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 « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »

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Enora Lacourt-Bourdieux
Élève à l'Institut Delta
Enora Lacourt-Bourdieux


Messages : 243
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MessageSujet: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeMar 28 Mai - 19:45

CHAPITRE I : Désespoir.




29 Avril 2013 — 10:51 p.m. — Infirmerie de l'Institut


"Comment te sens-tu ?"

Mes yeux se relevèrent sur le professeur qui se tenait au bord de mon lit. Que pouvais-je répondre à cela ? Y avait-il seulement besoin de répondre ? La même phrase, dure, sinistre, tournait en rond dans ma tête. Cette phrase qu'il m'était impossible de prononcer à voix haute. C’était tellement irréel. Daniel était mort tout en ne pouvant l’être. Cette simple pensée était douloureuse. Mon ventre se tordit tandis que la nausée m’envahit. Je détournai le regard, cherchant une réponse à cette question idiote que l’on posait, même dans les plus mauvais moments.

« Je… Je me sens si mal… Je… »

Les mots restaient coincés dans ma gorge tandis que mes doigts se refermaient sur les draps du lit. Le fauteuil du professeur s’avança et il posa sa main sur la mienne. Mes larmes se déversaient de nouveau sur mes joues. Je ne savais pas comment arrêter ça. Comment refaire surface. Y-avait-il seulement un moyen ? J’en doutais de plus en plus. Je m’effondrai. De quoi demain serait-il fait ? Qui me protégerait ? Où allais-je pouvoir vivre tranquillement ? Pourquoi Daniel était-il mort ? Trop de questions sans réponse.

Je pris une longue inspiration, tâchant de me reprendre, de calmer toutes ces émotions contradictoires qui m’habitaient. Puis, je relevai les yeux vers le professeur.

« Je me sens… Seule… Si seule. Il ne sera plus là. Plus jamais et moi je… J’ai… »

« Enora… Tu n’es pas seule, nous sommes là, tous autant que nous sommes à partager cette peine… »


Je ravalai ma salive en même temps que mes sanglots. Non, personne ne pouvait comprendre. Pas même Caitlyn, Amy ou Charles. Pas même Maéva, Paladin ou Ernest. Il ne savait pas. Il ne pouvait pas imaginer le point de repère que Daniel représentait dans ma vie. Moi, je vivais avec lui, partageant certains moments aussi plaisants que douloureux à se remémorer. Moi, je m’étais battue à ses côtés et j’avais cru le perdre plus d’une fois. Moi, je l’avais attendu une année durant, tandis qu’il était parti à Londres et que d’autres l’oubliait. Moi, je lui avais fait cette promesse silencieuse. Ce serment secret. Moi, j’avais été sa fille. Et j’avais le sentiment d’avoir trahi tout ce que ceci pouvait représenter.

Je n’avais pas eu le temps de m’excuser. J’avais l’intention de le faire dès qu’il serait de retour, dès qu’il aurait déposé ses valises dans l’appartement. Je serais venue à lui pour l’accueillir, je lui aurais facilité son retour du mieux que j’aurais pu le faire et je lui aurais parlé. Je serais revenu sur cet après-midi là pour lui dire à quel point je pouvais regretter mon geste. A quel point je pouvais regretter de m’en être pris à lui alors que j’aurais pu essayer de le lui dire autrement. J’avais été bête. Et je ne pouvais que le regretter désormais. Car je ne pourrais plus regarder ses yeux bleus. Je ne pourrais plus admirer son petit sourire. Je ne pourrais jamais obtenir son pardon. Sa disparition me faisait l’effet d’un trou béant dans la poitrine.

« Je ne pourrais pas y arriver… Pas sans lui… »

« Si, tu y arriveras. Nous t’y aiderons. Tu as déjà une chambre de prête ici à t’accueillir. Et nous te guiderons dans ce deuil car nous devrons tout simplement faire le notre également… »


Je le fixai, mes larmes s’étant estompées pour le moment. Je me sentais fatiguée, faible. Je n’avais pas mangé depuis la veille au matin. Avant que tout ceci n’arrive. Mais je n’avais pas faim et je me sentais incapable d’avaler quoi que ce soit. Je n’avais pas la force de grand-chose en cet instant. Je voulais simplement fermer les yeux pour toujours. Le rejoindre dans cet autre univers et pouvoir me laisser aller. Dire adieu à la peine. Nourrir mon désespoir.

« Je… Merci… Professeur… Je veux en savoir plus. Dites moi ce que vous savez. »

Mon regard s’était durcit et on pouvait y lire la colère. Oui, car sous tout ce chagrin, il y avait l’envie de savoir. Savoir qui, pourquoi, comment. Au fond de moi, il y avait une soif de vengeance qui se répandait avec une douceur mortelle dans mes veines. Le professeur dut la percevoir car son expression se figea. C’était mon adrénaline. La substance qui me gardait en vie actuellement. C’était la seule chose sur laquelle je pouvais me concentrer. Il fallait que quelqu’un paie pour cette mort plus qu’injuste à mes yeux. Il fallait que les sang coule pour toutes les larmes que moi, j’avais pu verser.

« Bien… Mais Enora, quoiqu’il se soit passé… N’oublie pas qui tu es et pourquoi Daniel t’aimait. »

Je tressaillis devant ce nom. Ma colère fut balayée par la stupeur. Le professeur avait-il eu besoin de plonger dans ma tête pour me dire ça ? Ou bien le déduisait-il simplement de ma manière d’agir et d’être ? Je baissai les yeux, cherchant à comprendre ce que ces mots voulaient réellement dire tandis qu’il tâcha de m’expliquer.

« Il y a eu… Un attentat. La voiture de Daniel a explosé. On ne sait pas encore qui, ni pourquoi… Le BAM est en train d’enquêter. »

« Le BAM ?! Mais… C’est certainement eux ! »

« Enora… Écoutes-moi… »

« Non ! Vous, écoutez moi ! Je ne suis pas folle ! Daniel se fait envoyer là bas et nous savons tous pourquoi ! Il y a eu trop de bavure ! J’ÉTAIS la bavure de trop qui fait que… Daniel… a été envoyé là-bas ! C’est moi ! C’est MA faute ! Et je suis sûre que c’est le BAM lui-même qui a fait sauter cette voiture ! Il représentait une menace ! Il en savait trop et sortait des sentiers battus en permanence, c’est pour ça qu’ils l’ont… Qu’ils l’ont… »


C’était trop. Les larmes étaient de retour. Je me mis à trembler des pieds à la tête. L’air ne pouvait plus pénétrer mes poumons sans me faire suffoquer. J’enfouis ma tête dans mes mains pour sangloter sans honte. C’était trop dur. Jamais je n’y arriverais. Jamais je n’aurais cette force de m’en sortir. N’importe qui pourrait venir me parler, rien ne changerait devant la perte de mon tuteur.

« Enora… Ne t’en prends pas à toi-même. Daniel savait ce qu’il faisait et connaissait les conséquences que ses actes pourraient avoir. Tu n’as pas été fautive de te faire agresser et torturer… Et tu ne peux pas en vouloir à Daniel d’être venu te secourir. »

« Mais… Je… J’ai mal agi. J’aurais dû faire autrment, il devait y avoir une solution différente qui l’aurait épargné… »

« Non. Personne ne peut savoir ce qu’il se serait passé. S’il n’était pas venu, tout comme si Alexandre n’était pas intervenu, je serais peut être en train de tenir le même genre de discours à Daniel aujourd’hui. »

« J’aurais préféré… Je n’aurais pas dû l’appeler… Ou j’aurais dû… Dire à Alexandre que c’était lui qui venait, tenter de le calmer autrement qu’en le frappant et… »

« L’Homme a cette faculté de se torturer en refaisant sa propre existence. On peut toujours faire les choses autrement. La vie n’est qu’une succession de choix. Et aujourd’hui, tu vis parce que Daniel a choisi de te sauver quand il en a eu l’occasion. Tu ne pouvais rien prévoir Enora. Tu n’as pas ce don. Ne laisse pas le remord te dévorer. Je te le répète, Daniel savait ce qu’il faisait. Il était lui-même libre des choix qu’il prenait et qui l’ont conduit devant sa mort. »


J’assimilai toutes ces informations du mieux que je le pouvais. Tout ceci semblait plus compliqué qu’il n’y paraissait. Je ne savais plus réellement quoi penser. Le vide. C’était ça. Je devais faire le vide, de nouveau. La vie continuait, oui. Mais comment devait-elle se poursuivre pour moi…

« Ne te tortures pas l’esprit, mon enfant. Tu as le temps de faire ton deuil, comme tu le souhaiteras. Nous t’attendrons et nous t’aiderons à traverser cette épreuve. Tu as peut-être perdu un père, mais tu n’as pas perdu toute ta famille. Tu es jeune et tu sais ce que tu vaux. N’oublie jamais que Daniel vivra à travers toi, dans ton cœur, dans les efforts qu’il a fait pour te garder en vie et te guider pour que tu deviennes celle que tu es aujourd’hui. »

Je le regardai, les larmes aux yeux. Il n’y avait plus aucun son qui pouvait sortir de ma gorge. Je finis par hocher la tête, signe que j’avais compris. Daniel était mort en se battant pour quelque chose. Avait-il donné le flambeau à quelqu’un ? Je ne le savais pas, j’espérais l’apprendre. Je poussai un long soupir, essuyant mes larmes d’un revers de manche.

« Merci… Je… je ferais de mon mieux, je vous le promets… Pour… Pour lui… »

« Je n’en doute pas un instant. Je veux que tu saches également… Daniel était un membre à part entière de cet institut. Un professeur et plus encore. Même si il n’y aura pas de corps, nous ferons une cérémonie ici et dresserons une stèle à sa mémoire dans le parc. C’est là que sa place se trouve, tu ne penses pas ? Auprès des siens. »

« Oui… Oui, c’est ça… Merci… »

« Ne me remercie pas… Je vais te laisser te reposer. Dors ici ce soir, tu retourneras dans ta chambre demain matin. Si tu as besoin de quoi que ce soit, fais le nous savoir. Tu n’es plus seule, Enora. »


Je hochai docilement la tête, le regardant sortir de l’infirmerie. Je me glissai sous mes doigts, ravalant mes sanglots. Même si tout ce que venait de dire le professeur était vrai, cela ne pouvait calmer ma peine. Ma douleur. Mon désespoir.


Dernière édition par Enora Lacourt le Sam 15 Mar - 15:05, édité 2 fois
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Enora Lacourt-Bourdieux
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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeVen 14 Mar - 22:28

CHAPITRE II : Douleur.




2 Mai 2013 — 09 : 22 a.m. — Dortoir des filles.

J’observai mon reflet dans le miroir. Qui était la copie, qui était l’originale ? Cette image de moi-même qu’il semblait renvoyer était plus brillante et plus réelle que je ne semblai l’être moi-même. Le réveil n’eut pas besoin de sonner car je n’avais pas dormi de la nuit, trop marquée encore par cet événement qui avait comme détruit ma vie. Aujourd’hui, nous devrons se souvenir de lui et lui dire au revoir, définitivement. Je poussai un soupir tandis que cette pensée venait assombrir ma mine déjà marquée par les jours passés. J’avais l’impression de n’avoir plus que la force de me tenir debout, le reste de mon être m’ayant été arraché de force par un facteur inconnu. Brisée. Voilà comment je me sentais, comment je semblais être devenue. Combien de temps cela durerait ? Toujours d’avantage de questions qui tourmentaient mon pauvre cerveau déjà noyé dans sa propre incertitude des choses. Perdue.

Quelqu’un frappa à la porte. Trois coups secs auxquels je n’avais plus à dire qu’il fallait entrer. Je restais aussi silencieuse qu’immobile tandis que la lourde porte s’ouvrit sur un fauteuil roulant et son propriétaire. Je n’avais pas à le regarder. Mon regard restait fixe et droit dans ce miroir que j’aurais voulu voir traversé par des lignes qui l’auraient déchiré de part en part. Mais telle n’était pas ma capacité. Je me devais de rester impuissante autant que meurtrie. La voix de l’homme s’éleva dans l’espace confiné qu’était ma chambre. Mon cerveau perçut les informations principales de cette courte phrase qu’il venait de m’adresser. Je poussai un long soupir avant de me lever sur mes deux jambes. Déjà, je vacillai. L’envie de reculer et de me rasseoir, de rester ici, dans l’obscurité, me donna envie. Cependant, aussi droite qu’un tronc d’arbre, avec un pas mécanique, je sortis de cette pièce pour affronter cette longue et douloureuse journée.


2 Mai 2013 — 09 : 34 a.m. — Parc de l’Institut.

Assise sur ma chaise, j’avais déjà l’impression d’être là depuis des heures. Je fixai inlassablement cette dalle de marbre sur laquelle demeurerait le nom de cet homme qui m’avait aimé, protégé, élevé, aidé et même avec qui j’avais partagé ma vie durant quelques années. Mon souvenir de mon arrivée à l’institut me rattrapa. Il avait été là dès mes premiers pas, partageant déjà rires et boutades sur des sujets simples et décontractant. Il m’avait permis de trouver mes marques rapidement, faisant rapidement sa « fille ». Ernest n’aurait jamais croisé ma route sans Daniel Hopes. Et plusieurs fois, je n’aurais pas pu croire l’avoir perdu si je n’avais pas été là.

Le professeur Xavier parlait encore et encore, tâchant de glorifier la mémoire de cette homme que les présents avaient connus dans tous ses états. Je l’avais vu aimable, drôle, plaisant, professeur… Je l‘avais également connu dur, froid avec ses instincts de tueur qui dormaient au fond de lui, le rongeant à petit feu, plus encore qu’il ne fallait. Mais je l’avais compris, j’avais tâché de toujours lui plaire, de toujours le rendre plus fière de moi qu’il ne le fallait. Mes études, ma mentalité… Tout avait été fait pour le rendre plus fier et plus heureux. Je l’avais accepté avec joie, bien sur. Cependant, aujourd’hui, alors que nous enterrions sa mémoire, tout ceci semblait ne plus avoir aucun sens. Tout ce que j’avais entrepris pour lui, pour moi, pour nous. Tout ceci semblait s’être envolé dans un battement d’espoirs insensé que nous avions.

Je demeurais assise. Je n’avais même pas prêté attention à l’entourage que j’avais. Quelle importance ? Rien ne pourrait le ramener à la vie. Alors pourquoi devrais-je prêter attention à ceci, à ceux qui étaient venus lui rendre hommage et ceux qui demeureraient absents. C’était tout à fait inutile. Je pouvais, qui plus est, deviner aisément qui se tenait près de moi. Amy, Caitlyn, Paladin… Tout comme je savais pertinemment qu’Ernest avait dû sécher cette tâche. D’autres dont l’existence m’avait peut-être échappée jusque là.

Le professeur m’avait demandé si je voulais ajouter un mot durant la cérémonie. J’avais refusé. Il y avait tant de choses que j’avais à dire mais qui ne pourraient jamais sortir du fond de ma gorge. Je me sentais incapable de me livrer en pareille journée. Je ne serais qu’une coquille vide. Mes parents m’avaient proposés de rentrer dès qu’ils avaient appris mais j’avais également refusé. Je voulais me retrouver seule. Seule et silencieuse, ainsi serait mon deuil. Il fallait que je le porte. Je serrais d’avantage la montre qui se trouvait dans ma main gauche à tel point que mes articulations blanchirent. Sans réellement savoir pourquoi, mes larmes se remirent à couler le long de mes joues. C’était trop dur. L’écroulement de mon monde sans que je n’ai pu m’y préparer.

Finalement, l’appel apaisant de mon nom me fit relever mes yeux rougis vers le professeur. C’était maintenant. Maintenant que je devais dire au revoir, que je devais commencer cette longue route vers l’apaisement. Mais étais-je prête à tout cela ? Je me levai de manière bancale, cherchant à chaque seconde à retrouver mon équilibre. Finalement, j’y parvins et je m’avançai vers la stèle polie et parfaite. Une rose blanche à la main, je m’arrêtai devant cette dernière, la fixant de nouveau de mon air vague et perdu. Je pris une longue inspiration, retraçant dans ma mémoire chaque souvenir que j’avais de Daniel, cherchant à rattraper ceux que j’aurais pu oublier. Finalement, je déposai la rose pure sur la dalle et me recueillie encore quelques précieuses secondes. Quand, enfin, je quittai cet espace qui semblait sacré, mon esprit tenta de prononcer un dernier mot, un dernier murmure à celui de mon défunt père. « Adieu ».


2 Mai 2013 — 10 : 51 a.m. — Dortoir des Filles.

Allongée sur mon lit, mes larmes ne pouvaient plus s’arrêter de couler. Il me fallait du temps. La douleur ébranlait mon être de toutes parts, me brisant plus encore que je ne semblais l’être déjà. Le poids que j’espérais voir partir avec cet instant passé semblait s’être alourdi de quelques tonnes, m’écrasant la poitrine, me brisant les os, déchirant ma chair. Le pouvoir d’Alexandre semblait soudainement le bienvenu dans pareil instant. J’aurais aimé mourir, suivre dans la tombe cette personne qui semblait mériter qu’on la suive qu’importe ou qu’il soit.

Des coups timides retentirent contre la porte. Je cessai immédiatement de pleurer, me tournant vers la porte que je pensais voir s’ouvrir quelques instants après ces coups. Cependant, rien ne se passa. Ce n’était pas Charles Xavier. Mes sourcils se froncèrent et je me levai, déterminée à envoyer promener quiconque me dérangerait durant tout ce temps. Mais mon idée fut stoppée par mon incapacité à reconnaître cet homme de grande taille et au costume formel. Malgré son air gêné, il semblait très professionnel et se tenait debout avec une droiture sans faille.

« Enora Lacourt ? »

Je hochai la tête, toujours avec des gestes mécaniques particulièrement peu distingués. L’homme me tendit un petit bout de papier, une carte de visite.

« Je me nomme Jarvis… Je doute que Daniel n’ait eu l’occasion de vous parler de moi… »

Je m’éclaircis la gorge pour décrocher mes premiers mots depuis quelques jours.

« Je… Il ne m’a jamais parlé de vous mais il vous a déjà eu au téléphone quand il était à côté de moi… »

Cette réponse parut convenir à cet homme. Ses yeux se portèrent de nouveau sur moi et je captais l’intensité de son regard.

« Le moment est très mal choisis, j’en conviens… Mais je tenais à vous signaler que nous serions dans l’obligation de nous revoir concernant la… Succession de Daniel. »

Je cillai légèrement, chassant une nouvelle larme de mon œil gauche. Succession ? Que voulait-il dire exactement ? Il semblait comprendre mon désarroi autant que ma peine et n’insista pas.

« Vous n’aurez qu’à m’appeler quand vous vous sentirez prête à aborder le sujet. Cela peut attendre quelques semaines, ne vous inquiétez pas. Je vous présente mes condoléances, mademoiselle Lacourt. »

Il baissa la tête en signe de respect et quitta le seuil de ma chambre. Je refermai la porte, soudainement intriguée autant qu’écœurée. Quelle succession ? Et quel toupet de venir me parler de pareille chose en une telle journée ! Je jetais rageusement la carte dans le tas de carton qui demeurait encore pleines de mon début de déménagement du BAM. Puis, laissant la douleur me saisir les tripes, je repris place sur mon lit, attendant alors que les heures passent, effaçant alors ma peine. Du moins, je l’espérais.
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Enora Lacourt-Bourdieux
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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeSam 15 Mar - 15:00

CHAPITRE III : Deuil.




3 Juin 2013 — 08:39 a.m. — Dortoir des Filles


Cela faisait un peu plus d'un mois. Un mois qu'il avait été enterré. Un mois que tout ceci avait chamboulé ma vie. Un mois de peine, de douleur. Comme une plaie béante dans ma poitrine qui ne pouvait se refermer. Comme un poison doux qui pouvait s'écouler encore et encore dans mes veines, sans jamais trouver d'antidote ni pouvoir enfin s'en débarrasser. Un mois de torture, de cauchemars, d'insomnies et de maux mal soignés. Pourtant, beaucoup s'étaient inquiétés sur mon sort. Icare, Amy, Caitlyn, le Professeur. Ils étaient tous venus me voir, avaient cherché à me soutenir, à me guider. Cependant, ils savaient tous que c'était à moi de faire le pas pour me relever. Trouver la force de le faire. La décision de pouvoir le faire me revenait à moi, et à moi seule. Tenter de vivre avec cette douleur pour avancer et puis, pouvoir faire mon deuil. Je le savais, mais je ne voulais pas y arriver… Jusqu’à aujourd’hui.

Pourquoi maintenant ? Je ne pouvais le dire. Mais contrairement aux autres matins qui avaient pu succéder durant ce long mois, j’ouvris les yeux en ayant cette incroyable impression que le poids qui m’étouffait et qui m’empêchai de me lever depuis tout ce temps s’était envolé.. Je sortis de mes draps, vêtue de ce T-Shirt trop grand que je mettais pour dormir. Je n’étais pas véritablement déboussolée mais plus apeurée par ce réveil à la fois brutal et doux. Je m'avançai vers le miroir de la chambre d’un pas qui se voulait presque normal. D'une main frêle, je replaçai certaines mèches de mes cheveux derrière mes oreilles. Et alors, je fis quelque chose qui me surpris. Je souris à mon reflet. Oui. Aujourd’hui, c’était parfait.

Je me rendis compte alors de la faim qui faisait gronder mes entrailles. De mon état physique amaigri et sale. Manger fut ce réflexe primitif que j’eus dans un premier temps. Poussant un long soupir, je poussai prudemment la porte de ma chambre, guettant si quelqu’un se trouvait ou non dans le couloir. Je ne tenais pas particulièrement à me faire remarquer, je comptais garder ces précieuses minutes pour moi. A pas de souris, je me rendis dans la cuisine de l’institut qui se trouvait être vide. Un coup d’œil à l’horloge me fit comprendre que ce n’était pas à cette heure là que je risquais d’être dérangée, la plupart des élèves devant certainement se trouver en cours. Alors, je fis le tour de ce qui s’y trouvait, chaque aliment me donnant plus envie que le précédant. Finalement, je finis par me préparer des tartines de beurre de cacahuète ainsi qu’un grand chocolat chaud. J’avais mis ma faim de côté bien trop longtemps pour pouvoir m’abstenir d’avantage dans ce jeun. A grandes bouchées, je mangeai avec délice ces tartines et bus avec une certaine délectation cette boisson qui vint réchauffer mon être.

Intérieurement, je ne cessai plus de réfléchir, de penser aux raisons qui m’avaient finalement fait sortir de ma chambre. Était-ce la faim ? Ou simplement le choix d’enfin avancer dans la vie, comprenant que celle-ci n’était pas finie. Je n’en savais trop rien, mais il était clair qu’un déclic avait eu lieu. Aujourd’hui, la mort de Daniel semblait ne pas m’affecter, ne plus me faire pleurer. Peut-être l’heure était-elle enfin venue de me relever, d’avancer.

Je finis ma dernière tartine et pris soin de ranger ce que j’avais sorti. Puis, toujours telle une souris, je regagnai ma chambre. Celle-ci était sombre et refermée sur elle-même. Je ne la voyais plus comme un cocon protecteur mais comme une cellule de laquelle il fallait que je m’échappe à tout prix. Alors, en grandes enjambées, je me précipitai vers la fenêtre et tirai sur les rideaux de toutes mes forces. Si la tringle résista, les anneaux finirent par céder et le lourd tissu finit sa chute sur le sol. La lumière m’éblouit, me forçant à fermer les yeux. Je fis de même avec le second rideau, le jetant à terre avec cette force qu’il me restait. Puis, d’un geste ferme, j’ouvris la porte fenêtre et laissai l’air entrer dans la pièce, balayant mon être. Je pris une profonde inspiration, pensant soudainement que tout mon être pourrait se laver d’une telle chose. Puis, je me retournai, contemplant ma chambre dans une telle lumière.

Je poussai un long soupir, tandis que mon regard se posa sur ces cartons. Les cartons. Ceux de l'appartement du BAM que j'avais dû aller faire peu après la mort de mon tuteur. Ils étaient intacts. Je n'y avais pas touché depuis qu'ils avaient été déposés ici. C'était comme si je ne les avais même plus remarqués, comme s’ils avaient été dotés de cette capacité à se rendre transparent. Et c'était avec appréhension que je les regardai à présent. Ces cartons pourraient me ramener violemment dans mon lit, avec ces envies d'oubli et de bonheur impossible à obtenir. Mais en même temps, la curiosité m'entraîna vers eux et me fit les ouvrir. La prudence était de rigueur, comme s’ils pouvaient être piégés. Les emmenant un à un sur mon lit, je commençai lentement à les disséquer. Le premier contenait en grande partie des vêtements. Pas les miens, les siens. Un à un, je les observai, me rappelant à quel moment il pouvait les avoir porté. Un léger rire m'échappa quand je retombai sur le costume que je le soupçonnais d'avoir porté pour aller à un rendez-vous galant. Sans réellement m'en rendre compte, je les portai tous à mes narines pour m'imprégner de cette odeur qui était la sienne. Pour pouvoir m'en rappeler. C'était comme se jeter dans ses bras de nouveau. Ressentir cette sensation.

Des affaires, en vrac. Voilà ce que ces mystérieuses boites renfermaient. Certains objets trouvèrent leur place dans ma chambre. Enfin, je voulais que cette pièce soit mon chez moi, mon vrai cocon. Et cela ne se traduisait pas seulement par redécorer la pièce avec mes propres affaires où celle de l’appartement. Non, il s’agissait également d’un nettoyage par le vide. Prenant des affaires, déchirant des papiers, je commençai ma longue route vers cette lumière qui me réchauffait tendrement la peau en remplissant ma poubelle à grande vitesse. Certains objets présents dans les cartons y trouvèrent leur place avec une vitesse incalculée. D’autres restèrent dans leur carton, rejoint par d’autres objets, trouvant plus sage de jeter d’abord un bon nombre de choses inutiles et futiles.

Combien de temps cela me prit ? Je n’en avais pas la moindre idée. Le temps semblait être une notion qui m’échappait totalement à présent et je savais que je ne pourrais le rattraper. Avec rage, j’arrachai tous ces articles de journaux qui concernaient Ernest et qui étaient restés là durant tout ce temps. Ce temps là était révolu. Ernest avait fait ses choix, Daniel avait fait de même… Il était temps pour moi d’avancer pour moi et dans la direction que je souhaitais. J’allumais mon ordinateur, presque surprise de voir l’écran s’allumer. Le temps qu’il se lance véritablement, j’ouvris un autre carton. Celui là contenait des affaires personnelles. Celles de Daniel. Je ne trouverais nul portefeuilles ou passeport, tout ceci ayant évidemment été réduit en cendres avec lui. Cependant, certains documents se trouvaient présents. J’y jetais un rapide coup d’œil, sans réellement souhaitant comprendre de quoi il retournait. Puis, je me saisis de son agenda. Feuilletant rapidement les pages, je souris en repérant mon nom, çà et là. Puis, mon regard se posa sur un autre nom. Jarvis. Mes yeux s’écarquillèrent et je refermai le précieux manuscrit en le claquant, le posant alors sur mon lit. Sautant sur mes pieds, je me dirigeai vers le reste des cartons qui se trouvait là, à la recherche de cette carte de visite que j’avais eu le jour de l’enterrement de Daniel.

Je finis par mettre la main dessus. Je m’assis sur la chaise, en face de mon ordinateur. Qu’avait-il dit déjà ? Je savais que je devais le rappeler mais tout semblait confus dans ma tête. Je me félicitai déjà d’avoir su reconnaître ce nom et me rappeler de l’endroit où j’avais jeté la carte. La mine soucieuse, je ne relevai le chef qu’après le bip sonore que m’adressa mon ordinateur. Mes mails s’ouvrirent et je compris la raison de cette alarme. Mes parents semblaient inquiets, Lucas également.

« Merde ! »

Je pris le temps de lire chaque message un par un, constatant à travers ma lecture que le professeur Xavier leur avait donné de mes nouvelles quand j’en semblais bien incapable. Me plaçant devant mon clavier, je cherchai les mots qui me permettraient de pouvoir y répondre, sans pour autant y arriver. Ravalant un grognement, je me relevai et attrapa alors de quoi me laver. Puis, continuant ce nettoyage de mon être, je pris une longue douche brulante, ressentant alors chaque goutte d’eau sur ma peau. Quand celle-ci semblait être trop chaude, mon bouclier venait recouvrir mes bras, tel une seconde peau. Je ris légèrement devant cette réaction. Finalement, je ne me contrôlai toujours pas parfaitement et il semblait que mon pouvoir ne cesse de m’étonner de jours en jours. Quand enfin, je semblai parfaitement lavée de toute cette peine, je m’habillai rapidement avant de sortir de nouveau de ma chambre. D’un pas assuré, je marchai vers le bureau du professeur.


3 Juin 2013 — 11:22 a.m. — Parc de l’Institut.

Je traversai la pelouse, sachant exactement où je voulais me rendre. Le professeur m’avait demandé si je souhaitai être accompagnée mais j’avais refusée. Seule. Je devais faire cela seule. Je finis par m’arrêter devant cette fameuse stèle de marbre gris. Gris. Voilà une couleur qui semblait définitivement appropriée à cet homme. Je m’agenouillai avec une certaine délicatesse, laissant le vent soulever mes cheveux. Puis, je poussai un nouveau soupir. Je lus plusieurs fois le nom inscrit, gravé dans cette roche. Puis, un léger sourire apparut sur mes lèvres.

« Je dois te sembler… Effrayante de là où tu es… »

Mes traits tirés et ma maigreur apparente m’avait moi-même apparut comme monstrueux lorsque je m’étais observée dans une glace. Mon ton se fit doux, presque murmure.

« Tu n’aurais pas voulu ça pour moi, je le sais… Mais comprends que c’est arrivé de manière trop brutale pour que je puisse essayer de comprendre ce qu’il se passait véritablement… Je ne sais même pas pourquoi aujourd’hui me semble différent de ces autres longues journées. Mais je comprends aujourd’hui…  »

J’adressai un petit regard au ciel où des oiseaux passèrent en nuée sauvage. Le vent se leva, faisant bruisser les arbres d’une réponse incompréhensible et forçant l’herbe à se plier dans une dans endiablée. Mes yeux se reposèrent sur la dalle.

« Je vais partir… Non. Je dois partir. Quelques temps. Je ne sais pas exactement quand je reviendrais, mais j’ai trop de choses à régler. Mes parents… Mes parents biologiques sont inquiets pour moi et ils me manquent… Il faut que je retourne en France, que je renoue avec moi-même… Je me suis perdue, Daniel. Je suis incapable d’expliquer ce que je fais là, à l’heure actuelle. Pourquoi je persiste à rester dans ce lieu qui me ronge. Alors je dois partir. »

C’était déchirant autant que pathétique. Les larmes glissaient de nouveau sur mes joues et je reniflai péniblement pour tenter de reprendre un peu de décence. Le professeur était en train de me décrocher le premier billet d’avion qu’il le pourrait à direction de l’Europe. Je n’aurais qu’à faire un semblant de valise et partir à l’aéroport. D’ici quelques heures, je serais de retour sur ma mère patrie. Je me relevai de terre et époussetai rapidement mes genoux.

« Je vais également devoir faire un rapide détour en Angleterre. Jarvis souhaite me voir, une histoire de succession. Je ne sais pas encore ce qui m’attend là-dessus, mais je suis persuadée que tu avais encore trop de secrets pour moi. Alors je veillerai à prendre soin de ceux que tu ne souhaitais pas dévoiler au monde… Je reviendrais, tu peux en être sûr. »

Je tournai alors les talons, retournant vers l’Institut comme un héro qui accepterait enfin sa destinée.
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Enora Lacourt-Bourdieux
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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeJeu 22 Mai - 16:20

CHAPITRE IV : Famille.

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20 Juin 2013 — 07 : 18 a.m. — Plage de Nantes

Mes orteils chatouillaient la surface du sable humide, venant créer un désordre inconsidéré dans cette surface plane. J’étais assise sur un petit rocher. L’air marin me faisait le plus grand bien et voilà des années que je n’étais pas revenue ici. Ce retour aux sources autant forcé que désiré me faisait le plus grand bien. Voilà des jours que je n’avais plus versés de larmes et que je pouvais sourire. Et pourtant, certaines choses restaient toujours dans mon esprit, allant jusqu’à inhiber certaines de mes émotions et m’empêchant de vivre, tout simplement. Je faisais encore mon deuil et mes parents l’avaient compris. Ils avaient rendu la chose plus facile, m’avaient aidé du mieux qu’il le pouvait et je ne pouvais que leur être reconnaissante. Une vague vint doucement me caresser les pieds, refroidissant mon être de manière quasi instantanée. La matinée était douce et promettait une belle journée, mais les températures restaient fraiche à une heure si matinale. Le soleil s’était élevé dans le ciel, caressant ma peau de ses rayons orangés et m’éblouissant de son aura brulant.

« Je savais que je pourrais te trouver ici… »

Je tournai la tête, haussant les sourcils. Mon père se tenait là, à mes côtés. Je lui adressai un léger sourire tandis qu’il prenait place à mes côtés.

« Petite déjà, c’est ici que tu venais te ressourcer. Tu disparaissais au milieu de la nuit et, par la fenêtre, nous te retrouvions ici chaque matin. »
« Je m’en rappelle… Combien de fois maman a pu venir me chercher en hurlant qu’elle était morte d’inquiétude alors qu’elle savait toujours que c’était ici qu’il fallait vérifier en premier. »


Nos rires se rejoignirent durant quelques secondes, nous remettant en mémoire ces instants aussi précieux que j’avais finalement pu les oublier. Puis, une sorte de gêne vint se placer entre nous. Mon regard se porta au loin et je ne savais soudainement plus quoi dire, attendant tout simplement que mon géniteur prenne la parole.

« Tu sais… Ca nous a fait bizarre, à ta mère et moi, quand tu es partie. Tout semblait si… Précipité. Nous avons laissé faire car nous avons toujours eu confiance en toi. Et puis, un jour, un homme vient frapper à notre porte. Daniel Hopes. »

Je tournai la tête vers lui. L’entendre prononcer son nom était à la fois rassurant et blessant. Mais il était vrai que Daniel avait eu l’occasion de les rencontrer. Quand j’avais fini entre quatre murs, il avait pris le temps de passer par ici afin de mettre mes parents au courant de cette situation gênante dans laquelle je me trouvais et, ensemble, ils avaient pris la meilleure décision qu’il puisse être.

« Quand il nous a expliqué qu’il allait devenir ton tuteur légal aux États-Unis, je dois t’avouer qu’une certaine jalousie m’a traversé… »
« Papa… »
« Non, laisse moi terminer. Ta mère et moi, ainsi que Lucas qui était présent, nous avions tous compris que ce lien qui vous reliait l’un à l’autre était fort. Très fort. Il faisait partie de toi, il était comme un membre de ta famille à part entière. Je m’en suis presque voulu de ne pas t’avoir accompagnée à New-York, de t’avoir laissée partir seule car, finalement, nous avons eu ce sentiment d’avoir été placés derrière. Tes nouvelles se faisaient de moins en moins régulières, nous n’avions tout simplement aucune idée de si tu étais encore en vie, de l’avancée de tes études… Et dans le peu de nouvelles que tu nous laissais avoir, tu ne parlais toujours que des mêmes choses. »


Je baissai le regard et la tête. Comment pouvais-je nier ? Il avait raison sur toute la ligne. Je n’avais pas renié mes origines, je les avais cachées sous ce nouvel état de mutante que je m’étais trouvé. Avais-je été égoïste ? Je ne me sentais pourtant pas coupable. Garder cet équilibre à distance avait été plus compliqué que ce que j’avais pu imaginer. Mes racines semblaient avoir été tirées dans tous les sens jusqu’à être passablement arrachée de mon être et enfouie dans le sol. Les paroles de mon père sonnaient comme des reproches voilés. Et pourtant, il posa ses mains sur mes épaules, me serrant doucement contre lui.

« Nous t’aimons, Enora. Nous avons accepté la situation car nous savions que nous pouvions être fiers de toi, comme Daniel Hopes l’était. Tu as créé une grande famille autour de toi qui, aujourd’hui, est fière d’exister. Ne lâche rien de tout ça. Daniel avait confiance en toi comme tout père se doit de le faire. J’ai confiance en toi. Prends le temps qu’il te faudra, et avance. Je ne veux pas que tu reprennes simplement ta vie où tu l’as laissée, mais je souhaite que tu puisses devenir aussi fière de toi que nous le sommes tous. »

Je ne répondis pas. Il n’y avait rien à répondre et mon père le savait. Il posa un baiser sur ma temps avant de se lever et de s’en retourner de là où il était venu. Je gardais les yeux posées sur la mer, sur cette eaux glaciale autant que libre et indomptable. Jetant un coup d’œil à gauche, puis à droite, je me re-concentrai sur cette eau qui venait s’écraser contre mes pieds. Puis, d’un simple mouvement du doigt, je fis apparaître un champ de force sous l’eau. Nacré, l’eau donnait à son teint argenté une lueur encore plus incroyable que d’ordinaire. Puis, la sphère ronde se creusa, se transformant en véritable bol qui finit par sortir de l’eau. Voilà une chose que je n’avais encore jamais faite. Si j’avais déjà constaté que mes champs de force pouvaient être plus matériels qu’ils pouvaient le sembler, jamais je n’aurais pensé qu’ils pouvaient également agir de la sorte.

Relâchant ma concentration, le champ de force se volatilisa et l’eau tomba. Souriante, je me retournai.

« Papa, tu as vu ? »

Mais mon géniteur était déjà bien loin. Je laissai un soupir transparaitre ma déception, le sentiment de rester incomprise pour ma famille m’envahissant soudainement. Ce côté de ma nature leur était inconnu et j’allais devoir leur montrer que j’avais su faire mes preuves. Mon père avait raison, il était temps d’aller de l’avant. Je me remis sur mes pieds et pris le chemin qui me permettait de rentrer chez moi. Ce faisant, je pris mon téléphone dans ma poche et lançait un appel à un contact que j’avais trop longtemps ignoré. La sonnerie retentit deux fois avant qu’il ne décroche, se présentant de sa voix grave.

« Bonjour Jarvis. Enora Lacourt. Vous vous souvenez de moi ? … Bien. Je… Je pense qu’il est temps que nous parlions. Je suis en France, à Nantes. Je vous atends. »
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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeVen 23 Mai - 13:57

CHAPITRE V : Héritage.

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17 Août 2013 — 10 : 01 a.m. — Londres

Je poussai un long soupir tandis que la berline noire me conduisait à bon port. Dans pareil engin, je savais que je ne risquai pas ma vie tant il semblait invincible. Et pourtant, c’était bien dans une voiture similaire à celle-ci que Daniel avait trouvé la mort. Le regard tourné vers l’extérieur, j’admirai Londres que je découvrais pour la première fois. J’aurais aimé que ce soit dans d’autres circonstances, mais on choisit rarement ce genre de situation. Vêtue d’un chemisier blanc, d’une jupe noir et d’un blaser aux manches retroussées, je ne cessai de me dire que j’avais tout de cette femme d’affaire que l’on avait voulu faire de moi. Cependant, pour une fois, c’était mon choix de paraître aussi adulte, aussi élégante.

« Tout ira bien mademoiselle. Le notaire va simplement vous énoncer les différentes closes de la succession et vous pourrez ainsi repartir avec le ou les biens qui vous concernent. »
« C’est bien cela qui m’inquiète. Je ne vois pas ce que Daniel aurait pu me laisser. »


Je me tortillai de nouveau à ma place. Jarvis m’observait, un léger sourire aux lèvres, presque amusé de me voir dans cet état. Après mon coup de téléphone, il était venu à Nantes en l’espace de quelques heures et ce, pour quelques jours. J’avais voulu savoir véritablement de quoi tout ceci retournait mais il avait été incapable de m’en dire plus. Il savait juste que j’avais été mentionnée dans le testament de Daniel et que ma présence à Londres pour plus d’informations était de rigueur. J’avais donc cédé et préparé mes affaires pour Londres, laissant un mot à mon ami Lucas que je n’avais toujours pas revu depuis mon retour. Je passai donc mes journée, accompagnée de Jarvis Cain, à remplir de la paperasse et à essayer de comprendre où tout ceci allait me mener. Puis, nous avions réussi à obtenir un rendez-vous auprès du notaire pour, enfin, apporter une conclusion à tous ces évènements.

La voiture s’arrêta devant une bâtisse à l’architecture assez ancienne. On m’ouvrit la portière et je descendis du bolide sur la pointe de mes escarpins. Un homme vint m’accueillir, me tendant une main que je serrai doucement.

« Mademoiselle Lacourt ? Je me présente, Maître James Oswald. C’est un plaisir de pouvoir enfin vous rencontrer. »

Son accent était typiquement anglais et je me contentai de sourire en hochant légèrement la tête tandis qu’il nous invitait à le suivre. Une enfilade de couloirs fut l’étape suivante, aboutissant sur un large bureau à la décoration aussi pompeuse qu’une galerie de musée. Le notaire m’invita à m’asseoir et j’obéis dans le silence.

« Tout d’abord… Je tiens à vous présenter mes condoléances. Je suis heureux de pouvoir constater que vous allez bien et que nous allons pouvoir désormais discuter de tout ceci. Je dois cependant vous avouer que je vous imaginais un peu plus âgée. »
« J’ai l’âge qu’il faut pour être responsable de mes mots et mes actes, monsieur. »


Le notaire haussa les sourcils tandis que Jarvis se redressait sur sa chaise. Je n’avais pas de temps à gaspiller avec des politesses passées ou bien des préjugés avoués. Je pris conscience alors que je n’avais plus peur de prononcer ces mots, moi qui préférait toujours le silence à la franchise.

« Je… Bien… Je vais donc pouvoir vous expliquer de quoi il en retourne exactement… Daniel Hopes, par le présent testament, vous a tout légué, hormis une propriété en Italie et un montant monétaire de plusieurs centaines de milliers d’euros. Parlons en euros, vous êtes Française. »

Je haussai les sourcils, attendant alors qu’il aille plus loin dans son raisonnement. Savoir que Daniel ait pu « tout » me léguer, sans pour autant savoir de quoi il s’agissait était à la fois alarmant et curieux. Si je savais qu’il m’avait toujours considéré comme sa fille, je savais aussi qu’il possédait une véritable descendance encore vivante et qui aurait pu mériter ce dû plus que moi. Alors pourquoi moi ? Voilà qui me sidérait.

« Vous êtes donc désormais la propriétaire d’un appartement Parisien, de divers comptes en banque dont le montant cumulé est de 5.865.458 €, d’une Ferrari noire immatriculée aux États-Unis et vous êtes également la nouvelle PDG de l’entreprise Timers, Industrie leader en recherche technologique des Industries de pointes dont le capital a récemment été estimé à plus de 40 millions de dollars. Enfin, tous les biens personnels de Daniel, non mentionnés ici, vous reviendront de droit. »

Son regard se posa sur moi et il ne dut pas être déçu du résultat. Bouche bée. Mon expression demeurait figée et mon cerveau semblait ne plus imprimer la moindre réponse. Plusieurs fois, l’envie d’exprimer mon désarroi arriva mais les mots restèrent coincés dans ma gorge. Finalement, je repris un minimum possession de mes faits et gestes pour pouvoir reprendre une figure quasi impassible, me redressant sur ma chaise. Le regard que j’adressai à Jarvis me fit comprendre qu’il était aussi surpris que moi, bien que je savais au fond de moi qu’il s’était toujours douté de cette situation.

« Je vous demande pardon ? »
« Je suis formel, mademoiselle Lacourt. Il suffit que vous signiez ce document et tout ceci sera à vous. »
« Mais… Je ne comprends pas… Jenny, elle doit bien avoir quelque chose également, non ? »


Ce nom sorti de ma bouche déclencha la surprise des deux hommes qui s’échangèrent un regard. Ainsi donc, il ne savait pas que j’étais au courant de cette jeune fille qui devait avoir mon âge et qui était le véritable sang de Daniel.

« Eh bien oui, elle fait partie des deux autres donations. »

L’argent était forcément pour elle. De plus, Timers avait appartenu à sa mère et elle devait posséder également l’héritage de cette dernière. Mais pourquoi remettre cette entreprise entre mes mains ? Quel était le message que Daniel cherchait à me remettre maintenant ? Je fermai doucement les yeux, réfléchissant à ce qu’il aurait pu me dire un jour, mais aucune parole ne semblait m’avoir préparée à ce genre d’évènement. Et pourtant, c’était Daniel qui m’avait envoyé dans une filière d’étude spécifique. Si à l’époque, tout ceci avait semblé insensé et juste pratique, tout semblait avoir un sens désormais. Les paroles de Daniel qui accompagnèrent ce choix me revinrent en mémoire. « J'aimerai t'inscrire à un programme particulier, un cours de communication et de management, diplomatie, rhétorique et Histoire politique. Je suis certain que tu pourrais devenir une communicante hors pair..je crois que tu es amené à faire de grandes choses ..pour nous. » A ce programme s’était ajouté de la gestion d’entreprise et divers autres modules qui m’avait plus et encouragé à poursuivre sur cette voie. Et à présent, tout ce chemin tracé venait d’aboutir sur sa destination. Depuis le début, c’était là l’intention de Daniel de me léguer cette entreprise. Pour quelles raisons ? Voilà un point qui demeurait flou. Pour le reste, les éléments se reliaient entre eux d’eux même. Merci Daniel…

Je pris une longue inspiration, ouvrant de nouveau les yeux. J’aurais aimé discuter de tout cela avec Jarvis mais je devais remettre cela à plus tard.

« Bien… Et puis-je savoir à qui la résidence en Italie a été léguée ? »
« Je.. Je dois vous dire qu’il m’est interdit, normalement, de vous dévoiler ce genre de choses mais au vu des circonstances et des conditions sur cette propriété… Elle doit être remise à Mademoiselle Amy de Lauro et à Mademoiselle Caithlyn Elioth au jour du 6 Juillet 2013. Malheureusement, au vu du fait que vous ayez en quelques sortes « bloqué » la succession, nous avons été dans l’incapacité de pouvoir prendre une telle décision, sans l’accord de l’héritier principal… »
« Voilà qui est fâcheux… »


Le 6 juillet 2013. Le mariage de Caitlyn et Amy. Voilà bien une chose que Daniel n’avait pu prévoir depuis fort longtemps. Une petite voix dans ma tête me hurlait de me méfier de tout le monde. Cependant, je finis par prendre le stylo qui avait été posé soigneusement devant moi et je signai le document.

« Toutes mes félicitations, mademoiselle. »
« Pour ce qui est de la donation à Caitlyn et Amy, je me chargerai personnellement de les mettre dans la confidence et de leur remettre les clés de leur bien. »
« Hum… D’accord. Quant à l’argent de mademoiselle Sparrow, elle ne lui sera remise qu’à sa majorité, d’ici quelques mois. »


Je hochai la tête et serrai de nouveau la main de l’homme avant de, simplement, tourner les talons et quitter le bureau. Je remontai dans la voiture en silence et attendit que Jarvis soit à mes côtés pour enfin reprendre la parole.

« Vous étiez au courant ? »
« J’avais des soupçons mais je ne savais pas de quoi il en retournait exactement. »


Je lui fis confiance devant la détermination qu’il avait mis à me répondre. Puis, je laissai un nouveau soupir faire par de toutes ces questions que je me posais.

« Otez moi d’un doute… Vous travailliez bien pour Daniel à Timers, n’est-ce pas ? »
« Tout à fait. Je pense pouvoir dire que j’ai permis l’expansion de Timers quand Daniel ne le pouvait pas, y comprit après sa mort. »
« Y compris la branche de l’entreprise qui s’occupe de la recherche sur les mutants ? »


Cette nouvelle révélation scotcha l’homme à son siège. Il m’observait maintenant comme si je pouvais encore cacher bien d’autres surprises de taille et pas forcément de bon augure.

« Commençons par être francs l’un avec l’autre, monsieur Cain. Daniel sembla avoir pris le temps de m’expliquer certaines choses et je ne pense pas que ce soit uniquement pour de jolis souvenirs. Partez du principe que, tout ce que vous auriez pu lui dire, vous pourrez désormais me le dire. »
« Dois-je comprendre que je garderai mon emploi à imers, mademoiselle ? »


Je lui adressai un large sourire avant de lui tendre la main.

« Des hommes comme vous sont rares et je ne doute pas un seul instant que vous aurez des choses à m’apprendre. Bienvenue dans mes affaires, monsieur Cain. Maintenant, si nous prenions la direction du siège de mon entreprise, pour voir de quoi il en retourne ? »
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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeDim 8 Juin - 22:02

CHAPITRE VI : Sœurs ?




14 Novembre 2013 — 4 : 17 p.m. — Londres

Jarvis m’avait prévenu du mieux qu’il avait pu le faire. Il ne voyait pas l’intérêt de cette rencontre mais je pensais tout le contraire. Ma curiosité l’avait emporté sur ma raison et je souhaitais plus que tout pouvoir enfin mettre un visage sur ce nom qui m’avait suivi durant ces mois. Étant restée à Londres afin de pouvoir mieux comprendre de quoi Timers retournait, j’avais fini par décider d’aller rendre visite à la seule autre personne qui aurait pu rencontrer et côtoyer Daniel si le temps lui avait été laissé pour le faire. Jennifer Sparrow. A quel point pouvait-elle ressembler à son arrière-arrière grand père ? Sur le plan juridique, tout semblait pouvoir nous éloigner tat par les générations passées que par nos vies respectives. Pourtant, à l’heure d’aujourd’hui, nous aurions pu être sœurs si le temps nous avait été donné pour le faire.

Je m’étais donc rendue dans cette école privée, accompagnée par Jarvis Cain qui semblait ne pas vouloir me laisser seule avec elle. J’ignorais purement et simplement la raison qui l’animait pour une soudaine protection vis-à-vis de moi et contre cette jeune fille de mon âge qui semblait tout ce qu’il y avait de plus inoffensif Cependant, lui accordant toute ma confiance, je m’étais contentée d’hausser les épaules devant sa demande pour m’accompagner. Nous patientions donc tous les deux dans un petit salon décoré de manière sobre et antique. Les meubles paraissaient anciens et donnaient, avec la décoration, un côté « vieillot » chic à la pièce. Seul un piano semblait avoir été déposé là, comme par oubli ou par contentement. Voilà donc à quoi ressemblait une école privée haute gamme ? J’étais soudainement heureuse d’avoir eu une scolarité normale.

Assise sur un canapé matelassé de couleur bordeaux, j’avais croisé mes jambes malgré la robe fourreau qui m’arrivait mi-cuisse de couleur verte sapin. Mes cheveux avaient été attachés soigneusement en une queue de cheval placée assez haute. J’avais posé ma veste beige à mes côté et remuait de manière rythmée mon pied en lévitation sur lequel trônait mon escarpin, à la semelle rouge, de couleur beige. J’attendais patiemment, soudainement anxieuse de ce qu’il pourrait arriver lors de cette rencontre aussi inattendue qu’improvisée.

Finalement, la porte s’ouvrit, attirant mon regard. Et elle entra. Une jeune fille aux cheveux noirs comme les plumes d’un corbeau. Elle était svelte, voire presque maigre. Son uniforme semblait réajusté un peu partout pour pouvoir se modeler parfaitement à cette minceur presque exagérée. Puis, mon regard se posa sur son visage doux. Sa peau était d’une teinte lunaire tandis que ses yeux brillaient d’une lueur bleue presque bouleversante tant la teinte était proche de celle de Daniel. Ses lèvres étaient magnifiquement dessinée et la beauté de cette jeune fille de mon âge ne tarderait pas à s’épanouir, j’en étais certaine. Ses cheveux encadraient parfaitement son visage, s’arrêtant en dessous de ses omoplates et agrémentés d’une franche à la droiture presque surnaturelle.

Elle adressa alors un regard froid à Jarvis avant de me dévisager à son tour, ce petit air supérieur marqué par un menton légèrement relevé et un regard glacial qui m’inspira cette peur incroyable que seul Daniel pouvait me mettre quand il rentrait dans une colère noire. Il n’y avait aucun doute possible sur le lien génétique et cela me rassura doucement.

« Alors quoi, Jarvis. Encore une assistante sociale ? A moins que vous ne soyez psychologue ? »

Insolent. Malgré son charmant accent britannique, le ton qu’elle avait avec son tuteur était d’une insolence sans pareille. J’en fus légèrement surprise, m’attendant d’avantage à une jeune fille silencieuse qui ne souhaitait pas parler d’elle. L’homme m’adressa un regard désolé avant de réprimander la jeune fille par la simple mention de son prénom sur un ton sec. Je comprenais maintenant beaucoup mieux les avertissements de Jarvis quant à cette rencontre et comprenait soudainement à quel point tout ceci allait s’avouer être compliqué. Je toussotai légèrement avant de prendre à mon tour la parole.

« Ni l’un, ni l’autre à dire vrai. Je m’appelle Enora, Enora Lacourt. Mais, assieds-toi, je t’en prie. »
« Je préfère rester debout. »


Je pris une profonde inspiration, cherchant à masquer de mon mieux ce malaise qui s’installait petit à petit en moi. Elle semblait être un véritable mur et je n’étais qu’une étrangère pour elle. Bon dieu, mais qu’avais-je cru imaginer ?

« Très bien… Je… Je suis ravie de pouvoir enfin te rencontrer, tu sais… »
« Pourquoi êtes-vous là ? »


Ses yeux m’observaient avec une intensité profonde et sa voix m’enchanta soudainement. L’envie irrépressible de lui répondre vint s’installer en moi et, malgré les apparences, c’était presque sous la contrainte que je lui répondis avec une franchise que je n’avais pas envisagé.

« Je suis là pour te parler de ton arrière-arrière grand père, Daniel Hopes. »

Sa mâchoire se crispa tandis que je savais que Jarvis m’observait avec attention. Jennifer s’avança et vint s’asseoir juste en face de moi. Elle était empli d’une grâce incomparable et semblait être capable de faire plier n’importe quelle échine rien que par la pensée ou par sa beauté. A moins que son caractère, aussi violent que pouvait l’être le cœur d’un volcan, transparaissait sur ses traits si beaux et gracieux et en faisait un titan capable d’abattre des montagnes rien que par un regard. J’avais capté toute son attention par cette réponse qui semblait être sortie de ma bouche sans même que je ne puisse la contrôler.

« Tiens donc… Apparemment, le temps est venu pour moi d’en apprendre plus, c’est cela ? Me voilà suffisamment... Âgée pour pouvoir entendre cette vérité ? »
«  Jennifer, s’il te plaît… »
« Jarvis, c'est inutile, je ne suis plus une enfant, surtout si vous osez me faire croire qu'elle est adulte. La seule raison pour laquelle vous viendriez me parler de cet aïeul aussi inconnu qu'il puisse l'être à mes yeux est qu'il n'est plus de ce monde. Mais je vous en prie, mademoiselle, dites-moi. Qui étiez-vous pour Daniel Hopes ? »


Son regard s’était braqué sur moi, flammes océaniques aussi endiablées que semblait l’être cette jeune fille. Et encore une fois, comme une obligation, je formulai la réponse sans aucune peur et malgré les insultes qu'elle formulai à mon égard et qui méritaient simplement que quelqu'un lui remonte les bretelles.

« Mon tuteur. »

Dans ma tête, je m'étais longuement entraînée à tourner une phrase correcte pour que la nouvelle soit moins directe à formuler. Cependant, elle avait balayé tout ça d'une manière que j'ignorais simplement. C'était comme si elle m'avait poussée à lui cracher le morceau. Et sa réaction fut aussi imprévisible.

Après m'avoir adressé un regard noir, elle éclata d'un rire froid et pourtant si pur. Un rire triste et empli d'ironie qui emplit la pièce de sa mélodie mortuaire. Jarvis se crispa à mes côtés, soudainement prêt à bondir pour une raison que j'ignorais. Le portrait que je m'étais fait de cette jeune fille bien élevé était erroné. Elle n'était ni simple à comprendre, ni même adulte comme je l'espérais. Elle était froide, distante. Un cœur de glace était placé dans son être qui brûlait pourtant d'un feu dévastateur. Elle me semblait soudainement dangereuse et la présence de mon nouveau bras droit avait quelque chose de rassurant.

Elle se pencha vers moi, un sourire mauvais sur le visage et un regard aussi supérieur qu'elle pouvait le faire.

« Écoutez-moi bien, Enora Lacourt. Vous n'êtes riens de plus qu'un titre juridique pour Daniel Hopes alors que le sang qui se déversait dans ses veines est le même que le mien. Je dirais que vous n'êtes âgée d'un an ou deux de différence avec moi alors n'essayez pas d'être cette adulte responsable quand vous vous retenez simplement de pleurer dès que l'on prononce son prénom. Nous aurions pu être sœurs, au lieu de cela, je resterai l'héritière de Daniel Hopes tandis que vous ne serez qu'un nom sur une feuille de papier que quiconque oubliera, avec le temps. Vous n'avez obtenu son affection uniquement parce que, d'après votre accent, vous êtes française et je peux me douter aisément que vous êtes également mutante. Je n'étais ni l'un, ni l'autre et c'est uniquement pour ça qu'il m'a rejeté. Alors vivez votre vie, mais faites le loin de moi. »

Elle se leva alors brusquement, le regard toujours fixé dans le mien. Puis, elle tourna les talons et se dirigea vers le piano. Je pris alors la peine de respirer longuement. Je n'avais pas bronché, buvant ces paroles qu'elle m'avait tout simplement craché à la figure. Je n'avais que l'intention de me plier à sa requête sans chercher à me dresser sur sa route. Encore une fois, je ne savais trop pourquoi, mais c'était mieux ainsi.

Le son du piano envahit doucement la pièce et Jarvis profita de la musique pour se pencher doucement vers moi.

« Tout va bien ? »
« Oui... Je... Je m'attendais juste à autre cho... »


Coupée dans mon élan, je relevai la tête et me hissai sur mes deux jambes. La musique. Cette musique. Malgré les quelques variations qu'elle pouvait apporter à celle que lui jouait, je reconnu l'air qu'il interprétait sur son piano avec toujours cet air de satisfaction quand il le terminait. Mon souffle se fit plus court tandis que des souvenirs me revenaient en mémoire. Comment...?

Les questions se mélangèrent à ces moments uniques que je pouvais avoir vécu avec celui qui avait toujours été là pour moi. Je sentis les larmes revenir. Ces larmes que je n'avais pas versées depuis un moment déjà. Mes mains tremblèrent tandis que je sentis la colère remonter le long de mes veines. Le sentiment qu'elle puisse le faire exprès me rendait folle. Je ne savais pas comment ni pourquoi, mais j'avais soudainement envie qu'elle disparaisse. Pour tous ces mots cruels qu'elle avait pu m'adresser sur un ton implacable que pour cet instant où elle réveillait cette peine que je pensai avoir enfermée. Oui, je voulais qu'elle n'ait jamais existé. Je voulais qu'elle s'arrête, que cette souffrance parte, que la douleur se taise...

« ARRÊTES ! »

J'avais hurlé. Elle fit taire le piano instantanément pour se tourner vers moi en m'adressant un regard satisfait. Je la détestais. Jarvis s'était levé et se tenait près qu'entre elle et moi. Cherchait-il seulement à la protéger ? Un coup d'œil rapide dans le reflet que m'envoyait le piano me fit comprendre pourquoi. Mes yeux éclataient d'une lueur verte surnaturelle tandis que trois sphères argentées tournoyaient autour de moi. Comment était-ce possible? La surprise les firent instantanément disparaître, me laissant avec ce masque d'étonnement et d'angoisse sur mon visage. De nouveau, mon regard croisa celui de Jennifer Sparrow et je pris la fuite.

Traversant l'école, je retournai à la voiture et m'assis sur le siège arrière. Mes larmes roulèrent sur mes joues, cette éprouvante rencontre encore trop récente pour que je puisse essayer de contrôler mes émotions. Mais mon incapacité à gérer mon pouvoir dans pareil moment m'inquiétait. Ce genre de problème ne m'était pas arrivé depuis mon arrivée à l'institut et voilà que je devais de nouveau y faire face.

Jarvis finit par me rejoindre, quelques longues minutes plus tard. Je savais qu'il se retenait certainement de me dire "Je vous avais prévenu". Cette fille avait le diable au corps et sa cruauté semblait dépasser ce que j'avais pu imaginer. Mais un détail me trottait toujours dans l'esprit.

« Jarvis... Êtes-vous sûr qu'elle n'est pas mutante ? »
« Eh bien... Elle n'a jamais montré aucun signe de pouvoir... Ce n'est qu'une enfant capricieuse, seule et qui s'est forgée une carapace dure comme le marbre. Pourquoi ? »
« Pour rien... Un détail inutile, certainement. Partons. Je ne veux plus jamais voir cette école ou entendre parler de Jennifer Sparrow. Vous vous chargerez de ce qui la concerne sans même m'en faire part. »


Il hocha simplement la tête avant de démarrer le moteur. Pour ma part, je tachai d'oublier cette sœur qui ne le sera jamais.
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Enora Lacourt-Bourdieux


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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeSam 2 Aoû - 22:24

CHAPITRE VII : Futur.




31 Décembre 2013 — 11 : 48 p.m. — Nantes

La joie. C’était un sentiment léger qui ne m’avait pas envahi depuis un certain temps déjà. Et pourtant, il semblait si évident de ressentir cette joie en cette soirée de la St Sylvestre. Une nouvelle année allait commencer d’ici quelques minutes et je pourrais laisser toutes les peines de 2013 derrière moi. Avancer. C’était le conseil que tout le monde me donnait. J’avais passé une bonne partie de la fin d’année avec Jarvis à Londres. Il m’avait expliqué diverses choses qu’il m’était nécessaire de savoir à propos de cette entreprise qui était mienne. Je savais bien qu’il n’osait pas encore tout me dire, me considérant certainement comme une jeune fille qui n’était pas encore prête à tout entendre. Cependant, il avait commencé à se montrer plus bavard dès lors que je lui avais réclamé des cours de tir. A croire que l’on devient adulte dans ce monde à partir du moment où l’on porte une arme. Je n’avais nul besoin d’en avoir une sur moi en permanence mais je préférais prendre les devants face à l’évolution des choses actuellement. Mieux valait être trop prudent, telle semblait être la véritable citation à suivre pour les habitant du monde entier. De plus, Jarvis avait souhaité me montrer lui-même quelques prises de corps à corps simple et efficace, juste au cas où. Cela me ramenait alors à mes entraînements avec Jubilation Lee qui avait été mon maître durant quelques séances de musculation et d’entrainement au combat à l’institut. Cela me manquait autant que cette X-Woman qui, sous ses airs durs et imperturbables, m’inspirait un grand respect.

Assise sur une couverture, je tachai de m’isoler du froid du sol du jardin de mes parents qui donnait sur la plage. On entendait déjà la foule qui se rassemblait, attendant le lancement des fusées qui viendraient illuminer le ciel. Je portai un lourd manteau qui me préservait du froid. La côte n’avait pas encore été touchée par la neige et c’était un soulagement pour nous. Lucas vint vers moi, le sourire aux lèvres et deux verres à la main. Je lui rendis son sourire tandis qu’il me tendait l’un des gobelets.

« Tiens. Cadeau de mon père qui tient à ce que l’on ne meurt pas de froid en attendant le feu d’artifice. »
« Hmmm… il faudra que je pense à le remercier de songer autant à moi, surtout si il me sert le meilleur punch de la ville. »


Je ris doucement tandis que mon meilleur ami s’installa à mes côtés. Voilà bien plusieurs semaines que nous n’avions pas parlés. Et peut être même plusieurs années que nous n’avions pas véritablement discutés comme nous avions l’habitude de le faire quand nous étions au lycée. La dernière fois que je m’étais livrée à lui, c’était quelques mois après mon arrivée à l’institut. Cinq ans s’étaient écoulés depuis et le silence qui vint se glisser entre nous était la preuve de ce temps où les mots avaient été bien trop absents. Je jouai avec mon gobelet plein de punch et toussotai légèrement avant de rompre enfin ce silence.

« Alors ? Qu’est-ce que tu deviens toi ? »
« Eh bien… Je suis à la fac. Médecine. J’ai mes partiels après les vacances. Je suis en troisième année et… Ca se passe plutôt bien. Comme quoi tout est possible, tu vois. »
« Wouah. Je dois avouer que je suis impressionnée. Ce n’était pas toi qui était incapable de disséquer une misérable souris sans que ça ne finisse en horrible bain de sang au lycée ? Rappelle-moi de prévenir tes patients le jour où tu exerceras… »


Pour toute réponse, j’eus droit à un léger coup de coude dans mon bras, suivi d’un rire léger. Je souris à mon tour, heureuse pour lui et à la fois envieuse de sa vie qui semblait si simple.

« Et toi ? Tu… Tu te remets de tout ça ? »

Nos regards se croisèrent. Le sien semblait inquiet et empli d’une certaine pitié que je n’avais jamais pu imaginer dans ses yeux. Je baissai la tête en poussant un long soupir.

« Ca va… Mieux en tout cas. C’est dur de garder la tête haute et de faire comme si tout allait bien certains jours tu sais… Et pourtant, il faut bien que j’essaie. Mes parents sont encore inquiets pour moi et je sais qu’ils transmettent de mes nouvelles au professeur. Qui sait… Peut être que Jarvis le fait, lui aussi et c’est quand tous ces gens se rendront compte que je vais mieux que je pourrais enfin reprendre ma vie en main. »
« Je sais tout ça. Mais toi, comment tu te sens. »


J’observai le ciel quelques instants. Voilà bien une question que j’avais cherché à esquiver depuis tout le temps que j’étais revenue ici. Car je savais trop bien comment j’allais au fond de moi. Mon meilleur ami semblait l’avoir ressenti, lui aussi, car il pointait du doigt la seule chose que j’avais gardé sous silence jusqu’alors.

« Vide. Je me sens… Vide. Je ne sais pas pourquoi je fais tout ce que je fais en ce moment. Pour me changer les idées, voir le monde, essayer de comprendre comment j’ai pu en arriver là. Mais je n’ai pas de but. Je ne vois pas où je vais, je suis totalement perdue. C’est comme rouler sur une route de campagne sans avoir de feux. Je suis aveugle et juste incapable de prendre des décisions par moi-même. Ou alors, je ne les prends que pour faire croire aux gens que je vais bien. »
« Alors pourquoi tu n’essaies pas simplement de te poser ? De prendre du temps pour toi et de réfléchir ? Depuis que tu es revenue en Europe, je n’ai réussi à te croiser qu’une fois, et encore, tu t’apprêtais à partir pour Londres. Tu vis à 200 à l’heure ! Comment veux-tu être capable de pouvoir prendre les bonnes décisions dans de telles circonstances ? »
« Mais si je réfléchis, alors… Je m’effondre, Lucas. Toute ma vie prend un tournant qui est beaucoup trop dur à suivre. »
« Installes-toi une direction assistée. »


Je ris doucement à sa remarque. Son humour m’avait manqué et me surprenait toujours un peu à chaque fois. Je lui adressai alors un regard presque désabusé de devoir supporter ses bêtises.

« Quoi ? »
« Je suis sérieux ! Tu sais, il y a une raison simple pour laquelle tu n’arrives plus à suivre. Tu n’as plus de but parce que tu ne sais même pas si tu en as jamais eu un. »
« Mais si, voyons, et tu le sais ! Mes études… »
« Tes études, que TU as choisi ? Non, Eno, écoutes, depuis que tu es à New-York, tu es tout simplement débordée par une multitude d’événements. Tu as traversé trop d’épreuves pour pouvoir t’estimer encore vivante. Tes études t’ont été soufflées par un homme qui était ton tuteur. Je n’ai rien contre lui, c’était un mec génial. Cependant, tu es juste incapable de reprendre possession de ton propre libre-arbitre. Tu es même incapable de savoir quelle boisson je devais t’amener quand l’ancienne Enora m’aurait énoncé un choix ridicule et farfelu. Reprends-toi ma vieille ou tu seras la personne la plus naïve et la plus influençable du pays. Et comme t’es mutante, en plus, je préférerais qu’on évite ce genre de conneries, okay ? »


Il laissa aller son verre à sa bouche et en but la moitié du contenu d’une traite. Je le sentais agacé. Moi, je l’agaçais. Voilà qui était nouveau. Mais je n’avais rien à redire à ce qu’il venait de me raconter, et c’était plutôt ça qui m’inquiétait. J’aurais dû lui faire ravaler chacun de ses mots par une remarque cinglante ou même lui démontrer de manière scientifique que ses arguments ne tenaient pas debout. Mais rien ne me vint en tête. Je subissais ces mots aussi durs que le marbre que mon meilleur ami venait de me servir sur un plateau. Je déglutis alors avec difficulté, presque certaine que les larmes ne tarderaient pas à faire leur entrée sur scène. Je les retins du mieux que je le pouvais, tout en reprenant la parole.

« Qu’est ce que je dois faire… »
« Pour commencer ? Avale ton verre avant que mon père ne se rende compte que tu n’es plus amoureuse de son punch. Merde, ça lui briserait le cœur je crois. »


J’obéis, souriant légèrement. Cependant, j’avais à peine bu deux gorgées du liquide à l’orange que je dus éloigner le verre, mon estomac hurlant à l’incendie.

« Oh la vache… J’avais oublié à quel point il était fort celui-là… »

Ma réaction fit exploser de rire mon ami qui manqua même de s’étrangler. Je me sentais alors légère et libre de pouvoir parler sans craindre d’être jugée. Et l’alcool n’était pour rien là dedans. Mon ami se retourna alors vers moi.

« Elles te plaisent vraiment tes études ? »
« Ça, tu peux en être sûr. Je crois que je n’ai jamais autant été attentive que dans cette filière. »
« Bon, alors le problème n’est pas là. Et ton côté mutant ? T’avais pas une équipe qui t’aidait à t’entraîner ? Tu voulais devenir X-Woman non ? »
« Je… Je ne sais plus. Tu sais, j’ai un peu de mal à comprendre où part le monde à l’heure actuelle. J’ai moi-même été victime d’anti-mutant et je continue à penser qu’une solution finale pourrait revoir le jour pour tenter de nous anéantir tous… »


Le silence s’installa entre nous, ce qui était chose rare. Le goût de l’alcool que j’avais bu me restait en bouche tandis que le champagne que nous avions bu en début de soirée commençait à me faire tourner la tête. Au loin, un décompte fut repris par plusieurs personnes. L’année se terminait. Avant que les dernières secondes ne furent totalement écoulées, j’entendis mon ami me dire quelque chose.

« C’est le moment de laisser toute cette vie, tes angoisses et tes doutes derrière toi. Avance Enora. Fais un vœu pour entamer cette nouvelle année et essaie de faire en sorte qu’il se réalise.

Je n’eus pas le temps de répondre. Le décompte s’acheva et les fusées s’envolèrent dans le ciel noir de l’hiver. Une à une, elles vinrent éclairer le ciel de leur beauté et de leur feu ardent. Lucas avait raison. C’était comme si je comprenais seulement certaines paroles. Il était temps pour moi de prendre mes responsabilités. Je ne devais plus reposer sur les autres, je devais m’assumer. Là où j’avais échoué, je pourrais apprendre à d’autres de ces échecs. Là où j’avais été blessée, je pourrais les prévenir du danger. Là où j’avais peur, je pourrais les rassurer. Un jour viendra où la voix du professeur finira par s’éteindre. Que deviendront les jeunes mutants de demain si nous qui avions été pris sous son aile ne tentons pas de reprendre son flambeau ? C’était donc cela d’être Xmen ? C’était ce que j’avais toujours souhaité être depuis le jour où je savais que cette école existait. Il ne fallait pas seulement être sur le terrain et savoir se défendre autant que la cause pour laquelle on se bat. Il fallait porter à voix haute nos arguments et faire entendre au monde entier ce que sont les mutants pour éviter que des horreurs telles que Mutant Town ne se répète, ou bien que l’on arrive à une situation finale. En cet instant, je n’aurais su dire si c’était l’alcool, le froid ou bien le moment même, mais j’étais persuadée que ce combat serait le mien.
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Enora Lacourt-Bourdieux
Élève à l'Institut Delta
Enora Lacourt-Bourdieux


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MessageSujet: Re: « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. »   « Grandir, c'est apprendre le mal. Le mal est inévitable. » Icon_minitimeLun 23 Mar - 23:06

Chapitre VIII : Nom




17 Janvier 2014 – Timers Enterprise – 02 : 07 p.m.

La paperasse. Je croulais littéralement dessous, cherchant à m’intéresser un peu plus à ce bien qui était le mien désormais. Daniel m’avait laissé un véritable empire à gérer et je ne me voyais pas faire autrement qu’en me montrant à la hauteur de ses espérances. Du coup, je prenais mon temps. Celui de voir à quelle structure j’avais été placée à la tête, celui d’apprendre à connaître les différents acteurs qui l’animait, celui de me pencher sur les activités menées par cette structure. Depuis nouvel an, j’étais revenue à Londres, m’attardant là bas autant que je le pouvais. Je ne voulais pas rentrer à New-York avant de me sentir prête pour cela, bien que la situation se fasse plus urgente maintenant que Jarvis savait très bien que je ne maîtrisais toujours pas parfaitement mon pouvoir. Il avait peur que ce fait ne cause des tords à l’entreprise, et c’était tout à son honneur de croire pareille chose.

Mon bras droit avait été absent durant toute la matinée, chargé de quelques missions pour moi, notamment celle de trouver un appartement pour moi dans la capitale britannique. Je ne comptais pas poser mes valises ici de manière définitive, mais le fait de savoir que le siège de Timers demeurait ici me forçait un peu la main. Et j’avais finalement choisi le quartier, laissant Jarvis régler les derniers détails. Voilà que la jeune fille ordinaire que j’étais encore il y a quelques mois commençait à prendre ses responsabilités en achetant son premier bien immobilier.

Je reposais le dernier bilan financier en date et me levais de ma chaise. Je me dirigeai vers la fenêtre, admirant la vue panoramique que m’offrait cette gigantesque baie vitrée. La comparaison avec celle que nous avions dans l’appartement du BaM avec Daniel était réelle et je ne pouvais m’empêcher de la faire, poussant un léger soupir. Je replaçais une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et croisai les bras durant quelques instants, les paupières closes. Je devais tenir. Je devais rester debout, droite, fière. J’étais cette jeune fille courageuse et brave, pas une petite fille qui avait toujours besoin d’une main à tenir. Jarvis était cette épaule sur laquelle je pouvais me reposer, une béquille soutenant un blessé en voie de guérison. Je devais pouvoir me débrouiller seul à partir de maintenant.

Quelques coups sonnèrent contre la porte et j’entendis la poignée tourner et la porte s’ouvrir. Je ne me retournai pas tout de suite, apercevant Jarvis dans le reflet de la fenêtre. J’attendis qu’il referme la porte avant de tourner sur moi-même. Je lui servis alors mon plus beau sourire.

« Est-ce fait ?
« Tout à fait, Enora. Vous êtes désormais l’heureuse propriétaire d’un appartement situé non loin du centre. J’espère qu’il vous conviendra. J’ai fait appeler les différentes entreprises participant à l’ameublement pour les livraisons. »


Si je ne connaissais pas cet homme auparavant, je comprenais un peu plus chaque jour pourquoi Daniel avait su lui accorder une confiance aveugle et lui donner le respect qu’il méritait. A mon tour, j’avais l’impression de ne pas être assez reconnaissante de ce que cet homme pouvait réaliser.

« Merci infiniment Jarvis. Vous pourrez prendre quelques jours de repos après tout cela. »
« Ce n’est pas tout. »


Je l’observai en haussant les sourcils tandis qu’il sortit une grande enveloppe de l’intérieur de sa veste. Il me la tendit alors et je ne pus que la saisir, m’avançant de quelques pas pour se faire.

« J’ai pu récupérer ça pour vous à la réception. Certains ont encore du mal à se faire à votre nom, et l’enveloppe n’aidait pas trop »

Je jetais un coup d’œil sur le papier et ne put m’empêcher de sourire avant de regarder Jarvis avec un air ému.

« Je crois que l’on peut en déduire que votre demande a été acceptée. L’enveloppe doit contenir vos nouveaux papiers à ce nouveau nom. »

Je ris légèrement avant d’arracher le papier de l’enveloppe pour trouver à l’intérieur ce que Jarvis avait su deviner. Un nouveau passeport et une nouvelle carte d’identité. Je caressais avec douceur le nom que j’avais fait modifier. Puis, je relevai la tête, un large sourire sur mes lèvres.

« Bien ! Je crois que nous allons avoir beaucoup de choses à fêter. Venez donc Jarvis, allons nous occuper de cet appartement. Mais avant cela, achetons du champagne. »

Le fidèle ami de Daniel sourit également et me suivit sans broncher. Moi, je ne quittais plus des yeux ces papiers d’identité qui étaient les miens. Les démarches nécessaires avaient pris pas mal de temps et l’ont m’avait fait comprendre que cela allait s’avouer devenir compliqué de part la disparition de Daniel. Mais le fait qu’il ait été mon tuteur légal avait aidé. Mes parents avaient donné leur accord. J’entamai la version 2.0 de moi-même. Enora Lacourt était morte, au profit d’une version plus adulte d’elle-même. Moi, Enora Lacourt-Bourdieux.
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