Viens jouer dans mon élément [PV Erik]

La Floride, mon chez moi. Loin de New-York depuis quelques jours, j’étais partie rejoindre ma mère à Miami, renouant avec elle par la même occasion. Sa trahison m’était toujours restée en travers de la gorge mais je pensais qu’il était temps de changer. Depuis que j’étais revenue, un calme précaire pesait sur nous, prêt à se fissurer au premier instant.

Profitant aujourd’hui du beau temps, je suis partie vers Panama City pour récupérer mon Yacht, en profitant pour faire une promenade en mer et sous l’océan tant que j’y étais. Ce serait la première fois depuis ma mutation que je partirais et irait nager de mon plein gré. Ce serait ma grande première et surtout je pourrais enfin retrouver l’océan qui m’avait tant manqué. La Floride m’avait manqué, j’avais beau dire et malgré les touristes, c’était tout de même mon chez moi.

Sortant de chez moi, mon sac sur l’épaule et mes lunettes dans les cheveux, je me suis retournée rapidement, regardant la terrasse sur laquelle ma mère prenait habituellement son café, regardant la télé ou lisant le journal. A l’heure qu’il était, elle était encore en train de dormir, quoi de plus normal. Soupirant doucement, j’ai placé mes lunettes de soleil dans mes cheveux laissés libres et je suis montée dans ma voiture, démarrant silencieusement et quittant notre propriété.

Il était encore tôt, bien tôt pour une heure de départ mais si je voulais profiter un tant soit peu de l’océan, rien n’était trop beau. Le soleil ne pointait même pas le bout de son nez, et pour cause, la lune était encore la et haute dans le ciel. Il était minuit passé et j’avais prévu de rouler de nuit pour arriver en fin de matinée à destination. Continuant de rouler ainsi durant de nombreuses heures, ne faisant de pauses que pour manger ou pour me dégourdir les jambes, je suis arrivée un peu après dix heures à la plage de Panama City.

Garant la voiture sur le parking, prenant mon sac puis fermant la voiture, je me suis dirigée vers le port, peu fréquenté pour le moment et surtout en cette saison. Seuls les habitués étaient là. Je ne connaissais personne ici et ce n’était pas réellement un problème à proprement parler, au contraire. Passant derrière la barricade pour accéder au ponton, je suis descendue pour arriver au niveau des bateaux, me dirigeant vers le mien, regardant au passage les magnifiques voiliers et autres bateaux tous plus sublimes et majestueux les uns que les autres. Le mien était dans la moyenne, il y en avait des pires mais des mieux également. Une fois arrivée devant, j’ai sauté à l’intérieur, déposant mes affaires dans la cabine.

J’ai commencé par faire un peu de ménage sur le bateau, il en avait bien besoin, c’était une évidence. Dépoussiérant ce dernier de fond en comble et nettoyant le sol, je voyais le temps défiler et les gens circuler de plus en plus, que ce soit sur les quais ou en direction de la plage. C’était normal après tout. Moi-même si j’avais pu venir c’était parce qu’actuellement nous étions en plein Spring Break et Panama City était un des endroits fétiches des vacanciers. Durant mon travail, j’avais retiré mon haut, me retrouvant en haut de bikini et short en jean, il faisait à présent chaud, le soleil allait bientôt arriver au zénith et j’avais prévu de partir peu après manger.

J’allais me diriger vers la plage pour aller chercher à boire et à manger lorsque je serais en mer, laissant toutes mes affaires à l’intérieur du bateau quand je me suis rendue compte que j’avais oublié mon portable une fois arrivé au niveau de la rambarde. J’ai soupiré avant de faire demi-tour, retournant auprès de mon bateau pour appeler ma mère comme promis lorsque j’ai entendu des éclats de rire. Des rires que je ne connaissais que trop bien. Ceux de la bande de mon ex, les trois larrons étaient installés sur un magnifique voilier qu’on ne pouvait s’empêcher d’admirer. C’était logique. Nous ne cessions de nous rejoindre ici lors des vacances, Panama city était notre QG et nous nous y rendions par les flots, lorsque nous étions encore ensemble. Ce dernier m’avait ensuite plaqué dès qu’il avait appris que j’étais une mutante et il profitait du fait que je sois seule depuis pour me rabaisser à chaque fois que nous nous voyions avec sa bande, me trainant à chaque fois plus bas que terre.

« Faith ! C’est bien toi ? »

J’allais partir discrètement quand ce dernier me vit et m’interpella, comme une andouille, je me suis retournée pour le regarder froidement. Je n’avais pas oublié ce qu’il m’avait fait et lui ne semblait pas regretter non plus. Il me regarda d’un air surpris tout d’abord avant de sourire, comme s’il venait de retrouver une bonne copine. Il était tout simplement abjecte et était tout ce que je détestais chez les humains à présent.

« Hey Faith ! Ça fait un bail ! Depuis qu’on a fini nos études… tu deviens quoi ? »

Pour qui me prenait-il ? Pensait-il que j’avais tout oublié ? Pourtant il s’approcha de moi, n’étant plus qu’à un pas l’un de l’autre tandis que les deux abrutis lui servant d’amis étaient restés dans le bateau et semblaient me regarder d’un air bien plus mesquin, comme s’ils préparaient quelque chose. Regardant uniquement Matthew, je ne savais pas quoi lui répondre. Je ne savais pas si j’étais heureuse de le revoir ou horriblement frustrée.

« Matthew… J’aurais préféré ne pas te revoir. »

Mon ton était cassant et sans appel. J’avais tranché entre la joie et la colère, cette dernière l’emportant. Mes paroles lui firent l’effet d’une claque, peut-être regrettait-il mais il était trop tard à présent, c’était terminé entre lui et moi. Matt’ se retourna vers les deux autres et Kevin, ce cher footballeur, capitaine de l’équipe qui avait à ses pieds toutes les filles à l’époque descendit du navire avec agilité, s’approchant de moi avec un immense sourire, levant les mains en signe de paix.

« Et bien petite anguille, tu n’es pas heureuse de nous revoir ? Dommage, c’est vraiment dommage. Nous qui nous faisions un plaisir de passer un aprem ensemble, comme au bon vieux temps. »

Il me prit par le bras avec douceur mais je me suis dégagée sèchement de sa poigne. Il ne devais pas s’attendre à ce que je me rebelle, je ne l’avais jamais fait par le passé, et c’était la première fois que je lui tenais tête. Il m’avait toujours fait un peu peur, surtout que je ne le connaissais que trop bien. Kurt quant à lui mâchouillait un chewing-gum, se contentant juste de corriger le anguille en murène.

Je ne me sentais réellement pas à l’aise avec eux, mais pas du tout, surtout avec Kevin qui était très impulsif. Préférant m’esquiver, j’ai tourné les talons sans un mot, reprenant la direction initial pour quitter les quais, tant pis pour mon portable. Seulement, le footballeur en avait décidé autrement et me saisit une nouvelle fois par le bras, plus ferment cette fois ci, me tirant brutalement vers lui avant de me soulever, me portant sur son épaule comme un vulgaire objet.

« Lâche-moi immédiatement ! Laisse-moi tranquille ! Mais bon sang lâche moi ! Kevin s’il te plaît ! Laisse-moi !! Repose-moi !!! »

J’avais beau supplier en vain, tout cela ne servait à rien. Matthew semblait pour sa part décidé à m’aider sans trop se mouiller, lui demandant simplement de me laisser et de me lâcher. Je ne cessais de crier et de me débattre mais face à sa carrure de sportif, je ne pouvais rien faire du tout. Alors sans rien dire de plus, sans un mot mis à part son rire dépourvu de toute gentillesse et compassion, uniquement empli de cruauté, il monta sur le bateau avant de me prendre dans ses bras et de me reposer au sol, me souriant comme un bel enfoiré avant de me pousser brusquement, me faisant passer par-dessus bord.

Lorsqu’il me poussa, mes yeux e sont écarquillés, j’avais peur, je savais ce qui allait se passer, je savais que ma mutation allait prendre le dessus. Sans me tromper, lorsque mon corps fut totalement immergé dans l’eau, mes jambes fusionnèrent pour ne laisser qu’une queue ocre et tacheté, comme la fourrure d’un léopard, sauf que c’était ma peau. Mon short glissa tout comme mon bas de bikini que j’ai rattrapé en plongeant. Seul le haut de mon corps était resté le même mais son mon nombril, je n’étais plus la même, je n’étais plus qu’un poisson. En sortant la tête de l’eau, j’ai placé mes cheveux sur ma branchie pour ne pas qu’ils la voient, les incendiant du regard. Que pouvais-je faire d’autre à présent ?Rien, à part regagner mon yacht, et encore, cela ne servirait à rien, vu le regard sans équivoque que me lançait Kevin, je ne pourrais être en paix. Il était bien décidé à continuer de me martyriser.

« -Bah alors ma belle, pourquoi tu ne sors pas de l’eau ? Viens nous rejoindre, allez, on ne mord pas, nous.
- Laisse la Kev’, fous lui la paix.
-Mec me dit pas que tu en pinces encore.. »

Je n’ai pas écouté la suite, me contentant de regarder autour de nous avant de plonger en silence, passant sous leur bateau et me dirigeant vers le mien, progressant sous l’eau, retrouvant mon élément d’une manière que j’aurais préféré évité. Je n’avais qu’une envie, pleurer. C’était une réaction de faible mais je ne pouvais que faire cela. Mon bateau se trouvait hors de leur vue et c’est là-bas que ma tête blonde perça les flots. Je me suis pourtant trouvée face à un problème, je ne pouvais pas monter dedans si l’échelle n’était pas sortie, hors, elle était remontée. J’étais bel et bien foutue.

L’esprit fumant et actif, je cherchais une solution pour pouvoir remonter sans être trop exposée à la vue des gens. Je ne voulais qu’une chose, être enfin en paix. Je faisais des cercles dans l’eau, trop occupée à réfléchir pour remarquer ce qui se passait autour de moi. Un bruit de pas attira mon attention, je ne savais pas qui s’était mais mon premier réflexe fut de me cacher. J’allais plonger et m’éloigner quand la personne m’appela par mon nom. Ouvrant grand les yeux de stupeur je l’ai immédiatement reconnut avant même qu’il ne me rappelle son nom.

Je savais qui il était, je ne pouvais pas oublier mon arrivé à New York quelques mois plus tôt et notre rencontre. Je ne savais pas quoi penser de lui, ni même si je pouvais lui faire confiance. J’avais réellement un doute sur lui mais vu sa phrase, il n’était peut-être pas au courant. Comment pouvais-je me rhabiller si je n’étais pas hors de l’eau ? C’était impossible. J’étais restée là sans bouger, à me demander si je pouvais lui faire confiance ou non, s’il m’avait manipulé ou s’il était sincère. J’avais des doutes, tellement de doutes et d’appréhension. Quoiqu’il en soit j’étais fichue.

L’échelle toucha l’eau et j’ai relevé la tête, le regardant dans les yeux. Je n’avais toujours rien, dit, je ne savais pas quoi faire. Il avait l’air de savoir mais se comportait comme s’il n’avait aucune idée de ce que j’étais. Peut-être jouait-il admirablement bien la comédie ou il était simplement très intuitif et il avait su viser juste ce jour-là. De toute façon, je n’allais pas rester dans l’eau indéfiniment, j’étais obligé de de sortir et il verrait. Tant pis, je prenais le risque. S’il devenait trop collant je pourrais toujours le virer ou le faire virer à corps et à cris.

Saisissant avec hésitation l’échelle, ma prise sur celle-ci s’est raffermie avant que je ne commence à me hisser à la force des bras, me servant se ma queue pour m’aider. M’arrêtant à la frontière entre mes deux natures, j’ai soupiré.

« Est-ce que tu pourrais aller chercher une serviette à l’intérieur s’il te plait Erik ? Tu entres dans la cabine et tu en verras une tout de suite sur ta droite… Laisse finalement, mais éloignes toi juste et retournes toi le temps que je sorte. »

Quel prétexte stupide, je n’avais trouvé rien de mieux pour l’éloigner le temps que je sorte. Avec ce soleil je serais sèche en moins de dix minutes chrono en main c’était une évidence et c’est pour cela que je me suis reprise, changeant ma demande. Sans attendre plus longtemps, j’ai terminé de sortir mon corps de l’océan avant de retrouver mes deux jambes. Grimpant finalement sur le bateau, j’ai remis mon maillot ainsi que mon short avant de m’asseoir au sol, m’adossant au navire. J’ai fermé les yeux, posant ma tête sur mes genoux. Les vagues venaient frapper la coque du bateau, le faisant osciller doucement. J’essayais de me vider la tête, de penser à autre chose, d’avoir un nouvel état d’esprit autre que celui défaitiste et dépressif que j’avais encore quelques secondes plus tôt.

Le cri des mouettes venait me distraire et le vent marin m’apaisait doucement. Sortant finalement de ma bulle je me suis relevée avant de le regarder, que dire, que faire, comment réagir ? Passant ma main dans mes cheveux, j’ai décidé de faire comme si rien ne s’était passé, comme si je ne lui en voulais pas. J’allais passer pour une folle sans aucun doute mais je prenais le risque. Qu’est-ce que j’avais à perdre après tout ? Je n’avais déjà plus réellement de fierté.

« Merci pour… l’échelle. »

Je me suis relevée, croisant les bras sous ma poitrine, regardant sur le côté, le large plus précisément. Je n’avais qu’une envie prendre le large, partir et oublier ce début de journée chaotique, c’était ma seule envie, mon seul désir. Mon regard bleu se posa sur l’adolescent, je me sentais presque apaisée et sereine.

« Qu’est-ce que tu viens faire à Panama City Beach ? Tu n’es pas de Floride enfin c’est ce que je croyais, c’est avec le Spring Break c’est ça ? »

Comment pouvais-je faire la conversation ainsi, faisant comme si de rien n’était alors que je me sentais si mal à l’intérieur. Je détestais ces trois caïds, je haïssais tous ceux qui me traitaient différemment et tous ceux qui méprisaient les mutants. Je commençais à différencier les mutants des autres et pour la première fois, je faisais réellement une distinction entre deux partis, allant même jusqu’à définir deux races.

J’ai finalement pris la serviette qu’il avait ramené, m’en servant pour mes cheveux, sans réellement de conviction. C’était plus pour lui montrer qu’il n’avait pas fait ça sans utilité, même si je n’avais franchement pas besoin de ça. Une fois debout j’ai posé la serviette sur le côté, mon short était trempé et je me demandais pourquoi je l’avais remis en réalité. J’avais agi instinctivement, peut-être parce que me retrouver en deux pièces sur mon bateau avec lui me gênait, je ne savais pas ce qu’il en était mais je ne pensais pas le retirer pour autant. Ce n’était pas très agréable mais bon, je préférais.

Regardant le sol, j'ai vu qu'il y avait encore une fois de l’eau partout alors que je venais de faire le ménage mais bon, c’était un bateau c’était logique. Remontant l’échelle de corde, je l’ai enroulée sur elle-même avant de la poser au sol. M’adossant contre la rambarde je l’écoutais attentivement, mon regard planté uniquement sur son visage. Le reste de son corps ne m’intéressait pas, je n’avais pas que ça à regarder, je n’étais pas plus que ça intéressée par lui et j’avais eu ma dose de garçons pour la journée. J’ai pu remarquer qu’il avait écarquillé les yeux, comme si je venais de poser une question indiscrète. Haussant un sourcil perplexe, je me demandais quand est-ce que j’avais pu dire quelque chose de déplacé. A aucun moment je ne me suis véritablement mise dans la tête de cet adolescent.

Il commençait à parler avant de finalement se demander ce qu’il racontait. Passant ma main dans mes cheveux humides j’ai senti qu’ils étaient un peu rêches à cause de l’eau iodée avant de figer mon mouvement lorsque j’ai senti ses deux mains sur mes épaules. Je ne devais pas avoir honte ni me sentir responsable ? Je n’étais pas coupable, il savait ? Mais de quoi parlait-il. Il avait vu, mais quoi ? Que j’avais été jetée à l’eau, que j’étais une mutante ? Je n’avais pas à me sentir responsable d’être ce que j’étais ? Je ne voyais pas d’autres possibilités. Il avait oui, mais c’était comme ça, j’étais ce que j’étais et je n’en avais pas honte, enfin peut-être, je ne savais pas.

Baissant la tête, j’ai croisé à nouveau les bras, cherchant une sorte de réconfort que je ne pouvais trouver, cherchant à me protéger avant de passer à table.

« Oui, c’est vrai, mais de toute façon, ce n’est pas réellement u secret, cela fait longtemps que ça dur. C’est pour ça que j’ai pris la mouche à New-York, je pensais que tu m’avais percé à jour, je pensais que tu savais ce qui j’étais. »

Je me suis arrêtée un instant, reprenant mon souffle et un peu de courage par la même occasion.

« Je sais que ce n’est pas de ma faute, c’est ainsi, même si mon père ne l’a jamais accepté. Une fille qui se transforme en murène c’est peu commun, c’était une tare et une honte pour lui, mais je ne pouvais rien contre ma mutation… Je ne suis pas responsable comme tu le dis si bien mais je ne pense pas que tu puisses m’aider, à moins que tu n’ais une formule magique qui m’enlève cela…. Et même si c’était le cas je dirais non. Je suis celle que je suis et c’est tout. »

C’était vrai, j’étais une mutante mais malgré le fait que je vivais mal ma mutation à cause des réactions des autres envers moi je n’appréciais pas que l’on me prenne en pitié. $Etre le bouc émissaire de tout un lycée était déjà difficile alors je ne voulais pas renforcer cette impression, loin de là.

Fuyant son regard je me suis éloignée de lui, allant rejoindre le milieu du navire. Je ne savais pas ce qu’il voulait, s’il cherchait à me faire chanter, cela ne servirait à rien , je n’étais déjà pas grand-chose à Miami alors ici, peu m’importait. Je n’étais plus à une ville près, je n’étais plus à une humiliation près.

« Si ce que je suis te dérange, je ne te retiens pas, tu peux toujours partir, et n’espère rien avoir de moi si c’est de l’argent ou quoique ce soit que tu veux. Le chantage ne prendra pas sur moi. »

Je préférais que les choses soient immédiatement claires et dites, je ne voulais pas qu’il y ai le moindre quiproquo entre nous. S’il ne supportait pas ce que j’étais et fuyait, il ne vaudrait pas plus que tous les autres. Je ne savais pas quoi faire, je ne savais pas si je pourrais supporter un autre abandon, une énième trahison mais plus jamais je ne me plierais pour oublier ce que je suis, je ne cacherais pas ce que je suis si l’on me le demande, je ferais de ce que je suis une fierté et une force.