Des fantômes trop vivants (Vermine)

Deux heures du matin, Neko rentrait à l'appartement après une journée de travail. Après son suicide manqué, elle s'était ressaisie et était repartie de l'avant. Elle n'avait pas encore digérée la mort de son amant, loin de là. Elle ressentait encore cette lourde perte dans son âme et dans sa chair. Elle doutait de pouvoir un jour s'en détacher. Même si avec le temps elle arrivait à oublier (ce qui était déjà peu probable en soi), il y aurait toujours sa cicatrice à côté du nombril pour le lui rappeler.
Pourtant, elle avait aujourd'hui su mettre de côté sa douleur pour travailler, et pas de n'importe quelle façon. Sa publicité passait déjà depuis plus d'un mois à la télé, dans plusieurs pays, et ça portait déjà ses fruits par rapport aux ventes de l'energy drink. Devant des résultats si probants, le responsable publicitaire avait recontacté Maëlys et l'avait engagée pour toute une campagne de pub. Neko avait besoin de commencer à gagner sa vie, et puis elle était bien forcée d'avouer qu'elle aimait faire sa star devant la caméra, c'était un véritable accomplissement de ce que Vermine lui avait appris : ne pas se cacher, mais chercher à en mettre plein la vue. Neko avait donc signé un nouveau contrat. La magical girl féline vêtue de rouge était partie pour vendre encore un paquet de canettes d'energy drink.
Ce jour-là, donc, Neko avait participé à une nouvelle séance photo pour une campagne d'affichage. Elle avait été très bonne, et en était plutôt fière. Poser habillée en magical girl avec un grand sourire alors qu'on porte encore le deuil d'un être cher, c'était ça la vraie force. Son patron était fier d'elle, et l'avait invitée à boire un verre après la séance. Mais maintenant qu'elle n'avait plus à se forcer pour faire bonne figure devant un appareil photo, elle avait envie de pleurer. Elle sentait que ce soir-là elle prendrait encore des somnifères pour ne pas être hantée par les cauchemars.
Elle entra dans le couloir de l'appartement et posa son blouson sur le portemanteau. Lize était absente, probablement encore chez un de ses 999 plans-cul. Neko n'alluma pas la lumière, elle voyait suffisamment bien dans le noir pour s'en passer. Traînant les pieds, elle alla dans la cuisine pour prendre ses somnifères.

Onze heures passées… une petite silhouette se mit à gravir la façade de l’immeuble. Sans presque un bruit et avec une aisance surprenante, Crapule, car il s’agissait bien de lui, fut en un rien de temps à plusieurs étages de hauteur. Il était peut-être un rat, mais il grimpait comme un singe. Il fallait dire qu’il cumulait les avantages pour s’illustrer en ce domaine. Petit, léger, vif, équipé de griffes, il était de surcroit assez fort pour mouvoir son corps avec une redoutable efficacité et il pouvait également compter sur une expérience déjà non négligeable. Caché par la nuit, grimpant à l’endroit le moins exposé, personne ne le vit s’arrêter à une fenêtre et y glisser un coup d’œil. Il espionnait l’appartement de l’amie de Neko. Il savait que cette dernière y habitait désormais, ayant quitté l’Institut. Mais ses informations dataient déjà de plus d’un mois.

Un mois, c’était long surtout quand on était sensé être mort. Ernest pouvait remercier en cela les manigances de Sinister. Sa captivité avait été longue. Et maintenant qu’il était libre, il se devait de ressusciter. Il n’osait imaginer la douleur de son aimée. C’était ça qui avait été le plus dur lors de sa séquestration dans le labo : penser à ses proches, penser à leur douleur. Cérès, sa mère adoptive, n’avait pas cru à la mise en scène du docteur. Mais elle, elle avait les moyens techniques pour mener son enquête. Pas Neko. Comment avait-elle réagit ? Et maintenant, que faisat-elle ? Quelles seraient les conséquences de cette séparation affreusement brutale ? Tant de questions. Crapule avait cessé de se les pauser depuis qu’il avait débuté son escalade. Ayant appris à ce concentrer, il était tout entier absorbé dans son action. Ce n’était vraiment pas le moment de commettre une maladresse.

Dans l’appartement, il ne vit personne. Tout était plongé dans le noir. Il se décida donc à entrer. Ouvrir la fenêtre fut pour lui un vrai jeu d’enfant, surtout qu’il disposait de tous les outils nécessaires. L’homme-rat n’avait vraiment plus rien d’un amateur. Il se glissa à l’intérieur et referma délicatement la fenêtre. Puis il visita l’appartement pièce par pièce. Quand il fut certain d’être seul, il cessa de progresser avec cette extrême discrétion. Mais il ne fut pas pour autant bruyant, loin de là. Il ne toucha à rien mais regarda tout. Il constata vite, à son plus grand soulagement, que Neko habitait encore ici. Les traces de ses récentes activités étaient nombreuses. Alors maintenant, il n’avait plus qu’à l’attendre. Il s’installa dans le salon, assis sur le divan, et ne bougea plus. Depuis le début, il était resté dans le noir. Lui n’y voyait pas spécialement dans l’obscurité mais son œil droit était couvert d’un monocle infrarouge. Le matos de la Confrérie était bien pratique.

L’attente dura deux interminables heures. Ernest n’avait cessé de se reposer les fameuses questions maintenant qu’il était passif. Il se demandait aussi quelle était la meilleure attitude à adopter. Il ne savait pas du tout à quelle Neko il allait faire face. Elle allait peut-être terriblement lui en vouloir. Peut-être allait-elle le prendre pour un autre, persuadée que son amour était bien mort. Peut-être qu’elle ne l’aimerait plus après ça ; Ses réflexions demeurèrent stériles. Il nageait trop dans l’inconnu pour pouvoir se passer du concret.

Lorsqu’il entendit la clé tourner dans la serrure, il retint son souffle. Dressant l’oreille, il suivit au son la personne qui venait d’arriver dans l’appartement. De qui s’agissait-il ? Neko ? Ou son amie ? Non, c’était Neko. Il en était sûr. Elle allait dans la cuisine. Ernest se leva et la rejoignit. Il se garda bien d’être discret cette fois, il ne voulait pas prendre par surprise. De plus, ses bruits de pas, ses pieds nues et griffus sur le sol, c’était comme une signature.

-N’ais pas peur, c’est moi, Vermine, fit-il avec un grand calme sur le seuil de la cuisine.

Il se surprit presque à être froid. En réalité, il était tendu, prêt à toute éventualité, comme s’il était en mission. Il s’était présenté sous son ancien pseudonyme car pour Neko il était et resterait Vermine. Seulement, il se présentait à elle sous les traits de Crapule, c'est-à-dire sous ceux du Confrériste. L’homme-rat portait son sombre costume intégralement noir qu’on devinait aisément fait pour l’action et la furtivité. A sa ceinture étaient fixés ses longs couteaux de jet, ainsi que son pistolet et sa sacoche à outils. Son visage s’ornait quand à lui du fameux monocle. D’habitude, Ernest s’efforçait de ne plus venir ainsi équipé pour voir son aimée. Il préférait des tenues plus classiques, un jean et un tee-shirt par exemple. Mais là, c’était différent…

Neko remplit un verre d'eau. Elle s'apprêtait à avaler ses comprimés bleus, quand elle se figea soudain. Ses oreilles bougèrent. Elle n'avait pas rêvé, elle entendait bien un bruit de pas qui s'approchait, des pas légers, mais ponctués d'un petit raclement de griffes, un bruit de pas qu'elle aurait reconnu entre mille. Lentement, très lentement, elle se retourna vers la porte de la cuisine. IL était là, devant elle, vêtu d'une combinaison moulante...et incontestablement vivant.

-N’ais pas peur, c’est moi, Vermine.

Le verre d'eau se fracassa par terre, et les comprimés rebondirent sur le carrelage avec un "tic...tic...tic". En une fraction de seconde, Neko bondit sur le plan de travail et en même temps, dégaina son Glock, qu'elle pointa sur le rongeur. Et à la même vitesse, son expression faciale était passée de l'interrogation à la véritable peur panique.

-NOOOOOOOOOON ! Non, c'est pas vrai ! Non ! Tu te fous de moi ! T'essaies de me rendre dingue ! T'es...T'es un clone ! Un foutu clone ! Je suis sûre que c'est ces connards de la Confrérie qui t'envoient ! N'A...N'APPROCHE PAS !

La brutalité de leur séparation, toute cette douleur, tous ces cauchemars, toutes ces nuits à se réveiller en sanglotant, cela avait beaucoup éprouvé les nerfs de la jeune féline. Et maintenant, voilà son Vermine adoré (à moins que ce ne soit qu'un imposteur) soudain revenu d'entre les morts. Elle refusait de croire que c'était le vrai. Elle considérait la Confrérie comme responsable de la mort de Vermine, et elle n'aurait nullement été étonnée que ces salauds aient créé un clone de son aimé pour la tourmenter.

Vermine resta impassible face à l'arme, comme à son habitude, en fait. Il ramassa un comprimé et fit non de la tête.

-T’as besoin de ça pour dormir, maintenant ? Quelle misère.

Neko ne répondit pas. Elle resta immobile, la respiration saccadée, les yeux embués de larmes. Elle faillit tirer quand "Vermine" fit un mouvement, mais ce fut juste pour jeter le comprimé à la poubelle. Il lui ressemblait tellement. Aaah, mais pourquoi ça ne marchait pas comme dans les histoires à l'eau de rose. Dans les films, quand un amoureux revenait d'entre les morts pour voir son amoureuse, ils tombaient dans les bras l'un de l'autre en s'embrassant langoureusement. Neko, elle, était à la limite du nervous breakdown. Le doigt crispé sur la détente, elle était à deux doigts de transformer le visage tant aimé en bouillie sanguinolente.

-Un clone ? Y’en a bien eu un dans l’histoire mais c’est pas moi. Maintenant, calmes-toi. Ce serait bien d’éviter d’ameuter tout le cartier, non ? Je vais dans le salon. Rejoins-moi quand tu te seras remise.

Et il quitta la pièce, tout simplement. Neko resta immobile, perchée sur son plan de travail, son arme pointée dans le vide, toute tremblante. Elle glissa dans l'évier, et dégringola sur le sol de la cuisine. Elle aurait aimé que le coup parte tout seul et la tue, mais le Glock était spécialement conçu pour éviter les tirs accidentels. Elle se releva en se frottant les membres, puis elle se rendit au salon. "Vermine" était sur le canapé. Elle avança lentement, gardant son pistolet braqué sur la tête du rongeur, et alla s'asseoir dans le fauteuil qui faisait face au canapé. Là, assise, l'enfant-rat toujours dans son angle de tir, elle prit une grande inspiration avant de parler.

-Si tu es vraiment celui que j'aime, parle. Parle-moi de notre histoire, dis-moi des choses que lui seul pourrait savoir, et tâche d'être convaincant.

Cette histoire la rendait dingue, et en même temps elle kiffait. C'était l'occasion de se venger pour la fois où Vermine lui avait demandé de le convaincre qu'ils étaient bien amoureux.

-On est là, assis l’un face à l’autre à une table sur la terrasse d’une pizzéria. Moi, j’suis dissimulé derrière un hologramme qui me donne une apparence humaine. On bavarde. Moi j’engloutis la pizza. Toi, tu me touche la main et tu te rends compte que quelque chose cloche. Faut dire que j’suis à poils sous l’hologramme. Donc forcément, t’as senti mon pelage. Moi, je crie, je te fous la honte devant tout le monde et j’en profite pour voler ce qui reste de la pizza. Toi, tu me poursuis et tu me rattrape un peu plus loin. Moi, j’désactive l’hologramme. C’est la première fois que tu me vois tel que je suis. Ça va se finir à Central Parc en baignade. Satisfaite ?

Neko écouta en fermant les yeux. Oui, elle arrivait à se remémorer la scène. Tout ça lui paraissait maintenant si lointain, ce souvenir heureux prenait l'allure d'un rêve. Elle avait presque l'impression en y repensant que c'était la vie d'une autre dont elle se souvenait. Et si elle n'avait pas vraiment vécu ça ? Et si elle l'avait imaginé ? Et si c'était elle, le clone ?

-Tu sais, si on peut cloner le corps, on peut aussi cloner l’esprit. L’esprit c’est rien de plus que des infos dans les neurones. Bref, un clône peut tout à fait avoir les souvenirs de l’original et se comporter exactement comme lui.

Oui, c'était bien ce qu'elle pensait. Il était un clone, elle était un clone, tout le monde était un clone, le monde entier était peuplé de clones qui se croyaient humains ! C'était la matrice ! C'était Skynet !

-Mais y’a un truc que j’ai appris en l’espace de ces quelques semaines : c’est que me cloner est vraiment pas facile. Toi on peut te cloner sans problème mais pas moi. Parce que toi, ton gène X, il fout pas la merde. Il dit que tu es une hybride chatte, point barre. Moi, il dit pas que je suis un hybride rat. Moi, il dit que je produits de l’Altérium. Et l’Altérium altère aléatoirement son porteur. C’est l’Altérium qui a fait de moi un hybride rat, pas mon gène X. Si on me clone, et bien ce clone aura droit à son jet de dés façon Altérium. Et faudrait vraiment un gros coup de chance pour qu’il retombe exactement sur le même hybride rat alors qu’il y a une infinité d’autres possibilités. Tu piges ?

Neko comprenait plus ou moins bien. Les paroles de Vermine éveillaient des informations consignées dans son cerveau, mais elle perdait peu à peu toute capacité d'analyse. Quelque chose dans sa tête s'était cassé. Une partie qui avait déjà été très fragilisée par tous les cahots de sa vie amoureuse avec Vermine, et que le retour de se dernier avait fini par achever. Elle se mit à sourire, un sourire un peu inquiétant.

-Ah oui. Je me souviens. Comme quand tu m'as mordue, quand j'avais mes chaleurs. Un poisson-chat ! Hahahaha !
-C’est bon, t’es rassuré sur mon identité ? Je peux peut-être t’expliquer le reste maintenant, le pourquoi du parce que. Qu’est-ce que tu en dis ? Ha, et si tu pouvais arrêter de faire mumuse avec ton flingue, ce serait cool. Moi aussi j’ai un flingue et c’est pas pour ça que j’te le braque sur la tronche.

Maëlys regarda son arme avec un sourire béat, puis Vermine. Plus ça allait, puis il était évident que quelque chose n'allait pas chez elle. Elle bougea le pistolet, pointa la télé, le vase avec des fleurs, encore Vermine, sa propre tête, la lampe, à nouveau Vermine, et finalement s'arrêta sur le vase. Puis elle éclata d'un grand rire hystérique, le visage levé, les yeux exorbités.

-Haha..HAHAHAHAHA...HAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAAAAAAAAA !!! Oui, c'est toi ! C'est bien toi ! HAAAAAAAAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHA !

Elle se tut, sa tête retomba en avant, ses cheveux cachant son visage. Puis elle se redressa, le visage quelque peu apaisé, elle semblait avoir retrouvé un peu de lucidité.

-Que s'est-il passé ? demanda-t-elle normalement. Qui t'a enlevé, cette fois ? Dis-moi tout. Tu sais que je peux tout entendre.

Oulla, voilà autre chose ! Crapule cligna des yeux et se redressa légèrement. Son air presque provocateur laissa place à une certaine perplexité. Le comportement de Neko était suspect ou plutôt, carrément bizarre. Et si elle était devenue folle pendant son absence ? Ou si justement c’était son retour qui la faisait péter un câble ? Merde, ça c’était vraiment pas prévu au programme. Le gros problème avec la folie, c’était justement ce côté imprévisible. L’homme rat n’était maintenant plus sûr de la marche à suivre. La féline jouait peut-être la comédie. Peut-être pas. Comment savoir ? Après plus d’un mois d’absence forcée, le jeune mutant n’avait plus toutes les cartes en main pour apprécier la situation à sa juste valeur. Si elle n’avait pas eu un flingue dans les mains, cette situation n’aurait pas été si embarrassante. Si elle tirait, même sur personne, le bruit allait réveiller les voisins et forcément, après un coup de feu, quelqu’un allait appeler la police. Non, vraiment, fallait pas qu’elle tire. Il pouvait peut-être l’en empêcher de force mais ce serait se placer dans cette situation ô combien risquée. Le seul côté positif, c’était que la fille-chatte ne visait plus Vermine. Après un petit temps de retard, il se décida à répondre. Il le fit d’un ton plus posé, cherchant maintenant à calmer le jeu.

-L’Altérium a attiré un généticien doublé d’un puissant mutant télépathe. Quand je te disais que tu ne pouvais rien contre les pouvoirs de l’esprit, et bien je suis dans le même cas. Ça fait vraiment bizarre de ne plus être maitre de son propre corps. Il m’a attrapé avec une facilité confondante. Ça frise le ridicule, enfin me concernant. Bref, il m’a prit. Pour ralentir la Confrérie qui allait partir à ma recherche, ce généticien m’a fait passer pour mort. C’est là que le clone dont je t’ai parlé dans la cuisine est entrée en jeu. Ce n’était pas un vrai clone, juste un métamorphe qui a prit mon apparence. C’est lui qui est mort. C’est lui qui a été filmé dans l’entrepôt d’alcool. Moi, depuis cet événement, j’étais séquestré dans le labo du généticien. Le plus étrange, c’est qu’il a été plutôt cool avec moi. Il voulait juste l’Altérium. J’ai eu droit à une chambre tout à fait convenable. J’avais même la télé, pour dire !

Arrivé à ce stade du récit, il s’autorisa une parenthèse. L’occasion était trop belle pour faire enfin une remarque sympathique.

-D’ailleurs, j’ai vu ta pub ! Ça m’a fait tout drôle. Elle est vraiment cool ! J’espère que ça t’as ouvert des portes avec ta fameuse entreprise de boisson énergisante.

Il n’en dit pas plus et reprit ses explications.

-Bon, pour en revenir à moi, la Confrérie a finit par retrouver ma trace. C’est grâce à eux que je suis libre maintenant. Voilà, tu sais tout. Ma mort, c’était qu’une mise en scène. Je compte bien en profiter, dit en passant. Le BAM y a cru. Je vais bien me garder de ressusciter à leurs yeux.

Il eut un petit rire amusée. Etre virtuellement mort, cela avait pas mal d’avantages. Mais très vite, il reporta son attention sur Neko. Il ne fit pas de remarque au niveau de son insolite attitude. Il préféra faire comme si de rien n’était.

-Et toi, pendant tout ce temps, ça n’a pas été trop dur ?

Vermine qui parlait tout légèrement de sa captivité alors que pendant qu'il était confortablement logé aux frais de la princesse, Neko endurait mille souffrances à l'imaginer enterré quelque part à nourrir les vers. C'était dur, très dur à encaisser. Mais Neko ne broncha pas. Elle se contenta d'écouter calmement, la tête penchée sur le côté dans une attitude qui aurait été terriblement kawaï si seulement elle n'avait pas eu le regard si vide. Elle émit juste un gloussement sonore quand Vermine aborda le sujet de la publicité. Il était vrai que jouer les mannequins l'avait bien aidée à surmonter son malaise. Mais maintenant en avait-elle toujours envie ?

-Et toi, pendant tout ce temps, ça n’a pas été trop dur ?

Neko releva la tête, fixant Vermine avec insistance. Était-ce une plaisanterie, ou bien avait-il vraiment envie de la faire souffrir plus qu'elle n'avait déjà souffert ? Elle le regarda ainsi pendant près d'une minute entière, une oreille levée et l'autre baissée, puis elle partit d'un nouvel éclat de rire qui n'aurait pas paru moins à sa place dans la bouche d'un savant fou, si ce n'était qu'il s'acheva par une espèce de miaulement rauque.

-HAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHEEEEEEEEOOOOOOOOOOW ! Non, Noooooon ! Tout s'est bien passé ! Je ne me suis pas ennuyée une seule seconde. J'étais bien accompagnée, tu penses, avec moi, moi, moi, ET MOI !!!

Maëlys se leva du fauteuil, pour se laisser tomber à genoux sur la moquette du salon. Là, elle ramena violemment vers son visage sa main qui tenait le Glock. Elle ne sentit même pas la douleur. Elle recommença, se frappa plusieurs fois avec la culasse du pistolet, les arrêtes lui marquèrent la peau, et sa fourrure commença à se tacher de sang. Pour finir elle jeta l'arme, qui rebondit sur la moquette pour aller se glisser sous le meuble de la télé. Elle parla alors avec une voix différente.

-J'ai cru mourir ! Il ne s'est pas écoulé une seconde sans que je pense à te rejoindre ! J'aurais voulu me faire greffer deux autres têtes pour être ton cerbère !

Elle arracha son tee-shirt et montra sa cicatrice, qui serpentait près du nombril.

-Ça ! C'est un coup de katana ! Si tu t'étais simplement fait kidnapper, j'aurais simplement patienté jusqu'à ton retour en me préparant aux éventuels désagréments, j'ai l'habitude. Mais tu étais mort ! MORT ! Et ces connards du BAM ne m'ont même pas permis voir ton corps !

Neko s’apaisa un peu. Les paroles réconfortantes lui firent l'effet d'un baume sur ses plaies, mais il en faudrait plus à la féline pour guérir. Elle releva son visage ensanglanté et plongea ses yeux dépareillés dans ceux de Vermine. Sa truffe était rouge de sang et son nez lui faisait mal. Peut-être était-il cassé.

-J'ai tellement envie de te croire. J'aimerais tellement pouvoir profiter de cet instant comme il se soit... Mais si tu me reviens, pourrais-je vivre sans être dans la crainte perpétuelle qu'on t'arrache de nouveau à moi ? J'ai mal dans moi ! J'ai si mal... Je me perds, quand tu n'es pas là ! Il m'entraîne tout au fond...

Encore une fois, elle parla de cette voix joyeuse, mais à la consonance malsaine. Elle se courba en avant en marmonnant des choses incompréhensibles. Quelques gouttes de sang tachèrent la moquette.

-Mes ailes ont brûlé...je vais disparaître...

Elle se redressa pour faire face à Vermine, et toucha un bout de sa combinaison noire avec deux doigts.

-C'est quoi, cette tenue ? Tu t'es découvert des penchants sexuels un peu particuliers, en mon absence ? Ou alors c'est un cosplay d'Hippolythe Kurtzmann ? Ou bien les deux ? Je te préviens, je ne fais pas le fist-fucking, ni avec toi, ni avec personne d'autre.

Elle eut un sourire un peu triste. Il y avait tellement d'émotions différentes qui se chevauchaient dans sa tête et qui lui collaient une sacrée migraine. Elle en venait à se demander si elle n'aurait pas mieux fait d'appuyer sur la détente.

Neko écouta le poème de Vermine l'oreille levée, avec une expression sceptique sur le visage. C'était un joli texte, pour quelque chose d'improvisé. Le genre de boniment auquel l'enfant-rat l'avait habituée. Mais certaines femmes (notamment Neko) avaient cette incroyable capacité à lire entre les lignes.

-Ouais, en bref c'est une combinaison offerte par la Confrérie pour que tu fasses des missions plus ou moins moralement douteuses sans te faire repérer.

Forcément, dit comme ça c'était tout de suite moins poétique. Neko avait le chic pour casser le mythe.

-Mais si tu ne l’aime pas, je l’enlève. Tu dois bien avoir quelque chose à ma taille ici. Et puis même si tu n’a rien, c’est pas un problème, tu le sais bien
-Hein ? Oh non, non. Garde-la, ta combinaison, ça fait sexy. Depuis le temps que je rêve de me faire prendre par Sam Fisher... Evidement que je veux que tu l'enlèves ! Je maudis la Confrérie de toute mon âme pour tout ce qu'elle t'a fait subir, pour tous les ennuis qu'elle t'a attirés, et pour tout le temps qu'elle m'a forcée à passer sans toi ! Je ne veux pas voir sur toi la moindre trace de ces terroristes extrémistes traîtres et aux mœurs douteuses.

Elle passa ses bras autour du cou de Vermine. Avec ses dents, elle mordit la combinaison à l'épaule et la déchira un peu.

-Si tu es vraiment celui que tu prétends être et que je suis vraiment celle que je crois être, tu es à moi, et rien qu'à moi. Je...suis...ta...seule...et...unique...petite amie. Et si quelqu'un d'autre veut prétendre à ce titre, il faudra d'abord qu'elle me tue.

Elle savait que Vermine voyait une femme de la Confrérie, ce qui la mettait davantage en rogne. Elle avait gardé son odeur en tête, un parfum si fleuri... Si elle rencontrait cette femme, elle était sûre de la reconnaître à l'odeur, et alors il y avait de grandes chances pour que l'Autre se manifeste...

Oui, effectivement, Neko avait vu juste, enfin presque. Les missions douteuses, il les faisait certes dans l’intérêt de la Confrérie, mais avant tout il les réalisait pour Cérès. C’était justement le genre de détails à ne pas donner. Crapule se garda donc bien de commenter, comme à chaque fois où la discussion s’orientait vers le groupe terroriste. Déjà depuis pas mal de temps, il avait pris l’habitude d’en dire un minimum, à la fois pour la sécurité de la féline, pour sa propre sécurité et aussi pour désamorcer les conflits. Il avait abandonné l’idée d’essayer de convaincre sa petite amie des bienfaits de Magnéto auxquels lui-même n’avait jamais vraiment adhéré. Il était à la Confrérie, c’était un fait et il ne pouvait rien y changer. Alors à quoi bon discuter ?

Il profita de l’étreinte de son aimée pour glisser son museau dans son cou et y déposer un doux baisé, enfin aussi doux que sa gueule dentue le lui permettait. Puis, il se dégagea, peu désireux que Neko continue d’ABIMER sa tenue. On n’allait pas le fournir en matériel indéfiniment sans rien lui dire, surtout compte tenu de son efficacité plus que relative. Heureusement qu’il était protégé par Cérès. Il s’approcha du divan et, tout en gardant un œil sur Neko par prudence, il commença à ôter cette fameuse tenue.

-Tu es bien ce que tu penses et je suis bien ce que tu penses. Tu es ma seule petite amie, personne ne te fait de concurrence à ce niveau, dit-il sur un ton rassurant.

Il avait bien compris où voulait en venir la fille-chatte. Cette autre femme dont elle ne savait rien l’intriguait beaucoup depuis qu’elle en avait saisit l’odeur sur son aimé. Et sa folie naissante n’allait rien arranger. Peut-être que un ou deux éclaircissement s’imposaient ? En attendant, Ernest avait terminé sa manœuvre. Sa tenue noire reposait sur le divan, pliée dans un coin avec son matériel et ses armes. Il ne lui restait plus que son caleçon assez ample et long, tembant presque jusqu’à ses genoux. Sa croissance si marquée, étant en plaine période d’adolescence, ne lui avait fait prendre que quelques centimètres. 1 mètre 16 à son âge, c’était minuscule. Mais en revanche, son corps s’était sculpté de courbes bien moins juvéniles. Multipliant les exercices physiques, on devinait désormais clairement sa musculature sous son pelage. Il avait la silhouette sportive, si on pouvait dire ainsi d’un être à moitié animal.

Il portait aussi toujours son monocle infrarouge. Sans lui, il ne verrait pratiquement rien. Il s’approcha de Neko et reprit.

-L’autre femme, c’est vraiment très différent. C’est pas avec elle que j’irais batifoler dans un lit, si c’est ce que tu crains.

Enfin Vermine se décida enfin à retirer cette affreuse combinaison, symbole de la Confrérie tant haïe. Neko le préférait décidément à moitié nu. D'autant que depuis le temps, il semblait avoir pris de la masse musculaire. Bon, évidement, il était toujours un avorton. Mais il s'était un peu étoffé, suffisamment pour ne pas être désagréable à regarder. Neko enleva son sweat. Elle aussi avait grandi, et c'était sa poitrine qui avait pris un peu de volume. Elle grimpa elle aussi sur le canapé et s'installa sur Vermine, l'écrasant de son poids pour qu'il ne puisse pas s'enfuir.

-Pourtant, vous avez été suffisamment proches pour qu'elle laisse son odeur sur toi. Je ne sais pas qui est cette fille, et je m'en moque pas mal, mais de ton côté je te conseille de prier le ciel pour qu'elle ne croise jamais ma route. C'est tout !

Neko sentait qu'il y avait quelque chose en elle, quelque chose de fou, imprévisible et dangereux. Elle savait qu'il serait risqué de se laisser surmonter par ce quelque chose, quel qu'il soit. Mais si elle venait à rencontrer cette femme, cette confrériste, c'est presque avec joie qu'elle laisserait l'autre prendre les commandes, quitte à devoir se laver copieusement les mains après.

-Bon. Qu'est-ce qu'on fait ? On continue de parler de choses qui fâchent jusqu'à ce que tu aies envie de me laisser tomber pour de bon, ou bien on passe directement à la partie interdite aux moins de 18 ans ? ...à moins que ton ravisseur ne t'ait castré.

-Ecoute-moi bien Neko. Evidement que cette femme est assez proche de moi pour que je puisse porter son odeur. Je la considère comme ma mère. Touche à un seul de ses cheveux et c’est moi-même qui t’étripe. J’ai le droit d’avoir une mère ! Tu piges ? J’agirais de même avec elle si elle tentait de m’écarter de toi. Elle ne t’est pas supérieure ! Tu ne lui es pas supérieure ! Et vous ne vous faites pas concurrence, bordel de merde ! Les trucs interdits aux moins de 18 ans, y’a qu’avec toi que je les fais ! T’as un petit ami fidèle, bon dieu, ça doit suffire normalement !

Neko grimaça en imaginant Vermine cajolé par une femme...une confrériste. Il s'était trouvé une autre mère ? C'était possible, ça ? La fille-chatte se calma un peu, mais il lui faudrait beaucoup plus de temps pour se faire à cette idée et pour calmer son animosité à l'égard de cette inconnue. Elle hocha donc la tête sans rien dire, en regardant distraitement le plafonnier éteint.

-Si on est ok, mon caleçon vient aussi de la Confrérie. Venge-toi sur lui si ça peut te relaxer. Tu pourras vérifier si j’ai encore tout ce qu’il faut pour notre extase mutuelle.

Là, Neko ne se fit pas prier. Elle attrapa le caleçon par les côtés, le souleva à l'envers et le secoua jusqu'à ce que le rat qu'il contenait retombe sur le canapé, intégralement nu. Puis elle jeta négligemment le sous-vêtement par terre. Elle aurait bien aimé le jeter par la fenêtre, mais la fenêtre la plus proche était fermée, et elle n'avait pas envie de s'embêter à se lever pour aller l'ouvrir. Elle-même ne se déshabilla pas intégralement, se contentant d'ôter son soutien-gorge et de baisser pantalon et culotte. Pendant un moment elle fut tentée de lui arracher aussi son monocle. Elle ne l'aimait pas, ça lui donnait une drôle de touche. Mais finalement, elle s'abstint. Elle ne savais pas encore que l'oeil de Vermine avait repoussé, et pensait que le monocle était un dispositif spécial lui permettant de voir correctement, et ne prit pas le risque de l'abîmer.
Elle fit l'amour à Vermine, mais de façon brutale, sans se ménager et sans ménager son amant, avec nettement moins de tendresse que d'habitude. Elle voulait tester la solidité de Vermine, l'éprouver au maximum, pour bien s'assurer qu'il était matériel. Elle avait toujours peur qu'il ne soit qu'une illusion née de sa folie, et qu'il s'évanouisse soudain en fumée, la laissant comme une idiote en train de s'ébattre seule sur le canapé. Finalement, elle ne fut pas déçue de voir qu'il était bel et bien réel, du coup elle s'en donna encore plus à cœur joie, comme pour le punir d'avoir été si longtemps absent. Elle fit ça comme une bête, pas différemment de ce qu'elle aurait fait si elle avait été en chaleur. A la fin, épuisée, le poil embaumant d'une odeur animale, elle se laissa retomber sur Vermine.

-Et maintenant ? Tu vas encore disparaître, ou bien je peux encore compter un peu sur toi ?


(Je sais, c'est minable de t'avoir fait attendre aussi longtemps pour une réponse aussi courte, mais en ce moment j'ai du mal à me concentrer sur le RP)

-Laisse l’avenir où il est. Je ne peux pas le lire, ni le prévoir, alors contentons-nous du présent, c’est plus simple.

Laisser l'avenir où il est ? Facile à dire ! Comment Neko pourrait-elle profiter pleinement du présent si c'était peut-être à nouveau la dernière fois qu'elle croisait son aimé ?

-Je suis là jusqu’à 7 heures du matin. On a encore du temps devant nous. Mais si tu veux dormir, ce qui techniquement est l’activité normale des gens en cet instant, ne t’en fait pas. Je vais revenir dès demain soir. J’ai pas mal de disponibilités cette semaine. Autant en profiter, non ?
-Non, je ne vais pas dormir. J'ai cru mourir, pendant tout ce temps, à cause de ton absence. Alors je vais profiter au maximum de chaque seconde de ta présence.

Elle se rallongea sur le flanc, en prenant Vermine contre elle comme une peluche. Pour le coup, elle ressemblait déjà un peu plus à la Neko pure et innocente qu'avait connu l'enfant-rat dans les premiers temps de leur relation.

-Alors c'est obligé ? Tu vas devoir repartir ? Tu vas encore faire des conneries et t'attirer des ennuis plus gros que toi ?

Elle prit un air plus grave, plus sérieux. Son jeune visage eut soudain l'air beaucoup plus adulte.

-Ok ! Je suppose qu'il serait difficile de t'en empêcher... Quand il faudra y aller, je te laisserais donc repartir. Tu pourras vaquer à tes occupations, voir...l'autre, là. Par contre, je tiens à mettre quelques règles. Ce n'est pas grand chose, mais c'est le nécessaire pour que je puisse aborder sereinement les jours à venir. Règle numéro 1 : Tu peux fréquenter ta...mère..., et je ne chercherais pas à m'en mêler. Par contre, interdiction totale de faire l'amour avec quiconque d'autre que moi. Règle numéro 2 : je peux comprendre qu'il est difficile de tourner le dos à Magnéto sans risquer de subir des représailles, mais promets-moi que dès que tu quitteras cette fichue confrérie dès que tu pourras le faire sans être éliminé. Règle numéro 3 : Obligation de me donner de tes nouvelles au moins une fois tous les trois jours et de venir me voir en personne au moins une fois par semaine. Règle numéro 4 : évite de boire l'energy drink dont je fais la pub, c'est carrément dangereux, ce truc.

Elle prit une inspiration. Ses conditions étaient exposées.

-Alors ? Qu'en dis-tu ? Tu serais prêt à faire ça pour moi ? Est-ce que toi aussi tu aurais des conditions ?

Ernest prit un air pensif tout en se laissant étreindre par Neko. LES CONDITIONS qu’elle voulait imposer étaient tout à fait raisonnable. Pour la première, il fallait bien avouer qu’il aurait du mal à trouver un autre partenaire pour une partie de jambes en l’air, vu son âge et sa tête. Même en payant, pratiquement aucune prostituée n’accepterait. Certes, il pouvait toujours se rabattre sur une poignée de déments aux goûts plus que douteux, mais ce serait tomber bien bas. De plus, le sexe était très loin de l’obséder. Il avait une aimée, c’était suffisant à ses yeux. Pour la deuxième condition, posée en ces termes, il ne risquait rien à s’engager.
Il fallait juste s’attendre à ce que cet instant n’arrive jamais ou dans très longtemps. Magnéto avait le bras si long… Crapule était alors loin de se douter que dans à peine quelques semaines, il serait de retour à l’Institut, un peu malgré lui, il fallait le dire. Pour la troisième condition, la seule qui au final entrainait une obligation, elle ne lui semblait pas intenable. Si bien sûr aucune autre tuile ne lui tombait sur la figure, il pouvait fort bien tenir les délais. Et pour la quatrième et dernière condition…

-Je ne suis pas d’accord, affirma-t-il tout d’un coup, laissant croire sur l’instant qu’il avait une vraie protestation à formuler. T’as boisson énergisante, j’ai envie d’en prendre ! Et tu ne va pas m’empêcher de goûter à ton succès médiatique ! Et puis, tu le sais bien, même si c’était un vrai poison, je n’aurais rien.

Il eut un petit sourire en coin. Enroulant ses bras autour du cou de la féline, il alla caler sa tête contre la sienne. Puis il reprit.

-Pour le reste, c’est ok ! Je peux même ajouter que je vais redoubler de prudence pour éviter les ennuis. Le kidnapping, c’est sympa, mais à la longue, ça lasse. Moi, je n’ai que deux règles. Un : faudra que tu fasses la paix avec ma mère. Deux : faut que tu ne perdes pas la boule. Je tiens à rester le seul maboule ici !

Disant cela, il se blottit de plus belle contre la fille-chatte. Il appréciait cet insant. Il se sentait bien.

-Et bien, si tu ne dors pas, on a plusieurs heures devant nous. Ton rat est prêt à faire ce que tu veux ! Il est tout à toi !

Neko se détendit. Elle avait toutes les raisons pour être satisfaite. Vermine acceptait ses conditions, et elle-même ne voyait aucun inconvénient à accepter les siennes (encore qu'elle ne pouvait pas se prononcer pour l'autre). Elle sourit en laissant Vermine se blottir contre elle. La grosse boule de stress disparue, elle se sentait rajeunir.

-Et bien, si tu ne dors pas, on a plusieurs heures devant nous. Ton rat est prêt à faire ce que tu veux ! Il est tout à toi !

La fille-chatte sourit à son amoureux, et resta à le serrer contre elle comme la grosse peluche qu'il avait toujours été. Elle commença à ronronner, signe extérieur incontestable qu'elle était détendue. Oui, elle allait bien exploiter chaque minute de la présence de Vermine. Pas pour faire l'amour, elle n'en avait plus envie. Elle avait juste besoin de passer du temps avec son rat, l'avoir sous la main, pouvoir parler de futilités, chose pour laquelle ils n'avaient jamais eu beaucoup de temps jusqu'à présent. Pas besoin d'artifices ou de distractions. Juste Neko, Vermine, et un canapé.

-Alors tu m'as trouvée bonne, dans la pub ? Pourtant c'est un peu naïf, non ? Et puis ce genre de pub n'est peut-être pas très éloquent pour ceux qui, comme toi, n'aiment pas la culture japonaise...


(à partir de là, à moins que tu aies quelque chose à ajouter, je pense qu'on peut faire une ellipse jusqu'au moment où Vermine doit s'en aller.)

Neko profita au mieux des heures restantes avec son amant. Il avait accepté ses conditions sans rechigner, ça lui permettait de profiter sans avoir la sensation d'une épée de Damoclès au dessus de la tête. Bien sûr, elle attendait avec appréhension le moment où Vermine devrait quitter ses bras. Mais au moins, elle se sentait capable de le laisser partir sans risquer de péter les plombs. Elle continua donc à le caresser, parlant avec lui de choses futiles pendant des heures. Et puis bientôt, l'aube pointa timidement le bout de son nez, sonnant le glas de ce moment si doux.

-Je vais bientôt devoir y aller. Faut que je me prépare.
-Je suppose qu'il serait vain d'essayer de t'en dissuader...

Elle lâcha Vermine, le laissant ramasser ses affaires. Elle le regarda se rhabiller, avec une certaine tristesse dans le regard. Elle avait beau s'y attendre, ça lui faisait tout de même mal. Ayant besoin de s'occuper les mains, elle entreprit elle aussi de partir à la recherche de ses vêtements éparpillés et de se rhabiller.

-Je reviendrais ce soir, vers minuit. Ça va aller d’ici là ?
-Oui... Oui... Assure-toi juste d'être à l'heure. Sinon, il se pourrait bien que je fasse une connerie.

L'autre était calmée, mais Neko sentait qu'elle ne pourrait pas toujours la garder sous contrôle. Elle sentait que l'autre guettait la moindre faille dans son esprit pour sortir, et qu'alors elle le regretterait. La journée allait être trèèèèèès longue...

-Tu tiendras tes promesses, j'espère ?

Ernest, de nouveau tout de noir vêtu, s’approcha de Neko et sans répondre à sa question, il lui déposa un petit baisé sur le bout du museau. Ce ne fut qu’après qu’il s’exprima de son air plutôt neutre, égal à ce qu’il était le plus souvent.

-Ne t’en fais pas. Je serais à l’heure et je n’ai qu’une parole. Si d’aventure j’ai un contre-temps, je te passe un coup de fil.

Il s’éloigna de deux pas et eut une sorte de grimace. Rien de grave : son monocle infrarouge était en train de tomber en panne de pile. La vision qu’il procurait devenait vacillante. Crapule se décida donc à l’enlever, l’éteignant par la même occasion. La féline put se rendre compte qu’il n’était plus borgne. Si elle avait été plus observatrice, cela n’aurait pas été une découverte. La queue du rat, sectionnée à son extrémité lors de l’affrontement contre Oméga avait également reprit son aspect initial. Il ne fallait pas chercher loin l’origine de cette guérison. C’était le fait d’un don de régénération dont le Confrériste avait profité. Plusieurs cicatrices avaient également disparu mais déjà d’autres commençaient à les remplacer.

Ernest rangea le petit appareil dans sa sacoche. S’en priver ne le dérangeait pas maintenant que le jour pointait le bout de son aube. De toute façon, connaissant par cœur l’appartement, il pouvait y évoluer à l’aveuglette aisément. Ses yeux rouges se posèrent une dernière fois sur son aimée. Elle n’était plus pour lui qu’une silhouette à peine mise en valeur la la luminosité filtrant des fenêtres.

-Oublie pas que ton flingue est toujours sous le meuble. Je serais toi, j’irais le ranger et je n’y toucherais plus.

Il s’approcha non pas de la porte mais d’une fenêtre. C’était par là qu’il était entrée. Ce serait pas là qu’il partirait. Il ne pouvait pas prendre le risque que qui que ce soit le croise dans la cage d’escalier. Sans un mot, il ouvrit donc la fenêtre, releva les stores juste assez pour le laisser passer, vérifia d’un coup d’œil qu’il n’y avait personne pour le voir, s’engagea lestement dans l’ouverture et disparut sans un bruit non sans dire avant :

-A ce soir !

Tel un singe, il fut en un rien de temps dans la ruelle. Puis il se volatilisa dans la bouche d’égout toute proche. Voilà, il s’en était allé.

HRP : dernière réponse me concernant.^^