[Yggdrasil] Cours Foster, cours ... [pv Peter Eyrie/Enora Lacourt]

Je me jetai à terre. La branche s'écrasa à l'endroit où je me trouvai encore, quelques secondes auparavant. Mes yeux s'écarquillèrent devant la situation et un frisson de dégout me parcourut le corps, des pieds à la tête. Où aller ? Nul part. New York s'était transformé en jungle urbaine. Mais comment en étions-nous arrivés là ?


J'étais passée à l'université pour aller chercher mon bulletin de notes de mes exams. Quoi de plus normal ? Vétue d'un short en jean et d'un haut léger, j'étais chaussée de tennis basse. A mon entrée dans l'université, la vie de New-York battait son plein et il n'y avait rien à signaler d'anormal. Ce ne fut qu'à ma sortie que je fus surprise de voir toutes ces branches, cette végétation qui se développait absolument partout. Certains fuyaient déjà. D'autres observaient curieusement cette nouvelle structure. Puis, le drame commença.

La végétation se ressera sur quelques bâtiments, les brisant et faisant alors tomber des gravas de béton sur les routes. Des cris s'élevèrent de partout, tels une plainte portée par la ville toute entière. La panique montait et tout le monde tentait de fuir. Mais certains furent rattrapés. Des branches s'étaient emparées d'eux. Des cris de nouveaux. Des bousculades. Mes yeux étaient restés écarquillés de stupeur. Nous étions prisonniers de l'université. Et en aucun cas, c'était la solution. Il valait mieux fuir.

Avant que les portes ne se referment, j'eus le temps de faire comprendre à certain que s'enfermer, c'était se retrouver prisonnier de cette chose. Des cocons étaient apparus. Quand l'un d'entre eux s'ouvrit, une des victimes préalablement attaquée en était retombée. Je m'étais approchée, pour tenter de voir si cette personne avait besoin d'aide. Mais quelqu'un l'atteint avant moi. Et la victime de cette plante lui sauta dessus. Littéralement. Une agressivité sans pareil se lisait dans ses yeux. L'autre se prit un coup de grife avant de lâcher un hurlement. Ce fut le cri de trop.

Je tendis la main et projetai un champ de force vers l'assaillant. Il vola sur plusieurs mètres avant de s'effondrer sur le sol, sonné. Je m'approchait de l'homme blessé et l'aidait à se relever.

"Vite ! Levez-vous ! Fuyez par la 5ème avenue ! Il semble qu..."
"Ne me touche pas, sale mutos !

Ce ne fut pas un coup qui me fit lâcher prise. Mais la réaction de cet homme. Je venais de lui sauver la vie et lui... Il me lança un regard haineux avant de tourner les talons et courir. Je le regardai partir loin de tout ça, choquée par cette attitude. Soudain, une branche attrapa ma cheville et me tira. Je lâchai un cri et sans réfléchir, commençai à lancer un nouveau champ de force. Finalement, elle me lâcha et je me relevai en vitesse avant de courir à mon tour. Cependant, je ne fuyais pas. D'autres personnes devaient avoir besoin d'aide. Il fallait évacuer et tant que le BAM n'était pas en place....

Le BAM. Daniel. Tandis que je poursuivais ma course, je sortis mon téléphone de ma poche et, en quelques clics, lançait l'appel. Votre correspondant n'est pas disponible pour le moment...

"Merde... Pap.. Daniel ? C'est moi ? Si tu es en ville, fait gaffe, ce truc essaie de nous chopper... Je suis entre Columbia et et c'est la panique ici... Je vais essayer de regagner le Bam... Non ! L'institut ! Il est excentré, au moins, je serais en sécurité là bas... Mais pour le moment, j'essaie d'aider... Fais attention à toi..."

Je raccrochai et pousuivais ma course. La rue dans laquelle j'arrivais semblait être encore plus dense en végétation que là d'où je venais. Il devenait difficile de se repérer. Je vis alors quelque chose qui me retourna l'estomac. Un homme avait été écrasé par un lampadaire. Il était mort. Je fis un pas en arrière devant cette vision d'horreur. Et la branche arriva sur moi.


Je me jetai à terre. La branche s'écrasa à l'endroit où je me trouvai encore, quelques secondes auparavant. Mes yeux s'écarquillèrent devant la situation et un frisson de dégout me parcourut le corps, des pieds à la tête. Où aller ? Où se cacher ? Où se diriger ? Tous mes repaires avaient pris un coup. La branche se releva alors, dévoilant un de ces monstres créés par cette végétation sordide. Je tentai de me relever mais il fut sur moi bien trop tôt. Il tentait de me lacérer le visage de ses griffes et de m'atteindre avec ses... crocs ?

D'un geste ferme, je me saisis de ses poignets et ne cessait de remuer, cherchant à me débarasser de cette ignoble créature. Mon bouclier apparut mais s'avoua inutile. Puis, je finis par lâcher un cri.

"Au secours ! De l'aide, s'il vous plaît !"

Se débattre. La vie semble parfois accroché à un fil bien plus mince que celui d'une toile d'araignée. On peu alors choisir entre abandonner tout espoir et regarder ce fil se briser. Ou alors, on peut se battre, s'agripper de toutes ses forces à ce fil, le remonter lentement pour se redresser et rester en vie. Et mon choix était fait. 

Je me débattais comme une forcenée contre cette immonde créature qui tentait de briser ce fil. Lui qui apparemment souhaitait juste et simplement me dévorer, tel un fauve échappé d'un zoo. D'ailleurs, cette hypothèse n'était pas à effacer... Mais l'aspect humain hybride de cet homme me laissait penser qu'il avait été transformé plus que naturellement ainsi. 

Mes forces s'épuisaient rapidement, luttant contre coups de griffes et de dents. Autour de nous, les branches remuaient toujours autant, cherchant à attraper la première personne qui se présenterait à elles. Pourquoi pas ce monstre? Cela m'arrangerait réellement...

Mais ma chance ne vint pas des branches. Mais d'une âme solidaire à ma cause perdue qui avait décidé de m'épauler. Je ne l'avais pas vu arriver, trop occupée à fixer les yeux perdus de mon assaillant. Je ne pris conscience de sa présence lorsqu'elle arriva à mes côtés, enfonçant quelque chose dans la bouche de la créature. Puis, un ordre auquel il valait mieux obéir. Je ne cherchai pas a comprendre pourquoi mais mes paupières de fermèrent et en une seconde, la masse du monstre s'envola. Littéralement. 

Je rouvris les paupières et m'appuyais sur les coudes, observant le corps gisant de l'assaillant désormais sur la touche. Mort? Aucune idée et je n'étais pas en état d'aller vérifier ce détail. J'étais à la fois soulagée, et choquée. Mais je n'es pas vraiment le temps de réagir que ma sauveuse me releva de terre et m'entraina dans une course effrénée. 

J'étais déboussolée. Mes jambes se contentaient de suivre le mouvement de la course, échappant à ces monstres. Je ne repris mes esprits que lorsqu'une branche surgit sur notre côté. Mon esprit réagit alors au quart de tour.

"Attention!"

Je tirai à mon tour sur le bras de la jeune femme. Mais cette fois, en arrière. La branche s'écrasa devant nous. Cependant, elle ne s'arrêta pas la. Tel un missile à tête chercheuse, elle chercha à s'emparer de l'une de nous. Mon premier réflexe fut de repousser ma nouvelle camarade. Je ne vis si elle finit à terre ou non mais je ne m'attardai pas la dessus. La branche s'avança vers moi... Et mon bouclier la stoppa nette. Puis, d'un champ de force bien placé, je lui fis comprendre que ça n'était pas le moment de nous embêter. 

Je profitai alors de ce cours instant de répit pour recaler ma respiration. Je ne cherchai pas a regarder la jeune femme qui m'avait sauvé. La découverte de mes pouvoirs l'avait peut être effrayée. Cependant, je me devais de la remercier tel qu'il le fallait. Les yeux sur le sol, je m'adressais alors à elle. 

"Merci... Je... Merci de m'avoir sauvé de ce mauvais pas... Ça va?"

Ma poitrine s'abaissait et se soulevait à un rythme digne de celui donné dans une boîte de nuit. Je n'en pouvais plus. Quelle idée m'était venue de sortir aujourd'hui? Mes résultats auraient pu attendre demain ainsi que le bulletin de note qui était dans mon sac, bariolé de A de parts et d'autres. À quoi me servirait-il a présent si je devais mourir dans cette folie aujourd'hui? Rien. La réponse frôlait l'absurde autant que la question aurait pu l'être. N'avais-je pas d'autres préoccupations en tête à avoir?

Mes yeux se posèrent furtivement sur mon héroïne du jour. À terre, elle fut rapide à se remettre sur ses deux jambes. L'adrénaline, très certainement. La peur nous guidait tous en ces heures sombres. Après tout, lorsque l'on modifie l'environnement d'un être vivant, il panique. C'était exactement ce qu'il nous arrivait à tous actuellement. 

L'étrangère me certifia qu'elle se portait bien, avant de me reprendre le bras et de relancer notre course effrénée. J'avais envie de lui hurler de s'arrêter. Mes jambes en coton voulaient se dérober à chaque pas. J'étais perdue. Moi qui avait des objectifs auparavant, j'avais été déviée de ma course par cette jeune femme. 

Comme si elle parvenait à lire dans mes pensées, elle m'encouragea d'une voix essoufflée. Ou peut être s'encourageait-elle elle-même. Je tentai de me concentrer sur mon souffle, écoutant aussi bien le bruit de notre course sur les feuilles tombées et les racines des arbres qui sortaient du sol, que le bruit de cette forêt vivante et réellement animée par une entité étrange. De plus, ces créatures semblaient sorties tout droit d'un rêve apocalyptique. 

Nous traversâmes une route plus large. Alors, je ralentis notre course, et, levant la tête, je tachai de nous repérer. 

"Attendez!"

Je ne sus si ce fut le son de ma voix qui la stoppa ou l'ordre simple que j'avais donné. J'observais les rues, cherchant un point de repère... Tel que ce disquaire. J'aurais pu le reconnaitre entre des dizaine car son architecture extérieure était bien particulière. 

"On est au Nord de la 5ème avenue. Si on continue dans cette direction, on rejoint la grande église de Manhattan. Par contre si on va sur la gauche, on va s'excentrer et retomber sur des quartiers isolés. L'institut est par là..."

J'avais prononcé les derniers mots plus doucement. Les yeux verts se posèrent alors sur ma camarade de galère. Je la dévisageais lentement quand des cris de terreur me glaça le sang. Des gens avaient besoin d'aide. Le BAM, s'il intervenait, serait trop long et pareil pour les Xmen. Le temps de s'organiser serait trop important. 

"Écoutez... Je suis mutante, comme vous aurez pu le voir. Je suis élève à l'institut et je sais qu'il est trop excentré pour être touché par cette folie... Ce sera une place sûre et sécurisée... Et d'autres on besoin d'aide également..."

Je ne savais trop comment poursuivre mon raisonnement. Je devais aider les gens. Et je ne pouvais pas abandonner celle qui m'avait aidé, et lui donner simplement la direction de l'institut risquait de se montrer compliqué. Quant à l'entrainer avec moi dans un sauvetage express... Le moindre bruit nous figeait. Quel était le choix que nous devions prendre?

"Attendez!"

Je m'arrêtais aussitôt, fis même un pas de côté, de peur qu'une autre branche ne me tombe dessus. Rien que le son de sa voix me fit réagir. Ça faisait bien cinq minutes que nous nous étions remises à courir. Pourquoi s'arrêter, il fallait partir.

"On est au Nord de la 5ème avenue. Si on continue dans cette direction, on rejoint la grande église de Manhattan. Par contre si on va sur la gauche, on va s'excentrer et retomber sur des quartiers isolés. L'institut est par là..."

L'institut. Oui, par là, mais bien plus loin, à au moins une heure de voiture au minimum. Il y aller à pieds, c'était tout simplement impossible. Nos regards se croisèrent, les yeux sombres devant ceux verdoyant de l'enfant, elle pouvait y voir de la peur mais pas uniquement. Je ne voulais pas y aller, de toute façon. Pas à l'institut, pas là-bas. Amy pouvait y être, je refusais de débarquer comme ça. Et
Il ne fallait pas rester ainsi, il fallait partir, ne pas rester immobile. Tout autour de nous, il y avait des personnes qui hurlaient. Je ne savais pas ce qui était le plus dur : occulter les cris, les ignorer ou les entendre mais ne pas réagir. Je voulais vivre, je voulais revoir Tessa mais pas dans ses conditions.
Les cris s'intensifiaient. On ne pouvait pas tous les sauver, c'était impossible, j'avais réussi pour l'une, pas pour tous, impossible. Je tremblais presque, de rage, de ne pouvoir agir. Les illusions, je ne pouvais pas les utiliser, je n'avais pas le temps de capter leur regards, pas le temps. Je ne servais à rien ici, du moins, j'en avais l'impression.

"Écoutez... Je suis mutante, comme vous aurez pu le voir. Je suis élève à l'institut et je sais qu'il est trop excentré pour être touché par cette folie... Ce sera une place sûre et sécurisée... Et d'autres ont besoin d'aide également..."

-On ne peut pas le rejoindre, l'Institut est beaucoup trop loin, et jamais on ne pourra faire avancer une voiture dans cette ville. Il faut trouver un abri, mais un que l'on puisse rejoindre à pied.

Où, où ?! Je ne savais pas, pourtant mon cerveau fonctionnait à cent à l'heure. Où bordel !! Je n'avais aucune idée, rien ne semblait sûr. Il fallait s'excentrer, c'est clair mais le moyen pour y arriver était plus compliqué. À pied, on serait trop lente, en voiture, il n'y avait plus rien de stable pour elle, en scooter … pourquoi pas : seul hic : je ne savais pas en conduire un !
Ma main se posa sur son épaule, pour tenter de la rassurer, je voulais sourire mais c'était à peine plus qu'une courbe que j'avais sur le visage. J'avais peur, peur de mourir sans les revoir, Cali, Tessa, Evan, lui surtout. Le seul que j'avais laissé passer mon masque.

-Écoute moi, je suis comme toi, je suis mutante aussi. Mais je ne peux aider personne, pas maintenant, pas face à eux. Je n'ai pas le temps de les affecter. Il faut fuir, on ne doit pas rester immobile. Tu comprends …

Son nom … Comment elle s'appelait, je ne le savais même pas, je n'en avais aucune idée. Je pris sa main, et la fit marcher doucement à nouveau, pour la faire avancer, qu'on ne reste pas ainsi, vulnérable. J'allais déjà tout droit, on verrait plus tard pour la destination. J'entendais aussi, parfois les cris alentours des bruits plus stridents, comme des hurlements d'animaux … les

-Je m'appelle Evangelina, et toi ?

J'entendais aussi, parfois les cris alentours des bruits plus stridents, comme des hurlements d'animaux … les bêtes, ces espèces de trucs …

-On doit pas traîner ! Lui dis-je en la forçant à accélérer le pas.

J'avais mal, sérieusement. Entre les chutes, les courses effrénées, les espèces de cascades à la noix, la pseudo course avec talons puis en pieds nus. Cependant, je laissais la gamine libre de ses mouvements, pour qu'elle me guide. Je ne voulais pas l'obliger, je voulais la sauver.

Mon entêtement pour rejoindre l'institut était fort. Mais je devais revenir sur terre et lui accorder que son éloignement n'était pas à prendre à la légère. On en avait pour une sacré trotte. Je l'avais déjà fait. L'image de ma sortie des égouts me revint et un frisson me parcouru l'échine. Non, l'expérience n'était pas bonne à retenter...

Mais l'idée en soit n'était pas mauvaise. Il nous fallait une place sûre et je savais que cette jeune femme était d'accord avec moi là dessus. Une idée me traversa alors l'esprit. Le BAM? Pas si loin que ça et plutôt bien - pour ne pas dire parfaitement - sécurisé. Cependant, je ne pouvais pas faire rentrer n'importe qui la dedans sans penser que cela serait sans conséquence pour cette personne comme pour Daniel et moi. Non, il nous fallait trouver autre chose. 

Alors, elle me fit une confidence. Celle qu'elle était également mutante. Je croisai de nouveau son regard sombre. Bon, peut être pour ça qu'elle n'avait pas paniqué quand elle m'avait vu manipuler mes pouvoirs. Mais apparemment, elle ne pouvait pas se sévir des siens pour tenter quoi que ce soit. Pouvoir passif? L'heure n'était pas au questionnement. Mes méninges tournaient aussi vite que possible, cherchant la solution à ce problème qui ne semblait pas en avoir. 

Je hochai la tête pour lui montrer que oui, j'avais compris. Trainer ne nous servirai qu'à nous faire avoir plus rapidement. Et alors que je réfléchissais sur la direction à prendre, elle se présenta. Sur ce visage, je pus alors mettre un nom. Évangélina. Je lui souris, du mieux que je le pouvais. 

"Enora..."

Guère de temps à perdre dans des mondanités affligeantes qui consisteraient à se rendre des enchantements en cascade. Et alors qu'elle me pressait dans ses dire, je la suivis, reprenant notre course qui ne semblait plus pouvoir s'arrêter. 

Il nous fallait sauter, se baisser sous les embranchements denses de cette jungle quasi artificielle. Finalement, l'idée de courir un marathon me semblait simple et triviale face à ce périple. Hercule lui même n'avait pas eu à affronter une jungle de cette envergure. Mais cela n'avait que peu d'importance.

Un nouvel hybride homme-animal nous barra la route. D'une tape sur l'épaule, je montrais à Evangelina un chemin parallèle au notre sûr notre gauche. Je fermai alors la marche, nous échappant alors de ce premier mauvais pas sans nous épuiser d'avantage que nous l'étions. Cependant, je sentais mes forces qui s'amenuisaient de plus en plus vite. Il allait nous falloir un miracle, un vrai, si nous voulions nous en sortir...

Était-ce une impression ou ma nouvelle alliée avait frissonné alors que je réfléchissais? En même temps, avec tout ce qu'on avait traversé, c'était compréhensible. Les présentations furent brèves. Le temps ne nous permettait pas d'échanger nos numéros de téléphone ni même de cherche une date pour que l'on puisse se revoir. Non, chaque chose en son temps et pour le moment, c'était notre survie qui était en jeu.

Je n'en pouvais plus de courir. Aussi, j'avais peur. Peur de cette chose qui nous suivait de près. De trop près. À chaque seconde, un coup d'oeil au dessus de mon épaule me permettait de constater son avancée. Alors je ne pouvais plus m'empêcher de courir. Mes pieds se posaient les uns devant les autres. Mes jambes semblaient répondre à un besoin machinal d'avancer. Mon corps entier semblait échapper à mon contrôle. Il n'y avait plus que la peur. La peur de mourir, de ne pas revoir les gens que l'on aime, de ne pas pouvoir leur dire au revoir. 

Je pris alors conscience qu'Evangelina m'avait repris la main. Je le fis lorsqu'elle tira sur mon bras et me projeta en avant. L'élan m'entraina alors dans une démarche peu assurée et je finis par échouer quelques mètres plus loin. La paume de mes mains entra douloureusement en contacté avec le macadam. Mes jambes tombèrent, elles, sur une racine qui s'échappa alors, comme si je venais la perturber. Le souffle coupé, je me redressai et tournai la tête. À travers quelques mèches blondes, je distinguai l'affreux hybride qui se battait contre mon alliée. Je me remis sur les pieds et, alors que je voulais intervenir, elle me donna un ordre. Simple, clair et fort. 

"FOUS LE CAMP!"

Je restai figée quelques instants. Je ne pouvais pas faire ça. Ne jamais laisser quelqu'un derrière nous, c'était ça que l'on apprenait. Mais là, c'était suicidaire. Je lui lançai un dernier regard avant de disparaître de sa vue, disparaissant derrière un tronc. Je ne prenais pas la fuite. Je cherchai une solution au problème. Un objet... J'ouvris alors mon sac dans lequel je retrouvai mon écharpe. Bien. Mes yeux parcoururent le sol avant de se poser sur des débris de barrière. Une barre métallique d'une cinquantaine de centimètres. Je la saisis avec l'incertitude de ce que j'allais faire. Ce que j'étais forcée de faire. C'était ainsi qu'il fallait raisonner en cet instant. Derrière moi des cris se firent entendre. Des cris d'animaux. Je retournai sur mes pas pour retrouver Evangelina qui se débattais toujours autant. Cependant, ce n'était plus le seul problème. Comme s'ils avaient pu percevoir quoi que ce soit, d'autres étaient venus et s'apprêtaient à se jeter dans la mêlée. Écarquillant les yeux, je laissais mes émotions me contrôler. Peut être que ça n'était pas la solution dans certaine situations. Mais je savais que là, ça allait me booster. 

Mes yeux brillèrent de cette étincelle émeraude. Je sentis mon pouvoir au fin fond de mes tripes. Tandis que j'avançais vers les créatures qui n'avaient d'yeux que pour la camarade de bataille, un champ de force de la taille d'une balle de tennis fit son apparition dans le creux de la main que je venais de libérer. L'instant d'après, ce même champ de force envoyait dans un arbre la créature qui se rapprochait le plus d'Evangelina, touché alors en plein abdomen. Un autre se formait déjà dans ma main tandis que je continuai à avancer. Une créature venait vers moi. Je projetai le champ de force sur le monstre qui dominait la jeune femme. Mes deux mains se refermèrent alors sur la barre de métal. Et alors que mon assaillant s'approchait, je me ruai vers lui, lâchant un cri. La barre de métal vibra dans l'air avant d'heurter, dans un bruit sourd, le crâne de l'individu qui s'effondra sur le sol. 

Un à un, je tentai de venir à bout de chacun des assaillants, alternant attaqués distantes et corps à corps métallique. La deuxième issue était souvent meilleure. La colère avait beau me booster, elle ne me permettait pas d'être plus précise. En quelques minutes, je venais de m'acquitter de ma dette. 

"Ça va?"

Mes yeux effacèrent leur lueur émeraude. J'aidais la jeune femme à se relever. Le temps pressait. Je lui tendis alors la barre métallique. 

"Tenez... Ça pourrait se montrer utile..."

Ca avait duré bien moins longtemps que je ne l'avais pu imaginer. Jamais je n'aurais pu me savoir capable d'une telle chose. D'une telle barbarie. Car c'est ce sentiment que je ressentais. J'avais l'impression d'avoir régressé dans l'évolution de l'homme. D'être revenue au stade où il n'y avait que coups en tous genre et ou aucune civilisation respectueuse d'autrui. J'étais un animal. Un animal appeuré, luttant au mieux pour sa survie. C'était comme si on nous avait plongé dans la salle des dangers en nous demandant de nous entre tuer. C'était déjà arrivé oui. Mais dans mon souvenir, on utilisait du paintball et non des armes réelles ou arrangées.

J'avais parlé sans même m'en rendre compte. Ma tête se reconnecta alors avec le reste du monde et ce fut le bras d'Evangelina qui me ramena à la réalité. Elle avait enlevé sa main un bref instant. Bref, mais suffisant pour que je puisse voir à quel point la peau avait été charcutée.

"Oh merde alors... Je suis désolée, j'ai un peu traîné, je cherchai une solution..."

Lâchant la barre de fer, je pris son bras avec délicatesse, et observai de plus près la blessure. Cela saignait, normal. Et c'était profond. mais apparemment, rien de bien grave ou qui pourrait mettre en péril la jeune femme. Du moins, provisoirement. Elle ne tarda d'ailleurs pas à me donner les nouvelles directives à prendre. Fuir Manhattant. L'idée était bonne, sauf que se déplacer était épuisant, sans compter tous ces hybrides étranges. J'en profitai alors pour dire un mot.

"J'étais à Columbia il y a peu... C'était moins dense par là, je ne pense pas que ça soit toujours le cas mais la végétation tient son coeur ici. Donc je pense que même si rejoindre un pont ne nous éloigne pas... Cela allégera la chose..."

Mes yeux se posèrent sur le bras qu'elle maintenait. Et alors, dans un souffle, elle me remercia. Je la regardai, légèrement surprise avant de lui lancer un sourire franc.

"On peut dire qu'on est quitte maintenant..."

Je pris mon écharpe que j'avais presque oublié. Je jetai un rapide coup d'oeil à la jeune femme, puis à son bras, avant de grimacer légèrement.

"On peut pas laisser ça comme ça... Les risques d'infections... Et puis, ce n'est peut être pas grave pour le moment mais si vous vous videz lentement de votre sang, vous allez finir par tomber dans les pommes et là..."

Il était aisé de deviner ce qui aller se passer si la jeune femme s'effondrait. Je n'aurait pas les forces de la trainer hors de ce guépier seule.

"Je vais serrer un peu..."

Aussitôt dit, aussitôt fait. Après quelques tours et un noeud convenable, ma camarade était occupée d'un bandage de fortune. Un nouveau sourire apparu sur mon visage, fière de ces premiers secours que j'avais pu apporter. les autres blessures étaient légères et n'étaient pas aussi dangereuses que celle là.

"Bon, on a un pont par là je crois. Et un autre de ce côté - Je montrai deux directions opposées - C'est pas facile de se repérer mais... Je dirais que par là serait la meilleure solution. On doit être moins loin..."

Je me baissai pour reprendre la barre métallique et m'engageait dans une voie un peu liberrée, suivie par ma nouvelle amie. Certaines branches s'agitaient, des cris revenaient nous hanter... Mais je savais que nous n'étions pas loin de la sortie. Que bientôt, tout ceci serait un mauvais cauchemar...

Au début, on se serait cru dans une véritable jungle amazonienne. Ni moi, ni Evangelina n'osait parler. Personnellement, la peur de rameuter ces sales bestioles aurait pu me faire avaler ma langue. Je ne pensais plus qu'à eux. A ces gens déboussolés et sortis de leurs gonds qui agressaient tout le monde. Peut être y avait-ils certaines personnes que je connaissais dedans... Peut être même des amis proches.

Je secouai la tête, cherchant à chasser ces pensées qui n'avait pas lieu d'être. Tout le monde devait être en sécurité. Tout le monde. Après tout, pourquoi devrait-il être dehors hein ? Mais ce genre de consolation fut maigre lorsque je me mit à penser à Daniel. Où était-il ? Plongé au coeur de cette bataille ? Ou bien n'était-il peut être pas au courant ou pas encore sur cette affaire...? Non. Cette dernière hypothèse devait être exclue. Tout le BAM devait être en action à cette heure. Pas seulement les agents. Je respirai profondément, espérant que je le verrais bientôt et que l'on pourrait^peut être même réussir à dîner ensemble ce soir si la situation venait à s'améliorer.

Les branches, d'abord dense, s'estompaient en quantité. Plus nous nous éloignons, plus les ennuis faisaient de même. Et ça, c'était réconfortant. Dès que nous entendions un cri bestial, nous nous arrêtions net, cherchant à situer sa source et attendant qu'il s'éloigne. Puis, je lâchai généralement un soupir de soulagement. En voilà un contre qui nous n'aurions pas besoin de nous démener pour notre survie.

De temps à autres, je m'assurais que la jeune femme me suivait toujours. Je jetai des coups d'oeil anxieux au dessus de son épaule, cherchant à vérifier que personne ne nous suivait.

Je ne sus pas exactement combien de kilomètres nous avions pu parcourir. Mais c'était une marche éprouvante. Lorsque je vis le pont, je me retournai vers la jeune femme, un large sourire dessiné sur mes lèvres.

"On y est ! On a réussi jusqu'ici !"

C'était peut être un débordement de joie démesurée, mais cela faisait toujours du bien à voir. Comme nous l'avions prévu, la jungle que nous avions pu rencontrer auparavant été désormais oubliée. Malgré les quelques branches, le pont semblait indemne et la végétation semblait n'avoir pas encore eut le temps de s'occuper de l'autre côté. Je m'engageai dessus, vérifiant si Evangelina me suivait toujours.

Ca va ? On a presque fini... Vous allez pouvoir aller à l'hopital vous soigner et puis on sera en sécurité loin de cette folie et...

Je m'arrêtai pour refouler mes larmes. Les nerfs. C'était les nerfs qui craquaient et je dus m'aggriper à la barre de métal que j'avais toujours en main pour ne pas véritablement éclater en sanglots.

Des encouragements. Quelques derniers encouragements, uniquement là dans le but de me ressaisir. La main d'Evangelina sur mon épaule se ressera légèrement. Nous arrivions au but. Je relevai la tête vers elle et lui souris. Nous avions survécu, et en ces temps treès hostiles, ce n'était pas qu'un miracle.

La traversée du pont fut certainement le moment où nous marchions le plus lentement. Peut être la sensation d'être enfin hors de danger. Au loin, on apercevait déjà le barrage formé par les forces de l'ordre. Ils repoussaient la végétation à coups de lance flammes. Voilà qui n'était pas une mauvaise idée. En arrière, les girofars nous laissaient comprendre que les secours étaient là en grand nombre. Pompiers, ambulanciers... Ils nous attendaient. Un regard en arrière me fit comprendre la gravité de la situation : Manhattan n'était plus qu'un amas de végétation. Pour peu, l'île était redevenue sauvage. Un frisson me parcourut le corps tandis que je songeai aux morts que nous avions pu croiser et peut être causer. Cette histoire ne resterait pas sans impacts.

Les secours accoururent vers nous et nous fûmes emmenées en arrière du barrage. nous étions sauvées. Evangelina insista sur le fait qu'il fallait d'abord que l'on s'occupe de moi. Pourquoi ? C'était elle qui était largement blessée, pas moi. Les médecins me demandèrent alors si j'avais été blessée, griffée, mordue et d'autres question du genre. Je hochai la tête en signe de dénégation. Lorsque je voulais m'assurer que monamie se trouvait à mes côtés, je fus surprise de constater qu'elle s'était évaporée. Avait-elle été emmenée dans un autre camion de soin ? Je l'espérais.

La suite fut une série de test simple. Des questions sur mon identité, mon adresse... Et une prise de tension, de sang et d'autres menus détails sur ma santé. Les médecins m'assurèrent qu'ils me recontacteraient si j'avais été contaminée ou quoi que ce soit. Je hocahi la tête, récupérai mon sac et pris le chemin du BAM. Je croisai la route de quelques journalistes, entendant certains de leur mots tels que "cataclysme spectaculaire", "bilan non fixé" et un nombre de disparu assez incroyable. Manhattan était devenue un cauchemar en l'espace de quelques heures. Je pressai le pas.

Arrivée au Triskélion, je ne croisai personne. Un agent était resté à l'entrée et, à peine avais-je ouvert la bouche pour lui poser des question, il me dit que "tous les agents étaient sur le terrain" et que "l'agent Hopes n'avait pas laissé d'instruction particulière à mon égard". Autrement dit, il ne serait pas là. Je le remerciai et montai dans mon appartement. De là, j'attendrais. J'attendrais le retour de Daniel aussi longtemps qu'il le faudrait. Je repensai à Evangelina. Elle m'avait sauvé la vie. Quand tout cela serait fini, je m'assurerais qu'elle ai bien récupéré, et je me promis intérieurement d'apprendre à la connaître autrement que par cet événement apocalyptique...