Haine d'ange aux repentirs du démon [PV Ernest]

Qu'il était bon au petit matin de prendre un bon bol d'air sur la grande terrasse. Située entre terre et air, elle était parfaite pour Jay. Tout comme le temps, ni trop chaud, ni trop frais en cette heure fort matinale pour un samedi matin. Le mutant s'était assis sur la rambarde, dans un endroit un peu en hauteur, de quoi de faire mal si l'on tombait mais évidemment, ça n'était pas lui qui allait s'inquiéter de chuter. Le regard dans le vide et les ailes à nu, Icare songea un instant à Amy et sa "photosynthèse." L'idée de faire pareil-sans résultats bien sûr- en sentant le soleil chauffer doucement son plumage l'amusa. Laquelle était mariée depuis juillet à présent. Le chanteur songea à sa propre "moitié" qui n'avait pas encore le titre d'aimé officiel. Pas encore, mais serait-ce possible un jour ? Est-ce qu'il se marierait ? Était-ce seulement dans ses intentions profondes ?

A 20 ans, il était encore très jeune, comme la X-Woman d'ailleurs avait passé la bague au doigt. Toute cette situation le laissait un peu rêveur, il se rappela de la musique, les couleurs, non vraiment, il était adepte des mariages. Peut-être pas pour sa propre personne mais alors chez les autres, et puis une amie à lui allait se marier en octobre, un autre couple lesbien tiens. Josh se demanda avec qui il irait là-bas et qui serait son partenaire. Non "sa". Il avait beau mieux assumer, il ne fallait pas pousser jusque là quand même et surtout ne pas voter la vedette au couple lesbien. L'idée "célébrité" à travers les préférences sexuelles le fit doucement sourire; le parallèle était amusant et puis comme ça, ils auraient deux robes de mariée à contempler, vêtement autrement plus attirant que les smokings plus ou moins semblables de ces messieurs. Donc en cavalière, peut-être Kaya ? Et si la jeune femme était absence ou qu'elle ne voulait pas aller au mariage d'une inconnue... Si la situation se prêtait, pourquoi pas Enora ?

Enora n'allait pas très bien en ce moment, la faire sortir lui ferait du bien sans doute. Jay l'avait toujours plus ou moins connue dans la détresse en fait, la peur que Daniel Hopes ne meurt, son décès effectif. Plus avant encore, sa crainte pour Ernest Lenoir, puis sa colère envers lui, mais surtout son pardon envers le gamin qu'Icare n'avait compris qu'au début. Raillé dès le début par le petit mutant, celui qui l'avait pris comme le contrecoup d'une carapace de protection avait fini par devenir un des plus fervents ennemis du rongeur. C'est dire si les professeurs s'étonnaient de voir le doux Icare s'acharner autant sur quelqu'un lorsque l'occasion du sujet se présentait. Sans pour autant geindre, le chanteur exposait les faits clairement, sans chichis mais sans aucune concession. Ernest avait tenté de le tuer, alors même qu'il essayait de l'aider. L'enfant-rongeur s'était tour à tour amélioré puis avait dégénéré, parfois même en une seule rencontre. Même quand ce fou furieux semblait aller mieux, il replongeait et rien ne l'excusait ! Certes il avait eu une vie difficile mais qui ici n'en avait pas eu ? Et lorsqu'on n'était pas capable de vivre en communauté, on s'abstenait.

Sans pour autant demeurer sur le sujet qui revenait de temps à autre hanter sa mémoire et le titiller de manière fort désagréable, Josh évinça la petite silhouette monstrueuse de sa tête. Sans doute parce qu'il ne voulait pas se gâcher la journée mais aussi parce qu'il avait encore peur de ces yeux rouges dans la grotte. Retournant à ses flâneries, l'artiste ferma légèrement les yeux et rejeta sa tête en arrière pour continuer de prendre le soleil, regardant paresseusement le paysage qui se réveillait en toute tranquillité. Ses yeux captèrent alors une ombre, une ombre qui n'avait rien à faire là. Croyant halluciner, sans mot dire, Josh se redressa vivement sur sa rambarde, manquant de chuter. D'un coup il se leva entièrement, en équilibre, ailes déployées pour chercher l'enfant rongeur. Voilà, il le savait ! Il aurait dû virer ses pensées de sa tête dès que son nom était venu dans sa tête. C'était ridicule voyons, comment un criminel pourrait être réintroduit ici après moult chances offertes sur un plateau d'argent ?

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En ce début de week-end, Ernest avait décidé de profiter de la mâtiné, car elle était douce et le temps, beau. Pour la saison, c’était remarquable, une invitation à ne pas délaisser. Il marchait donc vers la terrasse, plateau en main. Un petit déjeuné à l’air libre, voilà qui lui ferait du bien. Il ne pensait qu’à ça, ne laissant pas ses soucis, pourtant nombreux, empiéter sur un moment qui ne les concernait pas.

Sur le plateau, tenue avec maîtrise, rien ne tremblait, il y avait deux tartines beurrées, un bol où des céréales nageaient dans du lait, et un grand verre de jus d’orange. Un menu juvénile à la Française. Peu lui importait. Tout comme il avait envie de manger à l’extérieur, il avait envie de manger ceci, voilà tout.

Sur le petit mutant, dont la démarche paisible tranchait avec son ancien naturel, il y avait un tee-shirt rayé aux couleurs du zèbre et un large pantalon jaune-canari. Pieds-nus, le son de ses griffes marquait le tempo de sa marche.

Définitivement décontracté, il arriva à sa destination. La terrasse était presque déserte, chose plutôt normale compte tenue de l’heure. Altérion repéra, du coin de l’œil la présence d’Icare, qu’il reconnu tout de suite. Un de plus qui devait, à juste titre, le détester. Il ne chercha pas à remuer ses souvenirs et préféra continuer vers la table où il s’installa. Là, il huma l’air qui venait du parc avant de mordre avec appétit dans sa première tartine.

Il n’avait pas à imposer sa compagnie. Si l’ange voulait lui parler, il viendrait. S’il ne voulait pas entendre parler de lui, il ne viendrait pas.

C'était bien lui, avec ds tartines beurrées au lieu du pain sec que les criminels ont en prison. Sans barreaux, avec un soleil non mérité. Josh hésita à s'enfuir le plus loin possible avant d'être mordu par l'adolescent. Il se rappelait très bien de l'horrible douleur que seule sa régénération avait su enrayer, mais avec quelles difficultés. Pour autant le chanteur n'avait pas envie de laisser sa place sous les rayons, il en vint donc à se dire d'ignorer Ernest, seulement c'était là aussi impossible. Comment pouvaient-ils le laisser entrer après maintes rédemptions et maintes rechutes ? Alors il suffisait de s'excuser à chaque fois et on revenait à l'institut, comme ça dans un claquement de doigts ? Josh se rappelait également avoir été surveillé lors de sa venue ici car il était dangereux pour lui-même. Apparemment ce devait être un crime plus grave que d'être hostile envers autrui puisque le semi rongeur semblait totalement libre de ses mouvements. Si ce garçon n'avait su saisir sa première chance, pourquoi changerait-il maintenant ? Il devait encore être dans une de ses pseudos-phases de rédemption avant de voir son comportement modifié. Soit par pure malice, soit parce qu'un malheur le toucherait encore et il sombrerait dans la démence une fois de plus. Jay ne pouvait pas laisser Ernest s'en tirer impunément, ses amis vivaient à l'institut, notamment Kaya et la très fragile Enora que le rongeur avait également côtoyé. La jeune fille serait bien capable de lui pardonner qui sait, elle serait alors en danger. Mais d'abord évaluer la situation, voir comment se comporterait le rongeur pour tenter de le cerner, une mission quasi impossible bien entendu.

-Salut, tu as l'air plutôt calme, c'est bien mais à quand la prochaine crise ? Tu n'aurais jamais dû revenir ici... Tu mets tout le monde en danger.

L'Ange s'attendait à tout, des railleries comme lors de leur première rencontre et que, timoré, il ne s'en rendait pas vraiment compte. Des insultes aussi, ou pourquoi pas des coups ? Oui ça lui ressemblait bien au garçon-rongeur de sauter sur les gens sans prévenir, surtout que pour une fois, Josh avait eu une approche non pas agressive-avec lui c'était impossible, même quand il détestait vraiment.- mais froide et méfiante. Lorsque le chanteur abordait Ernest gentiment il s'en prenait déjà plein le museau, pas étonnant qu'il soit prudemment posté à une certaine distance de sécurité, bien que loin d'être lâche malgré les apparences il tende à s'approcher petit à petit. Il ne fuyait pas mais évaluait la situation de son mieux même en sachant que c'était une chose quasiment impossible avec Ernest l'imprévisible. Non décidément, l'ange ne pouvait pas laisser passer cette scène saugrenue sans rien dire, ses amis en avaient trop bavé et lui aussi. Bien que ça ne doive rien lui apporter, il devait bien montrer à Ernest qu'il n'était pas le bienvenue en ces lieux, et pour cela, un silence glacé ne serait pas suffisant, encore moins juste partir et laisser le rat prendre possession du territoire.

-Je ne te souhaite pas le malheur, vraiment, mais tu n'as rien à faire ici, ça c'est sûr.

Grogna le jeune homme en se rappelant une fois de plus du " venin" courant dans ses veines. Pourquoi Ernest n'était-il pas très loin, heureux s'il le voulait, après tout pourquoi pas bien qu'il ne le mérite pas -mais Icare ne saurait juger après tout, il n'était pas une instance divine si jamais elle existait- mais pas ici, à narguer tout le monde avec ses tartines beurrées. A cause de sa présence, Josh était obligé de revivre des souvenirs bien pénible et de craindre pour ses amis, surtout la frêle Enora qui ne devait plus tomber nez à nez avec Ernest.

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Ainsi, Icare avait choisit de l’accoster. Une petite partie d’Ernest aurait souhaité le contraire. Il était plus simple de ne pas affronter les conséquences de ses erreurs. Il était plus facile de pratiquer la politique de l’autruche. Mais fuir, au propre comme au figuré, n’était plus une alternative. Depuis qu’Altérion avait franchi les grilles de l’Institut, la vraie épreuve de sa vie avait débutée. Ce matin, donc, au programme, le face à face avec l’ange, qu’il avait déçu, qu’il avait attaqué... l’une de ses nombreuses victimes. Mettre en doute la gentillesse de Joshua n’était pas possible. Son ressentiment n’en était que plus lourd. Ernest tourna la tête vers Icare et, sitôt avoir avalé sa bouchée, il lui répondit.

« Bonjour Icare. C’est le BAM qui m’a replacé ici, je n’ai pas eu mon mot à dire à ce niveau. »

Sa voix nasillarde, désagréable, était tempérée par un calme étrange. Etrange car on ne le connaissait pas du tout pour ça. Le jeune mutant se garda bien du moindre geste brusque. Il estima aussi préférable de ne pas continuer à manger, ne voulant surtout pas sembler dédaigneux. Icare était venue, il devait lui accorder toute son attention, tout son respect, c’était la moindre des choses. Il reprit sur le même ton. Les phrases étaient un peu préparées. Il y pensait beaucoup.

« Pour les crises... on me soigne. Tu dois le savoir, enfin peut-être pas, ces derniers mois, j’étais interné en psychiatrie. Je vois encore une psychologue toutes les semaines. J’étais malade, j’étais dangereux... on m’a guéri. J’en est sans doute trop fait pour que tu puisses me croire. En tout cas, ça ne pardonne rien. C’est pourquoi je te demande pardon. Ce ne sont que des mots, mais il faut bien commencer par quelque chose. Et si tu veux que je me retire, j’irais manger dans le réfectoire. »

Josh pouvait comprendre que quelqu'un aille mal au point de faire souffrir les autres. Il était difficile de pardonner à ces "malades" mais ses parents l'avaient fait pour lui. Certes, le chanteur n'avait essayé de tuer personne, mais psychologiquement ils avaient beaucoup soufferts de voir leur fils s'enfermer dans sa bulle, se mutiler et se montrer hostile à tout ce qu'ils lui avaient pourtant enseigné. Néanmoins, une fois guéri, le jeune homme avait tâché de ne jamais retomber, et ce malgré les épreuves, parce qu'une fois que l'on voyait le sourire des siens rassurés, on ne pouvait plus les décevoir. Pourquoi le garçon-rongeur avait plongé, guérit puis replonger ? Lui-même devait penser qu'il était sauvé, oh oui avec cet air étrangement calme, et même ce physique changé, bien moins agressif, l'adolescent devait se songer sauver. Difficile même pour un ange rancunier de penser que tout était fait exprès, qu'un plan machiavélique était sciemment en route. Néanmoins, son instinct lui disait autre chose, un instinct prudent qui se souvenait très bien d'avoir laissé trop de plumes pour écouter la tête ou les psychologues et tous les autres adultes qui "savaient" ce genre de choses. L'enfant-rat n'était pas guéri, il était temporairement stabilisé. Prenant sur lui, Icare se força à avoir un ton plus tranquille, après tout une bagarre n'était pas recherchée, néanmoins Ernest devait bien comprendre certaines choses.

-Je me fiche que tu manges ici ou au réfectoire, ce que je voudrais, c'est ton pardon en action. Ne t'approche pas d'Enora, elle a déjà perdu Daniel Hopes, si tu lui laisse penser qu'elle peut te retrouver avant de la lâcher ou de l'attaquer, elle ne s'en remettra pas. Je sais ce que font tes morsures, et je ne veux pas qu'elle les subisse car elle en mourrait. Si tu as eu un peu d'amitié sincère pour elle, fiche-lui la paix. Je ne comprends pas le BAM, ce lieu est rempli d'enfants... Toi-même tu ne sais pas quand tu changes, avoue.

Josh épuisé s'assit non loin d'Ernest, il n'était vraiment pas fait pour haïr. Sans non plus redevenir copain avec le jeune garçon, Icare souhaitait juste trouver une solution entre deux. Que l'adolescent ne finisse pas ses jours en prison, pourquoi pas, par moment les autorités avaient de douces intentions envers de pires criminels que lui et puis Ernest avait seulement 14 ans... Mais qu'il demeure ici paraissait quand même improbable.

-Il n'y a vraiment pas d'autres lieux où tu puisses aller ? Je ne dis pas ça méchamment, mais je me souviens que tu changeais du tout au tout, même là je me demande si tu ne vas pas me sauter à la gorge. Toi non plus tu ne sais pas, alors comment tu peux savoir si tu es guéri ? C'est dangereux ici, tu es dangereux...

Certes la voix était moins ombrageuse mais les mots faisaient mal sans doute, Josh s'en rendait compte mais ses amis étaient ici, il ne pouvait pas jouer plus finement, ni préférer plus de délicatesse. Ernest, puisqu'il était dans de bonnes prédispositions pour le moment -meilleures que jamais, le chanteur ne l'avait en réalité, jamais connu aussi calme.- pouvait bien saisir le message non ? Malgré sa bonne foi, même si c'était vrai, en se forçant à croire l'enfant-rat, Jay ne pouvait que craindre une réminiscence de folie sans raison. C'est vrai ça, pourquoi ne l'avait-on pas assigné à résidence pendant au moins un an pour voir si les progrès étaient réels ?

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Ernest pouvait remercier Caitlyn, pour qui il avait toujours un grand respect. La rousse, en lui réservant un accueil glacial, polaire même, lui avait en quelque sorte administré un antibiotique. Pour faire plus mal qu’elle avec des mots, il fallait être particulièrement doué en la matière. Icare était bien trop doux en son fort intérieur pour rivaliser. Mais ce n’était pas parce que Altérion n’était pas vraiment malmené qu’il n’écoutait pas. Tout en observant le mutant ailé, il se donna un temps de réflexion avant de lui répondre. Avec lui, le dialogue était possible, une chance en or. Il fallait s’expliquer, il fallait que Josh comprenne.

« Si, Icare, je sais quand je change. Je l’ai toujours su. C’est juste que je refusais de me l’avouer. Avant de vous mentir, à vous tous, je me mentais à moi-même. Du coup, je n’ai jamais réglé le problème et il m’a dévoré. Or le problème est vieux, tu ne m’as jamais connu sans. Il a pris de l’ampleur avec mes mésaventures. Et puis, ça a fini par exploser. Sans l’aide de Madame Bragel, ma psychologue, elle est mutante aussi, jamais je ne serais sortie de l’hôpital. Avec elle, j’ai fait ce que j’aurais dû faire des années plus tôt.

Je n’ai plus ce mal être en moi, il n’y a plus d’agressivité à sans cesse refouler, il n’y a plus cette jalousie exacerbée... il ne reste que les traces de ma démence que je me dois d’effacer ou, tout du moins, d’essayer. Alors tu peux être rassuré. Je ne vais sauter sur personne, surtout pas sur Ennora. Je ne te demande pas de me croire sur parole. Tu le verras bien avec le temps. De surcroit, on me surveille. Tu peux être sûr qu’à la moindre connerie, le BAM me récupère. »

-Mais tu ne peux pas savoir quand tu changeras à nouveau n'est-ce pas ? Si un malheur te touches, tu n'as pas peur de retomber dans la folie encore ?

Josh restait, il était intrigué par la voix d'Ernest mais aussi son physique. Tout semblait modifié chez lui, et pour un peu Icare avait comme envie de le croire, bien entendu le garçon pouvait mentir, surtout que pendant leur première rencontre, il lui avait bien fait comprendre que c'était facile de promener les gens. Ernest était surdoué, il l'avait assez répété et Icare savait bien qu'il ne l'était pas, à défaut de ne pas être trop stupide non plus. Néanmoins, quitte à se faire balader encore, le jeune homme demeurait posté non loin du semi rongeur, non seulement attiré par son changement apparent mais aussi pour tester sa patience quelque part. Si Ernest devenait fou en sa présence, sa régénération et ses réflexes l'aideraient probablement à survivre et cela éviterait à un mutant moins apte à se défendre de se trouver en face de l'adolescent furieux avec la bave coulant aux lèvres.

-Comment ont-ils fait, comment as-tu fait pour que ce soit différent cette fois ? Car avant de replonger, tu avais l'air vraiment mieux déjà. Et puis le BAM ne pourra rien faire si ta "bêtise" a lieu sur un toit comme la dernière fois entre toi et moi, sans compter que ça ne changera rien de te punir si le mal est déjà fait.

Josh essayait de ne pas être trop méchant, mais il allait bien plus loin que d'habitude, non plus ulcéré mais souhaitant comprendre même si cela devait être un peu au détriment e la bienséance. Mais bon, Ernest lui devait bien ça non ? Et puis quelque part il faut avouer que c'était grisant de pouvoir -apparemment en tout cas- questionner celui qui vous avait humilié et presque tué en toute impunité, sans que celui-ci ne semble décidé à mentir, cacher ou s'énerver. En fait l'adolescent semblait chercher... Le dialogue !

-Tu te souviens de tout alors, je croyais que les gens atteints de folie ne se rappelaient pas, mais c'est mieux si tu sais... Ainsi tu es au courant de ce que tu peux faire, tu sais que tu dois faire attention. Pour Enora j'y compte bien, je la vois très rarement heureuse, si tu viens dans sa vie, ce sera finit, elle aimait tellement Daniel Hopes qu'il faut qu'elle l'oublie un peu et tout ce qui s'y rattache, sans compter que tu n'es, enfin étais, enfin on verra... Pas stable.

L'agressivité de l'ange avait largement diminuée, d'une parce que ce n'était pas dans sa nature, et de deux parce qu'Ernest ne le forçait pas au pardon, il lui donnait du temps pour jauger, sachant lui-même qu'il était fautif. Vrai ou faux repentir, Icare se donnait désormais le droit d'attendre avant de donner son opinion, il n'était pas acculé bien qu'il demeure surpris. Lui-même était persuadé de ne jamais changer d'avis sur Ernest et il s'apprêtait à peut-être remettre ses idées en jeu. Serait-il faible, manipulé par l'enfant-rat, trop naïf ou juste bon ?

-Alors, qu'est-ce que tu comptes faire ? Je veux dire, pas dans le cadre de ta surveillance ou du programme de réinsertion ou je ne sais quoi... Par toi-même j'entends.

Décidément, si on lui avait dit qu'il causerait avenir avec le semi rongeur, Icare aurait bien ri 1 h plus tôt, mais la curiosité l'emportait et face au calme d'Ernest, sa colère n'aurait pu être maintenue. Elle reviendrait par vagues peut-être, plus tard, pour le moment, seule la méfiance demeurait, mais il voulait savoir, apprendre. Ça c'était dans sa nature. Sans compter qu'un jour, si le semi rat replongeait, Josh aurait de quoi lui répondre, ses propres paroles en pleine face !

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« Je ne pense pas rechuter ou, en tout cas, je ne pense pas rechuter sans signe précurseurs. Le mal-être s’installe avant de nuire. Quand on est à l’écoute de soi, on sens ses choses. C’est comme un parasite. Il s’agit alors de s’en purger avant qu’il ne grandisse, avant qu’il ne prenne racine. Je me dois de ne plus être négligeant, je ne me laisserais pas chuter sans réagir si cela devait arriver. C’est pour ça que je suis toujours suivi par ma psychologue. »

Ernest continuait ses explications. Icare continuait d’écouter et de questionner. Le face à face, pour l’instant, se déroulait bien. Si jamais, à force d’efforts, l’ange admettait son changement, ce serait déjà un premier pas, un grand pas, vers le démantèlement de son ancienne et exécrable réputation. Paradoxalement, la chose allait prendre du temps, mais les premiers jours, les premiers échanges étaient d’une importance capitale. Il ne fallait surtout pas se louper lors de cette période si cruciale.

« Mon état actuel, je le dois à ma psychologue justement, Madame Bragel. Elle est mutante, une sorte de télépathe. Mais elle ne modifie pas l’esprit, il n’y a rien d’artificiel dans sa façon de soigner. Elle donne juste les moyens d’avancer, de mettre de l’ordre, de se comprendre, de se corriger et surtout, me concernant, de se contrôler. Elle est rentrée dans ma tête et elle m’a tenue la main jusqu’à ce que je mette au placard cette dangereuse démence, jusqu’à ce que je sois enfin honnête avec moi-même. C’est pour ça que je me souviens de tout. L’oubli, c’est la fuite, c’est nier le problème. L’amnésie n’a jamais rien arrangé. Je sais ce que j’ai fais, ce que je ne veux plus faire. Je ne sais pas encore exactement qui je veux être, mais je sais qui je ne veux pas être. Pour l’instant, je dois réparer mes bêtises. Et puis, je vais terminer mes études. Après, je verrais. Il y a plein de choses qu’il me reste à découvrir. Il y a forcément un métier pour moi. »

-Mais Charles Xavier n'a jamais rien vu lui, pourquoi ? C'est le meilleur télépathe de tous les temps, j'en suis presque sûr.

En effet, comment Miss Bragel, simple psychologue avait pu savoir quelque chose que le grand fondateur de l'institut avait raté ? Est-ce qu'Ernest était assez doué pour mentir à cet homme ? Avait-il décidé de se livrer à la mutante ou jouait-il encore ? Ernest avait menti à tout le monde lors de ses fausses rédemptions, et maintenant, qu'est-ce qui disait qu'il ne bernait pas encore tout le monde ? Légèrement plus tendu alors qu'il avait commencé à se laisser aller, Josh poussa un petit soupir. Seul le temps pourrait les conforter dans l'idée qu'Ernest allait mieux ou se jouait d'eux. Cette histoire de métier sonnait presque faux. Comment l'hybride rongeur pouvait s'en contenter, rentrer dans la normalité ? Le chanteur essaya bien de se dire qu'il ne devait pas comparer l'ancien Ernest avec le nouveau, qu'il connaissait une autre personne, cela restait difficile à intégrer pour son cerveau.

L'adolescent avait été instable, instable mais brillant et l'avenir qu'il dépeignait semblait terne. A l'époque, il avait semblé à Josh que l'ennui en plus de la colère et de la jalousie -qu'il n'avait pas deviné en revanche- créaient des crises. Avec un simple travail, une vie de routine, comment le semi rat comptait occuper son intelligence extraordinaire ? Et s'il se lassait, est-ce que le mal être reviendrait ? Et le jeune garçon se mentirait-il à nouveau ? Beaucoup de questions trottaient dans la tête de l'ange qui ne pouvait pas résoudre tout cela, parce qu'il n'avait aucun pouvoir d'omniscience et parce que son évaluation provenait de son instinct uniquement. Josh n'avait aucun diplôme en psychologie, il ne savait pas comment Ernest fonctionnait vraiment et sans doute était-ce ce qui l'effrayait le plus. L'institut avait déjà commis des erreurs bien que le mutant leur ait "pardonné". L'école n'était-elle pas encore en train de faire une bêtise ?

-C'est vraiment toi qui aspire à ça ? Ou c'est un discours sagement appris ? Tu ne te cache plus rien ? C'est réellement ça tes envies ? Non parce que c'est bien mais je dois avouer que venant de toi c'est... Bizarrement... Comment dire, ne t'offense pas du terme, mais... Petit !

Éveillé, Ernest était promis à un grand avenir, soit sombre, soit lumineux, mais comment imaginer le garçon suivre des cours, passer son bac, aller à l'université et "juste" faire un métier ? Outre son apparence que l'angelot ne jugeait pas, il y avait son mental. En réalité, Icare avait peur que l'ancien Vermine ait subi un genre de "lavage de cerveau" quoique ce dernier en dise, et qu'une fois l'influence de Bragel éloigné, il devienne fou à nouveau. La psychologue avait sûrement son niveau, elle avait pu occuper son esprit spécial, mais ici, entouré d'êtres moins brillants que lui, n'allait-il pas s'ennuyer et accumuler la frustration ?

-T'as le droit à des activité extra-scolaires ? Tu peux sortir de temps à autre ? J'ai été interné de force aussi, pour d'autres raisons que toi. Avec le temps ils s'assouplissent, enfin ça dépend je suppose, mais bon j'pense que si tu dis vraiment la vérité, vu ton âge, tu peux changer de vie, comme dans les films. Oui les films révèlent la vérité des fois je trouve et si tu ne mens pas, je gage qu'un jour tu pourras te faire apprécier, mais tu crois pouvoir supporter la colère et l'isolement en attendant ? Parce que tu n'es pas vraiment aimé, je dois d'ailleurs être totalement stupide pour te parler, et pire... T'encourager. A croire que quand j'aime pas, c'est du bluff.

Fit-il, exaspéré par sa propre "lâcheté" qui lui faisait changer de ligne directrice. Désormais il n'avait même plus envie de haïr Ernest mais de l'encourager. Inconsciemment son esprit, bien que loin d'être aussi brillant que celui du petit mutant avait compris qu'il valait mieux suivre la convalescence de ce dernier. Peut-être qu'en étant à ses côtés -pas trop non plus quand même, ça n'était pas un ami, loin de là.- il pourrait aider à réguler une prochaine crise. De toutes façons, à part d'horribles souffrances, il ne risquait rien d'autres, n'est-ce pas ? Ou à un degré moindre, ce qui lui faisait dire qu'il devait prendre le risque pour protéger ses amis.

-Et Madame Bragel, elle sera toujours disponible n'est-ce pas ? Qu'est-ce qui se passe si on te change de psychologue ?

Oui, parce qu'il se doutait bien que c'était elle la clé. Quelques soient ses efforts, pour détrôner Ernest pour l'aider, rien ne serait aussi utile que l'intervention de cette mutante psychologue. Mais... Si elle avait d'autres patients ou qu'il lui arrivait malheur ?

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« Tu n’es pas stupide Icare. Tu as raison de ne pas t’enfermer dans la rancune. L’hostilité empoisonne l’âme, j’en sais quelque chose. Faire du mal, ça fait mal. Mais, tu as aussi raison de te méfier. Trop nombreux sont ceux qui retournent la gentillesse à leur avantage, j’en faisais partie. Je suis contant que tu acceptes encore de m’écouter. J’espère au moins te rassurer, notamment au sujet d’Ennora. Et puis, dans quelques semaines, quand mes mots commenceront à devenir des actes, peut-être que tu croiras à mon discours. Laisse-toi le temps.

J’ignore si Monsieur Xavier a cerné mon mal. Je ne suis pas souvent aller le voir et, comme tu le sais, il est très occupé. Or sonder un esprit, même pour le meilleur des télépathes, ça prend beaucoup de temps, enfin j’imagine. Mais il devait bien se douter que ça n’allait pas bien. D’ailleurs, maintenant que j’en parle, je comprends mieux certaines de ses décisions à mon égard, preuve qu’il devait quand même avoir une idée du problème. Par exemple, lors de mon précédent retour, lorsqu’il a été question de me mettre sous inhibiteurs, il a refusé d’utiliser l’Altérium autrement que pour mettre au point le Neutralium. Le Neutralium, c’est un dérivé de l’Altérium, il me rend sensible aux traitements, mais bref, c’est un détail. Moi, je voulais une application plus large, plus militaire, des dérivés pouvant servir dans le feu de l’action. Monsieur Xavier m’a dit que ce ne serait pas ainsi que j’arriverais à mieux assumer ma mutation. Je me souviens lui en avoir énormément voulu. A mon avis, il voulait m’aider à comprendre tout seul ce qui n’allait pas, il espérait que je puisse par moi-même évoluer. Je n’y suis pas arrivé. Je n’ai pas été assez fort...

Concernant Madame Bragel, ne t’en fait pas, elle n’est plus la seule à qui je peux me confier. Tout l’enjeu de son travail est justement que je puisse me débrouiller par moi-même. Comme je te l’ai dit, elle n’a rien fait, elle m’a juste aidé, guidée. Les changements, c’est moi qui les ai fait, grâce à ce qu’elle m’a appris et ce qu’elle m’a fait comprendre. Si elle n’est plus là, j’irai voir Monsieur Xavier ou Madame Frost. Maintenant que j’ai la tête sur les épaules, je pourrais profiter de leurs conseils et non plus les nier comme j’en avais l’habitude. »

Altérion s’autorisa une petite pose. Il se désaltéra grâce à son verre de jus d’orange, puis il reprit.

« Pour l’instant, je crois que je ne vais pas pouvoir mettre le nez dehors. Je suis surveillé de très près. Faudra attendre pour les activités extra scolaires. Et pour mon métier... et bien, je n’ai pas dit non plus que j’allais être boulanger ou banquier. Il y a de grands métiers. Je ne sais pas moi, artiste pourquoi pas, ou physicien. Je pourrais étudier le gêne X ou autre chose. Ou alors, pourquoi ne pas devenir prof ? J’avoue que je ne sais pas. Faudra que j’y réfléchisse. J’ai encore le temps pour ça. En attendant, supporter l’enfermement, ce n’est pas un problème. J’ai beaucoup de chance d’être là et non pas en prison. On m’a offert une chance que je ne peux pas me permettre de laisser passer. J’ai tout raté jusqu’à présent, maintenant c’est terminé ! Je me prends en main et je m’en sors ! »

L’enthousiasme s’invita dans ses dernières répliques. Altérion était très calme dans son attitude, mais ce n’était pas pour autant qu’il s’apparentait à quelqu’un de lobotomisé. Il avait de l’énergie, une attitude infiniment plus saine, plus ouverte.

Ernest semblait trouver les réponses adéquates facilement, comme quelqu'un qui a longuement réfléchi sur son propre cas... Ou comment berner autrui, mais Josh avait envie de penser que le semi rat était honnête. C'était bien plus coûteux en énergie et surtout inutile de tout fausser quand on pouvait régler le problème en s'y attelant directement. Icare aimait à penser qu'Ernest était suffisamment intelligent pour l'avoir compris, surtout en tant que surdoué même si malheureusement parfois, le QI n'avait rien à voir avec la finesse d'esprit. A 14 ans, on pouvait espérer que l'hybride ait suffisamment de temps et d'envie pour changer, quoiqu'il en soit, ses paroles étaient plutôt rassurantes et Josh lui offrit un timide sourire en signe d'une possible réconciliation. Pour la première fois depuis leurs rencontres le garçon semblait approuver la façon d'être de Josh, une situation particulière qui n'avait pas manqué de surprendre le mutant ailé habitué à être rabaissé, surtout par le petit être poilu. Très isolé à l'époque l'ange s'était pourtant accroché à lui, ne fuyant pas les rencontres quand bien même l'enfant-rongeur se moquait de sa personne. Parfois il ne s'en rendait tout simplement pas contre tandis que dans d'autres cas, Josh avait préféré ignorer la véracité de cette triste situation. En effet, le jeune homme était encore très naïf à l'époque, et surtout extrêmement reconnaissant pour le simple fait qu'on daigne lui adresser la parole. Aujourd'hui, bien qu'il pense toujours inconsciemment ne pas être à l'égal de tout le monde, Icare avait commencé à s'améliorer, il ne croyait plus n'importe quoi malgré une tendance à la naïveté encore présente et prenait confiance en sa propre personne. Désormais Josh osait donner son avis, faire ressortir son caractère et se mettre en avant si nécessaire, pour un entretien de travail par exemple. Tout le monde avait le droit de vivre, quelque soit sa manière de faire, ses défauts tant qu'il n'était pas une nuisance pour la société.

Ainsi, lorsqu'Ernest aurait prouvé être guéri, lui aussi pourrait envisager un avenir en société malgré son apparence encore plus altérée que celle d'Icare. Bien entendu, personne, y compris lui-même n'aurait plus qu'une marge de tolérance diminuée envers le garçon-rongeur en cas de rechute puisque ce dernier avait déjà outrepassé la limite, mais il avait encore de quoi changer de vie. Ce serait très dur au début, même un naïf comme Josh se l'imaginait, c'est pourquoi il avait petit à petit changer d'avis, ne souhaitant plus la vengeance, il espérait aider Ernest à reprendre pied même si ce dernier continuait de l'effrayer et qu'il faudrait un certain temps avant que la confiance ne revienne, si jamais elle avait déjà existé auparavant.

-En tout cas, je me doute bien que tu as des idées d'activités pour tuer le temps, mais ayant déjà été consigné à l'intérieur, si tu veux, je pourrais te donner quelques astuces. Il y a des activités vraiment pas mal, le club d'échecs par exemple. Je trouvais ça vraiment ennuyeux mais après j'aimais bien y aller même si je perdais tout le temps... Le groupe de lecture aussi alors que je ne m'étais jamais vu là-dedans. Essaye de ne pas trop rester seul, il y a de quoi devenir fou sinon. Euh... Oups, désolé pour l'expression.

Josh rougit, ces débuts pour une tentative d'entente nouvelles n'étaient pas faciles. L'angelot n'était pas à l'aise, néanmoins il relativisait, sachant que parler à Ernest son démon faisait diminuer le poids dans sa poitrine. Comme si l'obscurité des sentiments ne pouvait être accepté par son coeur. Haïr ne lui apportait rien, voilà pourquoi il avait choisi sans vraiment décider de changer, de donner encore une chance au garçon-rongeur. Ce dernier devait néanmoins avoir conscience qu'en le décevant une fois, une seule, Josh serait bien pire qu'avant. Il ne le lâcherait plus et ferait tout pour le faire chuter. Une erreur mettant en danger ses amis serait "fatale" pour Ernest, car si l'ange ne semblait pas dangereux, il avait une force de caractère bien ancrée en lui qui avait su se révéler face à l'adversité, la vraie comme lorsqu'il avait rencontré le vampire.

-Physicien c'est pas mal, personnellement heureusement que ça n'a jamais été mon rêve parce que je ne comprends rien aux matières scientifiques. Artiste sinon ? Vraiment et dans quel domaine ? Littérature ? Tu lisais beaucoup je me souviens, tu écris aussi alors ? Dessin ? Sculpture ? Je fais quelques concerts pour ma part, et j'ai même dû refuser quelques invitations, ça commence à bien marcher, je peux en vivre en fait. Bien sûr, modestement mais c'est déjà super, je viens d'une famille très pauvre, l'avantage c'est que ce que je gagne maintenant me donne l'impression d'être très riche.

D'un ton plus joyeux, sans en devenir pédant pour autant, le jeune homme n'avait pas trop hésité à raconter ses aventures dans le domaine de la musique. La passion dépassait beaucoup de choses, notamment ses peurs ou sa timidité. De toutes façons, pour aider Ernest, rester dans les discussions sérieuses de remise en question n'était pas le mieux, il fallait bien le faire revenir dans la normalité et cette idée de devenir artiste était une sacrée occasion pour briser la glace. Sans compter que Josh était curieux de savoir ce qu'une personne douée en matières scientifiques pouvait bien apporter du côté artistique. Sans remettre en doute les capacités du jeune Lenoir-surtout pas, il savait trop bien combien le semi rongeur était talentueux dans ce qu'il entreprenait.- il avait très envie d'en savoir plus sur ce cas rare. En effet peu nombreux étaient les esprits pragmatiques capables de se lancer dans l'art et inversement. Quelqu'un qui aspirait à devenir éventuellement physicien, même si cela n'était qu'une ébauche de souhait n'émettait pas l'idée de se faire artiste. C'était paradoxale, intrigant, bizarre, "Lenoiresque" en fait.

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En deux rencontres, celle avec Caitlyn et celle avec Icare, Ernest avait peut-être attint les deux limites opposées. D’un côté, l’impasse, de l’autre, une incroyable ouverture. L’ange ne devait sans doute même pas s’en rendre compte, mais ce qu’il faisait, très peu de gens, dans son cas, l’aurait fait. Ne serait-ce qu’envisager le pardon, certes sous conditions, était une qualité salvatrice, le moyen de se purger des sentiments néfastes. Le jeune mutant repensa à Sinistre et à la rousse. Il voulait aider mais sa logique lui disait qu’il ne le pourrait pas. Néanmoins une chose était sûre, il voulait donner aux autres. Quoi ? Là était la question. On pouvait donner son intelligence, en étant biologiste par exemple, servir la société par des découvertes. On pouvait aussi donner son inspiration, en étant artiste par exemple, servir la société par la joie, le rêve. Les deux, à ses yeux, étaient d’importance égale. Et il pouvait sans doute envisager les deux. Il avait un gros QI, les études étaient pour lui presque des formalités. Il avait aussi l’imagination, preuve en était ses écrits, ses histoires. Petit, c’était par les romans, les livres qu’il s’évadait de sa prison dorée. Ernest en revint à Icare, absolument pas offensé par sa maladresse qui n’en était pas vraiment une. S’il s’énervait pour un mot, le rat n’aurait pas changé.

« Madame Bragel m’a en effet poussé à m’investir dans le domaine artistique. La discipline de l’esprit ne peut pas suffire sur le long terme. Il faut aussi une vie saine. Alors, j’ai choisi la musique et la danse. La musique car c’est émotionnellement très fort, la danse car cela dérive mon savoir et ma coordination gymnastique en quelque chose de pacifique. Je t’accorde qu’au début, j’avais une approche très utilitaire de l’art. D’ailleurs, je viens de te servir un raisonnement logique. Mais maintenant que je me débrouille, et bien je commence à bien m’amuser. Pour la musique, je joue pour l’instant de la flûte. J’ai pris simple pour débuté. La danse, ben je fais de tout, surtout ce qui bouge pas mal. En fait, j’improvise et quand on pratique les arts martiaux, ça aide pour le sens du rythme. »

Altérion afficha un peu de fierté, heureux de s’ouvrir à de nouveaux horizons. Et pour le coup, il pouvait facilement prouver ses dires. Pas besoin d’attendre des jours pour ça.

« Félicitation pour ton début de succès. Et merci pour tes conseils. A côté des cours, je vais avoir beaucoup de temps libre, je suis exclus de toutes les activités du cursus Héritage. Jamais je ne deviendrais X-Men. Ce n’est peut-être pas plus mal, même si cette voie me plait toujours. Enfin, il ne pouvait pas en être autrement. Je vais chercher à m’occuper. Lecture, Echec, pourquoi pas. Je pensais aussi aider à la Bibliothèque ou alors monter un petit atelier d’aide scolaire. »

HRP : ha, j’avais oublié de te le signaler, Ernest a 15 ans, presque 16. Mon profil n’est pas à jour au moment où j’écris ces lignes. Je vais corriger. Navré pour cet oubli !

De la flûte ? C'était plutôt ironique venant d'un semi-rat, mais Josh se garda bien de le faire remarquer. Inutile et méchant, soit pas du tout son comportement habituel, pas même face à un "ennemi" qui avait d'ailleurs des chances de rédemption avec lui. Le jeune homme était d'ailleurs plus à l'aise maintenant qu'on parlait musique. Il avait pensé qu'Ernest se serait lancé dans la littérature plutôt, mais recevait la surprise-bonne cette fois- de le voir intéressé par les instruments, mais également la danse. Icare était un chanteur né, dès tout petit il fredonnait sans cesse les comptines apprises à l'école et s'était vite tourné vers d'autres choses, cassant les oreilles à ses parents pour avoir d'autres disques pour enfants, encore et toujours, jamais satisfait. En revanche il dansait très mal bien qu'il dispose d'une certaine grâce naturelle, de la légèreté et de la grâce inhérente à ce genre de pratique. Sans doute était-ce sa timidité qui le bloquait ou sa maladresse qui, sans être légendaire restait handicapante. Par contre Josh voulait bien croire que l'hybride était encore plus agile que sa personne et que ses pas devaient être très agréables à l'oeil, surtout s'il les avait hérité de ses capacités aux arts martiaux, car pour cela aussi le mutant lui faisait confiance. D'ailleurs il avait déjà vu un film comme ça dans lequel un danseur s'en sortait face aux malfrats grâce à son don artistique, il devenait même un super héros. Et si cette pratique maintenait le rat en forme sans que personne ne s'en doute ? Et si c'était un moyen de travailler ses arts martiaux ?

Josh chassa cette idée de sa tête, il ne pouvait décemment pas commencer à douter de tout. Certes, le mutant ailé peinait à croire à sa stabilité et c'était légitime, mais de là à remettre en cause ses goûts pour l'art. Non, le chanteur ne pouvait pas sans cesse vaciller dans un camps ou dans l'autre, il y avait de quoi rendre fou-à juste titre cette fois.- l'adolescent. Adolescent qui en plus d'avoir mûri semblait avoir grandi du haut de ses 15 ou 16 ans d'après les rapides calculs d'Icare. Au début l'ange était resté fixé sur 13/ 14 mais rien d'étonnant quand votre régénération commençait déjà à ralentir le processus de vieillissement. Selon les analyses de sang et le reste, l'artiste savait désormais qu'à 25 ans le temps s'arrêterait pour lui, bien que personne ne sache encore si ce serait un stop net et précis ou juste un ralentissement, ni à quelle vitesse il vieillirait dans ce dernier cas. Oui, le semi rat avait bien changé, mais lui ? Dans quelques années ils auraient le même âge puis celui qui se faisait appeler Vermine le dépasserait. Josh avait une grande peur de cesser de vieillir car il allait perdre ses amis, de la même façon que son "immortalité" lui avait dérobé Julia sans qu'il puisse la suivre.

Julia... Quand il songeait à elle, bien fin de compte il n'ait jamais été amoureux d'elle, Icare repensait à Orphée. Cette ode dans la mythologie lui ressemblait tellement, et s'il savait le chemin pour aller en enfer la chercher, Josh le ferait. Il se tourna vers Altérion, ces pensées ayant défilé dans sa tête en quelques fractions de secondes, ne laissant rien paraître d'autre qu'un léger voile sur ses prunelles azurées. Comme bon nombre d'artistes, Josh avait l'esprit qui dérivait très vite, une chose en appelant une autre même quand elles paraissaient éloignées pour une autre personne.

-Et quelle branche en tant que physicien ? Tu ferais aussi un excellent chirurgien ou médecin.

Lança Josh pour reprendre le thème de l'avenir professionnel, sachant pertinemment qu'un rat dans un hôpital c'était également ironique. Mais Ernest avait un esprit humain avant tout, et donc la notion d'hygiène. A cette pensée vague d'un pauvre Altérion emmailloté dans une combinaison spéciale qui le serrait jusqu'à ses pattes nues pour opérer, Josh eut un mini sourire, pas méchant bien sûr mais il fallait avouer que la situation était cocasse. Quoiqu'au final, pourquoi pas ? Avec son cerveau et ses doigts de fée, il était certain que le petit mutant pourrait faire des prouesses en se dédiant à sauver des vies. Sauver des vies pour remplacer celles brisées eut-être ? Mais ce domaine de rédemption ne regardait pas Icare qui décida de laisser Ernest à ses démons personnels pour en revenir à l'art... Et à Julia malgré lui.

-Tu connais la musique qu'a joué Orphée aux enfers ? Il y a une version flûte je crois. Et quel style de danse ? J'aimerais bien voir ça, si tu veux je t'accompagne à la guitare, elle est dans ma chambre. Oh et merci pour le "début de succès", personnellement si ça reste comme ça, ça me conviens, je ne cours pas après la gloire, et puis il y a sûrement un facteur chance dedans. Bon et cette démonstration ? Musique ou danse ?

Lança l'ange, plutôt joyeux car enfin débarrassé pour le moment de ses inquiétudes et ressentiments.