaille dans le doigt, cela prenait trois jours (à lieu d’une semaine, il était vrai) ; non, aucun risque de développer un sentiment d’invulnérabilité, car s’eut été plutôt l’inverse, considérant qu’elle ne contrôlait plus la partie contrôlable de ses pouvoirs, partie qui n’aurait jamais dû exister d’ailleurs. Mais évidemment, de cela non plus, elle n’avait dit mot. Enfouir la poussière sous le tapis pour aller faire le ménage chez les autres, ne s’occupant de soi-même qu’une fois qu’on aurait résolut tous leurs problèmes ; chose impossible s’il en était, certes, mais c’était ce qu’Amy faisait.

Frost déclara ne pas vouloir lui faire peur, simplement éviter qu’elle n’ait à subir des épreuves à cause de ses pouvoirs.

- Ne vous en faite pas, mes pouvoirs ne sont ni assez puissants ni assez intéressant pour que je sois tenter de me croire meilleure grâce à eux. Je suis comme je suis, tout simplement. Je suis comme Dieu a voulut que je sois.

Une fois devant la porte, la co-directrice déclara ne pas vouloir la retenir trop longtemps, mais lui demandant quant même s’il y avait un autre sujet à aborder. Amy eut une expression de malaise, regardant ses pieds en ne sachant comment aborder le sujet ; car il y avait bien un sujet à aborder. Caitlyn Elioth : célèbre en moins d’un mois à l’Institut, et pas forcément pour les bonnes choses. Deuxième jour après son arrivée, elle avait crocheté la porte de Mlle Frost pour emprunter une de ses tenues et rappliquer à l’infirmerie voir Amy, qui y faisait son premier séjour après l’attaque du Met. Bon, Mlle Frost ne devait pas être au courant, mais depuis Fuzzy avait fait d’autres « exploits » dont les plus fameux se résumaient à une tentative de punaiser le siège de Charles Xavier, le séchage de 100% de son cursus scolaire et la vision (et le téléchargement illégal) de vidéo pas forcément recommandables sur les ordinateurs de la bibliothèque. De mémoire, c’était les principaux exploits ayant attiré l’attention sur la jeune femme en réinsertion, placée à l’Institut par le Triskelion après trois années de coma. Jeune femme qu’Amy considérait comme une sœur.

- Bah… il y en a un… en fait, déclara Amy, gênée. Caitlyn Elioth.

Emma esquissa un petit sourire en entendant la jeune fille parler de ses pouvoirs. Elle restait humble, c'est vrai, mais pour la principale adjointe, elle risquait surtout de se sous-estimer, de sous-estimer le danger qu'elle pouvait représenter, et peut-être même de se mettre une barrière elle-même à ses pouvoirs. Un pouvoir trop contenu pouvait devenir assez capricieux. Son sourire s'agrandît encore plus à la mention religieuse de l'étudiante. Non pas qu'Emma était anti-religieuse ou athée, mais seulement parce que de son expérience, la volonté divine avait tendance à rapidement s'effacer lorsque l'on parlait des mutants et de leurs pouvoirs. En plus, la plupart des mentions divines visaient à accuser les mutants d'hérésie et de blasphème. Considérer que son propre pouvoir venait de la volonté de Dieu était une pensée assez à contre-courant. C'était un bon signe pour Emma, car être capable d'aller à contre-courant dénotait une forte personnalité et une liberté vis-à-vis de ses propres préjugés et de sa propre culture, en général.

Mais son sourire s'effaça soudaine pour laisser place à un tic nerveux : se mordiller la lèvre inférieure. Emma se sentit un peu bête. Elle aurait du deviner que la jeune fille voudrait parler de sa camarade. Elle ne connaissait pas tout le dossier dans son intégralité mais de ce qu'elle avait compris, les deux filles avaient vécu des moments assez intenses et c'est en partie ce qui avait nuit aux études d'Amy.

Elle essaya de se détendre et retourna s'asseoir à son bureau. Elle était probablement un peu en retard, mais elle tenait à consacrer encore un peu de temps à la jeune fille. Elle glissa ses mains sous ses cuisses avant de s'installer délicatement sur son siège, puis elle reposa les coudes sur le bureau et joignit les mains. Je dois avouer que j'ai préféré ne pas lire tout le contenu du dossier. Ce qui m'intéresse n'est pas les faits, mais la façon dont vous vivez les choses. Vous avez du voir ça plusieurs fois en psychologie : ce qui est important, c'est ce que vous percevez et comment vous l'interprétez. Alors dîtes-moi, comment ressentez-vous la situation ? Que pensez-vous de votre cothurne ?

La directrice adjointe plissa les yeux pour plonger son regard dans celui de la jeune fille. Elle ne cherchait pas à lire dans ses pensées, mais seulement à faire attention aux moindres expressions. Il était évident que si la situation lui tenait à cœur, elle allait ressentir des émotions particulières, et c'est ces émotions qu'Emma voulait percevoir, car au-delà de ce que la jeune fille allait expliquer de son ressenti, une partie de ce ressenti allait ressortir bien plus vrai au travers de ses expressions. Mais il fallait le saisir au vol.

Elle se risqua à enquêter un peu plus, juste au cas où. Il était important d'écouter Amy, mais Caitlyn était aussi une élève et il fallait y faire attention. J'espère que mademoiselle Elioth n'est pas en danger.

A la mention de sa Sœur de Cœur, Mlle Frost eut un tic nerveux, retournant s’assoir à son bureau, laissant une italienne assez perdue quant à la marche à suivre. Du fait, Amy resta debout, écoutant sa professeure parler tout en essayant de canaliser une nervosité dont la cause lui échappait. C’était à cause des bêtises faites par Caitlyn ?

- Je dois avouer que j'ai préféré ne pas lire tout le contenu du dossier. Ce qui m'intéresse n'est pas les faits, mais la façon dont vous vivez les choses. Vous avez du voir ça plusieurs fois en psychologie : ce qui est important, c'est ce que vous percevez et comment vous l'interprétez. Alors dîtes-moi, comment ressentez-vous la situation ? Que pensez-vous de votre cothurne ?

- Euh… c’est pas faux, déclara Nephilim, yeux complètements ronds de surprise, essayant d’accoler le dernier mot de la Reine Blanche à un qui lui était familier, sans grand succès.

Toujours debout dans la pièce, sans savoir où se mettre aussi bien littéralement que métaphoriquement, Amy baissa le regard et se racla la gorge. Que dire de la relation avec Caitlyn Elioth ? Malgré ce que tout le monde croyait, Caitlyn était quelqu’un de très bien, et ses diverses bêtises relevait plus d’une sorte de rébellion du fait qu’elle ne trouvait pas sa place plutôt que d’une méchanceté quelconque. Elle était nouvelle ici et avec une histoire des plus compliquée, on ne lui avait pas laissé le choix et c’était tout juste si le BAM ne lui avait pas mit un bracelet traceur à la cheville.

La X-Woman la regardait avec attention, augmentant le malaise de l’italienne ; elle savait parfaitement à quoi jouait sa professeure, les micro-expressions faciales, c’était son truc. Génie de la Vérité, comme les qualifiait Paul Ekman, mais en plus, elle s’était entrainée à identifier les expressions involontaires du visage, ce qui rajouté à ses talents naturels l’avait destiné à la psychologie. Mais elle-même n’avait pas besoin de se montrer aussi intrusive pour les voir, et elle n’aimait pas qu’on lui fasse ce coup là, sans oser pourtant rien dire.

Cependant, quant Frost interrogea sur le fait que Caitlyn fut en danger, Amy réagit au quart de tour.

- Seigneur-Dieu non ; pourquoi voudriez-vous qu’elle le soit ?

Pour le coup, la jeune italienne avait été très expressive : surprise, peur, une expression d’exclamation et une interrogation pour se rassurer. Elle marchait à la baguette, c’était si flagrant qu’elle s’en rendait elle-même compte. Se renfrognant un peu, elle n’en parla pas moins.

- C’est plus qu’une amie. C’est beaucoup plus qu’une amie, voilà comment je ressens la situation. C’est une sœur, une Sœur de Cœur. Elle m’a fait un peu peur quant on s’est rencontrées, c’est vrai, elle était bizarre, intrusive, envahissante, bordélique, mais elle est aussi joviale et… survoltée. Cait’ est peut-être une résidente un peu turbulente, mais elle veut être là et le rester, elle veut s’intégrer, c’est juste qu’elle le sait pas encore. Désolée que vous et le Professeur Xavier en ayez fait les frais, mais elle pense pas à mal, vous savez ? Elle essaie juste de trouver sa place, faut lui donner du temps. Je dis pas de pas lui taper sur les doigts quant elle fait une bêtise, mais pas trop fort, hein ? Et parlez pas de ça à son agent de probation, il parait qu’il a pas d’humour. J’ai pas grand-chose à dire, enfin, d’intéressant pour vous ; le mieux, c’est que vous la rencontriez… mais rencontrer vraiment, pas pour la punir ou autre. C’est une crème une fois que vous avez passé outre la carapace de j’m’en-foutisme et le langage fleurit.

Amy ce tut, ne voulant pas en dévoiler plus que le nécessaire sur la personnalité de son amie, et surtout plus que Caitlyn ne voudrait qu’on en sache sur elle. Pinçant les lèvres, elle regarda la directrice adjointe avec gène.

- J’ai pas grand-chose d’autre à dire, Madame Frost. Alors… euh… merci de m’avoir convoquée et de votre aide mon m’aider à améliorer mes notes, je promets d’être assidue à vos cours ; pis de toute façon, vous savez où me trouver, n’est-ce pas ? Merci pour tout.

L’italienne essaya de lui sourire, mais ce ne fut guère convainquant. Elle ne prendrait congé que quant on lui donnerait, mais le ferait avec empressement, ce qui ressemblerait plus à une fuite qu’à autre chose. Bon, point positif, on allait l’aider à rattraper son année, c’était plus que bienvenu, mais elle allait devoir sacrément bucher pour. Cela promettait.

Emma décela la surprise sur le visage d'Amy. Pas besoin d'être télépathe quand la perplexité est aussi grande. Quelle pouvait bien être la raison de cet étonnement ? Elle ne pouvait pas être étonnée de la référence à la psychologie puisqu'elles en avait même parlé ensemble. Peut-être qu'elle avait juste été étonnée que son enseignante lui demande de but en blanc de parler de sa camarade. Peu importe, il était encore trop tôt pour en tirer des conclusions.


- Seigneur-Dieu non ; pourquoi voudriez-vous qu’elle le soit ?

Savoir savoura chaque émotion qui irradiait de la jeune fille. Elle était bien trop surprise pour avoir feint le sentiment. C'est peut-être ce qui expliquait la perplexité précédente. Donc, soit Caitlyn ne courrait aucun danger, soit Amy n'était pas au courant, et étant donné qu'elles partageaient la même chambre, il n'y avait aucun risque. Emma se détendit intérieurement, sa priorité était réglée, mais elle resta concentrée pour le reste du discours.

- C’est plus qu’une amie. C’est beaucoup plus qu’une amie, voilà comment je ressens la situation. C’est une sœur, une Sœur de Cœur. Elle m’a fait un peu peur quant on s’est rencontrées, c’est vrai, elle était bizarre, intrusive, envahissante, bordélique, mais elle est aussi joviale et… survoltée. Cait’ est peut-être une résidente un peu turbulente, mais elle veut être là et le rester, elle veut s’intégrer, c’est juste qu’elle le sait pas encore. Désolée que vous et le Professeur Xavier en ayez fait les frais, mais elle pense pas à mal, vous savez ? Elle essaie juste de trouver sa place, faut lui donner du temps. Je dis pas de pas lui taper sur les doigts quant elle fait une bêtise, mais pas trop fort, hein ? Et parlez pas de ça à son agent de probation, il parait qu’il a pas d’humour. J’ai pas grand-chose à dire, enfin, d’intéressant pour vous ; le mieux, c’est que vous la rencontriez… mais rencontrer vraiment, pas pour la punir ou autre. C’est une crème une fois que vous avez passé outre la carapace de j’m’en-foutisme et le langage fleurit.

Emma se trouva un peu prise de court. Pour elle, Caitlyn était une jeune fille turbulente, souvent provocatrice, et assez inconsciente pour ne pas réaliser les conséquence de ses comportements. Elle avait pensé qu'il fallait lui poser des limites clair et lui rappeler qu'elle n'était pas maîtresse à bord. Quelques petites punitions avaient consisté à lui apprendre l'humilité et à la mettre dans des situations en dessous de la condition à laquelle elle prétendait : tu veux agir de manière irresponsable, je vais te rendre irresponsable. Et Cait se retrouvait persuadée d'être un batracien. Selon Emma, ça lui donnerait une idée du côté désagréable de l'irresponsabilité et de a perte de liberté qui l'accompagne. Mais là, derrière le discours de la petite italienne, se profilait un horizon complètement différent. Et si la rouquine n'avait fait que porter un masque à chaque fois ? Elle aurait donc été à la fois victime de son propre comportement et de la réaction des autres face à ce comportement. C'était un cas psychologique qui pouvait arriver, et la torture qu'il infligeait pouvait être grande.

La professeur de psychologie fut tirée de ses pensées par son élève.

- J’ai pas grand-chose d’autre à dire, Madame Frost. Alors… euh… merci de m’avoir convoquée et de votre aide pour m’aider à améliorer mes notes, je promets d’être assidue à vos cours ; pis de toute façon, vous savez où me trouver, n’est-ce pas ? Merci pour tout.

Emma ne faisait plus vraiment attention à Amy. Ce n'était guerre professionnel, mais elle était préoccupée. Il fallait qu'elle trouve un moyen de se rapprocher de Caitlyn, sans la braquer, et Dieu sait que c'était difficile entre elles. Elle se leva et s'approcha de la porte pour l'ouvrir et laisser Amy repartir pour une de ses nombreuses occupations. Pendant quelques secondes, Emma se demanda si ce n'était pas un peu dommage de passer aussi rapidement à côté de sa jeunesse. Mais après tout, c'était sa vie à elle, elle était en droit de la diriger vers le port qui lui plaisait.

Sans réussir à afficher d'autre expression que la préoccupation, Emma clôtura l'entretien :
C'est moi qui vous remercie. Ca a été très enrichissant. Si vous avez le moindre problème, n'hésitez surtout pas à me solliciter. Je tiens à ce que mes élèves puissent s'épanouir dans un cadre propice. Passez une bonne journée.

Elle réussît quand même à esquisser un petit sourire à ces derniers mots.