Chronique des Chronopathes " La Quête d'Arthur Miller"
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Daniel Hopes Agent du BAM Alpha
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Sujet: Chronique des Chronopathes " La Quête d'Arthur Miller" Jeu 26 Juil - 21:53
Transport, motorways and tramlines Starting and then stopping Taking off and landing
ORLANDO MARS 2012 Edwin Lorigan ( 1990- 2012)
On vit par habitude, on finit par ne plus s’étonner de rien. On attend un train qu’on n’arrivera jamais à prendre, c’est l’excuse du’ j’aurai pu’ quand il suffisait juste de le faire, la ritournelle classique de nos lâchetés quotidienne.
Tout fini sur un quai d'une gare quelconque à attendre une destination faite de hasard dans la solitude anonyme du couvert d’une foule empressée d’être oppressée. Le voyage n’est que l’acceptation vers un alibi, alibi nécessaire pour accepter l’idée de mourir, on participe de cette mascarade cruelle de la futilité cachant un mot plus dur : l’inutilité.
Souvent je me sens si vide que j’ai l’impression d’être une vaste blague. Inutile et lâche jusqu’au dernier de mes renoncements. J’avance parce qu’on me dit d’avancer, j’aime parce qu’on me dit que c’est une bonne chose, je m’attache parce qu’il faut bien que le corps exulte de temps à autre et je compatis parce que ca me rend plus humain.
C’est le dogme de notre temps, nous autres enfants oubliés de ce siècle pliant un genoux à terre sous le poids de nos fausses certitudes où les biens ont fini par nous lier les mains et nous définir par ce que nous possédons et plus ce que nous sommes réellement.
J’écris depuis l’âge de quatorze ans et mon père m’a dit un matin que « je brulais le soleil ». Cette sentence pleine d’amère poésie m’est restée ancrée comme la certitude que ma vie se résumait à brasser du vent et soulever une mince poussière qui inévitablement retomberait sur un sol stérile. Je me suis accroché à cet espoir d’être différent puisque je revendiquais mon étrangeté et à vingt-deux ans, rien a changé à part cet étrange besoin de me mortifier en solitaire en jetant des poignées de sel sur des blessures béantes alors que mon cœur appelle de ses vœux la rencontre d’Ames égarées souffrantes mais similaires à la mienne.
Je crois aux belles âmes, aux nobles idéaux, aux sentiments exacerbés mais voilà le monde m’a brisé par sa dureté et ses réalités à mille lieux de mes utopies juvéniles. Si je crois encore à quelque chose ? Pas tellement à part que j’ai grandis et que mes vêtements sont devenu étroits.
Je mens…comme vous. Je mens et tout va mieux. Je mens à mes parents que je vois vieillir inévitablement et courir vers leur disparition. Je mens à mon corps que je vois vieillir même a l’apogée de ma jeunesse, Je mens à mes sentiments que je veux neufs et uniques quand il est si facile de se laver le cœur comme on se lave les mains. Je mens à ma conscience que je veux muselée et qui hurle à la révolte sous ce monde s’effondrant sur lui-même. Je me dis que c’est la vie, l’ordre des choses ou toutes les conneries habituelles que l’on marmonne pour se convaincre qu’il y a une logique et un fatalisme de bon aloi. Je brule moins le soleil, j’apprends à être un adulte raisonnable et insignifiant dans une vie raisonnable et insignifiante.
Je suis fier de quelques réussites dans le domaine d’ailleurs. Je suis aussi vide que vous, aussi futile que vos rêves, aussi cernable que vos ambitions, le repos, l’amour, la sécurité d’un foyer.
Certains soirs tout me dégoutte au point de ne pas avoir envie de me reproduire ! Le monde est un si grand malheur pour un si petit être, c’est sans doute un reste d’humanité qui me fait agir en ce sens, comme quoi, le moule peut se fendiller parfois et le modelage imparfait.
Oui j’écris pour me démolir, utiliser tant de mots pour se couvrir d’opprobre, ça a un côté masochiste, non ? Mes carnets sont emplis de cette bille que je vomis depuis toujours comme si drainer hors de mon corps cette noirceur étouffante était une opération vitale pouvant me permettre de subsister encore un peu pour me trainer vers un autre matin décevant. Hé quoi ? Bruler le soleil n’est pas sans risque de brulures ! Il faut régulièrement changer les bandages et extraire le pus des chairs calcinées. Ces mots sont destinés au vide, à l’oubli, à l’image de ce que nous sommes : inutiles et sans buts. C’est une longue plainte d’injustice devant l’inacceptable vacuité de nos vies.
Seulement voilà. Il y a un mois jour pour jour, j’ai découvert ma vraie différence et depuis ce vide me semble diminuer à chaque avancée dans ce monde inconnu. Une excitation inédite et une soif d’expérimenter, un coup du sort aussi puisque j’ai couché sur papier une différence que j’avais en fait dans mes gènes. C’est encore balbutiant, mais il semblerait que je sois ce que l’on nomme un mutant. Je n’arrive pas à l’écrire tant cela me parait extraordinaire moi qui trouve si facilement les mots pour couvrir une page sur le vide et le mon sens voici que la lueur que crée cette découverte m’empêche même de devenir clairvoyant et lucide. J’ai donc décidé de me faire aider et je prends le train pour New York, puis une petite bourgade de Salem pour trouver un centre pour « jeune gens » comme moi.
Tout commence par une gare, comme je l’ai dit. Tout commence par un homme comme un autre noyé dans la multitude. On attend tous un train pour un monde meilleur, tous un train d’aventure et peut être d’espoirs. Ce que je sais c’est que depuis hier, j’ai arrêté d’écrire. Une impression étrange que je n’ai plus rien à raconter, non, j’ai tout à vivre.
Père, j’ai cessé de bruler le soleil, tu sais pourquoi ? Parce que je suis le soleil ! J’ai mon mot à dire à la face de ce monde.
Parfois, dans une masse compacte comme une foule se pressant sur le quai d’une gare, un être vous ressemble. Parfois il vous ressemble même trop.
Inutilité de l’espoir, ça existe, je vous l’assure. C’est cet être singulier aux cheveux brun impeccable et au costume sombre qui me l’a appris. Pas besoin de connaitre son nom ni ses motifs, il a fendu la brume de la vie et m’a trouvé en premier. Je n’ai pas vu sa lame sous son manteau, juste sentit s’enfoncer dans mes chairs au niveau du cœur. Il a disparu si vite que j’ai compris combien nous étions semblable. Je l’ai senti lorsque j’ai voulu figer le temps…nous partagions cette singularité. Me voilà à genoux sur le sol me vidant de mon sang. Je n’ai pas de réponse à mes pourquoi, une idée incongrue me vient à l’esprit tandis que la brume m’emporte.
La mort d’un anonyme est finalement aussi idiote que sa venue au monde.
Jusqu’au bout il n’y avait donc rien.
Quel dommage, j’aurais voulu le coucher sur le papier….ca aurait pu remplir un vide.
Invité Invité
Sujet: Re: Chronique des Chronopathes " La Quête d'Arthur Miller" Ven 27 Juil - 9:56
Texas. Ranch Kruger 9h45, 7 AVRIL 2012 Alexan Kruger (1978-2012)
Comme tous les matins, il s'est levé. Comme tous les matins, il a à faire. Où, pourquoi, comment? Tout est réglé depuis des décennies ici , et il aime ça. Il a juste envie de les regarder faire, mais les regarder c'est chiant, il s'emmerde, alors il a aussi décidé de mettre la main à la patte. On lui a déjà demander de quitter les humains. Pourquoi faire? Il est bien ici. C'est le seul endroit qu'il connaisse où le temps s'arrête sans qu'il n'ait besoin d'y toucher. Son paradis intemporelle, au rythme des ventes du bétail , des débourrages de mustang, et des soirées où viennent les plus jolies filles du pays. Les cow boy, emblème de l'homme sauvage des USA, monstre de soit disant virilité et les vestiges de la période de la ruée vers l'or. Quoi de mieux que d'être une carte postale vivant quand on est chronopathe...?
Lui , c'est Alexan Kruger, l'ainé du patron qui gère ce lieu, une des plus grosses production bovine du pays et aussi à la réputation de dresseurs de chevaux hors pair. Il aime son monde, il aime son milieu. Il aime être oublié. Comme chaque matin, la roue du temps se remet en branle, comme si la nuit, sourde épopée depuis des millénaires se targuait de le ralentir. Alors, il était aussi puissant que la nuit? Il aimait cette idée bien qu'au fond, elle soit fausse. ll avait à peine 34 ans, la fleur de l'âge, et pas encore marié.
Fallait dire qu'il y avait quand moins hyperactif. Alexan n'avait pas de vie privée, il lui arrive même de dormir dans les écuries, dans la paille, le chapeau sur les zygomatiques à ressasser sa véritable place dans l'univers, ou bien pour arrêter de réfléchir. Un cerveau trop actif est un problème. Oui... un problème.. c'est fatiguant, comme si vous n'étiez pas mettre de vos désirs intellectuels... mettre de la dose d'informations à avaler. Et pour fuir cette réalité compulsive, il avait dégagé les études dans un coin sombre pour se consacrer au terrain. Juste ça. Ressentir la nature. Ressentir le temps. Oublier. Parce qu'on est là pour ça au fond. Qu'est-ce qu'on s'en fout...
Il se redresse , en virant le chapeau , qui vomit la poussière. C'est l'heure. Il entend déjà le vieux gueuler au loin comme quoi il est en retard. Oui, c'est bon , il lui suffira de remonter un peu sa montre biologique. Il tape son jean et les chaps de cuir fixés de sangles à sa ceinture de cuir vieilli. Sa gorge se racle et on entend un écho qui fait de même. Il fronce les sourcils et se retourne, observe , capte l'environnement, fait même un retour en arrière d'une minute , mais le bruit ne se reproduit pas. Comment est-ce possible...? Cela impliquerait que celui qui venait de l'imiter puisse effacer sa présence dans le passé en remontant lui aussi. Il écoute.
Rien. Le chapeau épouse sa tête et il se passe sa langue sur ses dents, en se sortant une clope. Craquage de briquet. Il ne part pas. De nouveau craquage et là , une vision d'horreur, l'étable est en feu. Comment est-ce possible. En une seconde!? Les chevaux s'affolèrent , se ruent. Alexan tente de faire marche arrière , mais rien ne marche. Qui l'entrave? Où est-il? Non pas maintenant! Il n'a pas encore fait de projet! Il avait le temps! Oui mais voila... L'autre n'en a pas à perdre.
Une ombre se glisse entre les flammes comme immatérielle et s'arrête prêt de son oreille, en même temps qu'un canon se colle à sa nuque. Sèche . Froide. Vicieuse.
- Echec et mat Lucky Luke.
Ses yeux s'écarquillent. Un léger bruit d'engrenage huilé. La balle part. Le corps tombe. L'étable flambe. Plus rien. Le temps s'est arrêté , puis repart... Un corps au milieu, une famille déchirée , des millions envolés...
Il aura du faire des projets. Il aurait du...écouter Xavier qui lui avait proposé de les rejoindre. Il aurait du se marier, avoir des enfants avec Malika la garce. Il aurait du oui...Mais il n'a rien fait. Et l'autre... lui... il l'a...ce temps... il en fait une boulimie...Dans un dernier souffle... la nuque éclatée...Il aurait pu prier de tout son être pour que cet enfoiré ne crève. Mais ça non plus il ne l'a pas fait...
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